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vcntion., ou plutôt des hommes clergés d’ empêcher
les traîneurs de s’égarer.
Toutes les fois qu’ on a pour objet de fe
joindre à un autre corps de troupes, il faut
choifir le chemin le plus facile , 8c celui
où FOn peut elpérer de ne pas rencontrer l’ennemi,
Lorfque le prince de Bervren voulut en
1767 aller joindre le maréchal de Schwerin ,
il ne ruiv.it pas cette maxime, & il s’en trouva
mal.
On d oit, quand on fait une retraite , prendre,
autant qu’ il eft poffible-, un chemin contraire à
celui que l’ennemi croit que vous l'uivrez. Ivlont- 3fuc a deux chemins pour aller à Pignerol, un
à travers la plaine, lur lequel il d o it, félon les
apparences, rencontrer lés ennemis plus forts
que lu i, 8c un autre plus long à la vérité de
trois ou quatre mille, & plus difficile, mais fur
lequel il ne rencontrera perfonne , il fe décide
pour ce dernier : « Si vous trouvez, dit-il, que
l’ennemi aye le temps pour vous trouver fur
les champs , & que vous ne foyez affez fort
pour le combattre , pour la peine de trois ou
quatre lieues d’ avantage , ne ' laiffez à détourner
votre chemin : car • il vaut' mieux être
las , que prins ou mort. Il faut , mes capitaines
, que vous ayez non-feulement l’oeil ,
mais aufli l’efprit au guet. C’eft fur votre vigilance
que votre troupe repe-fe- ; fongez à ce
qui vous peut advenir , mefurant toujours le
temps , & prenant les chofes au -pis , fans
méprifer votre ennemi ».
Le meilleur chemin pour une retraite n’ eft
pas toujours le plus facile, mais celui où l’ennemi
peut craindre quelque embufeade, & qui
eft par conféquent couvert ou coupé.
Il faut dans une retraite multiplier le nombre
des chemins & des colonnes; lailfer des gardes
au paflages & aux défilés -, les fermer avec des
charrettes & des arbres ; choifir le chemin le
plus court; envoyer devant foi des pionniers
cour le raccommoder.
Quand on eft très - inférieur à f ennemi , il
faut encore choifir des chemins inconnus ou détournés.
Montluc,- après avoir détruit le moulin
d’Auriole , veut fe retirer à Marfeille. -En
arrivant à Aubaigne, il apprend que l’empereur
a inverti Marfeille; il veut cependant entrer dans
cette ville ; il affemble une efpèce de confeil ;
un de fes officiers propofe de donner au milieu
de l’armée ennemie; fon avis ert combattu; un
autre ouvre l’avis d’abandonner le grand chemin,
& de luivre des rentiers dans les montagnes ;
fon avis eft adopté: « ainfi réfolûmes, dit Montluc,
de laiffer le grand chemin, en allant au travers
des montagnes à main gauche pour aller tomber“
derrière Notre-Dame de la Garde , faifant def-
fein que fi nous ne pouvions entrer dans la
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ville , le capital e de :a gaiv’ e nous recevrait;
Sc ainfi détour n aimes notre chemin, qui fut bien
pour nous , car Vignaux & les blefles prindrent
le grand chemin droit à Marfeille , n’eurent pas
fait cinq cents pas , qu’ils rencontrèrent quatre
ou cinq cents chevaux que l’empereur avoit envoyés
au devant de nous pour nous combattre,
ayant été adverti par ceux d’Auriole de l’exécution
que nous avions faite; & fans que l’empereur
fe trouvât parti la nuit pour venir devant
Marfeille , & que les meffagers ne trouvèrent
de long-temps a qui parler ; je penfe que nous
euflions été défaits ; mais l’empereur ne le fçeuc
jufqu’au point du jour, furquoi il envoya promptement
ces quatre ou cinq cents chevaux au chemin
d’Aubaigne, lefquels ne firent aucun def-
plaifir audit Vignaux , ni à ceux qui eftoient
avec lu i, finon qu’ ils leur o ftcrént les armes.
En cette façon nous allafmes tout le jour avec
le grand chaud de montagne en montagne ,
fans trouver de- l’eau , tellement que nous cui-
dafmes tous mourir de foif; or nous pouvions
toujours voir le camp de l ’emperôur, & entendions
fort clairement le s , efcarmouches. M. de
Caftelpers & fes gendarmes alloient à pied comme
nous , tirant leurs' chevaux par les brides ».
On doit encore gâter, le plus qu’ on le peut,
les chemins par lefquels on fe, rerire.
Il faut , avant un fourrage , faire bien re-
connoître, mais pourtant bien feçrétement, les
chemins par lefquels l’ennemi peut venir à vous,
& faire ; ouvrir plufieurs routes de votre camp
à l’endroit où vous voulez fourrager.
Le meilleur chemin pour furprendre l’ennemi
eft celui qui paroît le moins propre à cet objet.
Toutes les fois qu’ on eft réfolu de marcher
en avant, il faut envoyer des détachemens s’emparer
du chemin que doit fuivre l’armée, & des
pionniers pour le raccommoder ; il faut maigre
cela mettre des pionniers à la tête de chaque
colonne.
Il faut, dans un projet de marche, calculer
le npmbre d’hommes , de chevaux & de charrettes
qui peuvent paffer de front par les che-,
mins qu’on -doit tenir.
Quant à la manière de défendre un chemin^
Voyei l’ article D é f il é , 8c dans le réglement
provifoire fur le fervice de l’infanterie en cam-
. pagne , le tit. 8, art. 38 ; le tit. 15 , art.
. 9- & -63; le tit 40, art 43. On trouvera dans
ces articles, des détails fur la largeur des chemins
, fur la manière de les ouvrir, &c. Voye\
auffi les mots Marche & C olonne.
CHEMIN CREUX. Voye\ R a v in .
CHEMISE. Pour connoître le-nombre de
chemifes dont le foldat doit être pourvu, voye\
l’ article É q u ip em e n t .
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Des militaires ont propofé de donner au foldat
des chemifes bleues , ou tiffues de bleu , Sc
femblables à celles que portent une partie des
matelots ; ils prétendent que ces chemifes font
très-économiques : cela eft vrai ; mais font-elles
très-faines ? eft-il aifé de s’apercevoir fi le foldat
en change ? il faut fans doute chercher à diminuer
les dépeiifes du foldat Sc la quantité de fes
bagages , mais jamais aux dépens de Ta fante.
C hemise de m a il l e . La chemife de maille étoit
uflô efpèce d’arme défenfive : elle confiftoit en
un corps de chemife fait de mailles , ou petits
anneaux de fer ; elle fe mettoit par deffus le
refte des habits,. V o y e { A rmes d é f en s iv e s .
CHEVAL DE BATAILLE. L’homme d’arines
avoit deux chevaux pour fa perfonne, l’un qu’ il
nommoit cheval de bataille , d’ ejîrier ou grand
cheval, & l’autre courtaud ou bidet. Us montoient
fur leurs grands chevaux quand ils étoient proche
de Pennemi & fur le point de combattre , finies
courtauds pendant leurs voyages & leurs
marches. Quand ils alloient en congé, ils laif-
foient le cheval de bataille dans leur garnifon avec -
leurs harnois, leur armure, & n’amenoient que
le courtaud ou bidet. Le cheval de bataille étoit
ordinairement efpagnol, turc , ou gros roufiin
du royaume., d’une haute taille , d’une grande
force. 11 falloit bien néceffairement que le cheval
de bataille fût vigoureux , puifque bardé de fer,
chargé de plaftrons, de caparaçons, il portoit un
homme d’une haute taille, furchargé lui-même par
fa lourde armure. On doit compter parmi les cailles
de la réforme des lances Sc de s- hommes d'armes,
la difficulté que l’on trouvoit à fe pourvoir de
chevaux dé bataille.
C h e v a u x . ( Supp. ) Appuyés fur l’autorité
des écrivains militaires les plus 'judicieux, nous
9,vons dit que le luxe, des chevaux eft le feul
que des guerriers pui fient fe permettre. V oy e^
notre article L.u x e . Le luxe des chevaux pourroit
en effet être utile à l’état, S c aux guerriers eux-
, mêmes. Il fero.it utile à l’état, fi les militaires
ne copiant plus quelques jeunes gens peu réfléchis
, fe gardoient de donner, comme eux,
une préférence exclufive à des chevaux qui n’ont
prefque d’autre avantage fur les nôtres, que d’ être
nés Cous un ciel étranger.' Ce luxe lëroit utile
aux>militaires eux - mêmes, fi , le bornant à conduire
des chevaux bien dreffés , ils n’afpiroient
point à la' réputation inutile & même dange-
reiffes pour eux, de piqueurs habiles., ou de
téméraires caffecous, Si -je pouvois efpérer de
guérir j avec le fecours d’un âcre ridicule, la
manie de la jeune nobleffe Françoife , pour les
habits-, les manières, l’équitation Sc les chevaux
anglois, j’emprunter ois- avec empreffement le
ftyle dont fé. font fervis. nos. fatyriquea les plus
mordans ; défi, par leurs, beaux côtés, leur di-
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rois-je , qu’ il faut reffembler aux hommes que
l’on prend pour modèle, &c. Imitez les Anglois,
ajouterois-je dans leur amour pour la patrie,
dans leur refppél pour les grands hommes ,
dans leur admiration pour les- talens fupérieurs ,
dans leur goût pour les fciences , &c ; mais
fongez qu’on n’a rien de commun avec les
Newton, les Clarck , les Popes , les Adifion ,
les Malbourouck, quoiqu’on l'oit monté fur une-
quilledine aux oreilles & à la queue coupée,,
quoiqu’on foit fuivi par un jockai, & vêtu a
l’angloife : imiter ainfi, c’eft faire d’un original-
paffable , peut-être, une copie rifible, ridicule,
déteftable. J’ai vu , mais non fans pitié , un;
colonel François rougir d’avoir été rencontré-
trotant à la françoife ; jai vu plus , j’ai vu chercher
en vain, dans une de nos garnifons des
plus nombreufesun cheval françois d’une ceir
taine tournure, qu’on n’eût point mafqué à l’an-
gloife , en lui coupant les crins & les oreilles.
Mais au lieu de nous occuper à guérir cette
manie, que le temps feul peut faire cefler,
prouvons-que les chevaux fougueux font toujours
dangereux dans les armées , qu’un jour de bataille
n’eft point celui qu’on doit choifir pour
dompter , drefier des chevaux ; qu’un général-!
fige doit veiller par conféquent à ce que-
tous ceux de fes fubordonnés aient reçu d’avance
toutes les leçons , toutes les inftruâions»
qui font néeeflaires à leur perfe&ion.
Quelques- inftans avant la-bataille de Jarnac ,-
Louis de Bourbon, prince de Condé, général de-
l’armée proteftante , reçut un coup de pied-d’un
cheval fougueux que montoit le comte de la Ro-
chefoucault -.immédiatement après ce coup, qui:
lui cafta la jambe , & qui fut fans doute une des*
caufes de fa mort & peut-être de la perte delà
bataille , ce prince donna à la jeune noblefle-
qui - l’environnoit la leçon fuivante : « apprenez ,
leur dit-il, que les chevaux fougueux nuifent plus:
qu’ils ne fervent dans une armée , & que c’eft
une folle vanité de fe piquer d’adrefie de les>
dompter , & de partager fi néceffairement fés
foins quand il faut s’employer tout entier contre--
les ennemis.
Le grand Condé & le maréchal de Grammont:
furent fur le point d’éprouver aufli ,, après: la.
bataille de Le ns , combien il eft dangereux de
monter , un jour de bataille , des chevaux trop
fougueux , Sc combien il eft néceffaire d’avoir"
accoutumé tous ceux d’une armée au bruit des.
armes à feu , à l’éclat des. armes blanches.aux-:
cris- des foldats , &rc.
Le maréchal de Saxe étoit fi perfiiadë de lai
nécefiité^ d’aguerrir les chenaux, qu’il a confacré’
dans, fes rêveries deux longs alinéa, à ce feul;
objet : «on devroit, dit ce grand homme,, fàmi-
liarifer les chevaux aux cris- des? foldats ,. & le^
accoutumer à voir, faire Ibusi -leur» yeux, toute: