entiers dont elle a été détachée ont donc dû aitffî
leur conflruètion au travail des eaux. Outre cela
il faut croire qu’ils n’ont pas toujours été continens
découverts, & qu’ il y a eu un tems où ils
ont é té , par rapport à d’autres habitans, ce que
les lits de nos vallées font par rapport à nous.
Toutes ces pierres détachées , dépofant ainfi
d’ une manière invincille quelles ont été les parties
d’un tout de même nature qu’elles, nous apprennent
aufli qu’avaut l’accident qui les en a dé-1
tachées, ces tous fubfiftoient comme nous l’avons
dit; qu’enfin ces tous eux-mêmes n’ont dû leur
çonftruétion & leur compofition qu’à la démolition
& à la décompofition de mallifs préexiftans
à leur formation. Les anciens continens n’étoient
donc point fimples ?
7 Je pourrois peut-être le prouver plus en grand
par la variété & la dtfpofition même des bancs de
nos continens ; mais je fupprime ces difcuflions
pour me borner aux pierres aggrégées..
Les pièces détachées dont les1 poudings font
compotes, pouvant être confidérées comme des
débris d’autres aggrégés encore compofés, il n’y
a pas de doute que toutes, ces pièces ne foutînflent
une autre analyfe femblable à celle dont nous
avons annoncé la marche & les détails, &i qui nous
indiquevoit des époques fort anciennes. Le marb
re , dit le Père Caftel dans fou Traité de La Fe-
fanteur univerfelle, liv. I , §. I , eftle fruit de mille
générations fuccelfives.
Rien ne peut mieux le prouver que les obfer-
vations de l’abbé Sauvage fur le rocher de cailloutage,,,
connu à Alais fous le nom à[ameula: on
verra dans fes réfultats & dans l’expolition „des
détails de cette grande colle dion de frâgmens de
pierres, la plus grande conformité avec les principes
que nous venons d’analyfer. Nous'renyoyons.
en conféquence à l’article Ameüla, où tous ces
phénomènes feront développés. Le marbre n’eft
pas le feul compofé dont l’analyfe mène aufli à
une autre analyfe. Dans les carrières de nos pierres
communes l’ on trouve des blocs ifolésde differens
grains, de différentes conftruétipns;;desmorceaux
de grés, de cailloux, de pierres à fufil,: roulés,
dont la forme & la pofition annoncent qu’ils ne
font pas dans le lieu où ils ont été originairement
produits. Ces morceaux font aufli eux-mêmes remplis
d£ matière fouvent fi étrangère à celle qui
les renferme : on ne peut douter pour lors qu’avec
tin examen férieux l’on n’y découvrît des indices
de productions animales & végétales, qui offri-
roient les preuves d’une fituation différente &
plus ancienne. Enfin on ne peut rien trouver dans
l,es differens maflifs qui ne puifie donner ieu à une
analyfe femblable plus ou moins fuivie ; & il eft
fur que fi l’on interroge le moindre fragment de
ffierre égaré dans les fonds de cuve de nos val-
ées., il n’y en a pas un qui ne nous conduife à une
fuite d’époques très-alongée. Cependant nous devons
dire ici qu’au-delà de deux; ou trois de ces
révolutions, nous ne pouvons plus diflinguer nettement
la fucceftion des faits, & que toutes ces
matières fe fouftraient à notre analyle par la peti-
teffe de leurs élémens, par leur altération & par
la multitude de leurs fubdivifions.
Si nous voulions ici faire quelques recherches
fur la durée des différens maflifs qui ont éprouvé
quelques deftruêtions, fur l’époque de leur exif-«
tence, ce feroit une entreprife qui nous écarteroit
de notre objet.
L’analyfe dts compofés dont nous nous fommes
occupés ne nous a pas mené à un réfultat plus
fimple. Nous n’avons découvert que des opérations
fuccelfives & femblables> 8c à l’égara des
matières terreftres, le dernier terme où nous
fommes parvenus n’a différé en rien du premier :
ce font des fubftances également compofées,.également
fujètes à la décompofition. Nous n’y avons
vù pour dernier terme que ce qui demande d’avoir
été précédé d’une infinité d’autres. Nous trouvons
conftamment des mélanges de criftaux, de
cailloux, de graviers, de.glaifes, de dépouilles
d’animaux, de débris de végétaux. Nous y rencontrons
mêmes difpofitions dans toutes les parties,
quoique fous:différens afpeéts : toujours des
bancs & des lits ., toujours des.mers & des conti-
( nens, toujours des effets d’une organifation fuc-
ceffive, lente, femblable à la plus récente; toujours
auffi les mêmes lois & par conféquent la
même marche dans la nature. Toutes ces confi-
dérations doivent nous porter à. croire que tant
que nos analyfes ne nous éloigneront pas plus des
matières & des formes que nous connoiffons, &
ne nous ries offriront point plus fimples dans leur
nature & dans leur arrangement, nous pouvons
croire, dis-je, que nous fommes toujours infiniment
éloignés de l’organifation primitive & de la
première époque de toutes chofes.
Cependant, dira-t-on, fi tout ce qui exifte de
plus entier fur la terre ne nous rappelle que des
ruines ; s’il n V relie rien qui ait quelque rapport
à fa forme & a fon organifation primitive ; fi nous
n’ y pouvons voir autre chofe, finon qu’elle n’a
point été fubitement conftrüite, dans l’état où elle
t f t , avec des bancs de pierres , de craies , d’argile
, de marbres & des groupes de montagnes,
laquelle organifation n’a pas été ainfi conftituée
par une opération fubite & fimultanée:. effectivement,
comment tous les bancs r,enfermeroient-ils,
des criftaux de forme & nature différentes, des
fables, des graviers, des coquillages; & autres
fubftances terreftres & animales, s’ils avoient été
. créés fubitement,à cet effet ? Si toutes cés fubftances
ne nous annoncent enfemble ou féparément
que des fucceffions d’opérations fort longues tk
antérieures à toutes.les époques connues, quelle
idée faut-il donc fe former du Monde avant
qu’il y eût des bancs de pierres, de fables, dé
marbres., d’argile , de grès ? avant qu’il y eût des
vallées 8c des montagnes? Quel tout ..pouvoir- il
conftituer
conflituer fi toutes ces parties n'exiftoient pas ?
A ces importantes queftions, je réponds que
rien dans la nature ne pouvant retracer le premier
inftant, le premier fpcâacle ou'a pu offrir une
terre naiffante , c’eft une recherche qui eft an
deiïus de notre intelligence & de nos connoifiances
aéluelles. 11 fufifit au re lie , pour être convaincu
de ce que nous ne pouvons nous repréfenter, de
nous attacher à tout ce qui prouve que la terre
n‘a point exillé de tout tems telle quelle eft. Nous
ne pouvons nous diflimuler que fans des eaux pref-
qu’univerfelles, il étoit impoflible de faire intervenir
dans nos aggrégés des vafes & des depots
de toutes fortes, les diftribuer autour de la terre
bancs fur bancs, & répandte partout les feis, les
principes d'une infinité de fubftances végétales,
enfin les débris des animaux & des poiffons de
toute efpèce. Comment fans eau faire vivre &
multiplier ces coquillages dont les dépouilles font
la maffe de nos pierres, comme nos pierres com-
pofent prefque toute la maffe de nos continens ?
L’eau ne devoit-elle pas paroître aux hommes, non-
feulement la matrice de tout ce monde, tel qu'il
s'eft montré confirait à leurs' premiers regards?
Comment donc le plus grand nombre de ces ob-
fervateurs a - t - i l été d'abord tellement furpris,
qu'il a ofé appeler défordre la marche la plus fimple
, la plus générale que pouvoit choifir 1a nature
? ■
- Ce fera donc fur ces principes que nous fuivrons
bien en-deçà du premier terme l'analyfe & la réunion
de tous ces différens rélultats des opérations
de la nature, [bit qu'ils foient au dedans ou au
dehors de la terre, parce que nous pourrons lire
dans ces monumens, & furtout pénétrer a une certaine
profondeur dans fon fein. D'ailleurs, comme
il eft arrivé à l’intérieur & à l’extérieur de cette
grande maffe, dans les feules & petites parties
que nous en connoiffons, tant de changemens ,ne
fothmés-nouspas autorités àfoupçonner uneinfinité
d’autres révolutions dans ce que nous ne connoiffons
pas ? Ne femble-t-il pas que c'eft peu hafarder
préfentement, que de regarder le globe de la terre
comme un être qui a cela de commun avec tous
les autres êtres aâifs & paflifs, de renfermer au
dedans de lui-même des principes de vie' & de
mort, de pouvoir être dérangé & troublé par
une infinité d'agens? C’ eft peu hafarder de le
'confidérer dans la maffe totale comme on confi-
dère chaque partie de la matière qui ne périt pas,
‘ mais qui change fans ceffe. C’eft peu hafarder que
de le confidérer enfin comme un compofé qui,
expofé à l’aétion & au travail continuel de quelques
parties & de certains agens extérieurs, doit,
ainfi que tout ce qui eft o tg a n ifé s 'a ffa ib lir ,
■ s’épuiïer peu à peu & fe détruire, c’eft-à-diie,
changer de forme, de pofition, &c.
En reprenant maintenant les conféquences qu’on
peut déduire de tout ce qui précède, il me paroît
s'enfuivre d’abord, i° . quels formation des cou-
Géographie-Phyjique. Tome U .
ches ne remonte pas jufqu’à l ’antiquité P*!-18
reculée 3 i° . que tous les rochers compofés de-
çoquilles ont été formés d’un limon 8c d une paie
molle qui ont fervi à envelopper les coquillages;
3°. que les montagnes & les couches font M p a
rieures à la génération & à la vie des coquillages
quelles contiennent; 40. que le.mélange 8c 1 intime
union des coquillages avec les rochers boiffeverfes
prouvent que les uns & les autres eurent le meme.,
fort ; que Le limon 8c les coquillages fe pétrifièrent
d’abord dans le même tems ; qu’ ils furent élevés
à la fois au deffus des plaines ; qu ils ont
éprouvé enfemble les mêmes révolutions 8c les-
mêmes bouleverfemens.
Toutes ces conféquences font extrêmement
fenfibles, 8c fe déduifent d’axiomes très-fimples :
il ne faut que des yeux pour les obferver & les
| reconnoître ; car il n’y a pas un feul endroit de la
terre qui ne nous montre plufieurs conftruêhons
& démolitions antérieures à la plus ancienne dif-
pofition que nous pouvons lui fuppofer. Les marbres
que nous appelons brèches , ne font compofés^
que de pierres brifées, qui ont leurs veines particulières
& leur grain différent de la matière qui
lès lie. Ces marbres font rarement par bancs, mais
ordinairement par rognons , par blocs entaffés les
uns fur les autres, & ifolés. Or, il eft facile de fe
retracer le plan des époques que ces amas de marbres
nous font connoitre.
■ Ainfi donc, i°. il y eut utytems où les eaux ont
fait un dépôt en un lieu quelconque ; 2°. il fut un
tems pendant lequel ce dépôt s’eft durci & pétrifié;
3°. il fut un tems où de certains mouvemenS
ont brifé ce dépôt & l'ont réduit en fra^mens,
qui ont roulé long-tems & qui fe font a la fin
accumulés dans une vafe étrangère; 40. il fut urt
tems où ce nouveau mélange, compofé de vaftî
& de frâgmens roulés, s'eft aufli durci & pétrifie
en une feule mafîe & en une feule couche ; 50. il
fut un tems où ces débris confolidés enfemble ont
été de nouveau ébranlés, fouleves & brués en
quartiers de rochers que l’aêtion des differens
agens qui les ont bouleverfés, a difperfés dans certains
lieux & a entaffés irrégulièrement dans
d’autres. . . ^
C ’eft un fait certain & indubitable, par tout cô
que nous avons dit & par tout ce que 1 on peut
obferver, que l’ordre & la difpofition de nos terrains
font entièrement l’ouvrage de l’eau : il eft
vifible que la terre lui doit to u t, & quant à la
difpofition intérieure de ce que nous connoiffons
de fa maffe, & quant à Celle de fa fuperficie. Sans
parler de deux grands effets qu’ elle a opérés dans
les crifes de la nature, tous les jours l*eau la tourmente
en détail, entraîne peu à peu fes débris &
les dépofe en tous lieux : elle les reprend & les
abandonne, en forme des compofés & les détruit.
Cet élément eft toujours agiflant fur la terre, qui
lui eft foumife lorfqu’ il eft en mouvement. Mais
les parties de la terre,, en cédant, obéiflent toi^
1 r