quant au corps de la place, abfoUiment le même
que celui du maréchal de Vauban; ils ne diffèrent
que dans la proportion de la demi-lune , que
l'ingénieur Cormontagne augmente confidéra-
blement. Il augmente de même beaucoup le-réduit
, & en cela , il donne quelqu’avantagè de
plus à fa .-compofition. Plu fleurs auteurs avant
lui avoient déjà regardé la demi lune du. maréchal
de Vayban , comme n'ayant ni affez de capitale
, ni affez de gorge, & lui-même i’avoit
feuti , puifqu’il leur avoit donné plus de .capac
ité au Neuf-Brifac, place qu'il a conftruite la
dernière..
Ee fyftême de Béiidor s’écarte beaucoup de
;ces principes, qu’on peut appeler rétrécis , le
,çôté da polygone de Béiidor eft de deux cents
toifes ; fa perpendiculaire de cinquante - deux
toifes dans-l'oftogohè, ce qui-fait un peu plus du
quart du coté : les Jaoes de fes b.aft-ions font de
foixante-dix-iept toifes , les flancs de trente
to fe s , & il auroit pu leur en donner quarante ;
enfin , l'angle d’obliquité que les faces de fes
.battions font entr’ elles, rïeft que de cent vingt- -
quatre degrés, au lieu de cent quarante-trois, ce
qui fait dix-neuf degrés de moins d'obliquité ,
d'où il fuit qu'elles fe défendent mieux. Il fait
je retranchement de fon . baftion inhérent à fon .
■ fyftême , de façon que fes battions different j
beaucoup des battions adoptés pour toutes nos
.places, & l’on qe peut difconvenir qu'ilt n'en
foient infiniment plus forts. Le grand mérite du
retranchement de Béiidor eft de renfermer les
-flancs, du baftion de manière qu’ils fe trouvent
dans fon intérieur, & que cette conftru&ion eft
la feule dont on puiffe tirer quelque avantage.
L ’ingénieur Cormontagne a prétendu aufli retrancher
fon baftion ; mais ce n’ eft qu’acciden-
tellement & par addition à fon fyftême ; aufli fes
flancs reftent-ils .eitdehois ; il les perd en perdant
le baftion ; & ce a’eft pas entendre les
reflburces qu’on peut tirer de la malheureufe •
conformation des enceintes baftionnées,. Béiidor a prçuyé qu’il l’entendoit mieux , en adoptant
la forme qu’il a donnée intérieurement à fon
baftion, dont il a détaché les faces pour en faire
,iine efpèce de contre-garde, qui rempliroît mieux
fon o b je t, s’il Lavoir plongé de manière à ce
qu’elle couvrît la partie des faces qu’il a laiffée
fubfiffer à fes battions. Cette pièce P alors étant
vue en-dedans comme en-dehors , feront capable
4 ’ une bien .grande réfiftance.
Le corps de la place a fon enceinte particulière
, comme au Neuf-Brifac, excepté qu’il n’y
a point de tours baftionnées ; elles y enflent été ’
fort inutiles dans fes dehors : il donne à la
demi-lune encore plus de capacité que Cormonr
tagne , ainfi que fon réduit ; mais il lui donne
uoe défenfe "particulière ; cétte défenfe ajoutée
à cqjle que la même pièçe reçoit dans les mé-*
thodes ordinaires, eft opérée par deux tenaillons
qui flanquent à angle droit chacune de fes faces, 6c les faces de ces tenaillons, ainfi que celles de
la demi-lune, ont chacune les parties deftinées
à la défenfe des fofies, retirées en-dedans de toute
la largeur du parapet & du rempart. Au moyen
; de cette retraite ., ( que l’ingenieur Cormontagne
traite mal-à-propos de nouveauté , elle a
' été publiée en 1 5'5>9 > & adoptée en 1*653 par le
comte de Pagan ) une partie de la face peut être
retranchée par ùn parapet qui la fépare de la
pièce, & peut fe foutenir après qu’elle eft prife.
! On y trouve encore l’avantage d’avoir un flanc
■ bas de plus. Béiidor ayant voulu que la demi-
lune & fes -deux tenaillons fuflent -réparés , a
rempli l’intervalle de leur réparation, par deux
. petites pièces qu’ on peut appeller ailerons, lef-
quelles voient 8c défendent intérieurement les
deux pièces collatérales : il femble ne manquer
à la difpofition très-bien entendue de ces. dehors,
qu'une contre-garde qui rouvre l’angle flanqué
au baftion & fe lie aux deux battions de droite
& de gauche , dont une partie des faces feroit
retirée, pour qu’il né réfultât aucun efpace dans
cet angle flanqué , qui ne foit couvert ou par la
contre-garde ou par les tenaillons ; alors tous
ces dehors forment un ftont qui couvre totalement
le front intérieur 5 & dont toutes les parties
fe flanquent perpendiculairement. Une telle
difpotfîtion d’ ouvrage eft vifiblement d’une toute
autre force que celle qui fe borne à des demi-
lunes 8c des contre-gardes, laiflant entre cçs
pièces des efpaces qui permettent à l ’afliégé de
battre en même-tems le corps de la place > &
l’on ne peut qu’être furpris en voyant l’ingénieur
Cormontagne ofer avancer que ce fyftême eft
moins fort que le fien; peut-être auroit-on du
dire que le fyftême de Béiidor ne peut être
adopte relativement à la dépenfe confidérable
qu’ ocfafionneroit fon exécution, ce qui ne touche
point à fon degré de force ; degré de beaucoup
ftipérieur à celui de Berg-.op Zoom, &
cooféquemment bien fupérieur au fyftême Cormontagne
, & ne pouvant pas fe réduire en dix-
fept nuits, comme a eu le front de l’avancer
cet ingénieur,.
Ces deux plans préfentent d’abord une différence
confidérable, en ce qu’on voit qu’ il ne
faut que huit batteries à ricochet , pour atteindre
tous les feux de front de la fortification
Cormontagne; tandis qu’ il «n faut feize,pour
opérer le même effet dans celui de Béiidor. En
fuppofantfix pièces pour chaque batterie , quarante
huit pièces fuffiront pourLun, tandis qu’il
en faudra quatre-vingt>feize pour l’autre. L'on
fent qu’un travail beaucoup plus confidérable ,
ne peut fe faire qu’en beaucoup plus de <tems,
en y employant beaucoup plus de moyens , &
en y facrifiant beaucoup plus de monde j d’où il
fuit qu’on ne peut pas fuppofer qu’on arrivera
aufli promptement à la troifiènne parallèle , dans
un cas comme dans Lautre.
Suivant le fyftême Cormontagne , I’afliégeant
n»a contre lui dans l’attaque des lunettes, que je
feu qui peut partir des deux demi lunes collate-,
raies ; la diredion des faces du baftion eft trop
obliqué pour que leurs feux puiffent être dirigés ,
fur ces lunettes ; & quand on fuppoferoit que,le
retranchement projetté de la gorge du baftion
fût exécuté, ce retranchement Payant que la
même hauteur que la courtine & la face du
baftion ne peut produire aucun feu favorable à la
défenfe de la lunette ; rarcdis que la difpofition
des ouvrages dans le fyftême de Béiidor 6c leurs
profils, prouvent que ces mêmes luneties peuvent
être protégées ,. non-feulement par le feu
des deux demi-lunes & des deux tenaillons , mais
encore des feux partans du retranchement intérieur
du baftion, ainfi que celui de la courtine
& du petit baftion de la dernière enceinte formant
le corps de la place. O r , lès faces des deux
demi-lunes Cormontagne , les feules d’où peuvent
partir les feux protecteurs de ces lunettes
avancées , n’ont que cent feize toifes d ’étendue,
tandis qu’ on trouvera quatre cents dix toifes de
parapet dans le fyftême Béiidor , qui les peuvent
.protéger, ce qui fait deux cents quatre-vingt-
quatorze toifes de parapet de plus, qui pour-
roient être garnis de canons à trois toifes par
pièce ; quatre-vingt-dix-huit pièces que ce fyftême
a Vavantage de pouvoir employer de plus
que l’autre,, pour la défenfe d?e chaque lunette
avancée ; on laifle à- penfer quelle difficulté l’af-
fiégeant aura à vaincre dans ce dernier cas, pour
pouvoir établir fon logement fur des lunettes
aufli puiflammem défendues. Aiifli croit-on qu’il
ne pourra chercher à fes détruire * que par la
quantité de boulets de canon & fes mines, afi;.-
de . tâcher enfuite de les envelopper dans fes
flippes ; mais ces* fapoes elles-mêmes , comment
chemineront-elles fous un pareil feu ïQ n remarquera
que les fappes n’ont- rien .à craindre du
canon dans le fyftême Cormontagne de même
que dans tous les- fyfiêmes femblables au fien 5
parce que l’artillerie placée fur les faces des
demi-lunes & des battions,, eft toujours atteinte
par les batteries à ricochet ;; tandis qu-rci , en
comptant pour rien le feu des demi-lunes 6c des
tenaillons iurfie sfapes,qui pourosirêtre éteint également^
il refte quatre-vingt & tant de pièces fur
léfqudfes les batterie s-à. ricochet n’auront aucune
pri e , & qui battront continuellement les fapes.
Dans une telle fituation , l’on fent que ce qui
peut fè faire en huit jours-fous* le féal feu de la
moufqueterie , ne pourra- fe faire en un mois,
lorfqu'un feu de canon aufli confidérable y fera
reuni. Ainfi, vis-à-vis d’un obftacle aufli puif-
wnt, il n’eft plus ■ poffible. de calculer le terns.-
Les mines ont fans doute retardé de beaucoup
les progrès de Tafliégeant à Berg-op-Zoom,
mais le feu du canon de la place, y a eu aufli
une très-grande part. Il n’a jamais été éteint,
tant parce qu’on n’avoit pas placé exactement les
batteries à ricochet dans le prolongement des
faces des ouvrages , 1 que parce que l’afliégé
communiquoit à une armée qui renouvelioit
continuellement fon artillerie d’où il a réfult$“
qu’on n’a pu établir fes batteries en b ê c h e ,
dans les emplacemens ordinaires des places d’armes
faillantes des battions, il a^fallu chereh'èr
un emplacement couvert par les lunettes des
places d’irmes rentrantes ; ainfi cachées par ces
ouvrages qui leur fervoient d’épauleroent , ces
batteries ont fait brèche au baftion'; & fi la face
de ce baftion n’eût pas été la dernière enceinte
de la place, qu’il y en eût eu une autre derrière,
jamais elle n’auroitété prife. Comment donc foutenir
que le fyftême Cormontagne, q u ix toutes
.les foibleflfes des fyftêmes baftionnés , qui n’a
qu’une- fimpie enceinte , pourra renir plus Iong-
tems , qu’ un fyftême tel que celui propofé par
■ Béiidor, renforcé comme fi l’eft d'ouvrages extérieurs
qui fe flanquent par fai ement , & de
quatre eneeintesau corps de là place.-
II feroit inutile de pouffer plus loin les difeuf^
fions r toujours une nombreufe artillerie deftinée
à défendre chaque pièce jüfqu?au dernier moment,
donne au fyftême Béiidor un avantage
incalculable fur les méthodes en ufage ; quelque
chaleur & quelque animofité qu’il puiflfe y
avoir dans leurs parti fans , ils ne perfuaderont'
jamais qu’ une feule enceinte vaille mieux que
: quatre ; ils ne perfuaderont pas que des remparts
capables de recevoir une artillerie beau-
; coup plus nombreufe, ne foient pas lès meil- '
; leurs. Le projet d’attaque du fyftême Béiidor,
fait par Lingénieur Cormontagne , eft ènriére-
' ment à rejetter , en ce qu’ il fait une abftradtioh
totale de l’ artillerie d e i ’affiégé,- & qu’il fe permet
de détruire, au moyen tdes batteries qu’ il
' établit fur Te chemin cou vert, jufqu’aux ouvrages
qu'il ne v o it pas. Il ne compté pour rien-’
: d’ailleurs Car tille rie qui peut être dirigée fur ces*
■ batteries fi deftruêlivt s ; cependant on trouve
trente pièces de canon qui peuvent1 les Barre
tandis que remplacement ne permet- à l’ingé- "
nieur Cormontagne , que d’en plaçer huit à neuf
à chacu e: En outre, cette même batterie ne
peut être d'aucun e ffe t, qu’elle n’ait détruit le
; réduit;en maçonnerie qui la~mafque ,, 8t jufqu'à • +
ce qirellè foit en état dé tirër le feu à bout portant
de ce réduit, & celui des demi-lunes &
tenaillons qui la prennent en flanc , , rendront fà
conftiuéfeon très-longue Sétrès-pénlleufe. Toutès '
' ces. confidëracions foronr juger; de là légèreté
avec laquelle l’ ingénieur Cormontagne établît '
fes moyens d’ attaque 6c la-manière doni? il'e n n
étendfi’cffet,-