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on croit que le railîn qui fe mange alors, produi-
roit trois mille pipes de vin, quoiqu’il n’)" ait pas
de peuple plus fobre & plus frugal que les Portugais.
Cette île fournit à peu près dix-huit à vingt
mille pipes de vin. Le meilleur fe fait fur la côte
occidentale, dans les vignes qui appartiennent à
payai. Celui de la côte oppofée fe change en eau-
de-vie : on tire une pipe dJeau-de-vie de trois ou
quatre pipes de vin. Le meilleur vin eft v ert, mais
agréable; il a du corps, & il s'améliore quand on
Je conferve.
Tercère eft, après le P ic , la plus grande de
toutes les Açores : il y a beaucoup de b lé , 8e elle
produit un peu de mauvais vin. Comme c e ff ici
que réfident le gouverneur-général 8c la cour fu
périeure de juftice, elle jouit de quelque importance
par-deffus les autres. On compte qu'il y a
vingt mille habitans,8t fes exportations confiftent
en blé , qu'on envoie à Lisbonne.
L'île de Corvo eft la plus petite des Açores, 8c
elle contient à peine fix cents habitons, qui cultivent
lurtout du b lé, 8c qui nourriffent des co,-
chons : ils Exportent annuellement une petite
quantité de lard. On trouve fur cette terre une
grande quantité de corneilles.
. L'île de Flores eft un peu plus grande, plus fertile
8c plus peuplée : fes exportations montent à
fix cents muids ue b le, outre le lord ; mais comme
on ne fait point de vin dans ces deux îles, les habitons
font obligés d'en tirer de Fayal pour leur
confommatiom On y voit une grande variété de
fleurs, 8c les doux parfums qu’elles exhalent,
rendent l'air de ce canton d une extrême falu-
brité. <
: Saint-Georges eft une petite île étroite, très-
efcarpée, 8c d'une hauteur confidérable : elle eft
habitée par cinq mille perfonnes, qui cultivent
beaucoup de blé 8c très-peu de vin.
. Graciofa a une pente plus douce que Saint-
Georges : elle eft très-petite ; elle produit principalement
du blé, 8c elle a trois mille habitans :
On y fait aufli de mauvais vin ; il en faut cinq ou
fix pipes pour une pipe d'eau-de-vie. Graciofa 8c
Saint Georges ont des pâturages, 8c elles exportent
du fromage 8c du beurre.
. Saint-Michel eft»d'une étendue confidérable,
très-fertile 8c très-peuplée ; elle contient environ
vingt-cinq mille habitans : ils ne cultivent point
de v in , mais beaucoup de blé 8c de lin : avec le
lin on fabrique des toiles, dont on charge annuellement
trois vailfeaux pour le Bréfil.
Santa-Maria, l'île la plus au fud-eft de toutes
les'Açores, produit une grande quantité de blé.
Il y a cinq mille habitans : on y travaille une forte
de poterie de terre donc on fournit les autres îles.
Entre Saint-Michel 8c Santa Maria, il y a un
banc de rocher appelé Hormingam.
Telles font les îles qui compofent le grOuppe
des Açores. D ’après les différentes produétions
qui y croiffent, il eft aifé de juger de la bonté du
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fol & du parti qu’en favent tirer les habitans laborieux.
La chaleur y eft grande; cependant eh géhéral
le climat des Açores eft falubre & tempéré : on
n’y éprouve jamais les rigueurs de'l’hiver : à la
vérité, les vents font quelquefois impétueux &
les pluies fréquentes ; mais il ne gèle & il ne
tombe de la neige que fur les parties les plus hautes
du Pic. Le printems, l’automne & la plus grande
partie de l’été font délicieux, car une jolie brife
y rafraîchit communément affez l’air pour adoucir
les rayons brûlans du foleil.
En général les habitans font plus blancs que
ceux de Madère j leurs traits ont quelque chofe
de plus doux : leur manière de fe vêtir eft aufli
plus agréable. Parmi les femmes, on en voit qui
font jolies , & qui pofiedent l’avantage d’avoir un
teint très-blanc i elles ont beaucoup de~po!ite ffe :
leur prononciation eft fort douce & fur un ton
chantant, qui paroït d'abord affeèté; mais ce qui
détruit cette idé e, c’eft que les infulaires de-rcus
les rangs parlent de même. Ils font peu curieux
de cultiver les fciences, & leur froideur à cet
égard reffemble à celle des Portugais, d’où ils
tirent leur origine.
J'ajoute à tous ces détails les faits que j’ai pu
tirer des Mémoires de l'Académie des Sciences , fur
les éruptions des feux fouterrains dans quelques-
unes de ces îles ou bien aux environs."
On trouve dans les Açores, des terres fulfu-
reufes & des feories qui prouvent que les feux
fouterrains ont brûlé de grandes parties de ces
îles. De nos jours même on a été témoin de ces
effets, qui s’y font montrés d’une manière bien
frappante.
Le îo oélobre 1720, on vit auprès de l'île de
Tercère un feu alfez confidérable s’élever de la
mer : des navigateurs s’en étant approchés, ils
aperçurent une île qui n’étoit que reu & fumée,
avec une prodigieufe quantité de cendres jetées
au loin comme par la force d’un volcan fous-
marin. Il fe fit en même tems un tremblement de
terre qu’on reffentit dans les îles circonvoifines,
& on remarqua fur la mer- une glande quantité de
pierres-ponces, furtout autour de la nouvelle île.
On fait que ces pierres voyagent, & on en a même
trouvé de grands & nombreux convois au milieu
même des grandes mers.
La nuit du 7 au 8 décembre, il y eut un grand
tremblement de terre dans les îles de Tercère &
de Saint-Michel, diftantes l’ une de l’autre de,
vingt-huit lieues, & l’île neuve fortit. On remar-
, qua en même tems que la pointe de l’île du P ic ,
qui en eft"à trente lieues, & auparavant jetoit du
feu , s'étoit affaiffée & n’en jetoit plus; mais l ’île
neuve jetoit continuellement une groffe fumée.
Un pilote qui s’était approché de l’ île & en avoit
I fait le tour, ayant jeté la fonde du côté du fud ,
! fila foixante braffes fans trouver de fond : du côté
de l’oueft il trouva les eaux fort chargées $ elles
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fembloient d’un bleu & vert qui annonçoient du
bas-fond, & cette apparence s’étendoit à pluS
d’une lieue : elles paroiflbient vouloir bouillir. Au
nord-oueft, qui étoit i’éndroit d où fortoit la fumée,
il trouva quinze braffes fond de gros fable ;
il jeta une pierre à la mer, & il vit, à l’endroit où
elle étoit tombée, l’eau bouillir & fauter en l’air
avec impétuofité le fond étoit fi chaud, qu’ il
fondit deux fois de fuite le fuif qui étoit au bout
du plomb. Le même pilote obferva encore de ce
côté-là, que la fumée fortoit d’un petit lac borné
par une dune de fable. La nouvelle île étoit ronde,
& allez haute pour être aperçue de fept à huit
lieuefc dans un tems clair.
En 1722, l’île neuve avoit confidérablement
diminué de hauteur, car elle étoit prefque à fleur
d’eau ; de forte qu’ il paroït qu’elle s’étoit affaiffée
de manière à faire croire qu’elle pouvoit encore
diminuer. Au refte, comme fendroit d’où fortoit
la fumée., n’etoit qu’à quinze braffes de profondeur
fous l’eau, il y a grande apparence que c e c i,
comparé avec les profondeurs ordinaires de Î O
céan environnant cet endroit, eft un fommet de
montagne fous la mer.
Il paroït que ce volcan de mer avoit une communication
fouterraine avec des volcans de terre,
puifque le fommet du volcan du pic Saint-Georges,
dans l’ île de ce pic , s’abaiffa lorfque la nouvelle
île fe forma.
Ce pic eft confidéré comme une montagne
aufli élevée que le pic de Ténériffe : elle fe pre-
fente, au relie, de loin en mer fous une forme
arrondie & d’ une grande mafle.
On doit obferver que ces nouvelles îles volcaniques
ne fe montrent jamais qu’ à côté des anciennes
, aufli volcaniques, & qu’on n’a pas
d’ exemples, qu’ il s’en foit élevé de nouvelles dans
les hautes mers. On doit donc les confiderer
comme une continuation des îles voifines ; &
lorfque ces îles ont des vplcans, il n’eft pas étonnant
que leurs appendices contiennent des matières
propres.à en former.de nouveaux, qui
éprouvent de fortes & violentes éruptions, &
telles font les nouvelles îles des Açores & de San-
toriq.- Voye\ San to r in .
ACQUAPENDENTE , ville d’ Italie dans la
province d’Orviette. Elle eft fituée fur un rocher
d’ eù tombe une cafcade naturelle qui a donne.fon
nom à la ville. Lorfqu’on a paflfe la Paglia & le
ruiffeau qui defeend de Borfello, on aperçoit en
pie;.res perdues, fur la croupe qui conduit a la
vil’e d’Acquapendente, des matières fondues &
cuites, en. différens états, & même mêlées de feories.
A mefure qu’on s’élève fur cette pente rapide
, on y diftingue d’abord des couches d argile
& d’albarèfe,.qui font adoffées à des granits cuits
& déplacés. Quelques maffes de matières fondues
font a5un grain fin & ferrée d’autres, d’ un grain
plus ouvert, Ce taillent aifément : on en fait des
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cordons de murs, des chambranles, des croifées
& des portes.
Ce font toutes ces matières qui forment une
partie .des croupes d’Acquapendeme, & c’eft fur
ce fond folide que coule l’eau de la cafcade. C ’eft:
lui q u i, réfiftant à fon action 1 a confervé l’efcar-
pement qui occafionne la chute brufquée des
eaux.
A CQ U A , bourg du grand-duché de Tofcane
où font des bains qui ont de la réputation : on le
nomme Bagno a Aqua.
ACR AMAR ou Lac de V an. C*eft un lac qui
occupe un badin fort étendu fur les frontières de
la P e r fe ,& qui raffepvble les eaux de dix rivières ,
dont il peut être confidéré comme le rendez-vous.
11 paroît qu’ une partie de l’enceinte de ce baflin
eft formée par la chaîne des montagnes du Diar-
bekir, au fud-eft d’Erzerum. Une des rivières
qui s’y jettent, nommée Baud-Machi, nourrit une
grande quantité de poiflons d’une efpèce plus
grande que celle du Pelamide, fort recherché en
Perfe.
Ce lac & fon baflin fe trouvent dans le voifinage
d’ un autre lac & baflin ifolés,dont nous ferons
mention fous le nom d Ormia.
Il n’ eft pas étonnant que ces deux grands bâflins
fe trouvent fitués dans une contrée qui en renferme
plufieursautres, & furtout ceux de la CaÇ-
pienne, de Y Aral 3 & c . Nous en parlerons en détail
à l ’article de la mer Cafpienne & du royaume dô
Cachemire.
ACRIDOPHAGES , peuples ainfi nommés ,
parce que Ton penfoit qu’ ils vivoient de faute-
relles ; ce que lignifie ce mot Acridophages. On a
placé les Acridophages dans l’Éthiopie, proche des
déferts. On a dit que dans le printems iis faifoient
une grande provifion de fauterelies, qu’ ils falaient
& gardaient pour tout le refte de l’année : on a
même ajouté qu’ils ne vivoient que jufqu’à qua-
rante ans, & qu'ils mouroient communément à
cet âge , de vers ailés qui s’engendroient dans
leur corps.
Quoiqu’on raconte de ces peuples des circonstances
capables de faire paffer une grande partie
de ce qu’on en a écrit comme fabuleuxjM.Bruce
nous allure qu'il a vu des Acridophages ert Éthiopie.
( V-oye% ce qu’en cite Buffon dans fes Sup-
pléroens.) Nous favons, au refte, que dans le
royaume de Maroc, lorfque des nuages de fauterelles
viennent s’y abattre, les habitans, dont ces
infe&es ravagent les récoltes, ramaffent les Tau-
terelles qui furvivent aux autres, & en font des
mets dont ils fe nourriffent. Quelques voyageurs
européens qui ont été curieux d’ en goûter, nous
ont appris que c'étoit une affez mauvaife nourri-
> ture. Mais enfin , ils en font des ragoûts qui ne