
Unes, la première étude qu’il faut faire, eft celle
des vallées & de leur approfondiffement, & , ce
qui en eft une fuite , de la marche des eaux courantes,
auxquelles on doit ces grandes inégalités
de la furface de la terre.
Ces deux confidérations étant bien développées
, pourront fervir à guider les obfervateurs qui
voudront connoître ce qui concerne l’état aétuel
& fes caufes, & indiquer tous les progrès.de cet
ordre de deftruétions, qui ont eu lieu en même
teins que la formation des vallées s’ eft opérée.^
Ces deux objets de difcuflîon méritent d ette
confédérés dans leur enfemble, parce qu’ils s’éclairciront
réciproquement l’un par l’autre, d’un
côté les vallées , & de l’ autre les arêtes.
Je crois qu’en fuivant cette marche, l’étude des
pays de la moyenne terre devient très-facile, quoiqu'elle
ait pour objet des formes compliquées }
î dans les maffes montueufes, qui ne doivent ces for-
I mes qu’à des, a gens, lefqwete n’ont opéré que fur les
I faces extérieures de ces maffes. J’ajoute ici que les
arêtes dont j’ai fuivi les 'formes & les allures dans
la moyenne terre furtout,, peuvent fuflire à nous
donner la folution de la plupart de ces phénomènes.
car on parvient par ce moyen à rétablir les parties
détruites, de manière qu’on peut s’élever jufqu’à
l’état primitif des chofes, qui a dû être fort fimple.
Arêtes , formes plus naturelles que les crifiallifations
prétendues des montagnes.
IV. Les bizarreries d’ effets qui font furvenues
dans les deftruétions, ont tellement compliqué l’état
aétuel des chofes, qu’en vain voudroit-on le con-
fidérer & l’expliquer fous ce point de vue comme
un état primitifj car comment trouver un agent
qui pûf produire un état où l’on doit reconnoître
l'influence fuccêflive de plufteurs agens? C ’eft cependant
ce qui a trompé M. de Sauflure , & ces
crifiallifations de montagnes fi peu raifonnées prouvent
que, dans la difcuflîon des faits compliqués,
il n’eft pas familiarité avec cette analyfe, qui dé-
compofe les objets pour les examiner dans i’ordre
qui leur convient.
Je voudrais donc, i° . qu’on allât, les cartes de
France à la main, vifiter les Alpes du Dauphine
& de la Provence} qu’ on y fui vît & qu’on fît figurer
fur les cartes les différentes difpofitions générales
des maffes calcaires à couches inclinées &
de leurs arêtes ; 2°. les interruptions de ces maffes
fur la longueur Mes arêtes ; 30.Tés interruptions
latérales de ces maffes le long des bords des vallées
} 4°. les baflins dont l’enceinte eft due aux
veftiges de ces maffes, & dont le milieu n’ offre
que leurs anciennes baies. On pourroit indiquer,
par des traits particuliers, les maflifs des couches-
inclinées, & par d’autres traits les parties qui ont
fervi de bafe à ces couches avant leur déplacement.
. '
D'après ce travail, à la fimple infpection des
cartes, on ferait en état d’apprécier toute l’étendue
des deftruétions, & en même tems de rac-
' corder les maffes déplacées, femblables & autrefois
continues, & l'on n’auroit aucun befoin, pour
fe rendre compte des différens phénomènes , &
furtout des arêtes > de fuppofer des criftaüifations
Direftion des arêtes dans là moyenne terre.
J’ai fuivi les arêtes de la moyenne terre, & je
•les ai trouvées dans les planches de Vefoul,_de
Befançon, de Nozeroy, de Bourg en Breffe , du
Belley, dirigées toutes du nord au fud } elles fe
continuent dans la planche de Grenoble & de Valence
fur cette même direction, mais enfuite elles
prennent une direétion moyenne de l'eft au fud-
eft , & enfin elles courent prefque toutes de l’oueft
à l’eft. 11 fera fort aifé de juger de l’allure de ces
arêtes fi l’on s’attache aux détails de leur figure
dans toutes les parties de la moyenne terre cal-
1 caire : ces formes, qui affeétent de fi grandes maf-
fes, & fur une auflî grande étendue , font les empreintes
de plufieurs grands événemens qui méritent
d’être fuivis avec foin pour en reco*moître
l’époque & les circonfhnces.
Autant la connoiffance de l’étendue & des limites
de la moyenne terre peut fervir à juger de celle
que doivent avoir les arêtes, autant l’infpeétion
des arêtes fur les cartes de France peut nous faire
juger de l’étendue de la moyenne terre : l ’ une de
ces circonftances nous conduifant néceflYirement
à l’autre, il eft évident qu’ un obfervateur attentif
les réunira toutes deux enfemble.
Quelques arêtes commencent dans la plancha
du Puy en Vélay, à l’angle fud-eft & un peu obliquement
} fe continuent dans la même direétion
en traversant la planche de Nîmes, & fe montrant
fur celle de Nant. Vers le haut de la bordure
orientale de cette dernière planche, \es,arêces Conz
dirigées au nord-oueft, & enfuite au .nprd } mais
vers le bas elles reprennent la direétion générale,
& font bien marquées. Ort en voit encore des appendices
prolongés dans la planche de Montpellier,
à l’angle nord-oueft, & en plus grand nombre
fur la bordure feptentrionale de la planche
de Lodève. Lorsqu'elles fe continuent, elles font
moins fenfibles dans cette planche} mais il y en a
qui reparoiffent vers le bas de la bordure occidentale
, & qui fe montrent dans la planche de
Caftres , de Narbone & de Carcaflohe, toujours
fe dirigeant vers lés Pyrénées. Dans le haut de la
planche de Caftres il y a de ces arêtes, mais dirigées
de l’eft à l’oueft : il y en a dans le bas de
Carcaffone, qui font dirigées de l ’eft à l’oueft, &
qui peuvent reprendre la direétion générale. Dans
le bas de la planche de Narbone elles font de l’eft
. à l’oueft, ainfi que dans le'haut de celle de Perpignan.
Celle de Pamiers les offre d’abord du fud-
eft au nord-oueft , & elles fe terminent ainfi} mais
plus bas elles fe redreflent vers les Pyrénées, &
vont au fud-oueft d’une manière affez marquée
pour tracer leur direétion. Dans la partie fupé-
rieure de la planche de Mont-Louis,les arêtes font
bien plus marquées que dans celle de Carcaffone,
mais affez .conftamment de l'eft à l’ oueft , & ce
n’eft que vers le milieu & dans la partie inférieure
& méridionale qu'elles font tournées au
fud & vers le centre de la chaîne des Pyrénées.
Dans le n°. 40, qui vient enfuite, les arêtes
font très-marquées ; elles fuivent la direétion du
nord au fud, quelques-unes de l’eft à l’oueft,
jufqu’ au fommet, qui eft de l'eft à l’oueft.
Dans la planche de Tarbes, les arêtes varient
depuis la direétion du nord au fud, jufqu’à celle
de l’eft à l’oueft : ceci fe continue dans la planche
de Baguères jufqü’au fommet des Pyrénées , où
elle eft conftamment de l'eft à l'oueft. Il en tft de
même des eaux ; cependant fouvent des rivières
principales coupent & partagent les arêtes perpendiculairement
à leur direétion.
Dans la planche de Pau , les arêtes font affez
communément du nord au fud} mais il y en a .auflî
de l’eft à l'oueft.
De même dans la planche de Baygorry, les
■ arêtes font du nord au fud : il y en a peu de l’eft à
l’oueft.
■ Je vois avec peine que toute la maffe des Alpes
n’ ait pas été comprife dans la carte de France, ni
figurée par les ingénieurs qui ont levé le Jura, les
Alpes du Dauphiné &■ de la Provence , qui ne font
qu’une trop petite partie des Alpes de la Savoie
& du Piémont : les grands phénomènes s’y montreraient
dans leur entier, au lieu qu’ ils ne fe
montrent qu’en partie dans les planches de la carte
de France que je viens d’ indiquer, & par confé-
quenton n’ofe rien en conclure. Un plan topographique
général des Alpes feroit d’un tout autre
intérêt pour les bons nattiraliftes, que les descriptions
de voyages, où tous les objets paffent en
revue fans ordre, fans fuite, & font toujours pré-
fentés d’ une manière incomplète.
Une carte des grandes montagnes alpines avancerait
plus la Science, qu’un travail particulier ne
pourra le faire en deux cents ans d’ici., fans compter
qu’ il réfulteroic de la connoiffance topographique
des Alpes, des principes d’obfervation qui
pourraient être enfuite appliqués aux autres montagnes
du même ordre dans les parties correfpom-
dantes du monde, & en donneraient une idée
claire & diftinéte : cette application , en facilitant
la connoiffance de ces maffes, ferviroit également
à généralifer ces principes.
Direction des arêtes.
Je me fuis occupé à Suivre l’enfemble des arêtes
& des fommets. diceéteurs des vallée-s , depuis la
Franche-Comté jufqu’en Provence, en>parcourant
les Jura &: les Baffes-Alpes. 11 m-’a-paru que leur
allure étoit affujettîe à une direétion qui varioic
depuis l'eft jufqu’au fud : la planche de.Vefoul
nous les offre de l’eft à l’oueft } celles de Dole 6c
de Briançon les préfentent dirigées du nord-eft ail
fud-oueft; Lons-le-Saunier & Nozeroy à peu près
dans la même direétion, mais elles fe redreflent au
fud dans Bourg en Breffe} quelques-unes courent
exaétement au fud, mais d'autres tournent au fud-
eft vers la bordure. La planche de Grenoble nous
les offre dans la direétion du nord au fud , ainfi
que celle de Valence. Il faut remarquer que Fort-
Barraux & Briançon nous donnent des arêtes fous
différens afpeéts, & furtout vers l’eft & le fommet
des Alpes. A Vaifon, les arêtes de la bordure fe
prolongent vers le midi, mais ferment la direction
générale par une allure de l ’oueft à l’eft 5 allure
qui fe continue dans les planches d’Avignon,
d’Embrun & de Digne.
Toutes les arêtes qui viennent enfuite dans les
! planches d’A ix , de Lorgues, de V en ce , d’Antibes
; & de Toulon, courènt vers les mêmes points de
| l’horizon : c ’eft la même difpofition dans le centre
des Alpes & le long de la bordure de la Méditerranée.
Les détails de cet enfemble font véritablement
bien intéreflans, parce qu’ ils nous condui-
fent à un grand fait : il faut y joindre les planches
de Viviers, celles des environs de Montpellier,
de Lodève furtout, & celles des Pyrénées.
Nous en donnerons par la fuite les détails.
Pour appuyer encore les conféquences que nous
ferons autorifés à tirer de ces faits, nous y joindrons
par la fuite l ’hydrographie des mêmes contrées,
diftribuées par planches : ce fera proprement
la contre-partie des arêtes, les eaux courantes
devant naturellement être confidérées comme
un des principaux agens de leur formation.
Coupure des arêtes.
Je trouve dans la planche de Vefoul la longue
chaîne de la montagne d’Aumont, coupée par le
Doubs en plufieurs endroits. D’abord j’y rencontre
une large coupure depuis Danjoux jufqu’ à
Pont-de-Roide, puis-à Clerval, enfuite au village
d'Hyères, plus bas encore à CourTes-Baumes ,
en partie par le Doubs & en partie parle Cufan-
cin, rivière latérale} enfin, la cinquième coupure
eft à Montfaucon. C ’eft furtout au cours tourmenté
du Doubs qu’on doit rapporter ces interruptions
dans les arêtes.
La côte de Vie liez & de Chazelles eft coupée
par la petite rivière de Corcelle, & celle du Taillant
par là rivière de Rongnon. On pourroit a jouxter
plufieurs autres coupures faites par de petits
ruiffeaux d’eaux courantes-} mais on croit devoir
fe borner à ces exemples, comme fuffîfans pour
faire connoître toutes ces formes de terrains, &
furtout les caufes de ces formes dans ces contrées,
qui en général offrent les cours les plus variés
des ruifléaux 3c des rivières, car les ofcillations
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