
Douze à une lieue au deffous de Tarbes ; elle eft
groffie eniuite fucçeflivément par les Gaves d’Ole-
ïo n , de Mauléon, & parle Gave béarnoiç; bientôt
après elle reçoit la Bidouze, qui vient de Bi- ,
dache; enfin, elle Te réunit à la Nive à la porte :
de Bayonne. V Adour eft guéable partout depuis
fa fource jufqu'à A ir e , à dix-Auit lieues de
Bayonne j mais depuis Aire jufqu'à la mer il ne
fe trouve aucun gué, & il faut la paffer, ou fur
des ponts, ou dans des,bateaux.
Cette rivière coule autour des murs de Bayonne,
où Ton trouve un beau pont de charpente de cent
trente-fept toifes de longueur , la iargeur de l'A-
dour à Bayonne étant de cent trente toifes ou
environ. - '
Le cours de cette rivière au deffous du pont,
entre la ville & la citadelle, forme un port q u i,
fans la barre qui fe trouve à fon entrée y feroit un
des plus beaux ports de France, par l'étendue, la
profondeur & les bords de fon balfrn, qui font
llables & bien déterminés.
Elle petit porrer des vaiffeaux de trente à quarante
canons jufqu'au deffus de la v ille , & depuis
la ville jufqu'à Saint-Sever on y peut voiturer
toutes fortes de marchandifes & denrées avec des
bateaux plats & autres petits bâtimens.
Son embouchure à la mer eft diftante de Bayonne
de trois mille toifes. Cette embouchure étoit autrefois
à Cap-Breton, trois lieues nord au deffus
de l'embouchure d’aujourd’hui, où la rivière cou-
loit dans les fables au milieu des dunes; alors la
navigation des bâtimens, foit pour entrer en riv
iè re , foit pour leur fortie à la mer, étoit beaucoup
plus difficile qu'elle ne l'eft a préfent. Sous
le règne de Henri III, il fut fait une nouvelle embouchure.
Louis de F o ix , fameux ingénieur,
ferma la rivière par une digue en'maçonnerie &
en pierres de taille, dont on voit les reftes. Pendant
la conftru&ion de la digue, cet ingénieur fit
creufer à travers les dunes de petits canaux dans
lefquels la rivière, foulevée au moyen de la digue,
entra & fe creufa une nouvelle embouchure à la
mer, & forma ainfi le nouveau boucaut. Il réfulta
de cette opération bien concertée, que l 'Adour,
qui faifoit plus de trois lieues dans les fables entre
les dunes, fut redretfé, &que fon cours fe trouva
racourci par le nouveau canal , de cinq à fix cents
toifes, & fut affujetti à une direttion plus naturelle.
L'ancien lit de l'Adour s’eft comblé par la fuite
des tems, & fon embouchure, qu'on reconnoit
encore fous le nom de vieux boucaut, eft prefque
entièrement fermée, ne fervant qu’à fournir un
débouché à quelques petits ruiffeaux, & aux eaux
pluviales qui s'amaffent entre les dunes de ces
contrées. ' #
A la nouvelle embouchure de l'Adour il s’eft
formé une barre qui laitfe néanmoins aux eaux de
la rivière & aux vaiffeaux un paffage de cinquante
à foixante toifes ; cette barre a de baffe mer environ
fix pieds d’eau dans fon miReu, fitué entre
deux baffes de fable qui tiennent à la grève tout
le long de la côte des deux côtés, & avancent
quatre ou cinq cents toifes dans la mer ; au deffus
de ces baffes*, il n'y a que deux pieds & demi d'eau
de baffe mer. Les vaiffeaux qui entrent dans la rivière
ou qui en fortent, font obligés d’enfiler le
paffage que nous avons dit avoir cinquante ou
foixante toifes de largeur, & pour peu qu’ ils s en
écartent, ils fe trouvent échoués fur les fables ou
même perdus en certains cas.
Ce n’eft pas le feul inconvénient que rencontre
la navigation à l’entrée de l’Adour ; car la barre
ou le paffage change fouvent, & fe trouve à
deux ou trois cents toifes de l’endroit où elle
étoit auparavant : elle s’approche de la côte ou
s'avance dans la mer, fuivant que les grands vents
ou quelques tempêtes la déterminent. La violence
des vents & l’agitation de la mer font caufe que
les flots (entraînent les fables, les font mouvoir
& changer de place ; il arrive que les pilotes de U
rivière font quelquefois obligés d’aller a la recherche
de là barre la fonde à la main, afin de
faire paffer les vaiffeaux dans l’ouverture.
On peut juger d’après cela que la barre de 1 A-
dour eft très-difficile à paffer ; car aux difficultés
que nous venons d’expofer, nous ajouterons qu il
n'eft pas poflible d’approcher de la barre pouï
faire fortir ou entrer les vaiffeaux pour peu que
la mer foit groffe, que le vent foit contraire ou
que la marée perde.
Les balifes qui font placées fur la grande diine
au deffus de la digue neuve, marquent lé milieu
du paffage, & toutes les fois que la barre change,
les balifes fe changent aufli. Il y a des tems que la
barre fe trouve fi bien placée ,- qu'on entreroit en
rivière fans le fecours d’un pilote ; mais cette
heureufe difpofition de la barre eft fort rare. Les
balifes fervent aufli aux vaiffeaux qui font en mer
à reconnoître pofitivement le lieu où eft la rivière,
& en conféquence ils prennent le tems propre
pour s'approcher en profitant de la marée.
Pour faciliter aux vaiffeaux les moyens de s'introduire
en rivière, on a établi douze pilotes de
. la b a r r e , qui ont chacun une chaloupe armée de
huit hommes ; ils font entrer & fortir les vaiffeaux
qu’ils vont prendre quelquefois au-delà de la
barre, ou que d'autres fois ils attendent fur là barre
ou en dedans. Dès qu'ils ont atteint le navire, les
chaloupes, au nombre de deux ou de trois, remorquent
le navire jufque dans la rivière, & ne
le quittent que lorfqu'il eft hors de tout danger.
Les pilotes de la barre font fortir les navires de la
mê ne manière & avec les mêmes précautions.
Ces pilotes demeurent à Bayonne ou aux envi-
I rons, & fe trouvent toujours prêts au moindre
lignai lorfqu’ils aperçoivent quelque vaiffeau en
I mer, ou quand ils favent qu'il y en a à la rade ou
! dans la rivière qui fe difpofent à fortir. Au refte,
; il faut que la mer foit belle # le vent bon & la
marée.
marée favorable, pour que tous cès fecours foient
employés à propos.
• On a fait venir depuis quelque tems par l Adour
des mâts de vaiffeaux : ces mâts entrent dans l'Amour
par les Gaves d’Olerôn & par la Niève. Ceux
qui viennent par la première voie, font ordinairement
très-beaux. On les tire des‘montagnes d Alt
& de Baraton dans les Pyrénées, & on les transporte
par terre jufqu'aux Gaves, & là ces bois
font mis en radeaux & conduits jufqu’ à l’Adour.
Les mâts qui viennent par la Niève font beaucoup
plus petits, quoique de bon fervice.
Le'cours de l’Adour, depuis fa fource jufqu a
fon embouchure, eft de quarante-cinq lieues ou
environ.
Baßin de V Adour.
Je reprends maintenant ce qui a pour objet le
cours de l'Adour, relativement aux circonftances
phyfiques qui ont contribué à la forme & à la di-
redion de fa vallée. ,
L'Adour, de même que la Garonne, a raffemble
les eaux de tous les Gaves, qui fuivent une pente
moyenne entre celle du fud au nord 8c celle de
l'eft à l'ouéft. Dans ce fyftème de diftribution des
eaux, c'eit le plus grand égoût & celui qui eft le
plus éloigné du pied des Pyrénées.
Le baffin de l'Adour eft féparé de celui de la
Garonne par une ligne q u i, u un cote, fe remarque
dans les Landes de Bordeaux, & fe prolonge
entre les fources des rivières qui tombent dans la
Garonne, d'une part, & celles des ruiffeaux qui
fe jettent dans l'Adour; l'autre partie du baffin
de cette belle rivière fe deffmè en partant du
fomméc' des Pyrénées, 8c en fuivant cette cime
depuis le pic du Midi jufqu'aux fources de la rivière;
de Niève , de celle de Saint-Jean-de-Luz
& de la Bidaffoa.
L'Adour, d'après cette vue générale, eft le
rendez-vous de toutes les eaux que verfent toutes
les qallées qui fillonnent ces croupes multipliées :
en conféquence elle femble avoir été forcée par
les Gaves 8s leurs dépôts, à embraffer dans (on
cours une grande étendue, de terrain ; car elle n'a
été que très-foiblement repouffée vers le pied de,
la chaîne par les eaux extérieures qui affluent de
la partie des Landes, furtout jufqu à Bidache.
Il y a eu plus de mouvemens dans les eaux depuis
l'Adour jufqu'à l'embouchure de la rivière
de Bourette, trajet où fe trouvent des veftiges de ‘
l'ancien lit de l'Adour, 8c onze étangs liés en- ;
■ femble, qui n’ont point d'autre débouché quei
l'ancienne embouchure. *
Outre cela trois étangs inférieurs, dont le plus
confidérable eft celui d'Orx, font alimentés par
plufieurs ruiffeaux, 8s verfent leur trop plein dans
d'autres étangs qui fe réunifient au même dé-,
bouché.
Ainfi l’on rencontre dans cette partie deux fyf-
tèmes de'lacs ou étangs digués par les amas de
Géographie-P hyfique. Tome lu
] fables renfermés dans les environs de 1 ancien lie
de l'Adour, & dans refpace contenu entre l’embouchure
de Bourette & l’ancienne embouchure
de l’Adour, connue fous le nom de vieux boucaut;
outre cela neuf étangs, qui ne reçoivent aucuns
ruiffeaux de l’intérieur des Landes, verfent leurs
eaux en partie dans l’embouchure de Bourette ,
pendant que l’autre reçoit au contraire l’eau des
débordemens du vieux boucaut. Il faut avoir yifite
cês contrées fablonneufes, pour etre convaincu
que ces cours irréguliers tiennent aux différées
mouvemens des fables 8c aux anciennes pentes du
terrain. -
Effeéti vement, c'eft à la fuite des pentes qu offrent
encore les bords de l'ancienne vallée de.
l'Adour, que l'étang de Toffe, fitue au-delà du
fécond rang des dunes, 8c qui reçoit les eaux de
plufieurs ruiffeaux Sc fe décharge dans l’étang de
Soufions, qui lui-même eft encore abreuvé par huit
ruiffeaux & une petite rivière, a pour dernier
débouché le vieux boucaut. Cette ancienne embouchure
de l’Adour reçoit enfin la rivière de
Moliet, dont le cours traverfe l’intervalle qui eft
ouvert entre les anciennes & les nouvelles dunes,
& fert en même tems à lier trois étangs, dont le
plus confidérable eft celui de Moiffac.
A cès détails, qui nous font connoître la partie
hydrographique du baffin de l’Adour, je crois-de-
voir joindre l'hiftoire naturelle du foi de ce baffin
en deux mémoires féparés;le premier contenant
des vues générales fur Le pays adjacent aux Pyré-
nées, & le fécond traitant de La nature & de. l'emploi
des terrains qui compofent Le fo l du pays adjacent.
Dans ces deux écrits j'envi&ge à peu près le
même objet fous différens points de vu e , 8c fur-
tout relativement aux agens qui ont pu concourir
à la formation de ce vafte dépôt 8c aux états fuc-
certïfs pal- lefquels il a paffé. Je préfence ce travail
fans crainte des redites ou des doubles emplois,
8c comme les réfultats d'obfervations recueillies
en divers tems, 8c faifant connoître des opérations
de la nature qu'il importe de diftinguer avec
d'autant plus de foin, que plufieurs écrivains les
ont toujours confondues.
I. Pays adjacent aux Pyrénées.
On doit confidérer le pays adjacent aux Pyrénées,
8c où fe trouve la plus grande partie du
baffin de l'Adour, fous deux afpeâs différens:
i°. quant aux matières qui en compofent le maflif
fuperficiel, 8c quant à leur difpofition 8c ftruéfure
intérieure ; z°. quant aux dégradations que ce
maflif a pu éprouver par les eaux courantes depuis
la retraite de la mer.
| Le fol du pays adjacent aux Pyrénées eft com-
pofé en grande partie par les débris de ces mon-
: tagnes, 8c dans d'autres cantons, par des dépôts
fous-marins, fouvent même ces matériaux fe trouvent
mêlés enfemble ; outre ce la , cet affemblage
de matériaux difparàtes eft établi fur une bafe