
l'oueft, comme renfermant de vaftes terrains bas
& plats , coupés par un grand nombre de rivières,
& parfemés de montagnes iiolées ; la fécondé ,
celle qui corrêfpond à la mer occidentale de Californie,
renfermant des terrains élevés, qui font
les royaumes de la Nouvelle-Efpagne, de la Nouvelle
Galice & de la Nouvelle-Bifcaie. Quoique
ces contrées l'oient fort étendues, on ne peut cependant
les comparer avec celles qui, depuis ces
montagnes occidentales, fe prolongent jufqu’à la
chaîne des Apalaches, au-delà du Mijftjfipi, &
depuis la partie orientale des Apalaches jufque vers
l'Océan, le long des côtes de la Nouvelle-Angleterre.
Il eft vrai qu’on ne connoît pas cette partie de
terrains élevés, qui s’étendent jufqu’ à la mer de
Californie; ainfi on ne peut dire à quel point elle
s’élève au deffus du niveau de la mer, ni quelle
eft fa largeur de l’ eft à l’oueft. Il paroît, au refte,
que ces hauts pays font la continuation de l’A mérique
méridionale, & qu’après en avoir occupé
le milieu dans la direction du fud au nord, jufque
près des côtes des Caraques, de Sainte-Marte,
d’une partie du Dariel, ils fe refferrent, fe continuent
dans le royaume de Terre-Ferme, à travers
l’ ifthme de Panama, où iis fe réduifent à une
chaîne étroite de montagnes. En pouffant plus
lo in , dans le royaume de Guatimala, on voit les
terrains prendre une plus grande largeur à me-
fure qu’ils s’élèvent, bc fe continuer ainfi par les
provinces du royaume de la Nouvelle - Efpagne ,
pour fe perdre enfin dans,les pays du nord de cette
partie de l’Amérique feptentrionale , que l’on ne
connoît pas non plus > car on n’y a fait encore aucune
découverte.
En général, on peut dire que, dans cette partie
de l’Amérique feptentrionale , il y a beaucoup
plus de terrains bas que de pays élevés j ce qui
n’a pas lieu dans la partie de l’Amérique méridionale,
malgré les vaftes. plaines qui s’étendent de
Buenos-Àyres au Tucuman, & du côté des grandes
vallées qui reçoivent l’Orenoque, le Maragnon &
les rivières qui fe jettent dans l ’Amazone. Nous
avons fait connoître les contrées élevées, qui dominent
toutes ces plaines dans j Amérique méridionale.
( Voye^ P é r o u , Ma r a g n o n , &c. )
On ne connoît ni l’origine du Mijftjfipi ni le
cours qu’il fuit jufqu’au 43 e. degré de latitude
■ nord 5 mais autant qu’on peut le préfumer des
rapports des nations indiennes, il eft probable
qu’il vient de l’ oueft, & qu’il prend fa fource dans
la chaîne de montagnes qui fe portent vers la mer
au-delà de la Californie. Quoique ces pays ne
foient pas éloignés des provinces de la Nouvelle-
Efpagne , on ne les a encore ni reconnus ni décrits
exa&ement.
Les pays où l’on a le moins pouffe les découvertes
, dans le Pérou, font ies pays plats qui s’étendent
depuis le pied des Cordillières jufqu’à
l ’Océan. Entre ces pays & le Bréfil il y a de vaftes
contrées dont les habitans font des peuples fi barbues
& fi groiiieis, qu’ils n’ont aucune forte de
civiiilation. On connoît, au contraire, les vaftes
plaines de l’Amérique feptentrionale, qui s’étendent
depuis les côtes de l ’Océan, dans la Nouvelle
Angleterre, jufqu’aux montagnes des Apalaches
, puis de là reprennent jufqu’au fleuve Mif-
fijfipi pour aller joindre enfuite les Cordillières de
la partie occidentale. Mais les autres contrées qui
confinent à ces plaines & à la Nouvelle-Angleter-
re , jufqu a la latitude du Canada, ne font pas plus
connues que les plaines du Pérou, qui font entre
l’Orénoque & le Maragnon} & les vaftes contrées
qui font entre ce dernier fleuve & la Rivière
Grande, en fuivant iufqu’à Buenos-Ayres & même
plus loin vers le fua.
Les pays montagneux des Andes de l’Amérique
étoient habités par des nations civilifées à un certain
degré,-lorfqu’on y pénétra pour la première
fois j c eft ce qui en rendit la conquête plus facile.
Mais comme les plaines qui s’étendent depu;s ces
contrées;îà jufqu au Bréfil font habitées par des nations
barbares, c’eft pour cela qu’on n’a pas trouvé
des moyens faciles de les recpnnoïtre & de s’y
établir} en un mot, de former quelques liaifons de
commerce avec elles. Il en eft de même des pays
montagneux qui font au nord : les uns & les autres
relieront dans cet état jufqu’à ce que les millions
portugaifes & efpagnoles, par des progrès infen-
fibles} ouvrent quelques voies de communication,
de manière à connoître le caraétère des habitans
de ces contrées, les animaux, les plantes & les
autres productions du fol & du climat, qui peuvent
intérefler les Européens : enfuite les débouchés
pourroient s’ouvrir de toutes parts, en perfectionnant
la navigation de l’Amazone & des
belles^ & grandes rivières qui fe rendent dans
l’égoût général des eaux de ce vafte pays.
• Température de VAmérique méridionale.
La température de cette bande de terrains bas,
qui s’étend le long de l’Amérique méridionale vers
la mer du fud, mérite d’ être expofée ici avec
toute ^’ exactitude qui convient aux phénomènes
finguliers que l’on y obferve.
On vo it, au fud-eft de Lima & à trente-quatre
lieues & demie de cette capitale, une longue vallée
qui fe prolonge entre deux côtes, & que l’on
connoît fous le nom de las Capillas. Quoiqu’on
n en ait pas fixe la latitude, on peut la déterminer
par celle de Lima, & la fixer ainfi à 13 degrés, à
peu de différence près. En 17^8, le 23 oCtobre,
le thermomètre expofé à l’ air marquoit 11 degrés
18 minutes à deux heures après midi. Il faut ob-
ferver ici deux chofes : premièrement, que le
foleil fe trouvoit prefqu’au zénith de cette con-
trée, paflant au tropique du capricorne } feconde-
ment, que cet endroit eft une vallée bornée par
deux rangs de collines, ou la chaleur eft ordinairement
rement plus forte que dans des pays découverts.
Néanmoins ces obfervations prouvent l’état modéré
de la. température de ç’e.tte contrée.
En >1754* depuis le, ,8 oCtobre jufqu au 23 4 U
même mois, le thermomètre, placé à l’ombre au
hameau de Bellèyue, près des. ruines de Çallao bc
dans une (aile fpacieufe, marqua c.onftamment 11
à 16 degrés à cinq.heures du matin. La plus grande
différence fe trouva d’un degré; (avoir, depuis
onze heures jufqu’à deux heures après midi: cette
différence légère ne vint que déteins, qui fut ,couvert
de nuages., On éprouva prefque tous les joui's
les garuas d’.hiveç };,çés; garuas font des pluies fines
ou pljütôt; (les brumes qui fe réuni fient & fe pré- ,
cipitent. Àl,ors le foleil ne fe montroit que dans
d,tsrin.teryailes ■ très-courts, & refioit découvert
une ou deux heures au plus : enfuite il. fe déroboit
fous les nuages qui couyroient uniformément toute
l’étendue de l’atmofphère. Il eft clair que ce fut
pendant que le foleil fe montroit, qu on fentit
une augmentation de chaleur, & qu’il y eut cette
petite différence.d’un degré au thermomètre.
Depuis le 23. o&obre jufqu’.au y novembre, le
thermomètre monta d’un degré & même d’un degré
& demi dans le moment le plus chaud de la
journée; de forte qu’ à cinq heures du matin il fe
trouvoit à 16 degrés ou 16 degrés & demi , & à
18 ou 18 & demi à :deux heures après midi : l’atmofphère
étoit cependant chargée de nuages éle- ,
vé$: & contigus, qui cachèrent le foleil pendant la
plus grande partie de la journée ; les nuages ne fe
difîipoient que depuis dix heures;ou dix heures &
/ demie, jufqu’à deux heures. & demie après midi,
& l ’on fentoit alors,un certain degré de,chaleur.
Les mois d’octobre bc de novembre font le prin-
tems : on commence même à'ieferijtir dès le mois
de feptembre : cette différence de (aifon vient de
la circonftance où fe:trouve ratmofphère, qui eft
couverte de nuages. Il eft évident qu’il y a pour
lors un voile devant le foleil, qui ne permet pas
à fes rayons de pénétrer jufque fur la terre : cette
obfçurité périmant toute la journée lorfque le
voile ne fe déchire point, il en réfulte le degré de
chaleur qui a été fp.ëcifié, fans qu’aucune autre
eaufe le porte plus haut pendant le jour ou la
nuit. Voilà pourquoi il y a feulement cette petite
différence du matin; car l’ air eft alors plus trais,
relativement à toutes les autres parties du jour. Si
la chaleur fe trouvoit un peu plus grande à las
Capillas, il eft vifible que c’elt parce que cette
vallée eft fermée, & que le thermomètre y eft plus
expofé au foleil.
Nous verrons à l’article de. la Louifiane, que le
printems commence en mars à la Nouvelle-Orléans,
comme dansl’hémifphère feptentrional avril
bc mai font les mois qui correfpondent à ceux dont
il a été queftion à Bellevue & à las Capillas. En
1758, depuis le 20 avril, la chaleur fut de 17 degrés
& au-delà à la Nouvelle-Orléans, vers fix
heures du matin, & de 21 degrés à trois heures
Géographie-Phyjtque. Tome II,
après midi. Le thermomètre y étoit dans la meme
expofition qu’à Bellevue. O r , la Nowvelle-Orleans
fe trouve à i30; degrés & demi, & Bellevue a 12
de grés idelatitu.de' Fu d. La chaleur étoit plus grande
de y degrés à la Nouvelle-Orléans, variant de 4
degrés du matin à midi, avec cette différence que
le foleil fe trouvoit, en avril, à 18 degrés & demi
du zénith de la Nouvelle-Orléans, & en octobre a
I degré & demi feulement de celui de^ Bellevue.
II faut donc néceffairement recourir à ces ob fervations
& à l’expérience pour fe convaincre
d’ujîie difparité fi remarquable r elie paroît en effet
très-contraire à l’ordre régulier de la nature & aux
règles qui s’y trouvent généralement établies. On
peut faire ici cette comparaifon : qu’un homme fe
trouve près d’un grand feu, mais ayant devant lui
un corps interpofé, fans doute if en fera moins
affedté que celui qui en feroit plus éloigné fans
être garanti de fes effets par un fembîable corps.
II en eft de même ici à l’égard des opérations de
la nature : elle interpofe, dans le tems convenab
le , un voile qui empêche les rayons du foleil de
pénétrer jufqu’à la furface de la terre , ou d y faire
une. trop forte imprefiion en modérant ainfi la
chaleur au premier inftant qu’il paffe par le zénith
de cette contrée, faveur que la nature a refufée
aux autres! C ’ eft ainfi que la fage prévoyance de
la nature arrête l’effet régulier des rayoqs du fole
il, dont la projection plus ou moins direéte eft
la'première caufe de la chaleur plus ou moins
grande. Or " comme nous l’avons d it, ce phénomène
a lieu dans toute cette bande de terrains,
bas, qui fe prolongent depuis le 3e. degré de latitude
fud, jufqu’au tropique du même hémifphère,
& même dans toute leur largeur, à peu de différence
près. Après tous ces détails, fi nous paflons
au Pérou, nous verrons la différence qu’ il y. a entre
la température des .hauts Sc bas pays de cette
contrée..On y remarque, dans ces différentes po-
fitions de terrains, des phénomènes auffi finguliers
que ceux dont nous avons parlé. Ainfi l’on verra
que les grands froids de la Nouvelle-Orléa« s font
analogues à ceux qu’on éprouve dans d’autres
contrées à une plus haute latitude, & les mêmes
que ceux du milieu de la zone torride, entre l’équateur
& le tropique du capricorne, tandis qu’au
contraire on éprouve, dans ces mêmes contrées
des chaleurs fi grandes, qu’on eft comme fuffo-
qué. Tous les pores fe dilatent, toutes les forces
s’abattent, & cela dans de fi courts intervalles,
qu’on pourroit les traverser en un jour fans forcer
aucunement la marche. On y a donc prefqu’en
même tems deux températures contraires : de là il
réfuite que les refforts du corps, pafîant rapidement
parles degrés intermédiaires, fe dilatent Ôc
fe reflèrrërit néceffairement pour fe mettre à l’ équilibre
qui leur convient.
Les températures de ces deux contrées oppo-
fées y font.dans les mêmes rapports. Les habitans
j n’y déterminent pas les faifons : voilà pourquoi,