
matières hétérogènes, il eft vifiblé qu'il ne peut
y avoir aucune diftinétion de lits ou de couches.
On n’a pas encore déterminé par des obiervations
bien exadtes la nature & le progrès de tous les
atterrijfemens qui fe forment à l'embouchure des
rivières & le long des côtes de la mer , ni toutes
les circonftances qui concourent à leur formation.
Pour jeter du jour fur cette matière importante,
nous allons d'abord parcourir quelques-unes de
ces circonftances, & nous expoferons enfuite les
phénomènes principaux que nous ont préfentés
certaines embouchures He rivières , certaines côv
tes , jufqu’à ce que nous les décrivions elles-mêmes
à leurs articles particuliers.
Nous. remarquerons d'abord que ces atterrijfe-
mens des embouchures des fleuves ne s'opèrent
& ne fe prolongent qu’autant que la pente ^du lie
du fleuve y diminue, & que cette embouchure
préfente jufqu'à la mer un plan incliné fort doux.
Il eft donc nécelfaire que les bords du fleuve
foient bas, & qu'ils préfentent à l ’eau qui déborde
, un débouché facile*&: une large plaine,
où elle-puifie s'étendre & jouir d'un certain repos
qui favorife les fédimens..
C'eft dans ces mêmes circonflances que les
fleuves charient dans la mer iine immenfe quantité
de cailloux roulés, de graviers , de fables üc
jde terres vafeufes : il eft vrai qu'une certaine portion
de ces matériaux.s'arrête plus- abondamment
à leurs embouchures, pendant qu'il en pénètre
peu dans la mer , où d’autres,matériaux font entraînés
& rejetés fur lesxôtes en bien plus grande
quantité.
.Outre cela ces dépôts, produits par les courans
de la mer & par fes flots fur les côtes , font plus
abondans près des embouchures des fleuves qu'à
une certaine diftance, où il en parvient beaucoup
-moins. Ainfi, lorfqu’il y a plufieurs embouchures
de fleuves ou rivière sdans ces circonftances les
dépôts forment une fuite de plages qui fe continuent
fans grande interruption le long des côtes,
& qui mafquent les anciennes. -
D'un autre c ô té , il eft nécelfaire que les côtes
de la mer foient baftés, & qu’elles-préfentçnt à
l'action des vagues & à la marche des fables , des
pentes douces & continues depuis le bord des
touches primicives jufqu'à l'endroit qui reçoit les
dépôts & où s'établit la plage , car il eft impofli-
ble que ces dépôts s'accumulent le long des falai-
fes & des autres bords de la mer fort élevés.
Atterrijfemens des deux bordures de terres qui accompagnent
F Apennin dans toute fa longueur, & jufqu
'aux deux mers; . • ;
11 eft aifé de voir en fuivant le cours des eaux
qui fediftribuenr furies deux pentes de la chaîne
de l’Apennin , que les atterrijfemens ne fort bien
fénfibles que versies embouchures des rivières
«b peu c o a fid e r â b le sd o ^ j t .le cours eft allez
étendu. On diftingue d’abord ceux qui fe trouvent
vers l’embouchure du P ô , & qui s'étendent
d’un côté jufqu'à Ancône, & de l'autre jufqu’aux
lagunes de Venife. *
La côte occidentale de l’ Italie ne préfente point
d’atterrijfement de cette étendue : outre que les
montagnes font plus voifines de la mer, les rivières
qui en defeendent, ont à leur embouchure
trop de rapidité pour y laiffer des dépôts un peu
étendus. La mer, extrêmement profonde lin- ces
rivages, la plupart efearpés, demande bien des
fié clés avant d'être’ comblée au deffus des eaux :
il y a cependant fur cette côte deux à trois embouchures
, où le terrain paroîc être le réfultat de
plufieurs atterrijfemens prolongés j celle de la Me-
gra, où tout un golfe affez profond eft comblé ;
celle de l'Arno, où la vallée de ce fleuve êft de
nouvelle formation prefque jufqu'à Pife, enfin,
l'embouchure du Tibre, qui offre des atterrijfemens
bien marqués aux environs d'Oftie & des marais
Pon tins , fans parler du Garigiiano.
Afiieurs, ce font des accroiifemens du terrain
& du fond de la mer formés par d’autres caufes,
mais aufli dignes de remarque aux yeux d'un natu-
ralifte. Ces accroiifemens du terrain ne viennent
pas de l'intérieur des terres, comme ceux dont je
viens de faire.mention, mais des. productions de
la mer. Les coraux & les coquillages s’attachent
aux rochers du fond de la mer , les augmentent
les étendent d'une manière fenfible, &, plus
prompte qu'on ne pourroit le croire.. On peut s'en
alfurer furtout au port de Livourne , où les gros
quartiers de rochers que Ton détache du bord de
la mer auprès du lazaret, pour en former I j f
jetées qui défendent le môle de l’efforc des vagues
, paroiffent avoir été aifez récemment formés
de cette manière.
Atterrijfemens en Sicile.
, Il feroit facile de citer plufieurs exemples encore
plus fvappans que ceux qui précèdent. Il y a
près de Palerme une vallée bornee au nord par le
mont Pellegrino, connu des Anciens lous le nom
d’Ereta ; au midi font des montagnes liées avec,
celles qui s’étendent à Mont-Réal : cette vallée
eft percée' du levant au couchant, & aboutit à la
mer par fes deux extrémités.fa longueur totale
eft de quatre à cinq lieues. Les maflils de montagnes,
qui le bordent , font d'un roc gris calcaire,
à grain fin & ferré, femblable à celui des Apennins
, renfermant peu de corps marins pétrifiés Sè
çonfervési mais le fond de la vallée eft-un Jiratum
forme d’une pierre de toute autre nature, & qui
prefente tous les indices d'une formation postérieure.
à celle dés montagnes dont je viens de par-
,1er. C'eft un amas de villes, de buccins, d e co -
raux , precifément les mêmes dont on trouve;k s
analogues dans la mer voifihe. Tous ces différens
{corps font alftz bien confervés dans certaines
parties, & en général iis ne font - nulle part
complètement
complètement pétrifiés : il refte entr'eux des in-
terftices qui pourront fe remplir à la longue par
les dépôts des infiltrations, à en juger par ceux
des eaux infiltrantes, qui en onc déjà foudé &
rempli une partie, en forte que la pierre qui ré-
fulte de ce travail imparfait de la pétrification eft
tendre & poreufe. Ce Jiratum a donc été formé
par l'adhérence fucceflive des coraux & des coquillages
qui ont comblé en partie l’intervalle
des montagnes qui bordoient la vallée lorfqué la
mer occupoit ce détroit j & au moyen du dépôt
formé pendant fon féjour, le mont Ereta, par fa
retraite, s’eft trouvé lié à la Sicile, & a celle
d’être une île.
Un grand nombre de maffifs calcaires qu'on
rencontre dans les îles & dans les parties des con-
tinens qui font voifines de la mer actuelle, paroiffent
s'être formés à peu près de la même ma- !
nière, & probablement à la même époque : outre
cela, on peut s'affurer qu'il fe forme ainfi continuellement
de nouveaux rochers calcaires fur le
bord de certaines parties de la mer.
Je crois devoir joindre à ces faits ce que
M. Linnæus rapporte, qu'il a vu le long de la
Baltique des bancs très-épais & très-étendus, entièrement
compofés de coraux. ( Oratio de necef-
Jitate peregrinationis intra patriam. )
Tous les voyageurs attellent que le fond de la
Mer-Rouge eft couvert de coraux & d’autres coquillages
i & combien de fois les marins ne rapportent
ils pas dans leurs journaux, qu'ils ont fondé
fur des fonds de coraux & de coquillages!
On auroit tort de conclure de tous ces faits
réunis, q ue, parla formation de ces bancs de
madrépores, de coraux, de coquillages, il fe con-
fomme une quantité affez confidérable d’eau de
la mer pour influer fenfiblement fur la diminution
qu’elle a éprouvée depuis les tems les plus
reculés j car quoique la matière des coraux & des
coquillages foit une fubllance calcaire qui renferme
plus que la moitié de fon poids d’eau &
d’air, qui ne peuvent plus fe dégager que par fa
décompofition, il ne s'enfuit pas que les mâffifs
aient pu employer toute la quantité d’eau nécef-
fairé pour remplir le baflîn de la mer jufqu'au niveau
où cette eau s'eft élevée fur les continens,
& où elle a laiffé des dépôts. Ainfi cette caufe,
quelqu'aélive qu'on la fuppofe, quelle qu'ait été
l'étendue des atterrijfemens formes de cette manière
, ne peut être confidérée comme ayant contribué
à la diminution de l'eau de la mer en aucune
fo r te , comme l'ont cru quelques natura-
liftes hypothétiques. L'on doit donc avoir.recours
à d’autres moyens dans la nature, fi l ’on tente de
donner une explication raifonnable de cette diminution
ou du moins de la retraite de la mer j mais :
nçus renvoyons pour plus grands éclairciffe.mens
fur ces dépôts immenfes qu'on rencontre autour
de certaines îles de la bande équinoxiale du grand
Océan, aux articles de ces îles , où toutes les cir-*
v Géographie-P kyjîque. Tome IJ.
confiances de leurs difpofitions Sc de leurs accroif-
femens feront développées d'après les obfervations
de Cook & de Forfter.
A T T IG N Y , ville du département des Ardennes
, arrondiffemenc de Vouziers, & fi tuée fur
la rivière d'Aifne. Elle eft au centre d'une large
plaine, au milieu de laquelle l ’Aifne, qui a coulé
dans la direction du fud au nord, éprouve un détour
de l’eft à l ’oueft. C'eft dans cette plaine, qui
s’étend depuis Rilly-aux-Oies jufqu’à Réthel, que
cette rivière ofcille au milieu des dépôts qu'elle
y a formés, & où régnent de grandes prairies a;-
rofées, tant par la rivière d'Aifne, que par plufieurs
ruiffeaux latéraux, qui concourent à faire
de cette vallée un féjour délicieux. Quelques-.
uns de nos rois y ont habité, & plufieurs propriétaires
y réfident avec une grande prédileétion
[ fur les environs.
"AUBE. Ce département a pris fon nom de fa
principale rivière : fes autres rivières , outre
l’Aube & la Seine, font la Voire, la Barfe, la
Blaife 8c la Vanne j & fes forêts, celles d'Au-
mont ^ d ’Orient près Pinay, de Soulaines, de
Dienville, de Chaource & de Clervaux. Quelques
uns de fes cantons font d’ailleurs remplis de
bouquets de bois & d’étangs. Nous renvoyons à
l’article A r g i l e pour faire connoître les lits d e
cette matière, qui accompagnent la filière orientale ■
de la craie, laquelle s’y prolonge dans une grande
étendue : c'eft aulfi dans une bordure à peu près <
parallèle que l’on peut fuivre l’amas des cornes-
d’ ammon, des bélemnites, des nautilites & des
, huîtres > qui commence au Morvan , & fe continue
par Tonnerre, Chaource, Fouchères, Van-
doeuvre, Ecîance, Soulaines & Vaffy. Je ne puis
d'ailleurs préfenter un certain enfembie fur l'é ta t .
phyfique de ce département, qu'en réunifiant les
deferiptions raifonnées des environs de Troyes ,
de Bar-fur-Aube , de Soulaines, de Vandoeuvre ,
de Brienne-le-Château , de Pinay, d’Arcy-fur- ï
Aube & de Nogent-fur-Seine. Ce font tous ces ■
détails qu'il faudra rapprocher pour établir la
géograpnie-phyfique de ce département. En at- ■
tendant le développement de ces objets d’hiftoire
naturelle, nous allons en donner une ébauche:
dans la defeription du cours de la rivière d'Aube,
qui le traverfe principalement du midi au nord-
oueft.
A u b e , rivière qui prend fa fource dans le dé-
>artement de la Haute-Marne, à deux lieues d'Au-
>erive} elle a fa première dire&ion au nord, pafle
à Auberive, arrofe la Ferté, Clervaux, Bar-fqr-
Aube, Dienville, tourne à l'oueft, paffe à Arcy-
fur-Aube, à Plancy , à Anglure , & va fe rendre
à la Seine après-un cours de quarante lieues. On
voit par ces details, que VAube eft une rivière
fecondaire du bafiin général de la Seine j cepen-.
Q q q q q