
parlé , annonce visiblement la deftru&ion conti-
riuelie de cette ma de,
- Du haut du grand abîme, qui eft proprement
une ravine confidérable, il fe détache à tout moment
des rochers, dont la chute produit un bruit
effroyable, 8c tous ces débris font des pierres
noirâtres, dont la plupart font très-dures.
, On n’y rencontre d'animaux vivans qu’au milieu
& au bas de la montagne. Ceux qui occupent la
première région, font des bergers 8c des troupeaux.
galeux > ceux qu'on apperçoit dans la fécondé,
font des tigres 8c des corbeaux. Tout le
riefte', c'eft-à-dire les cimes fupétieùres les plus
élevées, eft , comme nous l'avons déjà remarqué,
couvert ide neiges, 8c ces neiges lont enveloppées,
la moitié de l'année, fous des nuages fort
é|ïais. ' -•v - / •' : .
r C e qu'il y a de plus incommode pour ceux qui
font la vilice de cette montagne, c’eft que les
neiges fondues ne dégorgent dans l’abîme que par
une infinité de fources où l'on ne peut parvenir
aifément, 8c qui font auffi fales que 1 eau des tor-j
rens dans les plus grands orages. Toutes ces eaux
forment le ruiffeau qui paffe à Acourlou, 8c qui ne
s'éclaircit jamais. M. de Tournelort penfe. que,
lorfqu'on a foif, on trouve cette eau chargée de
boue fort.agréable à boire3 parce qu elle eft perp
é tu e llem e n t à la g la c e . *
La tradition répandue dans le pays, qui porte
que l'Arche s'arrêta fur cette montagne, fait que
tous les Arménieps baifent la terre dès qu'il« ap-
perçoivent Y Ararat.
Pour éviter les fables mouvans dont nous avons
parlé , & dans lefquels on enfonce jufqu'à mi-
jambe, M. de Tournefort dirigea fa marche droit
aux grands rochers entaffes les uns fur les autres,
& il paffa même au de flous comme à travers de
cavernes où l'on peut fe mettre à 1 abri des injures
du tems,.excepté du froid.
L o r fq u 'o n ab an d on n e c e s c a v e rn e s , on r e tom b e
d an s un ch em in fa t ig a n t , femé d e p e t it s é c la t s d e
p ié r r e s q u e la g é lé e d é ta ch e d es r o c h e r s , & d on t
[e s v iv e s - a r ê te s c o u p e n t com m e c e lle s d es p ie r re s
à fu fil. ‘ ,
Lorfqu’on s’élève jufqu a la région des neiges,
on trouvé qu’ elle a plus de quatre pieds d epaif-
feu r , & quelle eft prefque toute entièrement
criftallifée. _ * • •
Tous lés rqchers qui font a découvert & a pic,
offrent des parties Taillantes noirâtres} en un mot,
comme des maffes de pierres falies par la fu-
niée, & des matières fondues par les feux fouterrains.
.
J’ai pris, pour rédiger cet article, tout ce qui
m’a paru le plus intérelfant dans la longue defcrip-
tion que Tournefort a faite du mont Ararat. Malgré
cetté attention on n’y trouvera que des details
un peu vagues, & .nullement propres à nous, donner
une idée fimple & inconteftable de fa coniti-
tutÎQP phyfique. On ne peut donc tout au plus
conclure de ces.faits, i° . que cette montagne eft
fort élevée, puisqu'il y neige même en é té , 8c que
le grand fommet cônferve toute l’année, la neige
qui le couvre}'2°. que la pierre en eft noirâtre}
ce qui femble annoncer les produits des feux fou-
terrains, conjointement avec le défordre que pre-
fente l'abîme dans toute fa hauteur, 8c particuliérement
les fables mouvans qui coupent comme
lès éclats de pierres à fufil. Au relie, fi ces confé-
quences que j’ai tirées de cette narration ne donnent
rien de précis, c’eft moins la faute de l’ob-
fervateur, que celle de fon fiècle, où l’on n’avoit
rien perfectionné, ni dans la connoiffance des
pierres, ni dans la méthode d'obier ver , 8c fur-
tout les volcans.
Ce n’ eft pas au refte la feule defcription de volcans
que j’ai trouvée aufli i n fi gni fiance, auffi peu
précife en général, foit relativement à la nature
des matériaux touchés par le feu, foit relativement
à leur état 8c à leur difpofition fuivant les
tems plus ou moins reculés des éruptions, &c.
ARBE, île du golfe de Quarnaro, dans la Dal-
matie, laquelle peut avoir environ trente milles
de circuit. Sa population n’excède pas trois mille
âmes, diftribuées dans des paroiffes qu un petit
nombre de curés pourroient deffervir ; mais , par
un abus très-commun, cette petite population fe
trouve furçhargée de trois couvens de religieux,
de trois couvens de religieufes, 8c d’une foixan-
taine de prêtres mal pourvus} enfin ce clergé eft
gouverné par un évêque qui l’eft mieux.
Le. climat d’ Arbe n’eft pas conftammênt favorable
aux habitans. L’hiver y eft une fa.ifon fort
rude & tourmentée par les vents de nord, qui y
| font d’une violence extrême. Lorfqu'ils fouflent
! dans d’autres faifons, ils les changent en hiver ,
8c font mêrhe difparoître l’été. C'eft particuliérement
au printems qu'iis caufent le plus de dommage:
Cés Vents, concentrés dans le canal étroit
entre l'ile 8c les Alpes morlaqu.es, foulèvent les
flots avec une telle violence, que l’eau de la mer
fe rabat fur l'ile fous forme de brouillards Calés,
qui brûlent les germes des plantes & lurcout des
grains} ce qui caufe pour lors une difette de toutes
ces productions. Les animaux partagent auffi. cette
défolation générale } car la viande fè refirent de la
mauvaife nourriture qu’ ils trouvent, étant abandonnés
dans des pâturages rouillés par le feh Hors
ces accidens heureufement rares , l’air d’Arbe eft
fort Tain.
A l’orient de l ’île on trouve une haute montagne
d'une compofition femblable à celle des
montagnes morlaqu.es, qui font vis-à-vis, & auxquelles
le maflif de l’île paroît avoir été autrefois
uni. ,
A partir du pied de cette montagne, Tîle s’étend
vers l'occident, & paroîtpartagée dans cette
partie , en collines propres, à des productions de
toute efpèce, & en belles 8c fertiles vallées.
Y Au
Au nord' s’avance dans la mer le cap Loparo, {
couroiiné de collines qui fervent d’enceinte à une
plaine bien cultivée.
A peu de diftance de ce cap font deux petites
îles , Saint-Grégoire 8c Goli.
La côte d’ Arbe, qui regarde les monts morlaqucs,
eft toute efcarpée 8c inacceffible aux.bâtimens. Le
long 8c étroit îlot de Dolin, en s'étendant parallèlement
à un rivage de l'ile appelé Barbado, forme
une côte moins dangereufe,
La nature du fol d’Arbe n’eft pas la même partout.
Il y a une différence extrême entre la côte
de la montagne le long du canal de Barbado, vis-
à-vis de Dolin, & celle qui regarde, ou l'intérieur
de l'ile , ou les Alpes mor laques.
. Le. fommet de la montagne n'eft pas non plus
de la même nature. Là il eft couvert de bois ou
de cultures dans un terrain fertile} ici il n'offre
que des rochers nus.
Les fonds au pied de la montagne font de marbre
le long du rivage de Jablenaz. Dans le diftriCt
de Barbado, le terrain eft du gros gravier fort
propre à la vigne. Les petits fragmens de pierres
qui le forment, font anguleux} ce qui prouve qu’ils
n’ont pas été roulés par les eaux de la mer, mais
par des eaux courantes, qui les ont dépofées dans
ces lieux. Le vin de Barbado , qui vient dans ce
fond graveleux, eft de la meilleure qualité. Les
amas de ce gravier fe durciffent 8c fe pétrifient
par.la nitration des eaux pluviales, qui en pénètrent
toute la rnaffe. Aux environs des ruines de
Colentum, le tèrrain porte des oliviers, des mûriers,
des arbres fruitiers 8c un peu de froment.
Toute la partie la plus baffe de l’île , compofée
de collines 8c. de vallées, a un fonds très-différent
de celui de la montagne. Les pierres de. la montagne,
comme celles de toutes les hauteurs , font
de marbre, 8c celles qui compofent les collines
font de pierre de fable, qui renferme des oftracites
8c des lenticulaires. Les couches qûi font expo-
fées à l’air fe décompofent facilement. Cependant
les vallées n'ont, dans leur fol excellent, que la
proportion de fable qui lui convient. Les fources,
bien diftribuées dans toute l’île , y entretiennent
une humidité modérée 8c convenable.
- On obferve, fur le fommet des montagnes qui
font en plaine, des maffes de marbre brèche,
femblable à celui que les haureurs des îles voi-
fines offrent} mais ce qu’il y a de particulier dans
cette île , c’eft qu’ on y rencontre de grands efpa-
ces de fable fin mêlé avec une terre ferrugineufe,
dépofé par lits affez femblables à ceux qui ont
été formés par les débordemens des grandes rivières.
Ce fable eft purement quartzeux.
• Dans un endroit appelé Crajjïck, on rencontre,
fur le .fommet de la montagne, dans un femblable
fable fin, des filons de mines de fer caverneufes,
affez riches. Du côté de la montagne qui regarde
Loparo 3 les eaux pluviales portent fur lé: rivage
cette efpèce de fable fin. quartzeux, connu .des
Géographie-Phyjique. Tome IL
marbriers'& des:verriers fous iê nom de faldam<\
Pline paroît avoir eu cet endroit en vue quand il
çlit que, pour couper le marbre, on avoit décou-:
vert une, bonne efpèce de fable dans un bas-fond
de la mer Adriatique, & qui reftoit à fec quand
les eaux fe retiroient. ( Pline , Uv. 3<6 , c. 6.)
La plage fituée au pied de la montagne appelée
V^erch. odjnela, c’elt-à-dire, Colline de fable, eft
toute compofée de feldàme, comme le font aufii
plufieurs autres endroits de l’île où les flots battent
avec force le pied des; collines fabloneufes. •
Ce fable, qui avoit occupé d’abord le fommet
des montagnes où il avoit été'dépofé, par la mer
ou par les rivières, fur des couches de marbre 8c
de brèches plus anciennes, fe trouve, comme on
voit , defcendu en partie fur le rivage, ayant été
entraîné par les eaux des pluies, 8c peut-être par
la fuite fe trouvera-t-il mêlé aux coquillages d’ une
mer nouvelle , 8c quelque jour agglutiné avec
eux. Que de fituations 8c d’emplois fucceflîfs une
feule fubftance inaltérable, comme ce fable, n'é-
prouve-t-elle pas dans l’ordre des événemens naturels!
La difficulté eft d ’ en embraffer l ’enfemble ,
pour rendre raifon des réfultats. C ’eft ainfi qu’il
faudroit réunir un grand nombre d’obfervations ,
pour rendre raifon de la préfence de ce fable fur
les fommets des montagnes auxquelles il paroît
fort étranger.
La pierre de fable de la colline fur laquelle la -
ville d‘Arbe eft bâtie, a ce même fable pour bafe :
ainfi on pourroit en conclure qu’il a été nôn-
fëulement entraîné du fommet. des:.montagnes ,
mais encore dépofé dans le baffin de l’ancienne
mer, où il a été organifé par couches-, comme il
fe trouve dans cette colline 8c dans d ’autres. C ’eft
aufli par la.même raifon qu’il renferme fouvent
une grande quantité de lenticulaires, productions
de cette même mer.
Sur les collines, de Loparo, on rencontre des
nummales dans un fable à peine agglutiné, 11 fe
trouve aufli dans ces collines fabloneufes que la
mer détruit peu à peu, des échinites étrangers >
des oftracites 8c des nummales, toutes produc^
tions de la même mer ancienne.
La brèche de la montagne d’Arbe reçoit un beau.
; poli} elle a des taches blànches d’un marbre donc
le grain eft fort fin. Le ciment qui les unit, offre
un fond rouge, fort vif.
Le marbre n’ell pas cependant la production la
plus intéreffante de i’île d’Arbe 8c des îlots de
San-Gregorio 8c. de G o li} voifins du cap de Loparof
On y trouve en très-grande abondance le marbre
ftatuaire blanc , parfaitement femblable à celui
dont fe fervoient les Romains. La parfaite reffem-
blance entré le marbre des ftatues romaines &
celui de la montagne d’Arbe vers Loparo; le nom
ancien de Loparo, qui étoit Neoparos ; la probabilité
que les vaiffeaux romains qui aîloient charger
dans les bas-fonds du voifinage le fable dont
parle Pline , tranfport,oient .auffi ce marbre j la,