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autres n'en connoiffenc Amplement que le terrein,
fans y diftinguer aucune pofltion particulière.
C ’eft dans le choix de les officiers qu’un géné-.
ral doit être attentif, en fe fervant des premiers ;
pour fes projets , & des féconds pour la Ample
d.re&ion des marches ; car les derniers ne font que
des guides , au lieu que les autres peuvent être j
fort utiles à un générai & au chef de l'état-major
de l'armée.
Pour.reconnoître le pays militairement, il faut
remarquer les endroits qui pourroient fervir à l’é-
tabliffement des camps , les -poires qui peuvent
couvrir une route fur laquelle on dirigerait des
convois ,. les débouchés dont l'ennemi pourrait
faire quelqu'ufage & tous ceux qui peuvent avoir
rapport aux opérations de la guerre dont on peut
être occupé, foit offenfiveou défenfive ; n'avoir
rien négligé fur le détail des revers de chaque
montagne , afin de fe trouver en état de couvrir
les droites & les gauches de l'armée ou des pof-
tes , par l'occupation des portes les plus favorables
; fav.oir exactement les diftances d'un lieu à
l'a u tre . pour combiner le tems des marches, ainfi
que les noms des fommets des montagnes plateaux,
mamélons, villages, hameaux, chapelles,
ruifleaux, torrens, rivières, comme auffi les cols,
ports ou partages, avec leurs communications.
Il faut juger des pofîtioris par leurs avantages
pu leurs inconvéniens ; ce qui exige beaucoup de
préciflon & un coup-d'oeil judicieux doud'expé-^
rien.ce feule peut procurer le talent, & c'eft du
coup-d'oeil que dépendent toujours, les décifions
d’un général, tant pour le foin 'dé fes camps , que
pour les portes particuliers, à faire occuper.
Ce n'eft.pas affez pour un officier chargé d'un
détail relatif à la connoiflance d’un pays, que
d'avoir le talent de bien faifir un local ; il eft
néceffaire qu’il foit es état d'indiquer parfaitement
dans les : connoilTances qu'il prend dans fes tournées
, u m,terré in contigu’, qu’il n'a pas la liberté
ni le tems de parcourir , ou qui appartient à une
puirtance limitrophe qud ne lui permettrait pas d’y
voyager, avec un terreirt qu'il parcourt, c’eft-
à-dire, une partie du terrein inconnu; C'ett ici où
il faut faire ufage de toute la reffouree de fon
imagination, & pour cet effet s'adreffer aux officiers
municipaux les plus intelligens des lieux
qu'on veut connaître, en comparant leurs rapports
avec l'idée quon s'en forme , afin de
parvenir^ fe faire: un tableau prefqu'auffi.fidèle
de la partie qu'on ne. cor.noît pas, que; de celle
que lion voit : il ne faut cependant pas croire que
tout homme foit. également en état de faire ce
discernement : la grande expérience.en donne l'habitude.
, & elle s’acquiert plus'ou moins vire, félon
l’application avec laquelle on y. travaille , &
félon auffi qu’on y a plus ou moins d’aptitude.
Comme il fe peut qu’il y ait des officiers char-,
gés des détails relatifs a ia-connoiffance d’un pays,
qui ne fâchent pas affez bien deffiner pour-rendre |
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le terrein avec la précifion qu’exige ce travail to*
pographique, l'on a cru à propos de donner ici
un moyen facile d’opérer, pour ceux même de
ces ofhciers qui auroient le deffin acquis.
5 Une reconnoirtance militaire qu’on lève fur
l’échelle de fix lignes fur cent toi fes , élu fans
doute la plus forte qu’on emploie ordinairement
dans la topographie la plus fcrupuleufe^,car.il n’y
a que des arpenteurs qui lèvent le terrein fur une
plus grande échelle, ou ceux qui voudraient y
adopter des profils) ; mais il eft néceflaire d’ob-
ferver que, d’après le figuré à vue , ou bien les
opérations géométriques rapportées au net fur le
papier, l’on ne peut fouvent pas y marquer fidel-
leioent la largeur des rivières , ruifleaux, torrens
ou canaux 5 la différence de leurs rives , c’est-à-
dire , leurs encaiffemens, comme auffi le commandement
qu’une montagne peut avoir fur une autre
qui lui ferait oppofée, par rapport à l’adoption
u’on a euecle tous les tems de faire venir le jour
e gauche à droite fur l’angle de 4.5 degrés ; ce
qui fait très-fouvent qu’une montagne qui fe
trouve légèrement tracée fur le deffin , parce
qu’elle fe trouve au jour de la carte, eft beaucoup
-plus haute & bien plus difficile à gravir que celle
qui lui eft oppofée , quoique cette dernière foie
marquée beaucoup plus forte que la première, par
rapport à l’ombre qu’on obferve ftrnftement dans
tous; les deffins ; cette différence de terrein :eft
cependant neceffaire. à faire connoître à un général
d’armée & à fon chef de l’état-major. En
voici les moyens :
L’on diftinguera les montagnes en trais clartés,
lesquelles feront défignées par les trois lettres
initiales P , S , T , marquées en rouge fur la montagne
dont on voudra parler ( V o y e ç la Car te pour
le s r e co n n o if fa n c e s).• Le P Agnjfiè première clarté,
& annoncera une montagne qui. n'eft acceftîble
que pour l'infanterie j TS Agnifie fécondé clarté,
& déterminera une montagne acceffiblè pour de
l'infanterie & de la cavaleriet, & le T Agnifie
troifième clarté , & fera connoîrre une montagne
acceffible à de l'infanterie, de la cavalerie & de
l'artillerie. A côté dé chacune de ces lettres initiales
placées fur ces différentes montagnes , ,1'on
y déAgnera les hauteurs eftimées en pieds , & jamais
en toife * partant du fol le plus bas ji ce qui
déterminera bien exactement le commandement
qu'une montagne aura fur: l'autre., & furtour fur
celle qui lui eft oppofée j toutés ces eftimations
feront en rouge.
La mature des marais fera diftinguée en trois
claffes, & déAgnée.de même par les lettres f i nales
P , S , T , en rouge , qui défigneront,. ainA
que pour les montagnes, la première , lé partage
pourj'infanterie feule ; ;!a 'féconde , pour l’rnfan*
terie & la cavalerie ; la troiAème,pour L’infanrerie,
1-a: cavalerie & l’artilleriie..( V o y &^la C a r te i).
j Tous ceux qui font ufage du 'deffin , favent que
l’on diftingue les bois, dè quatre manières, qui
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font , i°. grand bois , 2.®. bois clairs 3 30. bois
fourrés, & 40. bois taillis : conféquemment les
premiers s’fndiaueront par un G & un B placés
dans le milieu ae ce bois ; les deuxièmes , par un
B & un C ; les troiAèmes, par un B & une F ; &
en fin les quatrièmes s'indiqueront par un B & un
Tj & quand on en aura le tems , on pourra mettre
h ne teinte de gomme-gutte très-claire dans toutes
les.malles de bois , afin de les rendre plus dif-
tinifts.
Les rivières , ruifleaux , torrens ou canaux
feront marqués j favoir : la largeur, avec un chifre
rouge' placé au travers de la rivière j la hauteur
des rives, entre un chifre noir placé fur les crêtes 5
la profondeur , avec un chifre noir placé fuivant
le cours de la rivière.
Comme il eft d’ufage reconnu de placer une
flèche pour marquer le courant de la rivière , l'on
pourra auffi employer cette même flèche en la
plaçant dans les différens endroits ou la rivière
fera navigable ou non : on en fera aifément la dif-
tinélion en métrant une N- à cheval fur ladite flèche
lorlque la rivière fera navigable ; une flèche
fans N là où la rivière ne fera plus navigable , &
la ponctuation en noir, placée au milieu de la rivière,
indiquant très-intelligiblement la navigation
précife dans tout fon cours.
Si l'on a le tems de faire quelques fondes, l’on
pourra encore diftinguer lé fond par une lettre
initiale en rouge ; favoir : -lés fonds vafeux par
un V , & les fonds pierreux par un P ; ces lettres
feront placées dans le milieu de la rivière.
Les ponts, s'il y en a fur les ruifleaux, canaux,
torrens ou rivières , doivent être défignés ; favoir
: ceux en pierres, par deux traits parallèles en
rouge, &• ceux qui feront en bois, par deux traits
parallèles en noir.
Un feul porte-crayon qui aura d’un côté de la
mine de plomb & de l'autre de la fanguine , fera
le feul inftrument néceffaire à l'officier chargé défaire
à vue une reconnoirtance militaire 3 quelle
qu’elle puiffe être, & avec ce porte-crayon il
pourra exécuter exactement tout ce que l'on vient
d’expliquer;
- Get officier doit, indépendamment de l’application
qu’il mettra dans ce nouveau genre de lever à vue0 avoir la plus'grande attention de fe faire
rendre un cdmpfe-bien e'xaét , i°. combien .tel
bourgs village où hameau peut contenir de
troupes ; i ° i cèmbien il s’y trouve d’hommes ftif-
eeptibles de porter Tes armés.; 30. combien il y a
d’écuries ou grangès propres-à mettre de la cavalerie,
des dragons, chevaux de pelôtons , &c. à
couvert ; & 40. combien de tems une armée ou
un corps dé r ë f e r v e & même un détàcheffiènt,
quel qu’il -foit , 1 peut refter dans fes pofitions
par la facilité plus ou moins grande qu’il peut
avoir de s’y procurer des fourrages , des vivres ,■
du bois & de l’eau , & comparer le rapport des
gens du pays avec l ’idée qu'il s’eft formée de tous
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Ces détails j afin qu'il puiffe en rnidre un compte
très-circoniiancié à l'officicr-général en chef, &r
que ce dernier puiffe former fes plans d'attaque
ou de défenfe avec la plus grande fécurité.
11 faut auffi que l'officier qui fera chargé d’aller
recpnnoître le pays, fâche diftinguer, dans les
pays de montagnes „ fi la nature des rochers qui
forment les vallées ou vallons, foit fur la grande
chaîne , foit fur les contré-forts „ ne font pas des
rochers morts qui s'enlèvent ordinairement par
lits à la première lavange j parce qu’étant emportés
par cette fonte de neige, ils peuvent former
le vallon, foit en entier ou en partie, ou bien
s'arrêter de manière à former un plateau plus ou
moins grand , & qui pourroit défendre un débouché
qu’on auroit bien remarqué l'année précédente.
L’on doit fentir combien cet examen eft
néceffaire, dans le cas furtout où l’on voudrait
porter des recours à un corps de troupes attaqué
ou attaquant.
On entend par grandes chaînes de montagnes
ce qui détermine le pendant des eaux d'un pays,
& par contre-forts , une autre montagne qui tient
à la grande chaîné , foit obliquement ou perpendiculairement,
& qui ne forment que des valions,
tandis que les grandes chaînes forment les vallées.'
. " ’ ' '
Il eft très-facile d'employer les principes que
l’on vient de développer : une feule reconnoif-
fance faite avec attention dans ce nouveau genre
de la faite, peut faciliter b.eaucoup^ l’officier plus
ou moins expérimenté dans l’art de lever à vue
ou même avec des inftrumens mathématiques. Le
général peut, d’après dé pàrei's rerifeignemens ,
faire mouvoir fon armée en tout oit en partie , &
jamais il ne pourra craindre détre trompé dans
aucun des points qui intéreffent, Sc fa tranquillité.
S i le fuccès de fes armes?, furtout lorfqu’on lui
mettra fous les yeux des reconnoi(Tances détaillées
conformément à là carte annexée àcè.ménîoiréinf-
truélif ( V o y e i la C a r te p o u r U s r ecd nrto iffan c î's'): 4
;,C ’eft d'après l’expérience qu’on a faite 'de cè'
nouveau genre de lever militairement, qu’on peut
certifier de la facilité que trouveront ceux qui
voudront employer ces mêmes moyens pour pouvoir
promptement éclairer le général d’armée fur
les différentes difpofitions qu’il voudrait faire dans
un pays quelconque.
Noirs devons ce mémoire, trop peu' connu, au
général Cranjean; officier eftimablè & inftruit ,
mort récemment. Nous avons cru refldrê'fervice
à" nos leéteurs en l’inférant dans cet ouvrage , où
il pourra avoir beaucoup plus de leéteurs & être
conféquemment plus utile.
! PEINES. Les idées métaphyfiques dont on a
? fait ufage en traitant des peines militaires dans ce'
D i c t io n n a i r e ; le fyftème , à ce fujet, dortt on s’eft
' borné de tracer, une efquiffe fans vouloir fe donner
la peine de le développer davantage, & d’une
Kkkkk i