
de quelques obfervations qu’on a pu faire dans le s 1
contrées voifines.
Guancaveliea eft une bourgade fituée dans une i
de ces profondeurs formées par différentes fuites
d’éminences : fa hauteur eft de mille neuf cent
quarante-neuf toifes au deflus du niveau de la mer.
La cime du mont où fe trouve la mine de mercure,
&qui eft habitable partout, eft à deux mille
trois cent trente-fept toifes-, ou de cinq mille quatre
.cent quarante-huit vares au deflus du niveau
de la mer. A ir.fi la haute fuperficie du 'mont où
eft lamine de mercure, eft de neuf cent douze
vares au deflus du fol fur lequel eft fi tué Giianca-
velica. O r , cette profondeur a été excavée parles
divers courans d’eau qui defcendent de cette
montagne, & qui viennent fe réunir avec celui de
Guancaveliea , qui fort de l’autre partie de mon- ,
-tagne qu’on nomme le Ycho.
Le fol du village lfcuckàca eft de huit cent cin-
quante-fept vares plus bas que celui de Guancave- .
lica, profondeur qui eft l’effet des excavations de la
rivière Ifcuchaca. Cette rivière reçoit la Guanca-
velica, mais dans un terrain encore plus bas que
celui du village. Les eaux ont donc creufé à la
profondeur de mille fept cervt foixante-neuf vares,
depuis la cime du mont & la mine de mercure,
jufqu’ à Ifcuchaca, outre les excavations qui fe
trouvent encore au deffous du village.
Le terrain où eft fitué ce village a plus d’élévation
que les eaux de la rivière lorfque fes eaux
font hautes de dix à douze vares. Ainfi les eaux
ont encore fait cette excavation, comme il eft
facile de j e voir. On remarque en effet , dans la
partie voifine de leur lit, des -roches détachées,
toutes ferablables à celles qui font au milieu des
eaux 5 ce qui prouve que les eaux ont couru au
même niveau à une époque plus ancienne, &
qu’elles ont creufé le fol à force d’en détacher
les débris. Ces terrains, au refte, font ouverts par
un fi grand nombre de courans, qu’il n’eft aucune
de ces contrées qui n’en foit approfondie. On re- ;
marque feulement que la fuperficie du fol qui avoi-
lîne les lits des rivières, eft plus unie aux environs
des confluens, où plufieurs de ces courans fe réu-
niffent : cela vient de ce que les eaux l’ ont rongée
également dans plufieurs, en continuant leur marche.
D’ailleurs , ces furfaces planes font rangées
comme par étages, félon que les eaux fe/ont fixées
à différentes hauteurs pendant qu’elles creufoieni,
leurs lits. On obferve que les bords élevés, dans
ces lits , n’ont prefque point de largeur dans les
endroits qu’a pu fuivre directement fon cours j
c’eft cependant, comme nous l’avons déjà d it, fur
ces bords étroits & efearpés que fe trouvent pratiqués
les chemins par où l’on paffe. Toutes les
fois que le courant fait un détour, la furface des
bords a plus de largeur , cependant moins que
lorfque plufieurs fe réuniffent. On conçoit aifément
que l ’eau, forcée de fe détourner, s’éloigne plus
de la rive que lorfqu elle coule en ligne droite,
& ronge ainfi le côté rentrant-,-contre lequel elfe
fait fon détour, & qui en eft la limite.
On peut conclure de tous ces détails, à quelle
élévation eft la partie haute & montueufe de l ’Amérique,
relativement à la partie baffe, & à quelle
profondeur fe trouvent les excavations, qui font
l’ouvrage des eaux, car elles offrent des elcarpe-
mens de mille fept cent foixante-neuf vares verticaux
î cependant elles ont affez de fuperficie pour
préfenter les firuations qui peuvent convenir a une
nombreufe population, qui en tire tous les produits
néceffaires à fa fubfiftance. Parmi ces que-
brades.il en eft de plus étendues & de plus profondes
les unes que les autres. Je le répète : ces
excavations font d’autant plus profondes & plus
va fies , que les terrains participent à une plus
grande élévation.. Quoiqu’on ait dit qu’en cela
cette partie du monde fe diftinguoit de toutes les
autres, nous croyons que ces mêmes formes de terrain
exiftent dans d’autres parties du monde, à p*. o-
portion,des hauteurs & des largeurs des croupes
de montagnes. ( V’oye^ Q ue br a dès-, où tous tes
détails particuliers & ces comparaifons feront pté-
fentés avec foin.)
ANGERS. Cette ville eft établie dans une grande
plaine que parcourt la Mayenne, en fai font de
grandes ofcillations : cette rivière eft groflie du
Loir , de la Sarthe & de l’Oudon. Je confidérerai
donc cet article Angers comme étant le centre d’un
grand maftîf d’ ardoiji'eres, dont je ferai connoître
très-fuccinérement les principaux phénomènes.
Les ardoifières d’Angers fourni flé-nt depuis long-
tems prefque toute i’ ardoife de Paris ; elles f< nt
exploitées en grand avec foin &c avec fuccès. Les
carrières ne font point difpofées par lits & par
bancs, comme les autres carrières : on n’y voit
qu’une feule maffe de deux cents pieds de hauteur,
qui paroît continue, d’une feule forme &
d’ une feule couleur ; cependant, pour plus de facilité
dans l’exploitation, on la divife par foncées
de neuf pieds de hauteur. A chaque foncée on pratique
des repos; en forte que, fur la profondeur
d’une ardoilïère, on croiroit voir une fuite de
cafcades formées par des quartiers d’ardoife qu’on
a délités, & cela jufqu’ à la profondeur de deux
cents pieds, quelquefois même de quatre cents.
Les bancs d’ardoife étant comme un affemhlage
de lames -St de feuillets pofés verticalement du
haut en bas, on en détache aifément un afféz grand
quartier, en plaçant de diftance en diftance plufieurs
coins, pourvu qu’on les chaffe tous à h
fo is , & qu’une des extrémités du quartier que
l'on attaque, n’éprouve pas avant l’autre la force
du coin qui doit la féparer, fans quoi le quartier
fe romproit.
On peut dire en général que l’ardoife n’eft pas
une matière calcaire, ou qui faffe effervefcence1
avec les acides. Des échantillons tirés de la Bretagne,
de la Normandie, de la Flandre, du Lyonnais,
du Languedoc, de l’Anjou , ont tous réfifté
à l’épreuve des acid:S , excepté deux efpèces, qui
font une légère effervefcence, & pour peu de
tems i ce qui prouve que cet effet accidentel eft
dû feulement à quelques parties étrangères fp a thi-
ques & calcaires , répandues en petite quantité
dans certaines carrières d’ardoifes; .
M. Pott a voulu prendre un milieu ; il distingue ■
deux fortes d’ardoiles, dont l’une eft calcaire, &
l ’autre vitrifiable : la première fe réduit en chaux
par l’ a&ion du feu, & la feconde-donne un verre
tranfpâient. Il faut remarquer qu’il y a des pierres
noires & feuilletées qui font de la chaux ; mais
on ne peut pas dire, en conféquence,_qu il y a
des ardoifes calcaires. Il eft très-probable que les
ardoifes qui font tirées de maffes feuilletées opaques,
& qui ont une figure particulière, comme
celle d'un parallélogramme, font vitrifiables.
Les ardoifes font affëz communément noirâtres
& bleuâtres ; cependant plufieurs efpèces de fchi- .
tes ou pierres feuilletées ont des couleurs différentes
: il y a des fehites verts, gris-de-lin, marbrés
i & lorfqii’ils font propres à fe déliter aifément
& à être taillés en tuiles minces, on peut
les Confidérer comme des ardoifes, furtout s’ils
ont d’ailleurs la qualité vitrifiable des ardoifes
d’Angers.
Quelquefois on trouve dans les ardoifes, des
fpaths, efpèce de pierre dure, liffe, blanche, &
de nature calcaire : on y trouve aufli des pyrites,
des paillettes talqueufes, de petites étoiles blanches
& falines, qui ont depuis une ligne jufqu’à
fix de diamètre ; enfin, on y trouve des plantes
& des poiffons qui feir.blent avoir été furpris par
l’abondance des terres ou des matières qui ont
fervi primitivement à la formation des mafiifs d’ardoifes.
A l’égard des poiffons, on doit furtout
diftinguer les crujlacées, c’eft-à-dire , les animaux
qui, comme /éereviffe, ont une coque appelée
en latin crufia, plus fouple que celle des coquillages
dont l’enveloppe fe nomme tefia. Les empreintes
des cruftacées font beaucoup plus rares
que celles des coquillages bc des poiffons.
Parmi les plantes, il faut diftinguer les plantes
marines, les moujfes de mer, les tremella, les fucus,
beaucoup plus rares dans les ardoifes, que les fougères
& autres plantes dont M. de Julheu a parlé
dans les Mémoires de L'Académie pour les années
1718 & 1711.
Il y a de'ces empreintes qui ont plus d’ un pied
de long : on y apperçoit comme la place d’un pédicule}
on découvre aufli l’irrégularité des contours
que prend une plante lorfqu'elle eft racornie
, fechée, chiffonnée & comprimée entre deux
corps durs} on y voit ces petits filions que le corps
de la plante a dû produire dans la pierre} on y re-
connoït enfin la foupleffe & le jeu d'un corps mou.
Il paroît qu’on pourroit fans abfurdité attribuer
quelques-unes de ces empreintes à des diffolu-
tions ferrugineufes qui fe feroienc étendues entre
les différers lits de l’ardoife; elles en ont la couleur,
quelquefois même une efpèce d’apparence.
Cependant, après un examen férieux & répété
fur un grand nombre d’objets, on pourroit affu-
rer que ce font de véritables empreintes : telles
font celles des deux tremella de Dillenius, &reel!e
d’un fucus avec les petits grains ou corps ronds
qu’on croit être les organes de la fructification1.
Ces corps y font défignés par de petites taches
rondes, couleur de rouille, qui prouvent d’une
manière inconteftableque c’eft véritablement l'empreinte
d’un fucus 3 efpèce de plante marine, dont
les feuilles (ont très-menues oc très-découpées.
Plufieurs de ces empreintes de fucus ont parti^
culiérement les apparences de dendrites y c'eft-à-
dire, de ces pierres herborifées qui préfentent
comme des ramifications de plantes , & que l’on
fait aujourd’hui n’être que les effets de diffolutions
métalliques. Les couleurs de ces empreintes, qui
quelquefois font affoiblies dans des parties des
feuillets d’ardoifes, & même prefqu’éteintes ; la
fineffe de leurs découpures, leurs couleurs roulées,
enfin le manque de nervures qu’on trouve
toujours:dans les plantes, fembleroient lesplacer
parmi les dendrites : on y trouve même des étoiles
falines, des efflorefcences pyriteüfes, & des dépôts
vitrioliqties affez marqués j mais les botaniftes
font très-portés à confidérer ces veftiges comme
appartenais à de véritables plantes, parée qu’ il
y a certaines ardoifes dont les empreintes s'éloignent
trop des caractères des dendrites.
Il en eft furtout une qui fe fait remarquer par
un car-aCtère très-fingulier. On y voit les branches
confondues, froiffées, rapprochées comme par
fuifeeaux. Cette confufion prouve , fuivant le témoignage
dé Scheuçhzer dans fon ouvrage intitulé
Herbarium diluvianum, auquel nous ne croyons
plus, que ce font véritablement des plantes qui
ont été englouties par la fubftanee pierreufe : celles
ci paroiffent même avoir du rapport à quelques
efpèces1 de plantes du genre qui eft nommé conjerva.
dans YHiftoire des moujfes de Dillenius.
Les empreintes d’animaux font encore plus ca-
raétérifées, & femblent déceler mieux leur origine
que celles des plantés : une éereviffe de mer eft:
empreinte fur une ardoife, avec deux ferres très-
bien formées, avec les côtés, les anneaux & le
cafque ; une autre cruftacée préfhnte fur le côté
une patte ou nageoire fillonée, telle qu’on en voie
fur plufieurs animaux de cette elaffe. Une autre
ardoife d’Angers eft chargée des empreintes de
plufieurs petits animaux, femblables à des efpèces
de chevrettes. Une troifième préfente un animal
affez femblable au pou de mer, efpèce de crabe
plus petit & plus arrondi qu’une éereviffe.
Toutes ces reffemblances paroiffent d’abord
frappantes; cependant,'en étudiant les détails,
en comparant en un mot ces empreintes avec les
deferi prions & les figures d’animaux de ces efpèces
rapportées dans les livres d’Hiftoire naturelle,