
pendant que d’autres en offrent une grande abondance.
A deux milles ds Florence, piès du village de
Bobara » s'élève une montagne composée de couches
d’ un fchifte argileux tendre , ik du même
ichifte mêlé de mica ou de macigno i qui fe fuccê*
dent les uns aux autres : ces couches, ainfi que
toutes celles qu’ on rencontre dans cette traver-
fée.j font inclinées d’ environ vingt-cinq degrés du
iud-eft au nord-oueft. L e revers de la montagne
•eft plat , & même on fabrique des tuiles avec ce
fchifte argileux & tendre , qu’on trouve fur les
■ lieux : il s’étend en s’élevant un peu à deuxmilles
plus loin, jufqu’ à Creïka.
C ’eft là qu’ on voit dans le fchifte de petites
veines de gros fpath calcaire, dont les couches
minces ont pris, fuivant les différentes matières
qui fe font unies à elles, une teinte noire ou rouge :
les rouges font divifées en cubes obliques affez
réguliers.
Ge fchifte argileux renferme .encore des morceaux
détachés de pierres calcaires jaunes, avec
des dendrites. Affez près de là on voit des couches
de ce fchifte argileux, d’un grain lâche &
tendre, prefque fans aucun mélange de mica , &
enfin des bancs fort épais de pierre calcaire grife
le fuccéder alternativement. Ces montagnes , en
s'élevant confîdérablement , forment les Alpes
apennines , compofées de pierre à chaux grife ,
çompa&e & dure, dans laquelle il y a , d ‘intervalle
à autre, de petits lits d’argile qu’on ne voit
point dans les montagnes les plus élevées.
A huit milles plus loin on trouve dans les cou-
clfces calcaires , des fentes remplies par du fpath cal*
caire criftallifé, & dentelé fur les deux faces par
des lames qui fe réunifient au milieu des fentes :
ce même fpath fe rencontre dans les couches d'argile.
La chauffée pafle de niveau fur une de ces couches
d’argile pendant quatre milles, ju/qu’à Caja-
nello, où elle commence à monter infenublement
fur une longue croupe de montagnes : on y voit
des morceaux détachés de fchifte marneux & argileux,
avec un peu de mica j preuve que la chauffée
ne trayerfe pas les hautes montagnes de 1’ Apennin,
qui ne font formées que de pierres calcaires 5 car
elle paffe à côté d’elles en fuivant la croupe, où le
terrain argileux & fehifteux fe montre encore.
De Cajanello au Monte- Caraval'.o on compte
quatorze milles, & dans ce trajet on ne-rencontre
que des éclats de pierre. A Caravallo on monte
une colline nue, courte & fort roide, compofée
de couches de pierres calcaires à gros grain , mêlée
d’argile ou de marne, parfemée de mica & d e
morceaux irréguliers de macigno. Ces couches ont
une inclinaifon oppofée à celle des autres couches,
mais cette difpofition ne fe foutient pas : c’eft là
qu’on voit les marques d’ un bouleverfement que
ceux qui croient au volcanifme du Monte- Traverfo,
ifiji .attribuent, quoiqu’il folt à deux miljes de diftance;
chofe étrange, dans les effets des volcans
douteux.
En confidérant cette montagne relativement à
fa longueur, on voit qu’elle eft placée en travers
fur la chaîne de Y Apennin : c’eft une maffe dont
les pentes font très roides, 8cqui eft ouverte irrégulièrement
du fommet à fa bafe, & entièrement
formée d’une pierre d’un vert-noirâtre, avec
des taches grifes. Parmi les pierres détachées, &
difperfées dans les environs, & où l’on croit re-
connoître les effets d’ un ancien bouleverfement,
& même de l’éruption du prétendu volcan, on voit
beaucoup de petits & de gros morceaux de pierres
calcaires.
On monte encore pendant quatre milles au-delà
du Monte- Traverfo pour arriver à Pietra-Mala, le
plus haut point de la route : c’eft là que l’on trouve
une petite plaine environnée de quelques montagnes
qu’on peut prendre pour les croupes d’un
vallon. Sur le penchant d’ une de ces montagnes ou
collines s’élèvent jour & nuit des flammes qui ont
fait donner à ce lieu le nom de Pietra-Mala. A
main droite de la vallée eft une maffe formée des
mêmes matières que le Monte- Traverfo : à main
gauche font les Apennins calcaires. L’endroit d’où
les flammes de Pietra-Mala fortent, eft couvert
de terre & de pierres argileufes & marneufes,
comme s’il avoit éprouvé un certain bouleverfement
: tout autour il y croît de l’herbe, & on y
cultive des grains. L’endroit même où les flammes
s’élèvent, n’a que deux toifes environ de diamètre
: le feu s’annonce entre & autour de petites
pierres qui font détachées à la fuperficie du terrain.
Ces flammes font très-fubtiles, claires, d’un
jaune-blanc comme celle de l ’huile qui brûle; elles
ont une foible odeur de pétrolç , dépotent fur les
pierres une fuie fine, & s’élèvent de trois ou quatre
pieds au deffus de la terre.
Au deflbusde ces pierres détachées, il y a des
morceaux de gabbq> ou ferpentine. En remontant
un peu vers la montagne, & en fuivant la même
pente , on trouve un autre foyer de pétrole brûlant,
plus grand & plus étendu que le précédent;
mais les flammes en font fi foibles, qu’à peine elles
m’ont panr fenfibles le jour. Plus haut, à l’extrémité
du vallon , il y a un petit marais nommé
Aqua-Buja, dont les eaux, quoique froides j paroi
fient bouillonner continuellement^ il fumage à
leur fuperficie des parties de pétrole qui s’allument
à l’approche d’un flambeau , & qui continuent à
brûler jufqu’à ce qu’un vent fort ou la pluie les
éteigne. Tous ces phénomènes font raffemblés
dans la circonférence d’un mille & demi.
Le grand maftif dont je viens de parler eft com-
pofé de couches calcaires roûgeâtres, |àu deffus
defquelles il y a plufieurs couches épaiffes d’une
pierre calcaire grife, à gros grain. Les couches
rougeâtres, qui font voifines du chemin comme
les grifes, font inclinées de vingt-cinq degrés,
ainfi que nous l’avons vu jufqu’à prêtent; mais à
une
une certaine diftance de la route, à gauche, les,
couches font irrégulières, & différemment fi-
tuées.
La couche calcaire grife, à gros grains, continue
alternativement avec du fchifte marneux pendant
l’efpace de fix milles, j\*Y<\\i‘ ïDojano3 où l ’on
commence à voir des bancs de cailloux roulés
quartzeux, empâtés dans des pierres de fable, au
milieu de pierres à chaux, de morceaux de fchifte
argileux roulés, & de groffes pierres difformes de
même nature. Au deffus de ces couches on en
trouve d’abord de fchifte marneux, enfuite d’une
pierre de fable fine, d’un gris-blanc un peu calcaire,
puis de pierres de fable compactes, d’ un
gris-foncé.
A cinq milles plus loin , près de Livergnano| on
voit au deffus de la pierre de fable d’un gris-blanc,
des couches de terres marneufes,remplies de morceaux
de pierres à chaux roulées, de différentes
groffeur & couleur, & farcies de coquilles & de
coraux. Entre & au deffus de cette terre marneufe
font des couches de pierres calcaires à gros grain1,
qui deviennent peu à peu horizontales.
On obferve, en parcourant ce trajet, que plus
on defeend du centre de Y Apennin pour arriver à
la plaine, plus les couches & les pierres varient.
Il n’ eft pas douteux qu’elles ne datent pas du même
tems, & qu elles n’ont pas la-même origine que
les maffes plus régulières & plus élevées du centre
de Y Apennin.
La pierre de fable d’un gris-blanc reparoît à
Pianura, qui eft à cinq milles de Livergnano ; en-
fuite viennenr des collines plus baffes, qui fe prolongent
jufqu’au pays plat. La plaine commence à
la porte de Boulogne, à huit milles de Pianura,
& s’étend fans interruption jufque dans la large
vallée du Pô, dans la Lombardie. On a planté, le
long de la route, de grandes maffes de félénite tirées
de S an-Rofilo; elles prouvent aux voyageurs
qui favent les.reconnoître, qu’il s’eft fait autrefois
dans ce lieu une diffolution confidérab-e de pierres
& de terres calcaires par l’acide fulfureux, &
que cette diffolution & cette infiltration ont produit
ces beaux & étonnans réfultats.
Je ne puis quitter VApennin fans parler des falfes
de Modene : c’eft un marais remarquable, fitué dans
les montagnes des ènvirons de Sajfuolo. Ce marais,
autant qu’on a pu en juger jufqu’à pféfent, paroît
être la couverture d’un volcan particulier, qui
doit de tems à autre rejeter de l’eau, de la terre,
des pyrites & des fràgmens de pierres. On peut y
enfoncer une perche à la profondeur d’une toife,
& lorsqu’on l’en retire, l’eau s’élance avec force
hors de l’ouverture qu'on a faite. Plus haut, lorf-
qu’on fuit une nouvelle chauffée pour arriver à
un cabaret nommé il Piano dcll Oglio3 les habitans
creufent beaucoup de puits , au fond defquels ils
raffemblent le pétrole, qui fumage en abondance
à la fur face de l’ eau, laquelle afflue très-rapidement
dans toutes ces excavations. Les fources font
Géographie-Phyfaue. Tome IL
fi communes dans le Modénois, qu’on rencontre
i l'eau partout où l’ on creufe* .
Je rendrai compte, à l’article P a r m s , de tous
les procédés qui font en ufage pour extraire le
pétrole des profondeurs qui fe trouvent au pied
de l’Apennin, & qu’on met de même à découvett
par une quantité de puits approfondis dans les mêmes
vues.
APPAREIL des pierres A batir. Je me fuis
propofé de rappeler ici le principe d'après l.quel
il me paroît que nos confir ucteurs fe c.onduilènt
dans Y appareil des pierres a bâtir y qu’ on extrait de
nos carrières à couches horizontales. Il eft évident
qu'ils les taillent de manière à en faire dans les
bâtimens le même emploi que la nature en a fait
dans les couches de la terre depuis leur formation,
c’eft-à-dire, fuivant les fyftèmes de dépôts qui les
ont organifées dans le bafltn de la mer. Je ne doute
pas, en conféquence, que par cet emploi toutes
ces pierres ne fe trouvent placées dans une fitua-
tion où elles font plus en état de réfifter à toures
les forces furincumbantes. Ceci fe comprend aifé-
ment, & je me borne maintenant aux feules con-
fidérations que je viens d’expofer à cefujet.
Par conféquent je dois montrer ici les motifs de
ma furprife lorfque j’ai eu occafion d’obfervef,
dans les deux premiers étages du Louvre, des colonnes
où l'on a fait ufage de pierres d’une feule
pièce, prifes fur la longueur des couches, & par
conféquent contre les principes dont je viens de
faire fentir les avantages; cependant ces colonnes,
quoiqu’employées dans des circonftances où elles
fupportent des poids affez confidérables, ne paroi
fient pas avoir fouffert, & annoncer une dé-
compofition fenfible & une tendance à tomber en
éclats / comme on le remarque dans les bornes,
où l’on emploië des pierres debout, & qui fe dé-
compofent en peu de tems, quoiqu’elles ne fupportent
aucune charge fur leur extrémité fupé-
rieure.
J ai remarqué les mêmes inconvéniens dans une
fuite d’aflîfes fqrt longues, où l’on a fait ufage de
pierres debout, le long du quai du Jardin des T u ileries
, & dont les lames, qui font à découvert, fe
détachent & fe décompofent très-fenfîblement, 8e
paroiffent devoir continuer une deftruétion marquée
dans cette partie du mur qui fert à foutenir
la terraffe régnante le long du quai.
Je renvoie à cette aflîfe ceux qui douteroient
de la folidité du principe que j’ai expofé au commencement
de cet article. On peut fe convaincre
à fon infpetiion , que fa face n’annonceroit pas
une deftruétion aufii marquée fi les pierres qu'on
y a employées avoient été miles fur le plat, &
enflent offert les extrémités des lames & des dépôts
horizontaux de la carrière, comme fe trouvent
appareillées & placées celles qui font deffous
& deffus, & qui font bien intaétes & bien confer-
I vées fur leurs faces apparentes.
Tttc