les circonftances d’ un grand phénomène ; maïs
elle eft dangereufe lorfqu’on tente de former un
enfemble de certaines mafles d’effets difparates
avant qu’ils aient été difcutés féparément. Les
opérations de l’analyfe qui décompofe, ne doivent
pas marcher, dans tous ces cas , parallèlement
avec celles d’une fynthèfe qui les réunirait fans
méthode.
D o u z i é m e c o n s i d é r a t i o n fur les limites de
Vancienne mer. ...
Une des confédérations qui jettera le plus de
jour fur la diftinêtion des foiiiles & fur un grand
nombre d’autres queftions, eft la recherche des
limites de Y ancienne mer, déterminées par les couches
horizontales fuivies, dans lefquelles fe trouvent
les dépouilles des animaux marins. On a déjà
reconnu plufieurs contrées de la terre, fort étendues,
où l’on ne rencontre plus de ces dépouilles,
& dont les couches & les lits, ou bien n’exiftent
pas, ou ne font pas horizontaux. En fuivant les
îimites de ces divers maffifs, on déterminera deux
chofes également intéreffantes : d’abord , l’étendue
des anciens continens habités par les premiers
hommes & les animaux, & l’étendue des continens
formés fous la mer & abandonnés par la mer j
enfin, le niveau auquel l’eau de la mer contenue
dans cet ancien baffin a pu s’élever.
11 eft certain, par exemple, qu’on a trouvé au
Pérou des mafïifs montueux où il n’ y a pas vef-
tiges d’animaux marins, ni coquillages, ni couches
horizontales j mais à raefure qu’on s’eft éloigné
de ces mafïifs élevés à une grande hauteur,
qu’ on a gagné des contrées fituées à un niveau
plus bas, on a rencontré de ces bancs horizontaux
& des dépouilles d’animaux marins. A la terre del
Fuego au C h ili, à la Louifiane, à la Caroline,
dans les Antilles, à la Martinique, à Saint-Domingue
, on a trouvé des couches horizontales & des
lits de coquilles marines ; mais à côté fe font vues
des contrées dont la conftitution phyfique différoit
infiniment, foit quant aux matériaux, foit quant
à leur difpofition & à leur arrangement intérieur.
Il en eft de même dans l’ancien continent : les
fommets les plus élevés des Alpes ne fourniffent
pas de coquillages. On pourroit citer de même les
Pyrénées, les monts Krapachj mais on ne peut con-
fidérer fous ce point de vue que leurs noyaux,
car plufieurs adoffemens qui le's enveloppent, offrent
des couches horizontales , remplies plus ou
moins des dépouilles d’animaux marins : tel eft le
Mont-Perdu. Les pointes les plus élevées de ces
chaînes de montagnes n etoientdonc, dans le tems
que Y ancienne mer formoit fes dépôts , que des
îles qui dominoient à un certain niveau au deffus
des eaux qui en baignoient les flancs & les envi-
ronnoient de toutes parts. Par des obfervations
très-exaéïes, très-précifes, on pourra quelque
j<our parvenir à déterminer la plus grande hauteur
j à laquelle les eaux de la mer fe font élevées fur
les différentes parties des continens.
C ’ eft en formant la circonfcription des bords
du baffin de Y ancienne mer, qu’on pourra recon-
noître fon étendue & plufieurs phénomènes très-
intéreffans qui fubfiftent fur fés bords, & que nous
expoferons en détail dans l’article Dépôts littor
a u x , auquel nous renvoyons.
Nous terminerons cet article par une réflexion
générale, qui peut être de quelque intérêt. Si Y ancienne
mer n’a pas couvert toutes les mafles les
plus élevées du globe, il s’enfuit que ce n’eft pas
le flux & reflux ou les courans de la mer qui pnt
creufé les vallons, puifque les eaux de la mer ne
font pas parvenues jufque-là 5 cependant nous y
trouvons des vallons comme dans les parties des
continens, qui ont été formées inconteftablement
fous les eaux de la mer, & qui ont été expofées
à l’aélion des courans. Ainfi l’on peut douter avec
fondement, que ces courans aient influé fur l’ap-
profondiffemènt des vallons. ( Voye^ Vallon &
C ourans de la mer.)
T r e i z i é m e c o n s i d é r a t i o n fur le s bords de
Y ancienne m e r.
On joindroit à ces premières cartes, où l’on ne
figureroit aucune vallée, pour préfenter au naturel
l’état de la terre lors de la retraite de la mer, une
fécondé carte où l’on feroit figurer tout le travail
de l ’eau, qui s’eft exécuté depuis la retraite de
la mer.
11 faudroit auffi accompagner cette dernière
carte de quelques coupes, avec l'affemblage des
couches repréfentées dans leur pofition naturelle,
& à l’ aide de ces coupes on indiqueroit
l’étendue des dégradations des eaux dans certaines
parties voifines des vallées. On y compareroit les
dépôts faits'fous la mer avec les deftruéfions faites
à côté, & , fi l’on pouvoir, on étendroitlesdé-
tails de ces coupes jufqu’à la bafe graniteufe lorsqu'elle
feroit à découvert. Par ces coupes on fixe-
roit les différens âges des opérations de la nature,
relativement aux inégalités de la furface de la
terre.
J’ai omis de dire qu’il y avoit beaucoup de cail-
lous roulés dans cette ligne des limites de Y ancienne
& de la nouvelle terre, cette pofition étant
favorable à leur arrondiffement, qui s’eft opéré
par l’aétion des flots de la mer, qui les ont balo-
tés contre les côtes.
Outre cela, je dois faire obferver qu’il fe rencontre
de grandes variétés dans ces limites : i c i ,
les deux bords font unis & plats, comme aux environs
de Lodève & de Caftres \ là , c’eft une vallée
d'une affez petite largeur, comme aux environs
d’Ufez & d’Alais, dans la vallée du Gardon.
Ailleurs, ce font les bords d’une vallée large &
profonde ; en un mot, d’un grand golfe 3 comme lés
vallées du Pô & du Rhône, On trouve auffi ce«
bords de Yancienne mer fur les revers des grandes
montagnes, dont les croupes & les pentes alon-
gées font garnies de dépôts littoraux. Je trouve
cette difpofition des bords de Y ancienne mer en
Suifle. ( Voyei Golfe terrestre.)
J’ai déjà reconnu, par des obfervations affez
fuivies, les bords ou les limites de Y ancienne mer
fur une longueur de plus de deux cents lieues. Je
crois qu’il conviendroit de les tracer fur uné carte
de France, & de joindre à cette carte-, i ° . une def-
cription des phénomènes qui fe montrent le long
de ces limites : ces phénomènes font d’abord des
matières graniteufes criftallifées par mafles, & des
matières calcaires ou autres, diftribuées par couches
horizontales : cette bordure marque la réparation
de ces deux fyftèmes de fubftancesj i Q. les
niveaux différens de la mafle graniteufe & de la
maffe calcaire 5 30. dans cette bordure on trouve
auffi des débris de granit, entraînés par les anciens
fleuves qui circuloient à la furface de Y ancienne
terre ôc fe déchargeoient dans la mer : c ’eft là que
divers matériaux qui forment ce que j’appelle dépôts
littoraux, font par bancs mêlés avec les frag-
mens de coquilles marines > 40. il y a vers ces limites
, des débris de Y ancienne terre, entraînés fur
le nouveau continent depuis la retraite de la mer.
Je les appelle dépôts torrentiels.
Il conviendroit de marquer tous ces amas fur
des cartes particulières.
Q u a t o r z i è m e c o n s i d é r a t i o n f u r P ancien baffin
de la mer.
Les pays de lavages qui environnent les côtes
de l’ancien baffin de la mer, n’offrent point de
coquilles ni leurs débris, parce que les matériaux
apportés de Y ancienne ou de la moyenne terre fur la
nouvelle, la plupart vafeux , en ont éloigné les
coquillages : il y a cependant des parties des bords
de ce baffin où l’on rencontre ces coquilles fur
les granits mêmes, fans aucun dépôt de lavage
intermédiaire. Cette différence dans la nature des.
dépôts littoraux eft produite par les embouchures
des rivières torrentielles , lefquelles, obéiffant â
des pentes favorables, fe font déchargées dans
certains golfes, & y ont entraîné des matériaux
vafeux qui ont écarté les animaux à coquilles, au
lieu qu’ils fe font plus, même fur les bords de la i
mer, dans les endroits où les côtes ne recevoient
aucune matière étrangère : ajoutez qu’aux environs
des embouchures de tous les fleuves qui cha-
rioient abondamment des vafes, il n’y a pas de ces
animaux à coquilles.
A la fuite de ces confidérations , j ’obferve que
la diftin&ion des coquille^ littorales ou du fond de
la mer ne me paroît fondée fur aucune obferva-
tion, car j’ai trouvé des bélemnites des cornes
d’ammon le long des bords de la mer ancienne.
Par conféquent on ne peut pas dire, pour expliquer
pourquoi on ne trouve pas dans la mer actu
elle les analogues des bélemnites &r des cornes
d’ammon que ces animaux habitoient loin des
côtes, & occupoient conftamment le fond du
baffin de la pleine mer. Je puis adreffer mes lecteurs
aux articles Amas de coquilles , pour
indiquer les différentes parties des bords de l’ancienne
mer où ces différens phénomènes fe font
préfentés à moi avec ces circonftances remarquables
& très-décifives. ( Voyeç Ancienne terre
du Morvan , Pays de lavage, )
Q u i n z i è m e c o n s i d é r a t i o n f u r le s d ép ô ts v o ifin s
des limites de P ancienne & de la nouvelle terre, G*
dans le voifinage des bords de P ancienne mer.
J’ai tracé fur’ une grande partie des cartes de
France les limites de Y ancienne & de la nouvelle
terre, & même de la moyenne, & j’y ai fait figurer
en même tems les mafïifs des matériaux qui
ont été entraînés de Y ancienne terre dans le baffin
de la mer, où fe formoit la moyenne ou la nouvelle.
En conféquënce j’ indiquerai dans les articles A n-
goumois & Berry , les parties des limites où
l’on peut fuivre ces mafïifs.
J’ai trouvé d’ailleurs dans les couches de la nouvelle
terre en Angoumois, i° . des amas de réfînes
foffiles & des arbres réfineux de diverfes efpèces,
au milieu des marnes & à une petite dittance des
limites du Limoufin & de l’Angoumois.
20. Dés dents d’éléphans au milieu des lits de
pierres, dans le voifinage d’Angoulême.
3®. Dans les mêmes parages de la nouvelle terre,
beaucoup de réfidus de végétaux, ou confervés,
ou pourris.
4°. Des caillpus roulés, qui ont été primitivement,
ou des fragmens de quartz, ou de granit.
5°. Une grande quantité de pierres de fable ,
tant en Angoumois qu’en Périgord & dans le Bas-
Limoufin, adoffées aux maffifs de granit.
6 . Beaucoup de mines de fer diftribuées fur les
hauteurs, & roulées par les eaux torrentielles.
70. Beaucoup de cailloux roulés en poudings ,
fous forme de dépôts torrentiels, & d'une époque
vifibletnent poftérieure à celle dans laquelle ont
été formés & dépofés les cailloux roulés dont j’ ai
parlé précédemment, & qui font en lits fuivis.
Tous ces monumens concourent également à
prouver que Y ancienne terre du Limoufin étoit peuplée
de plantes & d’arbres dans le tems où la mer
formoit, par fes dépôts , la nouvelle terre de l’An-
goumois, tant avec les dépouilles des animaux
qui vivoient dans fon baffin, que de celles des
animaux & des végétaux, vivant le long de fes
bords , fur les îles, qu’elle entourait de la même
manière que la mer actuelle reçoit par les eaux
courantes les débris des continens. ( Voye£ Nouvelle
terre & Angoumois, où ces faits feront
confiâtes par l’expofidon de toutes les circonftances
qui peuvent les conftater. Voyei à l ’ar