
fant j elles -fe réduïfent en une fubftance terreufe
qui eft foutenue par les nouvelles racines, qui
compofent comme.la tiffu d'une charpente légère.
-Ces jnalTes .fe'détachent des bords du lac & vont
flotter Cuj:.. l'e.au, qui eft froide comme une autre
eau de fource ; elle en diffère par fa teinte, qui
eft allez femblable à celle ,des eaux où l’on a fah
diffoudre un-peu de favon. Les chiituftes nous diront
le refte. Les îles font le jouet des vents à la
furface du baffin du lac 5 elles fe heurtent dans
cette marche/fingulière, & s’arrondiffent par les
froçtçméns réciproques de leurs bords » elles ont
vingt}; à trente! pieds environ de diamètre ; elles
plient, fous le;poids? des curieux qui fe hafardent
fur cette foible compoficion : leur fouplefle donne
Une idée de la .manière.dont elles ont .été formées.
Cette fource & ce grand dépôt d'eau fe trouvent
placés dans une large plaine , couverte de différentes
maffes fuperficielles de travertin, d'un tiffu
plus ou moins ferré. Le long des bords du canal
par lequel le lac de l'Âcqua-Zolfa verfe fon trop
plein j on voit des dépôts confidérables d'incruf-*
tâtions de formes très-bizarres, qui les.revêtent;
Les différens endroits pàr lefquels ces eaux débordent,
offrent lesimêmes finguliers dépôts : outre
ce la , dans les chutes on obferve desincruftations
plus abondantes que partout ailleurs. C ’e ii vers
l'extrémité de fon cours, & umpeu avant que de
fe jeter, dans le lit du Teverone, que cette eau
extrayafée forme, dans les mois de l’année les
plus chauds, les confetti di Tivoli. : 1
Ces copfetti ne fe ramaffent qu'à l'extrémité de
la plaine, où l'on voit les maffifs de travertin dont
nous avons parlé, c'eft-à-dire, dans l'endroit où
les eaux foufrées, après une grande divifion, fe
jettent dans le Teverone. Alors l’eau n'étant plus
chargée! d’une grande quantité du principe terreux.,
le dépofe ifolément, & ne forme que de
petites maffes arrondies, qui imitent affez bien la
figure des dragées : l'eau les voiture à mefure qu'elle
les dépofe. Dansjce. cas l ’évaporation abondante
de la chaleur eft une circonftance néceffaire à la
formation de cette fingulière ftalaélite.
Quelques phyficiens obfervateurs ont cru que
la qualité de l'eau du lac qui fait les incruftations,
contrit?uoit à la compofition des îles flottantes,
& ils lui ont en conféquénce fuppofé la propriété
fingulière de ronger les bords du la c, quoiqu'elle
dépofe partout le principe terreux dont elle s'eft
chargée, en grande proportion en traverfant les
terrains à travers lefqueis elle a couru.
Il eft vifible, comme je Lai dit ci-devant, que
les îles flottantes ne font point les.débris des bords
du lac : comment de tels débris, pourroient - ils
faire des.îles de quinze à vingt pieds de diamètre ?
D’ailleurs , on ne voit point de fragmefis de pier-:
res détachées fur les bords des Acque-Zolfe> mais?
feulement de la terre ; &: quand il y eniauroit fur le
fond du baflin, comme on ne peut guère en doute
r , l'eau.qui dépofe ne,ronge,pas, puifqu'elle fe
trouve dans un état de fâturation du principe terreux
, qu'elle tient en diffolution. On voit bien
que ces phyficiens ont parlé de ce qu'ils avoient
vu trop rapidement.
11 m'a toujours paru abfurde qu’une pierre ufée
par l'eau, qui eft fuppofée la corroder, puiffe
( nager fur la même eau 3 carl'aétion de l'eau fur les
bords ne doit pas être plus forte que fa furface,
! où flottent les îles.; Tout ceci eft un tiffu de contradictions
d’un bout à l ’autre.
Je reprends maintenant l'examen du fol des environs
du lac des eaux foufrées, où fuit le travertin
jufqu'au canal du Teverone; enfuite on rencontre
quelques amas de terres cuites, qui ne
s’élèvent pas beaucoup fur le chemin de T iv o l i,
car après un certain trajet on obferve des maffes
énormes de ftalaélites de toutes les formes. Des
eaux courantes fe voient difperfées çà & là fur les
différentes pentes, & paroiffent avoir contribué
à la formation de tous ces dépôts : on y remarque
des lames de ftalagmites, ou plates ou contournées;
des tuyaux , ou entièrement remplis & obf-
trués, ou vides; des bouillons, des boules à couches
concentriques bien diftinétes , & quant à leur
couleur & quant à leur tiffu plus ou moins ferré :
certains tuyaux de ftalaélites donnent encore paf-
fage à l'eau, qui continue fon travail pendant l'hiv
e r , & l ’interrompt pendant l’été.
Certaines parties de ces dépôts n'offrent que
des feuillets fort minces, qui n'ont pas de coniif-
tance, & qui font même en état de decompôfition
parce qu'elles n'ont pas reçu un certain degré d'infiltration
; mais d'autres au contraire,. dont le
travail eft plus complet, & qui font fort étendus,
feroient fufceptibles; de prendre un grand poli.
On voit que les faces des ftalagmites, fur lefquelles
l’eau a coulé long-tems, font couvertes d’une
petite couche lifte & compacte : c’eft cette circonftance
qui conftitue la diftinélion apparente des
couches additives dont jJai parlé. Quelle que foit
la réunion des nouveaux dépôts après la reprife
du travail de l'eau, on ne peut point fe laffer de
fuivr.e tous les divers réfultats de ces dépôts éton-
nans que l’eau a laiffés de toutes parts , à mefure
qu'on approche de Tivoli. On voit clairement
tous les procédés naturels de la formation de l ’albâtre.
La diftinélion des bouillons, malgré l’addition
des lames qui en laiffent découvrir la forme,
quoiqu’elle réfide au milieu de maffes épaiffes,
ne paroît avoir pour principe que ce vernis natur
e l, dépofé par l'eau fur toutes leurs faces fuc-
cefîives.
L'extrémité d’une de ces maffes de ftalaélites,
dans le voifinage du pont qu'on traverfe au deffous
des écuries de Mecenas , eft appuyée fur une bafe
de terre cuite ou. tufau, femblable au fol de la
ville Aérienne, car elle en eft proprement la
continuation.
Au-delà de la grande cafcade du Teverone , le
MonterCroce & d’autres collines prolongées vers
le nord , la montagne des Capucins , & toutes
celles qui-forment une chaîne jufqu’ à Paleftrine,
font compofées d’albarèfe en couches inclinées :
cette maffe appartient à l’Apennin. Le grain de la
pierre en eft fort fin , comme celui du marbre : on
y trouve parmi , quelques noyaux de pierres calcaires
qui’ font filihées.
Au-delà du Teverone, qui coule dans un canal
Fort profond, les montagnes d’ albarèfe forment
une arête prolongée, dont les couches interrompues
biffent échapper des fources abondantes : ce
font ces eaux qui ont fait d'immenfès dépôts fur
l’extrémité de l’arête, où l’on trouve les mêmes
phénomènes qu'au deffous de Tivoli.
La cafcade de Tivoli eft un effet de l’art, &
non le réfultat d'une opération de la nature. Je le
répète : c’ eft l’effet d'une chauffée qui barre le
cours du Teverone, & retient une grande partie
de fes eaux pour fervir aux befoins des moulins
& des forges qui s’y trouvent établis. Cette eau
s'échappe par deux canaux latéraux : la plus grande
partie, après avoir parcouru une croupe de la vallé
e, fur la pente de laquelle font établies plufieurs
ufines, formé, par une chute générale, les cafca-
telles. D'un autre côté, la plus grande maffe tombe
& fé précipite fur le revers de la chauffée, qui a
peu de pente. L'obftacle que cette chauffée a op-
pofé au mouvement de l'eau, qui occupe le fond
du lit du Teverone, a retenu au paffage lés pierres
& les fables, & a élevé ce lit jufqu'au niveau
du bord fupérieur de la-chauffée. D’un autre côté,
l’eau de la grande cafcade s’ engoufre après fa
chute , au milieu d'un amas de ftala&ites qui font
percées en différens fens, & dont quelques-unes
traverfent d’un bord du canal à l'autre,’ & qui,
par des obftacles multipliés, tourmentent cette
eau de manière à la couvrir entièrement d'écumes.
L’afpeét de tout ce fracas de rochers, fur-
montés des. ruines du temple dè Neptune & de
celui de la Sibylle, infpire une certaine horreur.
| II paroît, outre cela, que les eaux de l'Aniô fe
font échappées aufli en partie du côté oppofé à
la forge, &c qu’elles y ont formé des dépôts très-
élevés, qu'on rencontre en allant à la montagne
délia Croce, & fur la croupe en face du temple de
la Sibylle. Pour que l'eau du Teverone ait pu parvenir
à cé niveau, il eft néceffaire que la retenue
ait été plus élevée, ou que le lit de la rivière air
été moins bas , car plufieurs dépôts de gravier &
de ftala&ites femblent prouver cette ancienne
difpofition. •
L'emplacement de la ville Adrienne eft une
maffe de.terres cuites , dans laquelle on a fait des
fouilles pour Lextraéliori du tufau , employé à di-
verfes conftruétioüs. Cette maffe paroît fe continuer
jufqu'à la chaîne de Frafcati , d’où eHe a
formé un courant de matières fondues, qui ont
pris aufli la route de Paleftrine. Ce tufau renferme
très-peu de ces points blancs, qui font fi communs1
d^ns le peperino d'Albano & dans celui qu’on
trouve aux environs du temple de Vefta.; Cela
femble prouver que ces débris de pierres calcaires
ne font dus ni aux dépôts du Tibre ni aux àva-
laîfons des montagnes, dont les courans de matières
fondues & cuites auroient enveloppé les débris.
Il y a plus d’apparence qu’ ils ont été fournis
par le JVIonte-Cavo d'où ils font venus, comme
je m'en fuis affûté en paffant au pied de cet ancien
cratère.
J'ai vifité toutes les montagnes qui font au midi de
Tivoli ; elles font compofées d'une pierre calcaire
blanche avec des veines filifiées. On découvre des
fommets de ces maffes, les croupes de l'Apennin ,
qui font face à la plaine où fe trouve établie la
ville Adrienne, ainfi que les courans de matières
cuites & fondues, qui ont pour origine les hauteurs
de la chaîne de Frafcati, comme je l'ai déjà'
dit. Ces maffes ont couru vifiblement le long du
pied des croupes de l’Apennin 8c de la colline' de
T iv o li, & s'y font accumulées à une certaine hauteur
, dont on trouve les correfp.orôdantes auprès
du pont du Teverone, qu'on traverfe avant d’arriver
à T ivo li, comme je l'ai déjà remarqué.
Je ne fais fur quelles obfervations M. de la Con-
damine, qui a tant parlé fur les volcans dans fou
Voyage d'Italie, s'eft hafardé à dire qu’une partie
de la montagne de Tivoli étoit un volcan. J’ai
déjà dit que cette montagne ri'offroit que de l’al-
barèfe bien intaéle. Ceci eft un véritable dépôt
de l'eau, chargée des principes qu'elle a diflbùs
en parcourant ces montagnes, tant au midi qu’au’
nord , & même à l'eft de T iv o li, 8<r qui a formé
ces ftalaélites immenfes qu'on y voit partout.
J'ai vifité de même les montagnes feptentrio-
naies affez loin, & , dans ce trajet, le prolongement
des croupes parallèles à celles, de T iv o li,
au-delà-du Teverone, eft entièrement compofé dé-
liai a élite s. Au-delà on rencontre un peu de tufau
c u it , mais c'eft peu de chofe lorfqu'on le confi-
dère , tant par rapport à fa maffe, que relativement
à fon origine.
Les montagnes d’albarèfe fe prolongent vifiblement
par l'oueft, & la circulation intérieure des
eaux qui les pénètrent, & qui fortent du pied de
cette enceinte, fournit aux fources des eaux foti-
frëes , & contribue à une partie des dépôts.du
travertin. C'eft un phénomène affez étonnant, que
les eaux foufrées qu'on rencontre aux différens
appendices de l’Apennin, fortent toutes de deffous
les couches inclinées de l ’albarèfe.
Les montagnes de Tivoli font la limite des maffes
calcaires à couches inclinées. On pourrôit rechercher
pourquoi la mer, qui a dû s'élever autour de
ces maffes, n’y a pas adôffé des collines à couches
horizontales, & affez femblables à celles qu'on
peut-obferver dans le voifinage de Rome, & particuliérement
au Monte-Mariô; car la partie qui eft
au midi de Rome a été tourmentée par le feu des
volcans , ainfi que par le torrent du Tibre. Ces faits
nous offrent une réponfe à l'objection précédente.
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