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paroît que les Canaries,autres terres volcaniques,
ont pu faire partie.
Pour terminer ce qui peut concerner les divers
agrandiffemens de la mer Atlantique, nous rappellerons
ici les recherches de M. Buache fur
cette mer, & il paroît que c’étoit dans ces mêmes
vues que noiis venons d’expofer, qu'il s’étoit
occupe à reconnoître les diverfes chaînes marines
qui tenoient à plufieurs îles difperfées dans cette
mer, & qui formoient, par une fuite de hauts-
fonds , une liaifon entre l'Afrique, l ’Europe &
l’Amérique, & c ’eft pour cette raifon qu'il avoit
cru être fondé? à admettre trois baflins maritimes'
dans X Atlantique y & dont les fuites de hauts-fonds
qu'il avoit reconnues étoient les limites. Je citerai
furtout l’échantillon le plus mémorable at-f,
taché à Tîle de Norohna , dont les appendices
fe prolongent depuis l'Amérique jufqu'en
Afrique.
A T L A S , chaîne de hautes montagnes de PA-
frique , qui féparent la Barbarie du Biledulgerid,
& qui s’étendent de l’eft à l’oüeft. Une branche va
jufqu'à l’Océan ,& l’autre, oppofée^ s'étend juf-
qu’en Egypte. Plufieurs fommets de cette longue
chaîne, & furtout celui xlu mont Hentête,.au
royaume de Maroc, font fi élevés, qu’ils reftent
couverts de neige la plus grande partie de l'année
; ce qui les rend inhabitables. 11 n'y croît aucune
plante ni aucun arbre à caufe du grand froid
qü’on y éprouve au voifinage des amas de neiges; :
Dans Je refte de cette chaîne, on ne divife l’année ;
qu’en deux faifons : l’une, qui comprend l’hiver,
dure depuis octobre jufqu’en avril > l’autre faifon y
qui eft l’é té , règne depuis avril jufqu’en oétobre;
I l faut obferver que, pendant tout le tems de l ’été
même ., il n’y a pas un feiul jour où :les fommets les
plus élevés ne foient couverts de neiges..
- Cette chaîne de montagnes commence, par des
hauteurs plus ou moins fenfibles, à l’extrémité
occidentale de l’Egypte,& s’étend de l’eft à l'oueft
jufqu’ à l’Océan atlantique. Elle fépare la Barbarie
du défert aride du Saara. Cette barrière arrête les
nuages que les vents du nord pouffent vers l'intérieur
de l’Afrique i elle tempéré d’ailleUrs l’ar-
.deur brûlante de ceux qui fouflent de ce centré,
en forte qu’elle eft l’origine d’ une multitude de
ruiffeaux & de rivières qui vivifient- la face .fep-
tenrrionale, &caufent fa prodigieufe fertilité. Les
^vallées qui fillonnent les croupes du mont Atlas
s’élargiffent dans certaines parties de leurs cours ,
pour former de très-vaftes plaines, où la nature
étalé les tréfors d’une grande fécondité.? Les hor-
-des errantes, des Arabes y reftent difperfées juf-
qufà ce que leurs troupeaux en aient dévoré &
épuifé les productions, pour aller chercher en-
jfuiie d’autres habitations aufli mobiles. On fai,t que
cette nation abufe plutôt de la fécondité naturelle1
-de la terre ■, au 'elle ;n’ en ufe,
. : .Ces Nomades cukiyent, à la vérité , quelques
portions de terre aux environs de leurs tentes ; '
mais on ne peut fe diffimuler l’ imperfedion d’une
culture faite à la hâte, fans préparation comme
fans principes.Tl feroit à defirer que l’adivité plus
éclairée des Européens fe fût dirigée vers ces
contrées , qui font fi près de nous, & ils en au-
roient fait un meilleur ufage que les Arabes. La
végétation y préfente toute l ’énergie dont peut
être fufceptible une terre riche en principes de
v ie, qu’anime' la chaleur de l ’Afrique, devenue
d’ailleurs affez,modérée pour n’être point un obf-
tacle invincible au travail des hommes} elle nous
ôffriroit, avec moins d’embarras & de dépenfes,
les produétions que nous allons chercher en Amérique
; elle fe prêteroit à nos goûts fuperflus devenus
des befoins. On a trop négligé l’Afrique ;
elle auroit ouvert un vafte champ aux fpéculations
de notre adive cupidité, en nous donnant peut-
être moins de guerre à foutenir & plus de profits
à recueillir.
Il n’en auroit peut-être pas coûté beaucoup aux
Arabes errans, par goût plus que par néceffité,
à nous avoir cédé la placé , s’ ils n’avoient pas été
féduits par les avantages qu’ ils auroient vu réfùlter
pour nous d’une culture mieux entendue & d’ un
travail plus foutenu, & s’ils n’ avoient pas été tentés
de s’y affocier en qüittant un genre de vie qui
n’eft pas fans peine, & qui eft trop borné dans fes
j’ouiffances.
ATMOSPHERE. Ses modifications relatives a la
fàlubrité des habitans.
“ La Géograpkie-Phyfique doit s’occuper à rechercher
les différens effets que peuvent produire
fur les habitans , tant des vallées que des montagnes,
les différens états de l’ air j en conféquence
je crois devoir préfenter dans cet article les différentes
vues qu’on peut faire entrer dans ce plan
de recherches.
On s’eft beaucoup étudié, en médecine, à nous
décider fur l ’influence de l’dtmojphere , relativement
aux différens animaux, & particuliérement
auxhommes. Des hommes célèbres ont fuivi fcru-
puléufement les températures qui fe fuccédoîent
pendant une fuite d’années, & ont expofé avec
foin les effets qu’ ils croyoient en être les résultats.
'
Cependant puifque, de l’aveu de ces illuftres
obférvateurs, la même conftitution aérienne , ob-
fervée à différentes époques, n’a pas produit les
mêmes effets, il paroît-que l’influence de Yatrnof-
phire n’y a pas la feule part.
- Cependant toutes, les confidérations étant rapprochées,
on ne peut difconvenir que chaque lieu
d’habitation n’ait une température & une conftitution
locale qui lui foient propres -, mais on fait en
: même tems qu’ elles peuvent en être modifiées. On
feroit porté a croire que llair ne conferve une qualité
quelconque qu’autant-qu’ il croupit dans un
certain efpace. A mefure qu’il en eft chaffé, il
perd ce cara&ère local , pour fe laiffer modifier
par celui du territoire voifin qu’il inonde.
Outre cela, il y a une conftitution générale qui
varie fuivant les faifons ; car les faifons.caufent de
ces changemens donc nous venons de parler, foie
par les effets des vents, foit par ceux de la température
, puifqu’à la fuite de ces changemens
régnent des conftitutions particulières, qui font
produites par ces caufes locales.
On obferve ces différences bien marquées dans
les fymptômes des maladies. Ainfi l’on rencontre
la fièvre bilieufe, par exemple, avec un caractère
malin dans un endroit, tandis que cette fièvre fera
très-bénigne à une petite dilhnee de là.
La conftitution locale dépend en partie des émanations
des végétaux qui cioiflent fur les lieux,
de la nature du fo l, de fon expofition & de fon
élévation.
Après que l ’on eut coupé une grande quantité
de gérofliers dans l’île de Ternate, l’air en devint
mal-fain.
L ’air des montagnes de la Suiffe eft fort fain:
on le doit à fa légéreté. Mais la tranfpiration des
végétaux ne doit-elle pas contribuer à cette bonne
qualité ?
On fait que l’air du Pérou attaque le plomb &
le calcine > c ’eft l’air de la met. Dans les lieux où
il y à beaucoup de mines de cuivre, les habitans
ont généralement les dents affrétées. De même fi
les mines d’ arfenic du Cap de Bonne-Efpérance
font long-tems ouvertes, elles corrompent l ’air
de manière à faire périr les animaux dans les environs.
Combien ne cómpte-t-on pas de grottes
en Europe, d’où les exhalaifons fouterraines réunies
s’échappent,- & font périr ce qui en approche
lès ouvertures ? Les montagnes calcaires exhalent
une grande quantité d’air méphitique, fuivant
Black &: Prieftley. L’air fe ’ charge , coinmë on
vo it, de ces différens principes dans les contrées
où régnent les maflifs de craie , de marne &
d’argile.
J’ai dit d’ailleurs que le fite contribuoit à tous
ces effets. Je me bornerai dans ce moment à un
feul exemple,'qui m’ a frappé plufieurs fois.
Chippis eft un village du Valais, dans le dizain
de Sirre > il eft fitué au débouché de la vallée
d’Annevie, & dominé par les montagnes qui fervent
de bordures à cette grande vallée, & qui
peuvent avoir environ fïx cents toifes d’élévation.
Ces montagnes, très-fertiles, font occupées, pendant
l’é té , par un grand nombre de beftiaux. Il
femble que les exhalaifons dé ces animaux dev
a ien t fe diffiper par un air continuellement agité,
& fuivre l’impulfion des vents. Cependant tous
-ceux qui paffent à Chippis pendant l’é té , rencontrent
cette même odeur qu’on fent dans tous les
chalets de la montagne, & qui vient aboutir au
village par fa pefanteur fpécifique, & pefer fur les
habitans de ce village, qui font petits, laids, &
comme écrafés d’un pareil poids. Si l’on jette un
Géographie~Phyfique. Tome IL
coup d’oeil fur tous les villages placés aux embou*
chures des vallons du Valais & lur leurs habitans ,
on obfervera les mêmes effets de l’air. Le créti-
nifme le plus complet y règne, & les habitans en
font petits, laids & parëffeux. Cependant on remarque
que le mal s’étend affez rapidement, &
l’on eft étonné que, depuis peu de tems, le créti-
nifme de Martigny fe propage aujourd’hui à Mon-
thai, quoiqu’ il en foit éloigné de quatre lieues.
Les habitans de la Suiffe, fîtués au pied du Jura,
offrent des variétés biert frappantes. En fortant de
Neuchâtel pour rentrer dans le canton de Berne,
à peine a-t-on paffé le pont de la Th ie lle , qu’on
trouve un autre peuple, un autre langage, un autre
habillement. Il feroit difficile d’ en défigner les
caufes.
En fuivant la même chaîne de montagnes pour
entrer dans le canton de Soleure, on obferve un
changement marqué dans deux portions du même
village. Dans la partie qui" appartient au canton
de Soleu re, tout y paroît dans un état briiiant5 le
fang y eft beau : on y trouve d’autres figures. En
fortant de ce canton pour aller à Arau, on rencontre
encore un nouveau changement. Les belles Allemandes
font plus réfléchies, & l’on ne peut douter
que les caufes \ hyfiques n’ y influent beaucoup.
Quelques habiles médecins ont obfervé que les
remèdes qui leur ont réuffi dans cette capitale,
n’ont plus produit le même effet dans les mêmes
maladies à Bienne, qui n’ en eft qu’ a cinq lieues de
diftance.
Dans chacune des localités que je viens d’ indiquer
, les maladies préfentent aux obfervateurs des
différ ences marquées .dans les fymptômes & dans
les moyens cürarifs.
Quand les médecins auront-ils déterminé pour-
quoi les écrouelles font endémiques fur la côte du
lac de Genèvea & à Genève même? Pourquoi le
feorbut a-t-il fés localités ? Pourquoi il y a peu
d’écrouelles à Neuchare! ? Pourquoi on obferve
peu de fièvres tierces à Olten & à Berne, & beaucoup
plus à Saint-Aubin & à Neuchâtel ? Pourquoi
les maladies de poitrine entrent plus facilement
en luppuration dans un endroit que dans un
autre? Pourquoi à Saint-Aubin on n'obferve point
d’épidémies, mais feulement des maladies de faifon
? Pourquoi le jalap réuffit-i! mieux à Yverdun
que partout ailleurs ? Quand les médecins fauront '
déterminer les caufes de l’endémicité des maladies
, ils en développeront par-là le caraétère, &
la manière d’ y obvier fera bien claire & bien
fûre.
‘ Il paroît qu’ une correfpondance exaéte & fuivie
pourroit éclaircir tous les doutes , du moins en
grande partie i mais chaque médecin a fa façon de
voir & de fentir, d’après laquelle il juge & prononce
; car quelles grandes variétés d’opinion ne
rencohtre-t-on pas fur la même queftion ? Il fou-
droit donc que le même oeil vît tout par lui-
même, & , pour prendre des renfeignemens plus
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