
ns préPente jamais cet ordre , cette continuité
qu'on obferve dans les primitives.
Les montagnes fous-alpines de Provence font
féparées des montagnes alpines par des coteaux
de nouvelle formation , couverts de pla tes aromatiques
jufqu’au pied des Alpes , ainfi que les
montagnes de la partie moyenne de la province :
leurs couches font pofées différemment les unes
fur les autres, îk l ’on y trouve fouvent des coquilles
pétrifiées. Toutes les montagnes qui les
entourent, font très-élevées, & tiennent à la
chaîne générale des Alpes , tant par leur organi-
fation intérieure, que par les divers foffiles qu’ elles
contiennent, & par les' plantes qui y croiffent :
telles font les montagnes de Sifteron, de Digne,
deNorante, de la Palud, d’Eiguines, de Triguance,
de Thorame, de Bargème, de Lachen, de Seranon,
de Cheiron , &c. Lorfque ces montagnes ont des
parties fchifteufes, & que la pierre eft feuilletée
en quelques endroits, comme à Bargème, à Cheiron
& ailleurs , c’eft toujours à leur bafe ou dans
des endroits nus, expofés à l’aétion de l’air, à
Pimpétuofité des vents, à la rapidité des eaux torrentielles
& à la chaleur du folei!} car c’eft à ces
caufes que lés irrégularités de la pierre calcaire
font dues. Effectivement, les marbres, les gypfes,
les terres marneufes, les argiles, les ochres, ne
fe trouvent que dans des collines formées de dépôts
fucceffifs.
* Les terres comprifes dans l’efpace des montagnes
fous-alpines, quoique fort étendues, ne font
point affsz fertiles pour nourrir leurs habitans :
les coteaux commencent à être pelés , parce que
le terrain eft emporté par les averfes dans les ruif-
fraux inférieurs : les défrichemens qu’on y a pratiqués
fans les précautions convenables l’ ont rendu
fi mobile, qu’ il s’y forme partout des ravins qui
en fillonnent la fuperficie j le fond des vallons
s’exhauffe , tandis que la cime des coteaux s*é-
croule , entraîne rapidement les arbuftes qui les
cou,vroient auparavant. La vallée de Traichaû,
dans le diocèfe de G ap , à trois lieues de Sifteron
, eft quelquefois expofée à ces terribles acci-
dens. Il n’y a que les parties fejkentrionales des
montagnes qui (oient à 1 abri de pareilsévénemens,
par les forêts antiques que la coignée du bûcheron
n’a point encore attaquées. Le climat diffère peu
de.celui des montagnes alpines: les froids y font
ati0i piquans & les gelées prefqu’ auffi fortes en
hiver. La neige qui couvre les montagnes fous-
alpines àu mois de novembre y fond plus tô t , far-
tout fur leur partie méridionale > car la fepten-
trionale eft long-tems expofée aux rigueurs des
frimats. L’air y eft pur & favorable aux phthi-
iîques.
Les montagnes alpines fediftinguent facilement
de celles qui leur font inférieures par leur élévation
& leur enchaînement, tandis que celles-ci I
paroifîent comme ifolées, & ne tenir pour ainfi J
dire à la chaîne des Alpes que par des collines intermédiaireç.
Les alpines portent leur cime plus
haut, s’étendent au loin , forment des gorges
étroites , des vallées plus fpacieufes, & influent
autant fur l’atmofphère qui les environne, que fur
la conftitution des habitans de ces contrées. Leur
difpofition intérieur# eft en gros blocs entafies les
uns fur les autres fans couches intermédiaires : le
quartz, le granit, la pierre cornée & les fehiftes
concourent à leur formation : la pierre calcaire
s’y trouve plus abondamment > mais elle eft toujours
plus ferrée, plus denfe que dans les montagnes
inférieures. On ne trouve plus de coquilles
pétrifiées ni de traces de teftacées dans ces grandes
mafiès calcaires d’origine primitive : ce n’eft que
dans les montagnes fecondaires que l’on obferve
les diverfes couches, les dépôts fucceffifs que les
eaux de la mer ont laiffes en fe retirant. Si l’on y
voit des fehiftes ou des pierres feuilletées, c’eft
prefque toujours dans les bafes des montagnes &
dans des lieux expofés à l’aâion de l ’a ir , des
vents & des eaux $ d’ailleurs, Ges fehiftes tiennent
un peu de la pierre &' fe rapprochent de
l’ardoife.
Les métaux (ont renfermés dans le fein de ces
montagnes, non pas en blocs défunis & féparés ,
comme on le voit dans les autres, mais bien en
filons, en longues veines, qui ferpentent, s’enfoncent
profondément dans les vallées pour venir,
fe montrer dans la même direction du côté oppofé.
Les montagnes qui font couvertes de bois ée de
gazon ont prefque toujours leur expofition principale
au nord. Les rivières qui en fortent, ne font
confidérables qu'a près la fonte des neiges ou les
pluies d’automne. Les ravins, les ruiffeaux, grof-
fiffent alors, & vont fe précipiter tumultueufe-
ment dans ces rivières.
Quoique les plantes qui croiffent dans ces lieux
aient beaucoup de rapport avec celles des montagnes
fous-alpines lorfqu’elles font au même
degré d’élévation, on obferve une grande différence
par les gazons perpétuels dont leurs fom-
mets font couverts , & par de nouvelles plantes
qu’on y trouve. Les arbres réfineux fe multiplient
beaucoup mieux dans les montagnes alpines, tandis
qu’ il n’ y a guère, aux fous-alpines , que de petits
chênes, des érables, des hêtres, & rarement des
fapins & des ifs.
La chaîne des Alpes de Provence commence à
Seine ,• elle s’étend du levant au couchant par la
vallée de Barcelonette ( voye£ ce mot ) , pour fe
joindre aux Alpes maritimes du Piémont & du
comté de Nice ; elle forme des vallées & des
gorges fort étendues, telles que les vallées d’Af-
ture , de Saint - Eftève , d’Entraunes & de Col-
mars. Cette chaîne va fe lier avec les montagnes
de Gap & d’Embiun, du nord à l’eft.
Les hivers font rudes & de longue durée dans
ces contrées feptentrionales : le thermomètre y
defeend fouvent jufquà dix & même douze degrés
au deflbus delà glace, il fait beaucoup moins froid
dans les montagnes fous-alpines. ( Voye[ C l im a t ,
ton influence fur les habitans. )
Le printems eft déjà bien avancé dans les parties
méridionales de la Provence, qu’à peine fes douces
influences commencent à fe faire fencir aux Alpes»
La terre nefe couvre de verdure que lorfque les
neiges ont fondu : les vents d’eft & de fud hâtent
ce moment dtfiré. Un jour de nuages & de vent
de mer fait plus que le tems la plus ferein & le
plus beau folei 1. Les montagnards qui paffent l’ hiver
dans le pays bas , connoinent fi bien cet inftant,
qu’ ils s’empreffent d’arriver avant le dégel. Lorfque
la pente des montagnes n’eft pas rapide, cette
fonte de neiges eft avantageufe j elle abreuve le
fo l , le pénètre , nourrit les racines des plantes &
favorife la végétation naiffante j mais quand la
pente eft rapide & que le terrain eft pierreux, dénué
d’arbuftes & de plantes j qu’on l’a défriché
fans le foutenir par de petits murs , que les terres
remuées depuis peu de tems font faciles à être entraînées
, cette fonte-caufe de grands ravagés : les
eaux fe précipitent du haut des monts, groffiftent
à vue d’oe i l, & , acquérant plus de vélocité par
leur chute , elles entraînent to u t, dépouillent les
terres, roulent les pierres, & donnent lieu à ces
accidens dont nous avons parlé & qu’ on nomme
avalanges.
Montagnes fous-alpines inférieures.
La partie de l’eft de ces montagnes, fituée dans
le diocèfe de V en ce , forme une chaîne qui s 'étend
jufqu’ au bord delà mer. Lavallée de Taurenc, les
montagnés de Cheiron & de Courfegoule , font
renfermées dans cette enceinte. La vallée de Taurenc
fe prolonge à quelques lieues vers l’oueft : La
largeur eft d’environ un quart de lieue ; elle eft
bornée au levant par la montagne deGheiron, que
plufieurs coteaux intermédiaires lient aux montagnes
oppofées. Le fommet de Cheiron a près
de fix cents toifes d’élévation au deffus du niveau
de la mer : les végétaux qui y croiffent, fe rapprochent
beaucoup de- ceux des montagnes alpines,
dont celle-ci a toutes les apparences. La
partie méridionale de Cheiron & celle qui regarde
l ’oueft font entièrement pelées $ elles n’offrent
que quelques petits arbuftes, que quelques
plantes attachées aux pierres. La montagne de
Cheiron eft de narure calcaire : fes extrémités vers
le couchant & vers le midi , du côté de Gro-
lières , font couvertes de fehiftes. Peut-être que
l'air 3 les orages1, les1 vents impétueux & les pluies
ont contribué , ici comme ailleurs, à rendre la
pierre calcaire fifjHe , & l’ ont pourrie en quelques
endroits} ce qu’on obferve à la bafe de plufieurs
montagnes entièrement nues. Il y a , fur le fommet
de celle-ci, une plaine affez étendue, couverte de
gazon. La vue fe promène à l’oueft fur les montagnes
(bus-alpines, qui s’ abaiffent infenfiblement
vers le bord de la mer. Elle eft bornée au midi par
le Cap de Teoules, le Cap Roux & les p omon-
toires voifins > mais elle le porte à une diftancd
plus éloignée du côté du levant, où l’on voit les
montagnes de l'ende9 prefque toujours couvertes
de neige , lesquelles feparent la Provence de l’ Italie.
La montagne de Cheiron fe lie avec celtes
de Courfegoule & de Grolières , villages fituéS
dans une étroite vallée que la rivière du Loup
fépare du diocèfe de Graffe. Le climat s’adoucit
de plus en plus aux approches des côtes méridio*-
nales : il y a quelques vignobles dans ces cantons;
On trouve des indices de charbon de terre dans lè
terroir de Courfegoule : les veines en font très-
apparentes , & on en a même retiré quelques
échantillons. Ces mines, qui s’étendent fort loin,
feroient d’ un grand fecours fi elles étoient exploitées.
La terre bitumineüfe qui tes couvre, s’enflamma
autrefois par les iffards qu’on y avoit pratiqués
tout auprès , & jeta long - remèdes étincelles
pour peu qu’on la remuât.
La commune du Caire , auprès de TourTettes ,
termine les montagnes fous-alpines au midi j elle
contient également des mines de houille, qui ont
été exploitées autrefois. Les veines de ce foffilé
fe prolongent du levant au couchant, tout le long
de la montagne , derrière le château. Les fehiftes
argileux qui tes couvrent » brûlent au feu en jetant
beaucoup de fumée , & font entièrement bitumineux.
Les couches de charbon qui font au def-
fous , paroiffent pyriteufes $ mais il n’eft pas douteux
qu’en creufant plus profondément on ne trouvât
le bon charbon dans une pierre dure, de la
nature de celles qui compofent les montagnes fu-
périeures, ces fehiftes n’étant qu’ un débris des
couches argiîeufes & calcaires. Il feroit à defîrer
qu’on mît ces mines de houille en valeur , parce-
que le bois commence à devenir rare dans ce^
cantons.
Les montagnes de Courfegoule & de Cheirotf
viennent fe joindre par de petits coteaux au débouché
oriental de la vallée dé Taurenc. Ces coteaux
ne font plus auffi pelés que ceux que nous
avons parcourus: les érables , les cornouillers,
les coudriers, y font nombreux, ainfi que les pins
plantés par bouquets tout le long de la vallée , 84
qui- forment même de petites forêts en quelque#
endroits.
La rivière du Loup prend fa fource dans 1#
vallée d’Andon , qui eft féparée de cellë de Taurenc
par une chaîne de montagnes à droite ; elle
coule à travers les terroirs de Cipières & de Grolières
, defeend des montagnes fous-alpines , dans
les campagnes de Bar, de Roquefort, de la Colle,
de Villeneuve, & va fe jeter dans la Méditerranée
près d’Antibes.
Les montagnes qui bordent la vallée de Taurenc
font autant de maffes pierreufes, dont les matériaux
font la plupart du tems difpofés par couches
dont les .cimes pelées s’élèvent tantôt en pyramides
, tantôt en groupes de rochers pointus &