
Sous ces deux couches eft une matière gnfe ,
femblable à du bois foffile, à cette différence près
qu’il n’ y a pas de fibres tranfv.erfales. On trouve
de X ambre jaune partout où Ton rencontre de ce
prétendu bois foffile.
L'ambre jaune fe trouve auffi dans les mon-
-tagnes de la Provence & auprès de 1a ville de
Sifteron, aux environs des villages de Salignac,
fur les côtes de Marfeille. On en a trouvé auffi
dans des couches aux environs de I aon & de
Noyon ; ce qui prouve que c ’ eft à l’époque de la
formation de ces couches qu’il faut remonter,
pour dater de l’origine de ce foffile, comme nous
l ’avons déjà remarqué en Pologne, en'Siléfie, en
Suède, en Danemarck, dans le Jutland & le Holf-
tein, fur les côtes de Samogitie, de Courlande
& de Livonie, & dans l’ intérieur des terres. Mais
l’ambre jaune qui vient de ces pays, n eft ni fi
beau, ni fi pur, ni en auffi grande quantité que
celui qu’on trouve.en Poméranie, depuis Dant-
zick jufeu’à l’île de Rtigen, & furtout en Prulfe,
dans le pays ;appelé Sambie, depuis ÎS’èvetiffjuf-
qu’ à Vrantz-yrug.
On a trouve auffi de l’ambre jaune en Italie,
fur les bords du P ô , daïis la Marche d’Ancône,
dans le duché de Spolette , mais nulle part auni
abondamment & d’auffi belle qualité’ qu’aux en
virons de la ville de Catane & de Girgtmij &
..ce font, ces détails-là ,qùe nous allons .faire con-
jiaître par la fuite.
Boccone , dans .fon Mujeum de 'phyfique ,
décrit, plufieurs endroits où l’on trouve de l’amb
re, & qui ne font pas éloignés, ainfi qu’il Lob-
ferve , de-quelques fources de pétrole .pu de,
naphte. Mais ce qu’ il ajoute, que cette matière
va par des conduits fouterrains jufqu’ à la mer,
où elle fe condenfe & prend une.certaine confif-
tqnçe, n’eft pas également affliré; car, quoique,
l ’ambre fe trouve fur ies bords de la mer où les,
vagues le jettent., il peut être détaché du fond
de fon baffin, où il réfutait auparavant dans l ’état
de bitumé folifte, comme on le trouve au. milieu,
des terres & dans:lésrdépôts de la mer.
Dans.la,yallée de Demoria, l’une dés trois provinces
dans lefqudles la Sicile eft divifée , on
voi.t un .petit canton & un Village appelé Petrolio,
ou rôn 'trouveéde l’huile de nàphte & de pétrole. ;
Voici la manière oh ramaffe cette huile : on |
éconduit dans un réfervôir lés eaux de différentes }
fources.qui3 paflant fur des bitumes liquides, ré-
fidans au milieu de différentes couches dè la terre,
emmènent avec.elles une certaine quantité de ces
fu’oftances huileufes ; & comme ces fubftances
font plus légères que l’eau, elles furnagent, &
forment deffus une couche plus pu moins épaiffe,
qu’ pn enlève avec des éponges tous les matins :
oh les conferve dans de petits ÿafes pour ê tre.
vendus àu^ apothicairés .de la Sicile'.
' , Çes bitumes1 liquidés, difperîés dans tout le
cînwn,dej/e Petrolie^ & que les eaux entraînent
& dépofent dans les puits ou réferv-oirs qu’on y
creufe à cette intention, diffèrent beaucoup tirs
bitumes folides, & furtout d\x fuccin qu’on trouve
feulement dans les couches de la terre & au milieu
des continens, dans un état dur & folide.
C ’cft donc fans fondement qu’on a fuppofé que
l’ambre jaune étoit originairement un bitùYne liquide,
comme le pétrole, & que, conduit dans
la mer par des conduits fouterrains, il y avoitpris
confiftance.par l’effet de l’eau de la mer5 car on
peut dire que l’ambre qui fe trouve au milieu des
terres n’a pas été dans la mer, & que, s’il y a rè-
iïdé lors de la formation des couches, il n’eft pas
certain qu'il n'ait pas eu d’abord une confiftance
folide en coulant de l’arbre qui l'a produit. D’ailleurs,
comme les bitumes liquides fe trouvent au
milieu des mêmes couches où l’on rencontre l’ambre,
il s’enfuit que les bitumes n’ont pas pris confiftance
dans l’ancien baffin de la mer, & n’en ac-
querroient pas plus facilement dans le baffin aétuel.
Quoi qu’il en foit, la mer jette deux fortes d'ambre
s fur les plages de Catane,l’une noire, & l’autre
jaune. La diverfité de ces deux couleurs nous
paroît devoir être attribuée à la différence des
principes bitumineux qui fe font durcis dans le fein
de là terre.
Air fi l’ambre noir paroît provenir d’une efpèçe
de bitume de la nature du jayet, qui fe trouve
d’ailleurs dans quelques montagnes de la Sicile,
fur tou.t à Rcgofa, ville dé h province de Noto-,
d o ù l’ on tire une grande quantité d’ambre noir
&: d’ambre jaune, foffile 3 mais le fuccin noir eft
regardé dans ce canton comme n’ayant aucune valeur,
parce qu’ on n’en fait point d’ ufage.
Ainfi le fuccin que les vagues de la mer jettent
fur fes bords peut venir, ou de l’intérieur des
terres par les eaux torrentielles qui viennent à la
fuite dès orages, ou du' fond du baffin de la mer,
miné .infenfiblement par l’aétion de ces vagues.
Lor (qu’il furvient quelques pluies très-fortes'dans
’.n ie , ce qui a lieu le plus fouvent au commencement
de l’hiver, plufieurs matelots & les gens
du peuple de Catane, furtout les enfans, courent
fur les bords de la mer, dans l’ efpoir fondé
d’y trouver quelques morceaux d’ambre. Ils vont
les chercher dans des monceaux d’algue & autres
matières rejetées & dépefées par les flots fur le
riyagèj c’ t-ft ce que,les Siciliens appellent fpra-
lare 3 du mot prala , qui fighifie plage dans leur
langue. L’ambre qu’on ramaffe ainfi reflemble à
une pierre couverte de rouille 5'mais lorfque cette
croûte eft enlevée, l’ambre paroît intérieurement
d’un jaune de topaze, c’eft-à-dire , d’un jaune
tirant fur le vert.
# On remarque fouvent , dans ces morceaux
d’ambre, différens infeêfes, tels que des fourmis,
des confins , des. fauterelles, des mouches
des araignées. Ces fingularitës s’expliquent ai-
fément, en confidérant que ces animaux ont,pu
être facilement empâtés par le bitume qui cfécoûtait
des • arbres auto.ir defquels ils ' volti-
geoient.
Les morceaux d’ambre qu’on trouve fur les rivages
de la Sicile font ordinairement d?un très-
petit volume & au défions du poids d ’une once-,
& on n’ en ramaffe guère du poids de trois onces,
& ceux qui pèfent une livre font très-rares.
Les payfanes des environs de Catane, & celles
qui habitent les villages qui font en grand nombre
fur les croupes de l'Etna, ont coutume',
d’après un ufage antique, de fe parer avec des
colliers faits de gros grains d’ambre. Plufieurs ouvriers
de Catane favent, par leur induftrie, mettre
à profit ce don de la nature, & le travaillent
dans une grande perfection j auffi s’occupent-ils
très-peu à envoyer au dehors cette matière, puisqu'ils
en trouvent le débit fer les lieux.
L’ambre fe façonne fur le tour comme l ’ivoire, &
l’ on en fait différens ouvrages, différens ornemens
pour femmes, des bijoux, des tabatières, des boîtes
de montres, des pommeaux d’épées, de cannes,
des boutons de veites, de manches, & furtout des
boucles d’oreilles pour les dames, ou des amulettes
en forme de coeur, qu’on fait porter aux
enfans. On finit par donner le poli à. tous ces ouvrages
avec la pierre-ponce pulvérifée & humectée,,
& enfin leur dernier luftre avec de l’huile &
de la potée d’étain.
On a trouvé en ié8o> dans un retranchement
voifin des po.tes de Virtemberg, plufieurs morceaux
de fuccin de différentes grofleurs 3 les uns
avoient une belle couleur d’o r 3 celle des autres
étoit plus pâle : quelques-autres offroient une teinte
brunâtre 5, mais tous reflembloient parfaitement
au fuccin de Pruffe 1 ils répàndoient, outre cela,
la même odeur lorfqu’on en jetoit des fragmens
fur les charbons ardens-Cette fubftance étoit renfermée
dans une terre légère & affez femblable
au fable mouvant. On rencontra d’ailleurs dans les
environs un bitume fous forme concrète, du charbon
de terre & du jayet, lequel reffembloit beaucoup
à du fuccin qui auroit éprouvé une légère
aélion du feu.
Bartholîn nous apprend qu’en creufant les foflfés
neufs de la ville de- Copenhague, on trouva de
même plufieurs morceaux de fuccin de diverfes
grofleurs , adhérens à des fragmens d’écorce :
quelques autres fragmens auxquels le füccin adhé-
ro it , étoient noircis de manière à offrir toute
l’apparence d’un bitume ou d’un ambre noir.
Le même auteur nous inftruit qu’on rencontre
de petits morceaux de fuccin dans les montagnes
de la Zélande, & qu’un payfan, en labourant la
terre à Tigeftrup, déterra avec le foc de la charue
un morceau de fuccin fort gros.
Tout paroît prouver, ajoute Bartholin^ que le
fuccin a été d’abord une fubftance molle, i° . parce
qu’on rencontre quelquefois des morceaux de
fuccin flexibles j 2°. parce qu’on v o it, dans plusieurs,
des gouttes d’eau qui flottent ) 3°. parce
qu’ ils renferment des infëétes bkn confervés &:
caiaétérifés, &c.
Outre les différentes contrées d’Europe que
nous avons citées, & dans lelqueilts fe trouve
le fuccin ou l'ambre jaune au milieu de couches
horizontales , ce qui prouve que ce foffile fait
parue des dépôts de la mer, nous devons faire
mention de deux gîtes de tette fubftance j qu’on
a découverts dans les contrées méridionale^
de la France. MM. Caffini & Mzrâldi l’ont'rencontré
près de Bugarach, dans l’ancien diocèfe
d’Alet üc dans lin éloignement de la mer, de vingt-
fept mille fix cents toiles. Les habitans fe fervent
de cet ambre jaune pour brûler dans leur lampe j
auffi reflemble - t - il aflèz à une réfine un peu
molle, & n'a pas la même dureté <fue le fuccin
de Prufiè.
Le fécond gîte s’ eft trouvé dans les rc chers de
Provence ,des plus dépouillés & les plus ftériles.
On y a recueilli des morceaux d’ambre jaune-,
& l’ on a annoncé cette première découverte dans
les Mémoires de VAcadémie des fciencés pour
l’annee 1700. On jeta pour lors quelques doutes
fur l’origine végétale du fuccin, parce qu’il fe
rencontjoit au milieu, des rochers ftériles. Mais
ce qu’on nous apprend d’ailleurs me femble rectifier.
cette mépiilè, en annonçant que le fuccin
trouvé fur le bord de la mer à Marleiüe avoitété
détaché des rochers que les flots battoient dans
les gros tems^Ôc- qu’il y étoit dans les mêmes cir-
çonttanees que le fuccin de Pruffe qu’on ramaffe
fur les bords de la mer Baltique, à quelque distance
de Dantzick.
^ Nous dirons auffi qu’on a obfervé le fuccin dans
File de C o r lè , aux environs de Boulogne en Ital
ie , vers Ancône dans l’Ombrie, au milieu des
terres &: fort loin de la mer.
M. le marquis de Bonnac affuroit à l’Académie
avoir vu lui-même ( voyeç en 1705) en Suède,
fort loin de la mer, de l ’ambee jaune, . femblable
à celui qu'on ramaffe le long de fes bords.
Tous ces faits lemblent décider que c’eft une
fubftance foffile qu’on tire des couches de la
terre, & quLne peut être une production de la
mer.
Mais comment cette fubftance eft-elle engagée
dans l ’intérieur des couches de la terre, fi ces
couches font le produit des dépôts formés dans
le baffin de la mer?-
Celui qu’on tire de la mer eft certainement de
la même nature que celui qu’on tire^ des côtes &
des couches de l’ intérieur des terres 5 c’eft donc
par la deftruCtion des couches qui fervent de lit
à la mer le long de fes cô te s , que le fuccin eft
dans la mer par accident.
S i, comme le difent Hartman dans fon Hiftoire
du fuccin de Pruffe, & Bartholin dans celui de
Danemarck,.le fuccin fe trouve mêlé à des écorces
d’arbres & à des fragmens de hois, ces circonstances
femblent décider que fon origine eft-végé*-