
i°. Le village de Satinas > ainfi nommé d*une
fource d'eau lalée , d'où l’on retire du fel par.
l’ébullition»
Le coteau où eft fitilé Salinas eft très-haut ; c’eft
le point le plus élevé de la province de Guipuf-
cof • on y trouve, malgré cela, des coquillages
pétrifiés dans une efpèçe de marbre bleu , veiné
de fpath 8c pyriteux.
2°. Le bourg de Mondragon eft vers l’eft de
Salinas : dans l'intervalle on trouve des géodes 8c
des pierres d’aigles.
A une lieue de Mondragon eft une naine de fer
très-célèbre : cette mine réfide dans une argile
rouge ; elle donne un acier naturel. Cependant,
fans l’apprêt de la cémentation que l’on emploie
ordinairement pour faire l’acier, on ne pourroit
en faire de bonnes limes ni de bons rafoirs. Cette
mine donne quarante livres de métal par cent de
minerai, mais il eft un peu dur à fondre.
Dans toutes ces montagnes il y a très-peu de
fources j quoiqu’il y pleuve fréquemment. 11 pa-
roît que cet effet général provient de la force des
terres réfidantes à la furfacé du fol, 8c qui s’op-
pofe à la filtration de l’eau pluviale dans les premières
couches. Les rivières n’y font en confé-
quence entretenues que par la fonte des neiges.
D’ailleurs , ces montagnes font bien boifées. Indépendamment
des châtaigniers, des plantations
nombreufes de chênes 8c des autres arbres dont
elles font couvertes, il s’y trouve auffi beaucoup
de noyers, de noifetiers, une grande variété de
fruits, 8c des pommiers à cidre fort nombreux.
On peut croire que les pommes à cidre de Normandie
&des autres provinces voifines y ont été
introduites par des provins tirés de ces contrées
d e l’Efpagne, où les pommiers de cette efpèce
font indigènes. Cette introduction s'eft faite vraisemblablement
lorfque les rois de Navarre pôffé-
doient des terres en Normandie; ce qui établiffoit
une grande correfpondance entre fes habitans &
les Navarrois. On aura connu la boiffon efpagnole,
& l’on aura defiré d’avoir le fruit qui la procuroir.
Les montagnes qui s’étendent de l’oueft à l’eft
fous le 43e. degré de latitude forment, avec celles
qui fe prolongent au fud fous lés 16e. à 17e. degrés,
un grand baffin, dont les eaux fe rendent
dans I’Ebre. On diftingue furtout YEga3 YArga, &
Y Aragon} qui donne fon nom à cette vafte contrée.
VArga paffe à Pampelune. Tout près de cette
ville, furtout du côté du nord, on ne trouve plus
de pierres roulées ; mais en s’éloignant, on trouve
des grès arrondis ; ils réfident dans le fond d’un
vallon formé avec le tems par un petit ruiffeau qui
coule au milieu de deux coteaux compofés de terre
& de pierres calcaires, & couverts de vignes &
de grains. Ces coteaux s’étendent jufqu’à Pampe-
lune : là fe trouve auffi une montagne de roche»
calcaire bleuâtre, garnie de très-beaux hêtres,
dans fa partie fupérieure : cette montagne eft une
des plus élevées du canton. |
On voit, fuivant M. Bowles, dans la plaine au
nord de Pampelune ,Jes effets de -la décompofi-
tion infenfible de la fubft.ance calcaire ; car dans
une ouverture prefque perpendiculaire de plus de
cent pieds de hauteur, formée par la petite rivière
qui y paffe, on apperçoit une terre que l’on
prendroit au premier coup d’oe il, 8c même au
ta£t, pour de l’argile , 8c qui n’en eft cependant
pas ; c’eft vifiblement une terre calcaire , mêlée
de très-peu d’argile , qui réfulte des plantes pourries.
Cette terre bleuâtre fe trouve aufli dans le
voifinage de Pampelune, mais elle y eft plus dure :
il y a même un coteau où elle l'eft au point, qu’on
peut la confidérer comme une pierre.
En s’approchant de l’Ebre, on trouve fucceffi-
vement des pierres roulées dans une belle plaine
de deux lieues 8c demie, des terres cultivées, des
montagnes de roches calcaires pelées, & enfin une
belle plaine de cinq lieues, où font, i°. des oliviers'
5 20. des vignes; 3W. des champs couverts de
blé 8c d’orge ; 40. des terres prefqu’incultes.
Sur le haut d’une chaîne de montagnes qui court
de l’oueft à l’eft environ deux lieues, eft un petit
village nommé Vaider a. Sur la côte où eft ce village
, il fe trouve une mine de fel gemme 3 que l’on
découvre même hors de terre : cette mine peut
avoir quatre cents pas de longueur. Plufieurs de fes,
galeries latérales font foutenues en plus de quatre-
• vingts endroits par des piliers de fel ou de gypfe,
que les mineurs y laiffent de diftance en diftance,
avec affez d’intelligence pour que l’intérieur ref-
femble à une églife gothique. Le fel fuit la direc-.
tion de la collinéen s’inclinant un peu vers le nord,
comme les veines de gypfe ; il eft renfermé dans
un efpace d’environ cinq pieds d’élévation, fans
qu’il paroiffe la moindre variation dans tout ce que
l’on découvre. On voit un ràmeau vers la droite,
où le filon falin fuit exaétement-Tinclinaifon- du
coteau, dont la pente eft confidérable dans cette
partie. Cetté.couche de fel, de cinq pieds d’épaif-
feur, defcend dans le vallon pour gagner la colline
qui eft en face. Le refte de la mine eft compofé
de différentes couches alternatives de gypfe , de
fel blanc, de terre faline, -de fel pierre, &c. la
plupart de ces fubftances n’ayant que quelques pouces
d’épaiffeur.
La montagne la plus intéreffante que l’on trouve
enfuite à la gauche de l’Ebre, eft le Monferat.
Cette montagne, fur laquelle eft une abbaye célèbre
, a environ huit lieues de tour j elle eft cora-
pofée de plufieurs maffes pyramidales, féparées
entr’elles vers leur fommet, 8c rangées à peu près
comme un jeu de quilles. Le ciment qui uniffoit
les différentes pierres de cette montagne ayant été.
“détruit parle tems, 8c la terre produite par cette
deftrùétion ayant été emportée par les eaux, il.
s’eft formé des ravines qui partagent le Monferat.
en une infinité d’angles faillans; elle eft outre cela
entourée de collines, dont plufieurs vont fe join-.
dre aux Pyrénées»
Le Monferat eft compofé de pierres calcaires
arrondies, conglutinées avec de.la terre calcaire
jaune 8c un peu de fable- Cette pierre reffemble
parfaitement à la brèche d’Alep, marbre.fort recherché,
excepté que les taches n’en font pas
auffi fines, & que les pierres font plus groffesque
celles du Levant : on y trouve auffi beaucoup de
grès, ainfi que des quartz, blancs arrondis & veinés
de blanc 8c de rouge, avec des pierres de touche
enchâffées dans de la brèche.
En général, le.corps de cette montagne eft
formé de maffes énormes de rochers difpofés par
couches de toutes fortes d’épaiifeur, depuis un
demi-pied jufqu’à cent pieds, & les pyramides qui
s’élèvent du centre de la montagne font compo-
fées de pierres de volumes très-différens, puif-
qu’il s’en trouve de groffes comme la tête , 8c
d’autres feulement comme un grain de chenevis.
Le bas de la montagne, qui s’eft déjà décompofé,
s’eft converti en bonne terre, abondante en ble
& en vin. Dans les endroits qui ne font pas cultivés,
il croît plufieurs efpèces d’arbres, dont les
principaux font le pin, l’arboufier , le chêne,'le
genevrier, 8cc.
A mefure qu’on s’élève fur cette montagne, on
s’apperçoit que les pierres deviennent plus dures,
& les plantes plus rares. Enfin, lorfqu’on eft arrivé
au fommet, on ne trouve que des roches pelées,
féparées en colonnes, formant des pyramides depuis
cent jufqu’à cent cinquante pieds d’élévation.
On eft étonné, en parcourant ces roches menaçantes,
de rencontrer des vallons délicieux, où
l’on trouve la verdure & l’ombrage au centre de
la ftérilité ; de voir des cafcades naturelles fe précipiter
de la cime de ces pointes hériffées, lef-
quelles ne troublent le filence qui règne dans cet
afyle, que pour le rendre plus intéreffant.
Cardona, à peu près au nord de Monferat, eft
remarquable par le rocher de fel, au pied duquel
elle eft fi tuée. Ce rocher eft un bloc de fel maffif,
qui s’élève de terre d’environ quatre à cinq cents
pieds, fans crevaffes, fans fentes & fans couches :
ce qu’il y a de fingulier, c’eft qu’on ne trouve
pas de gypfe dans fes environs. Ce bloc peut avoir
une lieue de circuit 5 8c quant à fon élévation, elle
eft la même que celle des montagnes circonvoifi-
nes. En général, le fel en eft.blanc : il s’y en trouve
cependant de roux. Ce qu’il y a de fingulier, c’eft
que cette couleur rouffè a fi peu de confiftance,
qu’en faifant moudre le fel elle difparoît, & que
le fel refte blanc.
Ce fel fe travaille dans les environs,d Cardona
& ailleurs., comme fi c’étoit du criftâl, & les ouvrages
que l’on en fait, font aufli tranfparens ; il
eft fi dur, que ces pièces* n’éprouvent aucune
perte en les trempant dans l ’eau, pourvu qu’on
ne les.y Jaifle pas l©ng-te.ips, Sc qu'on les effuie
après qu’on les en a retirées : c’eft même le moyen
de donner plus de tranfparence à ces ouvrages.
On voit par ce que nous avons dit de la mont
agne de Cardona, qu’elle eft une carrière de fel
inépuifable. Ce minéral s’y préfente fous un grand
nombre de couleurs; de forte que, lorfqu elle eft
éclairée des rayons du foleil, on croit voir des
maffes de diamans, de rubis 8c d’émeraudes : on
fait de ce fe l, des vafes, des urnes '& quantité
d’ouvrages précieux.. Les couleurs principales que
l’on y voit, font l’orangé, le violet, le vert 8c le
bleu. Une des particularités de cette montagne,
c’eft qu’elle eft en partie couverte d’herbes 8c de
plantes, & que fa cime eft ombragée par une forêt
de pins.
Quoique la pluie ne diminue pas la ma fie faline
de cette montagne, la rivière qui baigne fes bords
eft falée , & le devient encore davantage quand il
pleut : les poiffons y .meurent; mais cet accident
ne s’étend pas au-delà de trois lieues.
Un peu à l’eft eft la ville de Vique, près de laquelle
on trouve des améthyftes, des topazes 8c des
criftaux.colorés, que l’on travaille à Barcelonne. •
Dans le baffin qui renferme les eaux que reçoit
l’Ebre à fa droite, on ne remarquera que les deux
endroits fuivans.
i°. Alcaniç eft recommandable en hiftoire naturelle
par une mine d’alun qui n’eft mélangé d’aucun
corps étranger :.il fuffit, pour l’obtenir pur,
d’en écarter le limon. Une fimple leffive, que l’on
fait paffer au filtre , remplit cet objet. Cette le fi-,
five, tranfvafée 8c mife à criftallifer, donne un
très-bel alun.
M. Bowles fe plaint de ce que les Efpagnols font
affez peu éclairés fur leurs intérêts, pour vendre à
des Français l’alun tout brut, qui, après avoiivété
purifié, fe vend fort cher aux teinturiers efpagnols.
2°. Daroça eft fitué le long d’un grand ravin,
entre deux collines. Comme fa fiiuation l’expofoit
néceflairemerit à être incommodé par les eaux,
on a percé une colline fur une longueur fomcon-
fidérable pour faciliter l’écoulement dés eaux fu-
périeures, fans qu’elles entraffènt dans la ville.
Les montagnes qui font dans la partie de l’eft,
font compofées d’ardoifes 8c de pierres calcaires.
De la chaîne de montagnes qui s'étend depuis Mont-
Caio jufquau cap de Gâte.
Cette chaîne,qui commence à l’endroit le plus
élevé de l’Efpagne, ne laiffe pas à l’orient un très-
grand baffin entr’elle & la Méditerranée ; mais à
l’oueft elle a plufieurs branches qui forment les-
baffins d’autant de grands fleuves.
La montagne appelée Mont-Caio eft une efpèce-
de grand plateau , tels .que ceux des Alpes ou des
Cévennes : le Duero 8c plufieurs autres rivières y
prennent naiffancé. Cette montagne eft de roches
calcaires, qui, fuivant M. Bowles, fe décompo-
fent continuellement, 8c fe réduifent en terre r
auffi le fol, devenu par cette décompofition très-
produétif,eft-il couvert de toutes fortes de plantes*