
analvfe -nette & précife. L'Hiftoire naturelle , !
ainè que THiftoire civile, a dans fes monumens
un grand nombre à’kyérogliphes dont nous n avons
plus le dénoûment, mais qui nous dénotent toujours
une antiquité que lés hommes peuvent foup-
çonner.
Si nous voulions faire ici quelques recherches
fur la durée de ces continens qui ne font plus , fur
l'époque de leur exiftence, fur celle de leur def-
truélion , ce feroit une entreprife fort hafardeufe.
11 faudroit d'abord néceffairementreconnoître, &
jè ne vois pas qu'il y eût en cela d alternative ,
quelles difpofitions de ces anciens continens qui
ont précédé ceux que nous habitons^, doivent
avoir eu pour date l'apparition des nôtres , qui
eft cenfée connue ; mais il n'en eft pas de même
de leurs commencemens, que nous ne pouvons
fixer. Quant à leur durée, nous avons tout lieu
de foupçonner qu'ils ont fubfifte pour 1® moins
auflfi long-tems que les nôtres } & s’il étoit poffi-
ble de connokre à quelle profondeur les lits &
les bancs de la terre s'étendent fous nos pieds,
comme il eft facile de mefureF leur élévation au
de (Tus de nos têtes, notre certitude augmenteroit
infiniment. Cf s fuites de lits ne nous donneraient
pas , à la vérité, des époques précifes, mais ils
nous apprendroient & nous confirmeroient de
plus en plus que nos continens , avant d'être habitables,
ayant été deffous les mers pendant des
âges très-longs r~la durée des plus anciens qui les
environnoient, a voit été encore plus confîderable.
Tels font les principaux-faits que nous avons pu
déduire de la comparaifon des temps ; mais lorsqu'il
eft queftion de leurs révolutions & des vicif-
fitudes qui les ont précédées, tout fe plonge pour
nous dans la nuit la plus obfcure.
Ce doit être-fans doute une grande fatisfa&ion
pour un hiftorien, 8c même un adouciffement
dans fqs travaux littéraires, que d’ être en état de
ranger dans un ordre net & fuivi les faits qu'il a
mis beaucoup de te ms à débrouiller & à concilier,
& d'avoir pu trouver les tems propres à les plac
e r , ainfi que les'anecdotes qu'il a recueillies de
tous côtés. Mais c ’eft une fatisfa&ion dont l'hifto-
rien dé la nature ne peut fe flatter de jouir, puif-
que des faits vrais 8c conftans qu'il découvre
chaque jour, fe perdent pour lui dans de grands
efpaces de tems, & qu'il ne pourra vraifemblable-
ment faifir des époques certaines pour les nouveaux
réfultats de fes obfervatigns & de fes recherches.
L'analyfe d’un compofé d oit, ce femble, conduire
à un réfultat plus fimple } c’eft cependant à
quoi nous n'avons pas pu parvenir par celle que
nous avons adoptée. Nous n’avons découvert dans
les produits naturels, que les réfultats des opérations
fucceflives, mais femblables j 8c à l’égard
des divers compofés, le dernier terme où notre
analyfe a pu nous mener, ne diffère en rien du premier.
C ’eft toujours une matière également compofée
& également fufceptible de la décompofi-
tion. Nous n’y avons vu enfin , pour dernier terme
, que ce qui paroît encore avoir été précédé
d’ une infinité d’ autres. On trouve conftamment
des mélanges de criltaux, de fables, de Tablons,
de cailloux, de graviers, de pierres, de^ craies,
de glaifes, de débris d'animaux, de végétaux 8c
de minéraux de toutes natures. On rencontre les
mêmes difpolitiôns daris toutes les parties d un
tou t, quoique chacune d’elles fe préfente fous
divers afpeéts : toujours des bancs & des lits }
toujours des golfes, des mers 8c des parties de
continens > toujours des effets d’une organifation
fucceflive, lente, & femblable à celles qui fe forment
fous nos yeux ; toujours enfin les mêmes caractères,
& par conféquent aùfli la même nature.
Tout ceci doit nous porter à croire que tant que
nos analyfes ne nous éloigneront pas plus des matières
8c des formes que nous connoiffons, 8c ne
nous les offriront pas plus fimples dans leur nature
8c dans leur arrangement, telles qu’ elles ont dû
être certainement lorfque les principes de l’ or-
j ganifation primitive n’ont été que peu ou point
mélangés î tout ce c i, dis-je, doit nous porter à
croire que nous fommes infiniment éloignés du
premier terme 8c de la première époque de toutes
chofes.
Cependant, dira-t-on , fi tout ce qui exifte de
plus entier fur la terre n’annonce que des ruines,
s’il n’y refte plus rien qui ait quelque rapport à la
forme 8c à l’organifation primitive , fi nous n'y
pouvons voir autre chôfe, finon qu’ il n'a pas été
fubitement conftruit dans l’état où il eft avec des
bancs de pierre, de craie, d'argile, de marbres
8c des groupes de montagnes formés à cet^ effet}
fi ces bancs de pierres eux-mêmes n'ont point été
formés comme ils fubfiftent, par une opération
fubite avec clés Tels, des criftaux , des fab'es, des
graviers calcaires , des coquillages 8c autrc-s fubf-
tances terreftres 8c-animales , formés aulfi fubitement
} fi le moindre grain de fable n’eft pas l’effet
d’ une compofition inftantanée, 8c fi tous ces êtres,
enfembîe ou féparément, ne nous annoncent que
des fucceflîons 8c des réfultats d’opérations fort
longues 8c antérieures à toutes les époques connues
, quelle idée donc peut-on fe former de la
terre avant qu’ il y eût des bancs de pierres, de
fables , de marbres, d’argiles, de grès ? avant
qu’il y eût des vallées 8c des montagnes ? Pouvoit-
elle former un tout fi toutes ces parties n’exiftoient
pas ? A cette importante queftion je réponds que ,
rien ne pouvant retracer J e premier inftant 8c le
premier fpeétacle qu’a pu offrir une terre naif-
fante, c’ eft une recherche qui furpaffe l ’état pré-
fent de notre intelligence & de notre expérience ,
8c qu’il fuffit, pour être convaincus de ce que nous
ne pouvons nous repréfenter, d’avoir tous les témoignages
poflibles qu’elle n’a point exifté comme
elle eft de tout tems, 8c qu’elle exifte depuis tous
ceux qui nous font connus, 8c que toutes les
idées que notre imagination feule peut nous fournir
ne peuvent être que trompeules & incertaines.
Au refte, nous fommes étonnés aujourdhui
d’apprendre que nos continens ont été formes oc
renouvelés fous les eaux des mers. Maigre le poids
des monumens qui conftatenc cette grande vente,
il peut arriver qu’on fera bien plus frappe de notre
furprife , car un tems viendra peut-être ou 1 on
verra clairement que , fans le iecours des eaux
prefquuniverfelles , il nauroit pis ete poflible
d'accumuler des vafes & des dépôts de toute el-
pèce de les difpofer autour de la terre bancs fur
bines, de répandre partout des bitumes, des fels,
& les principes d'une infinité d’ étpes & de fubl-
tanctsq de faire vivre , naître &c multiplier ces
coquillages, dont les débris immenfes forment la
(ubftance de nos pierres calcaires, comme ces
pierres forment la plus grande partie de nos continens
; car , d'après ces confiderations, I eau ne
devoit-elle pas paroître la matrice & 1 origine de
toutes chofes ? N’ett-il pas vifible que ce qu'ils ont
appelé défordre» était l'ordre même, & la voie
la plus féconde & en. même tems .a plus iimp.e
que pouvoir choifir la nature.
Cette matrice de toutes chofes ne pouvant te-
uir fon origine d'elle-même, on fera tente fans
doute d'en chercher l'époque & l'ongmeÆe que
nous avons découvert dans ces derniers tems fur
fes principes conftituans, ne nous apprend rien
fur les applications que la nature en a faites dans
les diverfes révolutions du globe. C eft donc fans
retour que nous fommes obliges d abandonner
l'analvfe de différens effets opérés par. la nature
& écrits au dehors 8c au dedans de la terre, bien
en deçà du premier terme, parce que nous fommes
réduits à nous borner aux circonftances des faits
& de laitfer fouvent les caufes inconnues, & lur-
rout celles de l'apparition de la terre moyenne &
nouvelle hors des eaux. , ,
Comme il eft arrivé à 1 ultérieur & a 1 extérieur
du globe, dans les feules & petites parties que
nous connoiffons, un grand nombre de change-
mens, ne fouîmes-nous pas autordes a foupçonner
une infinité d'autres révolutions dans celles
que nous ne connoiffons pas? Ce rie feroit donc
pas hafarder beaucoup, que de le confiderer d une
vue générale , comme une maffe qui a cela de
commun avec les autres êtres actifs 8c paflirs,
quelle renferme au.dedans d'elle-même des principes
de vie & de more ; qui eft pérîuable pur
elle-même au bout d'un certain tems marque par
fa durée ; qui peut être dérangée & troublée par
une infinité de hafards & le concours de plufieurs
agens : on hafarderoit de même aufïi peu en envisageant
cette maffe comme foumife aux mêmes
conditions de là matière prife en général, qui ne
périt pas, mais,qui change fans ceffe i comme un.
compofé qui, éprouvant des actions & des mou-
Vemens continuels par le travail^ de tous fes propres
que tout ce qui eft organique, s’affoiblir, s épuifer
organes & de fes agens extérieurs, d oit, ainfi ]
peu à peu, & fe détruire dans certaines parties,
c'eft-à-dire, changer de forme, de poimon,
& peut-être de nature. .
Le c ie l, qui s’ouvre aujourd'hui plus que jamais
à nos .yeux par les'grands progrès de l agronomie
& de l’obfervation, confirme tous ces foupçons,
& nous engage à èmbraffer dans une fuite de vues
tous les globes de l’Univers. O r , les planètes font
les moins conlidérables de ces grands corps j
parmi elles, fi on les prife par leur grandeur oc
leur volume, notre terre n’occupe que les derniers
rangs. Mais comme nous n’avons pas encore
afl’ez vu de faits de cette nature, & que les
révolutions des globes ne nous font pas encore
affez connues, quoiqu’il en arrive beaucoup
fouvent, pour fuivre l ’ordre des changemens auxquels
la nature les aflujetiit, & pour affranchir
ces grandes probabilités du nom de fyltemes, je
n’ inlifterai pas ici fur ces conféquences.
N°. VI. A necd o t e s fur les phénomènes des vallées
& les formes de leurs bords.
Je viens de faire connoître les principales inégalités
qui fe trouvent à la fuperficie de la terre,
& même d’en indiquer les caufes les plus remarquables
} il convient enfuite, pour achever cette
defeription du globe, de montrer, avec le meme
foin, ce qu’il nous prëfente dans fon intérieur, 8c.
ce qui contribue à fa cqnftitution phyfique dans
les parties où nous avons pénétré jufqu’à prefent.
je remarque d’abord que les conftruaions reconnues
par l’examen de la maffe & du foliue de
la terre datent d’ une époque bien plus ancienne
que les dégradations que nous avons fuivies a fa
furface, & cette vérité doit être confidérée comme
.un axiome incontc.ftable.Le travail, quel qu il
foit, qui nous repréfente aujourd’hui, fur un bloc
de marbre, la figure & les traits d;Alexandre,
ainfi que les accidens qui ont pu lui mutiler le
bras ou d’autres parties faillantes , font certainement
plus modernes que les circonftances auxquelles
le marbre doit la difpofition & l’infiltration
de fes parties intérieures : il eneft de .même
de la terre 8d de fa figure. Les chaînes de montagnes
, les ramifications de nos; vallées, & toutes
les inégalités de nos,continens, qui,font les traits
de notre globe, ont été formées dans une maffe
qui avoir une difpofition inferie.ure, 8c dans chacune
de fes parties, bien plus ancienne que tous
les événemens 8c que tous les accidens connus 8c
inconnus qui ont tronque 8c mutile certaines parties
de fa furface, comme nous l’obfervons pré-
fentement. On doit bienfentir, après.tout ce que
nous avons d i t , que, pour avoir une idée jufte
des montagnes, il faut les regarder comme des
parties d’une ancienne maffe laiffée en relief, 8c
fes vallées comme des filions creufés .darjs la même
malle. C ’eft ainfi que le fculpteur, pour faire enfler