
turellement; car ces pays font fi voifins les uns
des, autres, qu’on peut, en une matinée, aller
des montagnes où il pleut,dans les plaines où l’at-
mofphère eft claire & fèche. Ce double effet febible
être produit, i° . par les chaînes de montagnes
des Andes; 2°. par le vent du fud-oueft-, qui règne
dans ces contrées atfez conftamment. Ce vent
chafle les vapeurs contre les malles élevées des
montagnes, où elles le c o n d en fen t& en même
tems il les difperfe, de manière quelles fe diffi-
pent fur toute rétendue des plaines. On,a fait voir
ci-devant, à l’article des Montagnes, comment les
vapeurs parviennent à ces lieux élevés.
Le Pérou a cela de commun avec l’Egypte &
quelques autres contrées, que les vents du fud n’y
font pas humides & chauds, & qu’au contraire ils
produifent des tems clairs. Il femble que cela
arrive dans tous les lieux fitués dans les latitudes
fud.
La partie de l’Amérique méridionale, qu’on
nomme le B réfil, laquelle s’étend depuis i degrés
jufqu’à 24 de latitude fu d , jouit dune température
fi faine & fi agréable, qu’elle ne le cede à
aucune contrée de la T e r re , comme Pifon nous
l ’apprend dans fon livre fur la médecine du Bréfil,
en traitant des faifons du pays. La partie antérieur
e , qui eft habitée, jouit toujours d’un bon vent
frais, qui vient de l’ eft , & qui nous femble être
un vent général, & non pas un vent d’eft périodique.
Il rafraîchit les hommes & les animaux, &
rend fupportable la chaleur du foleil dans le tems
où il occupe la partie du ciel qui eft au deffus de
leur tête. Si la mer monte avec ce vent, il s'élève
dès le matin 5 mais elle defcend & s’éloigne de la
côte s’ il ne s’élève que plus tard : il ne fe ralentit
pas le foir, comme on l’éprouve dans tous les pays
de l’Inde expofés de même. Mais il devient plus
fort lorfque le foleil fe porte avec lui à l’oueft,
& fe foutient avec la même activité jufqu’à minuit.
L’ air condenfé de la nuit ne peut empêcher la
marche & le mouvement naturel de ce vent vers
l ’oueft.
- A l’oueft du Bréfil, dans la partie, que la longue
chaîne de montagnes fépare du Pérou , il y a un
vent d’oueft qui, étant mal-fain, quoique lent à
s’introduire la nuit au milieu des terres, incommode
les habitans, parce qu’il arrive après avoir
traverfé une grande quantité de marais & de lagunes.
Cependant il eft arrêté par les montagnes,
-& refoulé par les vents frais du matin, de telle
forte qu’ il parvient à peine fur les côtes de l’eft.
Quoique ces faifons agréables, dons nous venons
de parler, fe foutiennent fans éprouverbeàu-
coup d’ altérations, il y a cependant de la différence
à cet égard entre la nuit & le jour, qui,
pour être égaux en longueur, éprouvent des variations
remarquables par rapport au froid & au
chaud ; car quand le foleil approche du zénith, &-
qu'il a ouvert les pores de la terre & des corps
organifés, il s’éloigne beaucoup fous l’horizon;
1 ce qui occafionne une grande condenfation dans
I l’ air, & du froid qu’on y éprouve pendant la der-
1 nière partie de la nuit quand la rofée tombe le
1 plus abondamment. Ce froid v if continue depuis
trois heures du matin jufqu’au lever du foleil, &
affeéte tellement les corps, qu’ il caufe de graades
incommodités aux étrangers. En effet, s’ ils n’ont
pas foin de fe précautionner contre ce froid, ils
ont de la peine à vivre dans ce pays aufli bien que
fur les autres côtes de l’ Inde : on ne l’ ignore pas
au Bréfil 5 auffi fait-on continuellement du feu la
nuit pour fe garantir du froid &c des infe&es incommodes.
D’ailleurs, le foleil fe levant &. fe couchant en
ligne directe, il en réfulte que le crépufcule eft
court, & les jours & les nuits font fi égaux, qu’il
n’y a jamais entr’eux une heure de différence.
Le froid eft plus.piquant dans les nuits de l’été
que dans les nuits de l’hiver ; ce qui paroîtaffez
étrange : on apperçoit clairement qu’ il eft plus
modéré en hiver quand l’air eft calme & preffe de
toutes parts par les nuages, tandis qu’ il les raffem-
ble pour les précipiter en pluies. \
La fàifon des pluies commence en mars & avril,
& finit en août, car le foleil, retournant du cancer,
change les vapeurs en vent, d’où nailTent les
tempêtes que le printems ne tarde pas à difliper.
Ceux qui habitent vers les tropiques n’éprouvent
pas de changement dans leurs faifons quand le foleil
s’ en approche ou s’en éloigne deux fois par an.
Il n’y a que deux faifons dans l’année au Bréfil,
l’une chaude & fèche, l’autre chaude & humide,
comme l’été d’Europe, qui eft l’hiver de ce pays-
là. On remarque la même chofe dans toutes les
Indes entre les tropiques, feulement le commencement
& la fin de l’é té , & par conféquent ceux
de l’hiver, n’ arrivent pas partout aux mêmes époques,
à caufe de certaines circonftances particulières
à chaque lieu, & furtout à caufe de leur
différente diftance de l’équateur.
Cependant on peut dire en général que l’année,
dans tous ces pays, a fix mois de tems humide, &
fix mois de tems fec 5 & quoique, fur les différentes
côtes d’Afrique & d’Afie, qui ont la même latitude,
il y ait par cette raifon différens degrés de
chaleur, il n’y en a point ou prefque point au
Bréfil en octobre & en février, quoique le foleil
foit précifément au zénith, & lance des rayons
perpendiculaires.
Cette différence de chaleur donne lieu à des
calmes fréquens, chauds & fort incommodes, qui
coûtent la vie à un grand nombre d’habitans. Au
Bréfil, au contraire, elle procure une fanté conf-
tante ; à caufe des vents frais qui y régnent.
D’où l ’ on peut fe convaincre que ce n’eft pas
tant le mouvement du foleil qui fait les faifons,
que les efpèces de vents, les différens afpeéls du
ciel & la fituation des lieux.
Ain fi dans l’intérieur des terres, vers l’oueft,
les nuits font d’autant plus froides, que les lieux
font plus voifins de la mer. C ’eft là furtout que
l’on a vu affez fouvent des voyageurs avoir, le
matin, les cheveux couverts de gelée blanche.
Il y a auffi, à l’oueft du Bréfil, un été & un
tems fec dans les mêmes mois que les tems couverts
& pluvieux régnent à l ’eft.
A la vérité, on peut voir fouvent le ciel couvert
de nuages apportés de l’ eft à l’oueft 5 mais hors de
la faifon de l ’hiver ils font très-raréfies.
L ’afpeét différent des planètes & le concours
des autres caufes dont nous avons parlé, donnent
à l’atmofphère une température très variable. Il y
a fur le foir des éclairs très-fréquens-, quoique
dans un tems fort fec & fort clair.
Les gouttes de pluies font fort greffes, tombent
avec violence, & font précédées ou fuivies d’ une
grande chaleur.
La rofée eft plus graffe là qu’ en Europe 5 auffi
fertilife-t-elle mieux les terres : elle ronge outre
cela tous lès métaux, & furtout le fer.
Les prairies & les campagnes font couvertes de
verdure dans les mois pluvieux, mais moins qu’en
é té , quoique les habitans n’ en reffentent pasjes
agrémens ; & quoiqu’ il n’y ait pas de récolte pour
lors, du moins on n’y manque pas de pâture pour
les beftiaux. Tous ces détails iméreffans ont été
obfervés & recueillis par Pifon ; mais pour en
mieux juger, j’ ajouterai auffi ce que d’ autres ob-
fervateurs ont vu & ont cru devoir publier.
Toutes les campagnes du Bréfil font parfemées
de petites-collines agréables. Il n’y a point de
hautes montagnes le long des côtes -, auffi c’eft dans
ces petites chaînes que les rivières côtières dont:
j’ ai parlé, prennent leur origine. Ce n’ eft que d’intervalles
à autres qu’ on rencontre quelques font-
mets élevés. Dans l’efpaee de plufieurs milles on voit ;
des vallées arrofées par ces petites rivières qui les J
fertilifeut, furtout dans la faifon des pluies & même ;
pendant l’été. Les^ hautes montagnes font deffe-
chées pour lors par le foleil, au point que, non-
feulement les plantes, mais encore les arbres, y
meurent. Rarement, dans la faifon des pluies, il
pleut toute la nuit & tout le jour. Il eft fort rare
de voir un jour fans quelque relâché de beau tems :
outre cela les mois pluvieux changent d’une année
à l’autre. Marcgrave oblerve qu’ en 1643 il plut
-pendant fept mois, depuis le i cr. de février jufqu’au
i cr. de feptembre; mais abondamment, fur-
tout en niai/& juillet. En 1640 il plut autant de
tems, mais furtout en avril, mai & juillet ; & en
1-642 il n’y eut que fix mois de pluies 5 favoir,
depuis mars jufqu’en août. Nous devons dire que
la même chofe eut lieu dans les autres années ;
cependant il faut remarquer que ces obfervations
différentes n’ont été faites que dans un feul endroit
du Bréfil; -favoir, à Ftrnanbouc, qui eft à
8 degrés de latitude ; mais- ailleurs ces mois pluvieux
changent beaucoup , & lés pluies ne commencent
&.ne finiflènt pas à beaucoup près aux
mêmes heures.
Il réfulte de là que l’été & l’hiver du Bréfil
s’accordent un peu avec les mêmes faifons céleftes.
La pluie1 commence quand le foleil eft à fa plus
grande diftance; enfuite la plus forte chaleur & la
grande féchereffe fe montrent quand le foleil eft
à fa diftance moyenne. Cependant dans quelques
endroits il y a des. circonftances qui ne cadrent
pas avec la marche du foleil, comme nous l’avons
déjà dit, à caufe des vents & de la fituation des-
lieux; ' '
Nous nous bornerons à ces détails pour la partie
de l’Amérique fituée dans les latitudes méridionales.
Mais il n’en eft pas de même pour les latitudes
feptentrionales ; car dans la grande province
de Nicaragua, dont le milieu eft à 10 degrés de
latitude-nord, il pleut pendant fix mois, depuis
le Ier. de mai jufqu’au I er. novembre, & dans les
fix autres mois il fait un tems fec la nuit aufli
bien que le jour ; ce qui eft contraire au mouvement
du foleil; car en mai, juin, &c. le foleil
eft au zénith ou fort proche, & alors il devroit y
avoir de la chaleur ou du tems fe c , au lieu de
pluies : au contraire, il eft plus éloigné en novembre
& décembre, & ce devroit être le tems des
pluies.1
Les montagnes de Sainte - Marthe, qui font
fitùées au 1 1 e. degré de latitude nord, font la plupart
du tems couvertes de neige.
' Maintenant que nous avons examiné les phénomènes
les plus remarquables que p éfenrent les
faifons dè l’Amérique méridionale dans les parties
fitnées fous la zone torride, nous'en tirerons
ces conféquences :
i° . Qu’ il y a'plufieurs endroits où l’hiver ne
confifte que dans un tems pluvieux ; 20. que dans
d’ autres le froid eft afiez fenfil le ; 50. qùe le froid
ferait fentir furtout à la fin de la nuit, le foleil
étant alôrs fort enfoncé fous 1!horizon ; 40. que la
! grande raifon qui fait qu’on fupporre la chaleur,
& qu’om peut habiter ces lieux, eft qu’il n’y <l
point de longs jours", & que tous font à peu près
de même longueur que les nuits ; car s’ils étoient
auffi longs que fous la zone tempérée ou glaciale ,>
I on ne pourroit pas y habiter aufli facilement ; 50.
que les vents modèrent beaucoup la chaleur du
foleil ; 6°. les différens lieux y ont l’été & l’hiver
en différens tems, quoique fous le'même climat, &
qu’ ils foient fort voifins'les pus des autres;.*/0. les
endroits qui ont la chaleur & le tems fec contre
la marche du foleil font fitués à l’oueft, & ont une
chaîne de montagnes à. l’eft, excep e le Pérou ;
8°. les faifons en différens lieux ne fuivent aucune
règle certaine ; 90. la plupart des habitans de la
zone torride, ftiivant le rapport des voyageurs,
comptent deux faifons; favoir, la fèche & l’humide.
Cependant il me femble qu’on doit^en compter
quatre, y compris un printems & un automne;
car comme le printems chez nous tient un peu de1
l’été", & l’automne de l’hi v er, de même aufli on
peut partager les faifons lèches •& humides fous
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