
mêmes effets & fuivent la même marche. Si le
foleil agiffoir toujours fur le même centre , il
n’elt aucun doute que l'air n'accourût & ne Ce
précipitât de tous les points vers ce foyer j
mais la terre, par fa rotation, oppofe à chaque
inftant des centres nouveaux à l'action du foleil j
& comme l’aâion de cet aftre fe porte fucceflive-
ment vers les parties occidentales du globe , ce
font donc les colonnes d’ air orientales qui fe re-
froidiflent, pendant que celles plus à l’oueft s'échauffent
& fe dilatent. Ce font donc les parties
de l’ atmo fphère plus à l'orient qui, fe conden-
fant, acquièrent un poids & une force qui les
déterminent à fe précipiter vers le vide fucceflàf
que le foleil. forme à L’oueft. Voilà donc une force
aCtive & un déplacement fucceflif, enfin un courant
d’air déterminé entre les tropiques.
Telle eft l’économie de la nature dans la formation
des vents alifés ; vents aufli conftans dans
leur aétion, que la marche de l’ aftre qui en eft le
principe. Entrons maintenant dans quelques détails
, & voyons fi les faits font conformes à cette
théorie. Nous devons négliger ici les exceptions
qui peuvent avoir leurs caufes dans le voifinage
des terres, ou dans quelques circonftances rates
& particulières, dont nous tâcherons de donner
une explication fatisfaifante. à l'article, des Vents
variables. Nous ferons remarquer d’ abord que., la
marche du foleil étant fenfiblement égale, & fes*
effets fenfiblement égaux, le vent alifé doit être
aufli régulier que les circonftances qui le produi-
fent : c'eft en effet ce que l'expérience démontre.
Le v^nt alifé n'eft jamais accompagné de tempêtes,
& très-rarement, excepté fous la ligne , comme
nous le montrerons par la fuite , eft-il réduit au
calme. Les vaUTeaux parvenus dans les parages où
régnent ces vents , comptent alors avec aifez de
certitude le nombre de jours qu’ils, ont à tepir la
fper, d’après la connoiflance qu'ils peuvent avoir
de la diftance où ils font du.lieu de leur deftination,
& un bâtiment d'une marche moyenne doit efti-
mer qu'il fera environ trente lieues par jour.
Une autre obfervation qui confirme fort bien
nos principes, c’eft que non-feulement les vx/its
alifés, mais même les vents d’e ft, par un beau
tems, reprennent une activité trèsMn.arquée pendant
le jour , c’eft-i-d ire , pendant que le foleil
eft fur l’horizon, & qu'ils font plus calmes pendant
la nuit.
Peut-être voudroit-on objeCter le peu de force
u’a le vent alifé.» q u i, dépendant de la marche
ü fo le il, devrojt avoir une viteffe proportionnelle
à cejle du mouvement de. la terre fur fon
a x e } car ce vent ne.fait qu’environ dix pieds par
fécondé , tandis que l'équateur en parcourt qua--
torze cçnt vingt - cinq dans le. même efpace de
tems.
Mais cette difficulté Paroîtra fans force fi l’oq
confidère que le foleil n agit à la fois que fur une
partie de rajtmofphère, & qu’ il a conféquemment,
beaucoup de réfiftance à vaincre à chaque inftant,
tant pour échauffer que pour déplacer les malles
tfcaityfoÉ lefquelles il agit. Effectivement , on doit
confidérer. comme un principe, dans ce grand
effet phyfique, que l’a&ion du foleil a la même
etendue de i'eft à l’oueft, que celle qu’on lui
connoït du nord au fud : il doit donc agir à la
fois fur environ foixante degrés de longitude j ce
qui forme la fixième partie de trois cent foixante
degrés, & la fixième partie feulement de la bande
des vents alifés.. D’ailleurs, l’atmofphère fupé-
rieure, qui ne participe point à cette aétion du
foleil, forme un obftacle; la furface du. globe ,
heriflee de montagnes, en préfente un autre ; à
quoi il faut ajouter un troifième frottement, ou
plutôt une, décompofition de forces , très-propre
a retarder le mouvement de l’atmofphère, & que
nous allons développer.
Le foleil, agiflànt par fa chaleur fur une zone
aufli étendue que celle des vents alifés, ne peut
avoir une aCtion égale fur tout cet efpace, &
l’on conçoit facilement que lorsqu’ il eft dans
1 équateur, la partie de. l’armofphère qui répond,
verticalement à fes rayons, eft plus échauffée que
celle qui fe trouve à trente degrés de diftance
vers le nord ou vers le fud. Il en réfuite donc
que les colonnes d’air du. nord ou du fud preflent
fur les colonnes orientales, qui, en fe refroidif-
fant,,viennent remplacer les vides que le foleil
produit par (a chaleur vers l'oueft. Ainfî dans,
1 hémifphere boréal 1 e vent alifé doit prendre en
partie du nord;, & dans. L’héroifohère auftral 1©
même vent doit prendre en partie du fud, &:
c’eft ce qui arrive;en effet. O r , c.es deux vents,
en fe rencontrant vers l'équateur, s’affeiblilfent-
néceflairement par leur choc & par la deftru&iori;
des dire&ions oppofées , & il en réfojte, fous,
la ligne même, un vent directement à I’eft, mais
calme, qui. eft eft-nord-eft & eft-fod-eft, & plus,
frais.à quelque diftance de l'équateur, & qu-i eft;
prefque nord-eft &; fud-eft fur les limites refpec-
tives des. vents, alifés. L’expérience, qui confirme:
tout cela, juftifie encore ce que.npus pouvons: en
conclure, c’ eft que fous la ligne, indépendamment
du calme qni doit y régner. & qui y règne effe&ive-
rnent. la réunion des. nuages dit nord-eft & du
fod^eft doivent y occafienner de greffes pluies &
des orages, qui y font, comme on fait, habituels,
& qui piodutfent, fur les terres comme fur les,
mers, plusieurs phénomènes que nous décrirons
dans des articles particuliers. ( Voye% Pluies x.
voyez Hiver de la. T orpide. )
Le foleil eft tellement la. cauiè des effets que
nous venons d’indiquer, que ce que nous ayons,
dit exifter fous la ligne, a lieu, pour parler plus
exaélément, fous le parallèle du foleil >. de forte
que, par la même latitude boréale, où.le vent étqifc
eft «ord-eft, tandis que le foleil parcouroit l’équar
teur., Je yent y devient eft lorCqu® cet aftre eft
parvenu à cette hauteur, & par une fuite de ces,
çhangemens
chaîigemens on le voit eft-fud-eft à l ’équateur
lorfque le foleil eft dans le voifinage du tropique
du cancer. La fphère d’adtivité du foleil s'étend
alors plus au nord , & dans cette faifon les vaifo
féaux qui partent d’Europe, rencontrent les vents
alifés plus tôt. Les calmes , les nuages, les pluies,
les orages, fe rencontrent de même fous fe parallèle
du foleil, ou du moins ils s’y montrent fort
fréquemment & d’une manière très-»remarquable;
Si cependant ces effets n'ont jamais toate l’étendue
qu’ils fembleroient devoir acquérir, c'eft que
cet aftre agit principalement par reflexion, & que
la terre a toujours moins de chaleur acquife vers
les tropiques que fous l'équateur, dont le foleil
ne s’écarte que. de vingt-trois degrés vingt-huit
minutes au plus, & où il agit verticalement à
chaque équinoxe.
, Tout fe pafle à peu près de la même façon dans
la partie auftrale. A mefure que le foleil approche
du tropique du capricorne , fa fphère d’aCtivité
s'étend vers le fud , & elle fe reflerre vers le nord.
Les vaifleaux qui partent d’Europe dans cette faifon,
ont plus tard les vents alifés. Il y a cependant
dans l'hémifphère auftral une différence très-remarquable
à cet égard, & qui prouve de plus en
plus en faveur de la théorie que nous avons expo-
fée ci-deflus. Le vent alifé eft en général, dans
cette partie, plus frais & plus déterminé que dans
la partie oppofée. Les calmes & les orages y font
plus rares} & lors même que le foleil eft à l’équateur
, on,.ne les trouve guère au-delà de deux
degrés de latitude fud , quoique ces mêmes effets
s’étendent alors jufqu’à huit & neuf degrés de latitude
nord. Pourquoi donc le vent de fud-eft
a-t-il cet avantage fur le vent de nord-eft, & ré-
fifte-t-il plus à l’aélion du foleil que fon antago
nifte? En voici la raifon : l'hémifphère auftral, à
•latitudes égales, eft beaucoup plus froid que le
nôtre. Nous indiquerons ailleurs les caufes connues
ou foupçonnées de cet effet : nous nous bornons
à citer ici .'l’expérience qui démontre incon-
teftablement cette vérité. L'atmofphère étant en
général plus denfe dkns l’hémifphère auftral, il eft
néceflaire qu’en conféquence du vide que caufe le
foleil en raréfimt Pair, les colonnes amenées par
le fud-eft aient un furcroîc de force proportionné
à la différence de fleur pefantcur fpécifique fur
celles du nord-eft. Aufli quelques navigateurs
ont-ils appelé les Vents alifés de la bande du fud
de la ligne, vents généraux, pour les diftinguer des
vents de nord-eft, auxquels feuls ils donnoient la
dénomination de vents alifés.
Ce que l’on a dit fur la raréfa&ion de l’air par
la chaleur, & fur la preflion des colonnes d’ air
plus froides, a été mis hors de doute par la célèbre
expérience de M. Clarc, rapportée dans fon
Traité du mouvement des fluides. Au milieu d’ un
grand plat plein d’eau-froide il plaça un petit plat
rempli d’eau chaude j puis ayant une chandelle
allumée, il la. foutfià, & pendant qu’elle fumoit
Géograpkis - p-hyf-que. Tomé IL
encore il l’approcha du bord du plat plein d’eau
chaude } la fumée fe porta auflitôt ati deflus du
milieu de;ce plat, & .ce ne fut qu'alors qu’elle
s’éleva en fuivant une ligne verticale. Ayant changé
fes difpofitions de manière qu’é -le'-petit plat du
milieu1 fût rempli d ’eau froide, & que le grand
plat contînt l’eau chaude , il plaça la .chandelle
fumante au deflus de l’eau froide, Ôt pour fl ors1 la
fumée, au lieu de s'élêvér perpendiculairement,
fe dirigea au contraire au deflus de l’eau chaude
du grand plat, entraînée par l’air froid qui fe pOr-
toit vers l’air que cette eau chaude avoir raréfié.
Il fe préfente ici une ôbfervafion qui né doit
pas nous'échapper, c’eft q ue, fuivant nos principes,
les îles & les cohtinens, étant, plus fufeep-
tibles que la mer de recevoir & de réfléchir la
chaleur des rayons du foleil, peuvent être confédérés
comme le plat d’eau chaude” dont on vient
de parler, placé1 au milieu de l’Océan, qui fera le
plat d’ eau froide. Il en doit donc réfuiter que,
fur les côtes“ occidentales, non feulement le vent
alifé foit fans effet, mais que l’ air plus condenfe
de la mer foit porté au contraire vers les terres au
deflus defquelles l’air eft plus raréfié. Aufli ces
effets ont-ils lieu réellement, non pas à la vérité
aux îles très-petites, telles que les Antilles &
l'Ile-de-France, qui par-là font incapables de déranger
le cours général de l’atfnofphère } mais les
vents de mer exiftent vraiment & conftamment
aux côtes occidentales de l'Amérique, de l’Afrique
& de la Nouvefle-Hollande , fituees dans la
zone torride.
En jetant les yeux fur la carte , & obfervant la
diverfité des giflemëns des côtes de l ’Afrique, on
trouvera même une nouvelle preuve de Ceci dans
les différentes fortës dé vents qui y régnent, qui
font nord-oueft aux côtes de Maroc, fud & fud-
fud oueft à celles de Guipée , & . ouefr aux côtes
d’Angola. Le principe & la caufe de tous ces
effets font'actuellement trop evidens: pour qu’ il
ne foit pas facile de fentir qus la forcé & l’étendue
de ces vents dépendent de la quant1'té de chaleur
que la terré eft fufceptible ’de réfléchir. Aufli
n’ en eft-il pas de. plus marqués que ceux.d’ Afrique
, à caufe idu foi fablonneux & des vaftes dé-
ferts fecs & arides de cette partie du Monde ,
que l’ on fait être la plus chaude de la terre. Çes
vents, qui ont leur plus grande force dans le voifinage
des terres, fe font fentir à plufieurs de-;
grés au large. Là le vent alifé reprend fon cours,
ordinaire > & pour qu’il ne refte aucun doute:
fur la caufe , nous devons citer les calmes mie1
l’on trouve dans ces parages, & oui font une
fuite néceflaire du balancement qu'éprouvé'- l’air
entre le vent général d’eft & les vents particuliers
qui fe portent vers lès’côte s ..
Par la même raifon on y trouve encore des
nuages, de groffes pluies & des orages que les
vapeurs abondantes & ftagnantes y^ccafionnent,
& dont le réfultat eft de purifier Pair & d’en ré ‘
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