
dans leur conftru&ion, femblables aux nôtres, de
voir que toutes les dépouilles que nous y trouvons,
.foit des animaux, l'oit des végétaux, font femblables
aux dépouilles què nous offrent les nôtres..
Ils avoient donc même difpofition intérieure &
extérieure, même température, & des afpeéts de
même nature. Concluons donc qu'ils n’étoient.
point fimples, mais qu’ils avoient été aulïi l’ouvrage
de l’eau, qui, en les conffruifant, en avoir démoli
d’autres, & changé encore dans ces contrées la
difpofition de la furface de la terre.
Nous ajouterons ici que les fragmens de pierres
détachées, dont les marbres font compofés , font
quelquefois eux-mêmes des débris d’autres marbres
encore compofés, dont toutes Jes pièces fou-
tiendroient une autre analyfe , & annonceroient
encore des époques plus anciennes. Le marbre , dit
Je Père Caftel, eft le fruit de mille générations fuc-
celfives ( Traité de la pefantcur univerfelle, liv. il,
§. i ) , & rien ne le prouvera encore mieux que
le rocher de cailloutage, connu à Alais fous le nom
c’Amenla. ( Voye£ cet article. ) On apprendra, par
fon refultat, les mêmes vérités que nous venons
d’expo fer ci delfus.
La fexième chaîne de montagnes des environs
d*Alais n’eft point compofée de bancs pofés régulièrement
les uns fur les autres, mais d’un aflem-
blage de rochers 8c de pierres à chaux, dont les
amas font immenfes, 8c au deffoùs de (quels règne
un banc régulier de pierre morte, où il ne paroît
aucun veftige de coquillage Foffile. Ces quartiers de
rocher qui le couvrent, ne font compofés que de
cailloux de différens grains 8c de diverfes couleurs.
Chaque caillou eft ufé 8c arrondi, 8c le tout eft
noyé dans une terre roufteârre, au milieu de laquelle
fe voient auffi une grande quantité de fofe
files étrangers à nos climats, non par couches
comme partout ailleurs, mais confondus 8c mêlés
dans des amas d’Amenla, ufés 8c arrondis comme
eux.
Dans cette chaîne , le terrain porte toutes les
marques d’un bouleverlement 8c d’un défordre qui
a confondu les pierres avec les coquillages, 8c
qu’on trouve indifféremment dans toute l’épaifleur
du rocher-, & dans les endroits les plus profonds
où il aboutit. D’après tous ces faits remarquables,
nous nous croyons aurorifés à conclure, à l’appui
de tous les phénomènes que nous avons difcutés
précédemment , i°. que la pétrification des morceaux
arrondis du rocher d’Amenla 8c des coquilles
qui s’y trouvent mêlées , eft de beaucoup antérieure
à la pétrification du ciment qui les lie en-
femble $ 2°. que tout le rocher eft étranger à la
place qu’il occupe , 8c le produit de tranfports
faits par l’eau ; 30. que les pierres dé Amenla fe font
arrondies en roulant les unes fur les autres , 8c
ballottées par Jes flots de la mer avant d’avoir
été accumulées fous la forme de rocher.
De plus, comme dans la caffure d’un bloc corn- pofé dé Amenla , on y trouve quelquefois des vei- »
nés de fpath blanches du fuc pierreux, qui travers
fent quelques-uns de ces morceaux , qui fe terminent
à les bords, 8c qui ne s’étendent pas au-
delà dans le ciment qui les lie. Cette circonflànce
dans la pétrification des cailloux d‘Amenla prouve
qu’elle ne s’eft pas opérée dans le même endioit
que celle du ciment, ni dans le même terris , mais
que les pierres d*Amenla, aujourd’hui arrondies 8c
probablement anguleufes autrefois, font des morceaux
détachés d’une plus grande mafia. Les veines
blanches de chaque morceau détaché montrent
qu’ils ont fait partie d’un aptre roçher, 8c
que ces morceaux d’ailleurs n’ont pas toujours été
ifolés. Ceux qui font accoutumés à voir les pierres
en naturaliftes, 8c qui les ont oblèrvées le marteau
à la main, fendront mieux que perfonne la force
de toutes ces preuves. Pour moi , je les crois fi
viCtorieüfes, que, je ne crois pas qu’il foie nécef-
faire d’être grand naturahfte pour fe rendre à ces
démonftrations. ïl n’eft befoin que des yeux 8c des
plus fimples lumières de la rai fon pour fuivre une
telle analyfe , 8c en tirer toutes les conféquences
qui en doivent refulter pour l’hiftoire de la terre.
I.es marbres brèches ne font pas les feules fubf-
tances pierreufes dont l’analyfe mène à une autre
analyfe. Dans les carrières de plufieurs de nos pierres
, 8c même les plus communes, l’on trouve des
blocs ifolés de différens grains 8c de diverfes conf-
trudtions, des morceaux de grès fous formes très-
variées , des rognons de cailloux ou pierres a tu-
fil, dont la difpofition annonce qu’ils r»e font pas
dans le lieu où ils ont été originairement produits.
Ces morceaux 'égarés font eux-mêmes tellement
remplis de matières fi étrangères à celle qui les renferme,
qu’on ne peut auffi douter qu’on n’y trouvât
plufieurs veftiges de productions animales ou végé-,
taies qui nous offriroient les indices d’une fituation,
différente 8c plus ancienne 5 enfin, l’on ne peut rien
trouver dans les couches de la terre , qui ne puiffe
fouffrir une analyfe de cette efpèce plus ou moins
fuivie, 8c il eft fur que fi Ton pouvoir interroger,
les moindres pierres errantes dans tous les gîtes ou
elles fe trouvent, il n’y en auroit pas qui ne nous
donnât une fuite d’époques encore plus confidéra-,
blés & peut-être incalculables , par rapport à la foi-
bleffe de nos idées fur l’efpace ^ fur le tems > car
au delà de deux ou trois révolutions, nous ne pouvons
plus nettement diftinguer la fucceffion des
faits un peu remarquables, tant ces matières fe
fouftraient pour lors à nos analyfes , par la peti-
teffe de leurs parties, par leurs altérations 8c par
la multiplicité de leurs fubdivifions. La naturé,
ainfi que l’hiftoire, a dans fes monumens une multitude
d’hiéroglyphes que nous ne comprendrons
jamais, mais qui nous dénotent toujours une antiquité
que nous ne pouvons que foupçonner.
On peut voir dans notre Notice Jur Stenqn (premier
volume), ce qu’il a ejfayé de développer,
|
de mettre à la portée de tous les bons efprits, re-
i lativement aux diverfes productions des continent,
fucceflifs dans fa Differtation defolido intact folidum
naturaliter contenio, 8c l’on verra que nous n’avons
rien exagéré dans ce travail de la nature, 8c combien
nos anecdotes méritent l’attention des géo-
logiftes. J’entends parler de ceux qui étudient la
terre d’après nos principes de giographie-phy-
fique.
A necdotes des faits civils & hifioriques, non comparables
à celles concernant les faits de la géogra-
S pkie-phyfique.
Quelques écrivains ont voulu mêler les faits
hiftoriques aux grands faits de la nature.,-Les hif-
toriens de la nature, fanspenfer aux archives immenfes
qui font difperfées fur toute la furface de
la terreront eu la foiblefie de fouiller dans les
Chartres du huitième ou dixième fiècle, comme fi
de petits intervalles, comptés depuis ces époques
jufqu’à nos jours, pouvoient donner à la nature le
tems de produire des nuances fenfîbîes dans une
opération quelconque. A-t-on crm qu’en mêlant
les faits hiftoriques aux faits naturels, on parvien-
droit à les rendre plus croyables en fixant leuis
époques 8c en recueillant quelques traces des anciennes
révolutions ?.
Lorfqu’on a recours â ce fupplément, l’on n’a
pas a fiez bien vu les faits de la nature, leurs cir-
conftances 8c dépendances, car ces faits, bien
difcutés, font d’une toute autre force 8c d’une
toute a,utre évidence que les faits hiftoriques.
Quoiqu’altérés en partie par une fuite de révolutions
continuelles, on peut les retrouver, en
grande partie, fi l’on fait bien remonter à l’état
ancien. En appréciant les deftru&ions partielles
avec fagacité, on trouvera que les altérations
elles mêmes du premier fait font de nouveaux
faits suffi effentiels que les premiers. Or , cette
manière de procéder nous éloigne absolument de
tous les tems hiftoriques, 8c nous rejette dans les
âges où les révolutions de U nature n’ont, en :
aucune façon, été confervées par les monumens
des hommes. Les hommes fauvages, qui auroient
pu être témoins de quelques-uns de ces faits ,
n’ayoient aucun intérêt à les obferver, 8c ne les
auront pas remarqués. Qu’eft-ce qui obferve la dégradation
des bords d’une rivière? N'eft-ce pas
un propriétaire intérefle par les pertes.ou les avantages
caufévà la fuite des ofcillatiens des eaux
courantes ? Or, le fauvage qui eft propriétaire de
tout un pays, ne s’attache à aucune partie, 8c
n’obferve ni les nuances de ces ravages, ni leurs
progrès.
D’ailleurs, les faits dont je parle font les produits
d’une infinité d’aétions répétées, qui deviennent
infenfibles pour des yeux diftraits ou
peu inftruits , comme étoient les premiers habi-
tans du grand nombre de ^nos contrées de la
moyenne & de la nouvelle terre , car celles de Vancienne
terre étoient fi peu de chofes 8c fi ifolées,
qu’elles n’ont été habitées que petit à petit. Lorfe
que nous connoïtrons bien précifément l’étendue
8c les limites de Y ancienne terre , nous pourrons
plus aifément juger de l’état 8c des démarches des
nabi tans qui s’y font établis dans les premiers
tems.
! A necdotes fur Vapparition de la moyenne 6? de la
nouvelle terre» hors du fein des eaux de /’ Océan.
E t apparuit ar/da.
L’apparition de la moyenne 8c de la nouvelle
terre hors du fein des eaux de la mer eft un
. événement confia té par une grande quantité de
monumens. Ce-font deux grands faits incontef-
tables, puifque ces deux maffifs étant les produits
de vaftes dépôts formés dans le fein de la mer, il
eft néceffaire que , pour être à découvert 8c faire
partie de nos continens, la mer les ait abandonnés :
ce font deux effets importans dont nous ne connoif-
fions pas les caufesj ce font donc des faits anecdotiques.
L’époque de cette apparition n’eft: annoncée
par aucune circonflànce remarquable. Je puis
cependant prouver, par plufieurs observations
très-précifes, que la moyenne terre a été découverte
beaucoup plus tôt que la nouvelle, 8c qu’entre
la retraite de la mer de delfus la moyenne terre,-
8c celle qui a mis la nouvelle terre 2 découvert, on
doit admettre tout le tems néceffaire aux eaux
courantes pour creufer une grande vallée dans un
maffif de pierre calcaire d’un grain fort fin, qui
eft du diffriCt de la moyenne terre ,• puis le tems
qu’il a fallu à la mer pour combler cette vallée
d’u,n dépôt que je corifidère comme appartenant à
la nouvelle terre, 8c qui, abandonné par li mer ,
i a été creufé par le retour des eaux courantes qui
; avoient approfondi la première.
| Toutes ces anecdotes de la nature, telles que je
| les raconte, font des phénomènes dont les rno-
numens très-remarquables peuvent être reconnus
aux environs d’Alais 8c d’Ufez. C’eft là , ainfi que
| partout ailleurs, qu’on peut les obferver en parcourant
la vallée du Gard, creufée d’abord, comme
nous l’avons dit, dans la pierre de marbre qu’on
voit entre Ufez 8c Nîmes j enfuite la fuperféta-
tion ou dépôt foufmarin d’une pierre calcaire
'tendre 8c d’un grain très-lâche, laquelle fe dif-
tingue fort facilement de la pierre de marbre,
tout le long de la "ligne qui fort d’enceinte à la
première vallée. Voilà de grands faits que je puis
établir fur des preuves juftificaiives, auffi étendues
qu’elles font intéreffantes.
J’ajouterai ici que ces monumens naturels font
partie de la vallée-golfe du Rhône, où l’on peut
fuivre de grands traîius de la moyenne 8c de la
nouvelle terre, 8c même de longues enceintes de
Y ancienne terre graniteufe : c’eft là que j’ai recueilli
tous les caractères des vallées-golfes. 11 me paroît
três-iutéreffant, pour les progrès de l’hiftoire ru -