
C e t expofé des cîrconfhnces qui concourent à
la formation de l'albâtre nous fait connoître dans
le plus grand détail, pourquoi fes carrières ne font
pas difpofées par bancs & par lits horizontaux, ni
interrompues par des fentes verticales comme
celles de la pierre & du marbre j il nous donne,
outre cela^ les moyens d'expliquer les différens phénomènes
que l'on remarque dans l'albâtre ; il nous
fait voir que fa demi-cranfparence vient du fpath
dont il eft compofé; que fes diverfes couleurs font
produites par ies différentes matières métalliques
qui fe mêlent au fpath} que les veines de lalbatre
en cercles , en ondes, en différens contours , font
formées vifiblement par les differentes'couches de
ftala&ites. Si l’on trouve même quelquefois des
Vides entre deux couches1, il eft vifible que Teaii
y paffoit en trop grande abondance pour que les
molécules des matières dont elle étoit chargée,
puffent être dépofées dans les ftala&ites} car l’eau, ;
qui eft le principal agent de la formation de l'al-
Datre, lorsqu'elle filtre en petite quantité, ne peut
déjpofer aucune fubftance criftalline & fpathique
fîtot qu’elle commence à couler en grand volume
& avec une certaine viteffe.
. ÀRCY-SUR-AU BE, petite ville fituée fur la
rivière d’Aube , navigable1 dans cette partie du
département de l’Aube} ce qui favorife un commerce
de grainspour la fourniture de Paris : outre
cela, il y a une manufacture de bas de coton affez ;
bien montée, & difperfée un peu dans la campagne.
En revenant à mon objet principal, je dois
m’occuper de la conftitution phyfique des environs
de cette v ille, telle que je l’ai obfervée avec
foin. J’y ai d’ abord trouvé, à un niveau affez élevé
au deffus des eaux courantes de la rivière, de fort
grands dépôts de graviers calcaires & plats, ainfi
que des terres jaunes marneufes,. le tout fur un
fond de craie : outre cela, le long du canal aétuel
de l'Aube, qui eft encaiffée par ces dépôts, j’ai
fuivi des amas de terres argileufes , q u i, par les
effets de la defficcation, font la plupart du tems
prifmatifees d’une manière affez régulière. Ces
amas argileux font établis affez généralement fur
îes graviers dont j'ai fait mention ci - devant :
c’eft de là que j'ai vu plufieurs petites fources ou
filets d'eau affez abondans, qui s'épanchent dans
la rivière. J'ai remarqué d’ailleurs des fources qui
fortent des anciens bords que l'Aube, en creufant
fa vallée, a îaiffés à découvert, & dont les eaux
fe rendent de même à cette rivière, à travers les
dépôts formés, comme nous l'avons d i t d e terres
& de graviers.
Je dois dire ici que ces graviers calcaires &
plats ont été amenés par la rivière1 des parties fu-
périeures de fa v allée, qui fe trouvent au deffus
du niaffif de la craie : cè font originairement de
petits fragmensde pierres d’un grain ferré, & qui,
dans leur tranfport, ont été ufés & polis} ils n'appartiennes:
donc pas ? comme on voit, au maflif
de la craie, au milieu duquel l'Aube a une grande
partie de fon cours.
Avant d’arriver à la ville d‘Arcy de la partie de
l’oueft, on trouve depuis Mailiy beaucoup de terres
rouges & de marnes jaunes qui couvrent la
i furfacé du fol crayeux, comme entre Châlons &
Reims, vers les grandes Loges. Je penfe que ce
font les reftes de l ’ancienne couverture de la craie,
qu’on peut voir encore fubfiftans en entier dans
certaines hauteurs ifolées, comme à Somme-Puis,
! à Somme-Sous, &c. & dont les débris font dif-
! perfés aux environs des buttes les plus élevées de
ce maffif. Au refte , je ferai connoître lescirconf-
tances de cette curieufe & ancienne difpofition des
chofes aux articles C r a i e , C h a m p a g n e , & c .
ARDÈCHE (Département de T ) . Je dois indiquer
plufieurs phénomènes remarquables dans
ce département, après avoir fait connoître la dif-
tribution des trois ordres-de maffifs que j’ai rencontrés
à fa furface. D’abord on peut y obferver
des maffifs de granit dans trois contrées que j’ai
vues toutes trois : ce font les environs d’Annonay,
ceux du Mezen, & les montagnes du Coiron} en-
fuite des dépôts calcaires à couches horizontales
& inclinées} en troifième lieu, deux centres dif-
ferens d’éruptions volcaniques,que j’ai cru devoir
diftinguer fous deux époques particulières très-
remarquables. D’abord tous les volcans de la première
& plus récente époque réfident, tant le
long de la partie inférieure de l’Ardèche, que dans
les montagnes du Coiron : c ’eft là où les cratères
ouverts ont vèrfé des courans de laves’& de ba-
faltes dans les vallées plus ou moins approfondies,
tous caractères que j’ai aflignés aux volcans de cette
époque. Je puis citer ici particuliérement le volcan
de la Coupe , qui préfente un beau cratère, & ,
au pied de cette montagne, des courans de bafaites
prifmatiques qui occupent la cuve d'une vallée
profonde. Enfuite viennent îes volcans très-im-
portans du Mezen & de fes environs, où non-
feulement les cratères ont difparu & ont fait place
a des culots d’un volume confidérable, mais encore
on y trouve des courans diftribués fur les plateaux
élevés des diverfes croupes de vallées très-
étendues. C'eft à ce centre très-élevé des éruptions
volcaniques que fe montrent les caractères
que j ’ai cru devoir fixer à la fécondé époque des*
volcans.^Effectivement, je puis noter ici le courant
forti du culot des Etables, & q u i, après avoir
parcouru la partie fupérieure de la croupe fepten-
trionale de la Gafeille, s’étend beaucoup au-delà
du Monaftier. Ainfi, outre les maffifs de granit &
des couches calcaires qui occupent chacun fépa-
rément d’affez grandes contrées du»département,
on peut y obferver avec intérêt des produits du
feu , qui recouvrent de leur côté d’affez grands
territoires, & y montrent, comme je l’ai d it, des
difpofitions différentes. On remarque d’ailleurs
qu’fci c’eft à travers les fchiftes & les grès que
les feux foiiterrains ont fait leurs éruptions, Sc
ont jeté des courans de laves de plufieurs fortes ,
& furtout des bafaltes prifmatiques, pendant que
ces mêmes feux fe font fait jour à travers les dépôts
calcaires Superficiels, deffous lefquels le feu
trouve des matières combuftibles & d’ardens
foyers fans doute.
En parcourant les plaines du Vivarais, & fui-
vant les différens amas de cailloux roulés qui s’y
trouvoient accumulés dans plufieurs culs-de-ffacs,
je n’ai pu me diffimuler qu’ ils m’offroient un des
grands effets de 1 invafion de la mer dans la vallée-
golfe du Rhône.
J’y vis d’abord les déblais des différens maflifs
graniteux , fchifteux , calcaires, à couches horizontales
ou inclinées, à grain fin & à gros grain,
enfin volcaniques , foit produits des feux fouter-
rains au milieu des fchiftes , foit ceux d«*s éruptions
à travers les couches calcaires de différens
ordres.
D’après toutes ces obfervations, il me fera facile
de diftribuer ces cailloux roulés en trois clafi*
fes, d’après Its maffifs calcaires, fchifteux & volcaniques.
Çes trois fortes de cailloux font d’abord dues à
l’aéfion des eaux courantes, à la furfaçe de ces
trois maflifs qui, parcourant les terrains calcaires ,
fchifteux, volcanifes, ont entraîné les lragmens
de pierres qu’ils en ont détachés jufque dans le
baflïn de la mer, & furtout dans celui qu’elle oc-
cupoit lors de fa dernière invafion dans la vallée*
golfe du Rhône.
On fe uomperoit beaucoup fi l'on penfoit que
ces fragmens ont été arrondis & polis par le fimple
tranfport des eaux courantes : il m’a toujours paru
néceffaire d'y faire intervenir les flots de la mer,
St leur balottage contre les bords de fon baffin &
entr’eux. Ainfi 1 ür poliment général annonce l’opération
particulière des flots de la mey, qui fe
montre à ceux qui favent obferver aux deux côtés
de la grande vallée du Rhône, & furtout dans le
département de l ’Ardèche, comme fur les bords
de l’ ifè re , &c.
A p r è s c e tra v a il d e la m e r & ap rès fa r e t r a i t e ,
o n r e t ro u v e c e s c a i llo u x d iftr ib u é s pa r le s e au x
coû ta n te s d es r iv iè r e s & des ru iffe au x d a n s .to u te
l’ é ten d u e d e leu r s v a llé e s & v a llo n s } m a is , je le
r é p è t e , c e ne fo n t pas c e s e au x c o u ran te s q u i les
ont p o lis & a r ro n d is ,
Quoique certaines parties de la région volcani-
fée foient fupérieures aux régions fchifteufes &
calcaires, & qu’elles aient fourni des fragmens de
ba faite aux vallées de ces deux dernières régions,
ce ne font point leurs ruiffeaux & leurs rivières qui
les ont arrondis, mais les flots de la mer qui les ont
repouffes dans Es culs-de-facs des vallées & vallons,
& ies y ont â- cumulés > mais ce ne fut qu’aprèi la
retraite de la mer , que ces cailloux defeendus
dans 1’ érat brut des différentes régions, &: polis
par fes flots, ont été diftribués dans les différentes
" vallées du Vivarais, depuis les cuîs-de-facs où ils
ont été d'abord dépofes, jufqu’ au Rhône. Je n’ in-
fitterai pas davantage fur les raifpns que je pour-
rois ajouter ici pour détruire l’opinion affez généralement
adoptée, & contraire à celle que je crois
devoir expofer ici fuccinfrement, vu les grands
avantages que la fituation du département de Ivfr-
dêche m'ont paru préfenter pour faire connoître la
vérité fur cet article, important de la géographie-
phyfique. En général, je dois dire que les eaux
courantes des rivières & des ruiffeaux du département
de Y Ardèche n'ont jamais pu polir & arrondir
les pierres les plus dures qui fe trouvent
diftribuées dans les vallées, & que leurs formes
aéfuelles font l’ouvrage des flots de la mer contre
fes rivages.
Pour faire connoître un des maflifs graniteux
du département de l ’Ardèche, je vais donner ici
un précis de çe, que j’ai ohfervé aux environs
d’Annonay, dans les différens féjotirs que j'y ai
faits, ( Vqyè-[ ANNONAY.)
Pour me rendre à Annonay de Saint-Etienne,
j'ai traverfé le Mofit Pilât. J’y rencontrai d'abord;
dts fchiftes micacés , & des gçès ou pierres de
fable, toutes f bftançes eorrefpondantes à celles
qu’on peut obfeiver dans les montagnes du Mezen
ôst du Coiron.
Etant parvenu à une certaine hauteur dans le
Pilât, je trouvai le fehifte à lames verticales : ce
même fehifte micacé fe prolonge fur une aflèz
grande diftanee, après quoi fuccède le granit rayé
ou le gneiff mêié au granit à criftallifation uniforme,
& coupé par des quartz. Les fchiftes à
bandes ondées s'obfervent vers la Guerinière ;
mais entre ce village & Annonay, pn ne voit plus
que des fchiftes terreux : telle eft la variété des
compofitions pierreufes que le Mont Pilât offre
aux obfervateurs qui les fuivent dans les coupures
que les eaux y ont faites à diverfes époques aifées
à faifir.
En defeendant à Annonay, tout eft granit à
grains uniformément criftallifés : on y voit fur-
tout des trape\es, produits de la defficcation, fous
des formes affez régulières, & ordinairement d’ un
grand volume. Lorfqu’on eft parvenu au pied de
la montagne, on troiive des blocs graniteux dif-
perfés.fur les croupes} & comme iis fe décompo-
fent très-abondamment, ils ont recouvert tous fes
■ environs de débris , de mica, de quartz & de feld-
fpaths fort ternis.
Plufieurs accidens annoncent ces décompofi-
tions. D abord les fentes de defficcation par ief-
quelles les eaux attaquent les granits avant d’être
chargées de principes terreux , commencent par
fe ternir beaucoup : auffi, le long de< bords des
deux rivières d’Annonay, il n’y a guère que les
noyaux des maffes trapézoïdales qui aient confervé
une criftalîifatio» vive & entière : p’eft là que les
quartz & les feld-fpaths font briHans, & que les
1 micas préfenten; des teintes bleues.
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