
Après avoir brifé ces-pierres en gros tnoëlons} :
on les alfemble dans un fourneau l'emblable à nos j
fourneaux à chaux, & on les y fait calciner pendant
douze à quatorze heures. On retire du fourneau
les pierres calcinées, & on en fait plufieurs
tas dans une grande aire : les tas n'y font pas élevés
j on les fépare les uns des autres par un foffé
rempli d'eau : cette eau fert à humeéter les tas
trois ou quatre fois par jpur pendant l'efpace de
quarante jours, jufqu'à ce que la pierre fe décom-
pofe, fe dél te & fe couvre d'une efflorefcence
d'une couleur rouge} alors on met ce réfidu dans
des chaudières pleines d'eau que l'on fait bouillir
pendant quelque tems pour faire fondre le fe l}
enfuite on rranfvafe l'eau imprégnée de fe l, & on
Ja fait bouillir pour la réduire à un certain degré,
& fur le champ on la fait couler toute chaude
dans des vaiffeaux de bois de chêne : l'alun fe
criftallife en huit jours dans ces vaiffeaux} il fe
forme fur leurs parois une croûte de quatre à cinq
doigts d’épaiffcur, compofée de criftaux tranfpa-
rens & d'un rouge pâle : c'eft ce qu'on appelle
alun de roche.
Il y a auffi en Italie une autre mine d'alun à
une demi-lieue de Pouzzole , dans le voifinage de
Naples : elle fe trouve dans la Solfatare. On voit
dans cet endroit de la fumée pendant le jour &
des flammes pendant la nuit : ces exhalaifons forcent
d une foffe longue de quinze Cents pieds &
large de mijle :. on en tire beaucoup de. .foufre 8c
d'alun. L'alun paroït fur.la terre en efflorefcence:
on ramaffe chaque jour cette efflorefcence avec
des balais, & on la jette dans des foffés remplis
d'eau, jufqu'à ce que l’eau foit fuffifamment chargée
de. ce lelj alors on la filtre, & enfuite on la
.verfe dans des vaiffeaux de plomb qui font; enfonr
•çé$ dans la terre* A près i que la chaleur fouter-
raine, qui eft coqfidérable dans ce lieu, a fait
évaporei une partie de l'eau, on filtre de nouveau
le réfidu, 8c on le verfe dans des vaiffeaux de
^oisj. ja. liqueur s’y refroidit & l'alun s'y criltal-
life.,Les criftaux de ce fel font blancs & tianf-
parens. 5
.• .Oh trouve auffi dans la folfatare des pierres
dures, qui contiennent également de l ’alun : on
fbs travaille de la même ma bière que celles de la j
Toi fa. ;
^ Les mines d’ alun d’Angleterre,, qui fe trouvent
dans les provinces d ’Yorck & de Lancaftre, font
dans des pierres bleuâtres, affez femblables à i’ar-
doife;: ces pierres, contiennent îauffi beaucoup de
foufre } c’eft une efpèce de pyrite qui s'enflamme
au.feu & s'effleurit à l’a ir:.on pourvoit retirer
du vitriol de Ton efflorefcence. On fait des tas dé
cette pierre, 8c on y met le feu pour faire évaporer
le foufre qu’elle .contient : ; le .feu s'éteint
de lui-même après.; çette combuftion ; alors on
met en digeftion .dans l'eau la pierre calcinée,, en-
fuite on tranfvafe dans des ,chaudières de plomb
i ’e?u chargée d ’alun... On fait .bouilli* Gétce-eau <
avec une leffive d'algue marine, jufqu'à ce qu'elle
foit réduite à un certain degré d'évaporation }
alors on y verfe une affez grande quantité d'urine
pour précipiter au fond du vaiffeau le foufre, le
vitriol & les autres matières étrangères à l’alun ;
enfuite on dépofe la liqueur dans des baquets de
fapin} peu à peu l’alun le criftallife & s’attache aux
parois des vaiffeaux : on l'en retire en criftaux
blancs 8c tranfparens, que l'on fait fondre fur le
feu dans des cnaudières de fer. Lorfque l'alun eft
en fufion dans des tonneaux, il s'y. refroidit, & y
forme des maffes qui prennent la figure du tonneau
qui lui fert de moule. On a auffi appelé cet
alun alun de roche,,parce qu’il eft en grandes malfeîj,
ou parce qu'il eft tiré d'une pierre, comme l’alun
de la T o lfa , quoiqu’elle ne foit pas femblable.
Dans les mines d'alun d'Angleterre on fait couler
fur les pierres alumineufes une eau claire d’un
goût ftyptique : on retire auffi l ’alun de cette eau
en la faifant évaporer.
On trouve en Suède une forte de fubftance
dont on peut tirer de,l'alun, du vitriol & du
foufre 5 c'eft une belle pyrite fort pefante & fort
dure, d'une couleur d’o r , brillante, avec des taches
de couleur d'argent. On fait chauffer cette
pierre, & on l’arrofe avec de l'eau froide pour
la fairé fendre 8c éclater ; enfuite on la caffe àifé-
ment : on met les,morceaux de cette pierre dans
des vaiffeaux convenables fur un fourneau de réverbère.
Le foufre que contient la pierre fe fond,
& coule dans des récipiens pleins d'eau. Lorfqu'il
ne tombe plus rien, on retire la matière qui relie
dans les vaiffeaux, Sc on l’expôfe à l’air pendant
deux ans} en cet état elle fe réduit en cendres bleuâtres
dont on peut retirer du vitriol par les lotions}
les évaporations & les criftallifations. Lorfque le
vitriol, eft criftallife, il refte.1 une eau craffe 8c
épaiffe que l'on fait bouillir avec une huitième
partie d'urine 8c de leflive de cendres de bois ;
! il fe précipite au fond du vaiffeau beaucoup; de
fédiment rouge & groflîer : on filtre la liqueur,
on la fait évaporer jufqu’à un certain degré de
concentration} enfuite il s'y forme des criftaux
d'alun bien tranfparens, que l'on appelle alun de
Suèdes . [»rièiq
A Cypfele en Thrace on obtient de l’alun: en
faifant calciner lentement des marcaffites, 8c en
lcs-faifant enfuite diffoudre à l'air par la rofée &
les pluies} après quoi on les fait- bouillir dans l'eau,
8c on laiffe criftallifer le fel.
IJ y a une mine d’alun fort abondante à trois lieue*
de Liege 8c a déux lieues de Huy. Les-montagnes
des environs,de la mine de Datjge ( voye\ce mot )
font couvertes de bois de plufieurs efpèces. Les
terres rapportent des grains de plufieurs natures}
& donnentdu vin:l'eau des fontaines eft légère. La
pierre des rochers eft d'un gris bleu ’célefte : elle
a le grain dur & fin} elle eft calcaire. C'eft derrière
ces rochers qu’on trouve les bures pour le
Toufre , l’alun,, le vitriol, le^plomb & le cuivre.
Plu*
Plus on s*enfonce dans les profondeurs, plus les
matières font belles : on y defcend quelquefois
jufqu’ à quatre-vingts toifes $ on fuit les veines de
rochers en rochers. On rencontre de très-beaux
minéraux, quelquefois du criftal. Il fort de ces
mines une vapeur qui produit des effets furpre-
nans. Trois hommes commencent une bure : ils
tirent les terres} les autres les étançonnent avec
des perches coupées en deux. Quand le percemènt-"
eft pouffé jufqu'à une certaine profondeur, on
place à fon entrée un tour avec lequel on tire les
terres au moyen d’un panier. Six hommes font
occupés à tirer le panier, trois d'un côté du tour,
& trois de l’autre. Un brouetteur reçoit les terres
au fortir du panier, & les emmène ail tas. Quand
on eft parvenu à cinquante pieds de profondeur,
les femmes , occupées au tour, tirent jufqu'à
deux cents paniers en huit heures. A dix pieds on
commence à rencontrer de la mine qu’on néglige:
on ne commence à mettre à part & à recueillir
que celle qui fe trouve à vingt & vingt-cinq pieds.
Quand on la trouve de bonne qualité on la fuit
par des routes fouterraines qu’on fe fraie à mefure
que fe fait l'exrra&ion. On étançonne toutes ces
routes avec des morceaux de bois, qui ont fix
pouces d'équarriffage fur fix pieds de haut : on
place ces étais à fix pieds les uns des autres fur les
côtés : on garnit le haut de petits morceaux de
bois 8c de fafcines. Quand les ouvriers craignent
de rencontrer l'eau ils remontent leurs galeries}
mais s'il arrive qu'on ne puiffe éviter l'eau, on
pratique un petit canal fouterrain qui conduife les
eaux dans une bure qui a quatre-vingt-dix pieds
die profondeur, & qui eft au niveau des eaux.
C'eft de cette bure qu'on l'en retire avec des
pompes.
. On jette le minéral qui contient l’alun, dans de
gros tas qui ont vingt pieds en hauteur fur foixanre
en carré. On le laifïe en cet état pendant deux
ans} au bout de ce tems on en fait de nouveaux
amas pour y mettre le feu : ces amas font conftruits
de manière qu'il y a un lit de fagots 8c un lit de
minéral : on a foin de donner de l’air à Ces amas
dans les. endroits où l’on s’apperçoit qu'ils ne
brûlent pas également. Nous renvoyons au mot
Daugb les principaux procédés de la purification
de ce fel.
ALYRE ( Fontaine de Saint- ). Cette fource
d’eau aérienne, martiale, chaudë, fe trouve dans
un des faubourgs de Clermont - Ferrand , ville
principale de la ci-devant province d’Auvergne,
département du Puy-de-Dôme; elle fort d’une
pierre de fable infiltrée : il en eft de même des
fources de Saint-Mars & de la porté de Jodde.
Cette eau, chargée d’une terre calcaire, martiale,
abondante, quelle entraîne, la laifle précipiter
dans les parties voifines de fa fource, à
mefure qu’elle fe refroidit. C'eft à caufe de l’abondance
5c de la fingularité de fes dépôts, que nous
Géographie-Phyjtque. Tome 11.
nous en occuperons ici. Comme elle fourdit dans
un point un peu élevé fur les bords d’un ruiffeau,
8c qu’elle incrufte le fond de fon li t , elle a formé
un mur de plus de cent toifes de longueur fur une
largeur de dix .à douze pieds, 8c fur quinze à
vingt pieds de hauteur. C ’eft par le prolongement
fucceflif de toutes les dimenfiôns de ce mur, qu'il
eft réfulté de ce travail fingulier de l'eau une
voûte, fous laquelle 'coule un ruiffeau qui fait
tourner deux moulins : cette voûte eft confolidée
de manière à préfenter un pont fur lequel on paffe
fort aifément, au moyen de degrés taillés fur les
deux extrémités, & qui en facilitent la montée
& la defcente.
Dans l'examen que j’ai fait de tous les dépôts
formés en différens tems par les eaux de cette
fontainey j'ai remarqué que l’eau, qui fort tiède
de la fource, donne , à mefure qu'elle s’en éloigne
& qu'elle fe refroidit, des fédimens plus
abondans, & que c'eft ainfi que les dimenfions
du mur, relativement à fa hauteur, ont augmenté
de manière à combler le vide de la pente que
l'eau a rencontrée entre la fource 8c le ruiffeau ;
20. q ue, dans le voifinage du ruiffeau & fur fes
bords , l'augmentation des incruftations eft plus
fenfible, parce que l'eau, ayant moins de pente
que dans le milieu du mur, y a féjourné davantage.
Outre cela cette ea u , ayant éprouvé plufieurs
chutes verticales le long des bords du ruiffeau,
les a garnis de filets de ftalaâites fort nombreux ,
parce que ces chutes ont favorifé l'évaporation
de l'eau & les précipités qui en font la fuite. C'eft
par la réunion de toutes ces circonftances , que
tous les principes terreux dont l'eau eft chargée,
fe font attaches à tous les corps folides qu'elle
a rencontrés aux environs du ruiffeau , comme
morceaux de bois, plantes, murailles, 8cc. ; &
comme ces fédimens ont trouvé l'eau courante
du ruiffeau , ils s’y font arrêtés 8c portés naturellement
d’un bord à l’autre, fur-tout fur les deux
faces de l’extrémité du mur , à mefure qu’elle
débordoit fur le canal du ruiffeau. C'eft ainfi que
les deux bords élevés du canal offrent des efpèces
de pilaftres ou colonnes, affez femblables à ceux
qu'on obferve dans les grotes.
Si l'on fuppofe maintenant que les colonnes ou
pilaftres établis fur les premiers bords du ruiffeau,
& les incruftations qui ont continué, tant fur le
fommet du mur que fur les côtés, fe foient trouvées
à environ vingt pieds d’élévation au deffus du
niveau de l’eau du ruiffeau , elles auront atteint
le fécond bord, 8c y auront formé des 'colonnes
ou des pilaftres très-propres à foutenir folidement
les parties de l’ incruftation, quiétoient plus élevées
qu’elle. C ’eft ainfi que la fécondé culée du
pont a pris naiffance avec la partie de la voûte
qui s’achevoit. Il eft aifé maintenant de concevoir
comment ce travail de l'eau, parvenu au point
; où nous l'avon? conduit, fe fera confolidé de
X t