
font rares, parce que les bons foins le font auffi :
toutefois le lait donné par ces vaches, en quantité
à peu près égale à celle qu'elles donnent en Europe
j produit un quart moins de beurre ; 8c la viande
de boeuf, auffi belle qu’en Europe, eft, en Amérique,
beaucoup moins fubftantielle & nourrif-
fante. Cette vérité inconteftable s’étend jufque
' fur les productions végétales ; car il eft reconnu
que la,meilleure farine d’Amérique, faite dans les
meilleurs moulins', avec les meilleurs blés, n’égale
ni en poids ni en fubftance les farines d’Europe,
particuliérement celles connues dans le commerce
fous le nom de farines de Moiffac.
Quant aux Indiens, fans être d’une taille élevée,
ils font d'une ftature ordinaire, & femblent forts
& bien conftitués. L’ ufage du rhum les affaiblit,
les énerve & les fait vieillir affez vite 5 mais ce
n’eft pas à la nature ni au climat que ces effets
doivent être attribués. Les voyageurs qui ont vu
beaucoup d’indiens, & furtout des Indiens moins
voifins des blancs, nous apprennent qu’ils ont
trouvé des tribus d’hommes fort grands, & toujours,
comme les autres peuplades, d’autant plus
forts qu’ ils étoient plus fobres.
Le règne végétal eft en Amérique d’une abondance
& d’une richeffe admirables, & plus encore
dans les Etats du fud, où les plantes .multipliées
ont une croiffance v iv e , fo r te , & où celles qui
n’ont pas ou qui n’ont que très-peu d’odeur dans
les parties feptentrionales, en exhalent une très-
agréable. Au refte, tout ce que l’on a pu obferver
fur les diverfes natures de terres, dans les climats
variés , relativement aux productions végétales ,
prouve évidemment qu’ il n’eft aucune de ces productions,
au fucre près, dont le territoire des
Etats-Unis ne foit fufceptible avéc une culture
appropriée. Peut-êt^e pour quelques-unes d’elles :
le climat n’ eft pas affez fait 3 mais le nombre de J
celles-là paroît être peu considérable.
La variété des oifeaux eft grande, & Ta plupart
ont le plumage le plus riche & le plus brillant. II
en eft peu d’entièrement femblables à ceux de la
même efpèce en Europe, fi même il en exifte une
feule abfolument pareille. Il en eft peu qui aient
un chant varié ou même un joli chant} & la promenade
des bois eft, fous ce rapport, bien moins
agréable qu’en Europe.
La différence frappante. & prefque totale des
produits animaux & végétaux des deux hémif-
phères eft loin d’être la même quant au règne
minéral. Nous en avons cité des preuves qui nous
paroiffent fuffifantes, & nous ne nous étendrons
pas davantage à ce fujet : nous y reviendrons dans
d’autres articles.
Avant de terminer ce qui nous paroît convenable
d'expofer au fujet du climat & de fes effets
variés, nous croyons devoir nous attacher à ce
que nous offre dans ce genre d’obfervations la
Caroline du fud.
Le climat dans la partie baffe eft chaud, humide,
variable & mal-fain ; car les habitans y font chaque
automne attaqués de fièvres bilieufes. Le climat
dans la partie haute eft moins chaud,plus fec,
& par conféquent plus fain. Les variations fou-
] daines dans la température font confidérables à
Charles-To>wn. Par exemple, le 28 oCtobre 1793,
le mercure eft defcendu de 16 degrés du thermomètre
de Réaumur, 8c le 10 décembre 17 5 1 , de
20 degrés du même thermomètre.
L’hiver eft à Charles-Town la faifon la plus
agréable. La plus forte gelée ne pénètre pas la
terre a deux pouces, & le froid n’y dure pas trois
jours de fuite. -Les pluies font très - abondantes
dans la Caroline. Souvent à trois mois de féche-
reffe fuccédent trois femaines ou un mois de pluies
continuelles. D’après les obfervations de la Société
de médecine, il a tombé quatre-vingt-feize pouces
de pluie en 17 9 1, quatre-vingt-huit en 1792.,cent
quatorze en 1793, cent dix-huit en 1794, 8c
foixante-onze en 1795.
DES R A P I D E S , DES C H U T E S , &C.
Quoique j ’aie fait mention des rapides 8c des
chutes dans les différentes deferiptions des rivières
qui précèdent, cependant je crois convenable de
les reprendre ic i , & de les confidérer'comme des
formes du terrain qui tiennent à la nature du fol
8c aux pacages des eaux courantes d’un maffif tendre
à un maffif dur & folide.
Effectivement, Iorfque l’on corndère les inégalités
de la furface de la terre , telles qu’ elles fe
montrent actuellement à nos yeux 8c qu’elles
s’offrent à notre examen, on découvre aifément
qu’ elles ont fuccédé à une fuite de maffifs plus où
moins folides, plus ou moins élevés : en fécond
lieu, qu’elles font dues la plupart à PaCtion des
eaux pluviales qui ont circulé fur cette première
bafe , & qui ont creufé des vallées plus ou moins
propres à leur marche , fuivant que les maffifs fe
font prêtés à une démolition plus ou moins régulière
, plus ou moins fuivie : de là les rapides, les
chutes. Ainfi l’on voit qu’ elles n’exiftent que par
la rencontre que les eaux courantes ont faite des
limites de certains maffifs plus durs, & des paf-
fages de ces maffifs élevés à d'autres d'un niveau
inférieur & d’un tiffu plus tendre.
^ Je ne puis rendre raifon de ces phénomènes
d’une manière plus fimple & plus conforme à ce
que l’obfervation m’a fait connoïtre dans l’examen
de ces paffages fréquens des maffifs de l’ancienne
terre à la moyenne, & même de la moyenne à la
nouvelle. C ’éft ainfi que les limites de l’ancienne
terre granitique du Limoufin, de l’Auvergne , du
Forez offrent de ces cafcades dans le cours de
tous les ruiffeaux & des rivières qui paffent à la
moyenne terre & à Ja nouvelle du bas Limoufin ,
du Périgord, & c. ( Voye% ces articles.)
Je voudrois pouvoir embraffer,d’après ces vues
dans un efpace déterminé, tous les maffifs qui ont
pu influer fur les fauts ou rapides des diverfes rivières
de l’Amérique 5 mais je me bornerai ici à en
indiquer quelques-unes d’une certaine étendue.
. Nous avons vu que, fur la rivière du détroit,
en partant de la rivière des Miamis ou de la
Pointe au chêne, on trouve fix lieues de rapides,
qui font fort difficiles à franchir dans le terris des
hautes eaux, à caufe de la quantité des petites
chutes qui s’y trouvent. Parmi ces obftacles on
rencontre la Roche Debout, qui dans ces tems eft
prefqu’inacceffible. On ne peut la franchir qu’en
fe ferrant contre la rive du Sud,. où les rochers
fous l’eau font moins nombreux. La Roche Debout
peut avoir environ vingt-trois toiles de circonférence
5 elle occupe à peu près le milieu de la
rivière : on nous dira quelque jour de quelle nature
elle eft.
A vingt lieues au deffus des rapides, on trouve
la grande Glaife , rivière qui prend fa fource dans
un marais très-large. Il eft fitué au fud de la rivière
, & <5n le rencontre en remontant fon canal
à quinze lieues au deffus de celle des Miamis.
La cafcade du comté de Fayette en Penfilv.uiie
tombe d’un rocher de forme à moitié circulaire ,
dont l’arcade a , d’ une extrémité à l’autrë, plus
de deux cent foixante pieds : cette arcade impo-
fante a plus de vingt pieds de hauteur 5 elle eft
compofée d’une efpèce de marbre avec des veines
de formes affez fingulières.
Les couchés de pierres qui en forment l’affem-
blage, paroiffent-être plutôt le produit de l’art
que celui de la nature à ceux qui ne les examinent
pas attentivement. Une pierre plate, & de dix à
douze pouces d’ épaiffeur , eft placée à la partie
fupérieure de la cafcade d’où la rivière fe précipite.
Tout le front de ce rocher eft compofé ,
depuis le haut jufqu’en bas, ainfi que d’une extrémité
à l’autre, d’une fuite régulière de pierres
calcaires diftribuées par couches. La couche fupé-
rieure fe projette un peu hors de fa bafe : celle
qui fuit avance plus que la précédente, 8c toujours
ainfi de fuite quant aux autres, jufqu’à ce qu’elles
fe terminent par une pierre très-large, mince &
.unie comme il a été dit-, & cette arcade fait une
telle faillie, que fa partie fupérieure eft parallèle
avec fa bafe , fur laquelle tout le rocher fe trouve
fufpendu à une hauteur de cinquante à foixante
pieds.
Cette ftruéture 8c le grand efpace circulaire
eptre le front du rocher 8c la nappé d’eau qui fe
précipite de fon fommet, offrent une perfpedfive
très-extraordinaire : ce font des objets dont la nature
& les eaux courantes ont fait tous les frais.
Je dois joindre ici les rapports des eaux courantes
entr’elles, 8c les intervalles qui exigent des
portages plus ou moins longs, pour achever de
donner une idée bien intéreffante de la diftribu-
tion des eaux. Ainfi entre le Miffiffipi, l’Ohio &
les lacs, il y a de petits intervalles qui féparent les
têtes des rivières de Wabash, des Illinois, çje
Mufchingum 8c de Miamis, des lacs Michigan 8c
Erié. Le faut de Niagara néceffite un portage de
huit milles. Depuis le lac Ontario jufqu'à Albany,
il y a quatre portages : le premier, d'un quart de
mille fur Y Onondago, près d’Ofv/ego 5 le fécond,
de deux milles, depuis Wood - Créék jufqu’à la
rivière de Mohawx 5 le troifième, aux petites rapides
de la Mobawx d'un quart de mille, et le
dernier de feize milles de Shene&ady à Albany.
V . FLORIDES -ORIENTALE ET OCCIDENTALE.
La Floride eft bornée au nord par la Géorgie,
à l’oueft par le Miffiffipi, au fud par le golfe du
Mexique, & à l’ eft par le détroit de Bahama.
Le Miffiffipi eft un des plus beaux & des plus
grands fleuves du Monde. En y comprenant tous
fes détours, il ne parcourt pas moins de quinze
cents lieues ; mais fes embouchures font ën quelque
forte obftruées de bancs de fable , qui s'op-
pofent à l ’entrée des gros vaiffeaux. Selon la carte
de'Michel , il n’y a que douze pieds de profondeur
fur la barre, 8c dix - fept fuivant le capitaine
Pitman , particuliérement à la principale branche.
Lorfqu’ on a franchi la barre on trouve cent braf-
fes d’eau. Le canal de ce fleuve eft partout profond
& le courant len t, excepté dans certaines
faifons, où il croît de manière à devenir très-rapide.
Il eft d’ailleurs , fi l’on excepte l’entrée ,
partout fans bancs de fable, fans chutes ou rapides,
8c navigable prefque jufqu’à fa fource. ( Voye%
l’ article Mississipi.)
Nous ajouterons à ce fleuve fix autres rivières
affez confidérables : d’abord la rivière des Ya^ous,
dont le cours eft fort alcrgé 8c s’étend jufqu’au
pays des Chicachas, où elle prend naiffance par
quatre principaux embranchemens qui fortent du
pied d’une chaîne de montagnes : en fécond lieu,
la rivière des Perles, puis celle de Pafca- Coula ,
qui a trois embranchemens affez longs. Enfin la
Mobile, qui raffemble les eaux d’une fuperficie de
terrain très-étendu par fept embranchemens con-
fidérables, 8c dont la plupart atteignent la même
chaîne de montagnes. Nous ajouterons à toutes
ces eaux courantes l’Apalachicola, qui fe prolonge
éga'ement. Toutes ces rivières fe jettent fur la
côte méridionale de la Floride , ainfi que beaucoup
d’autres que nous fupprimons. Nous ne ferons
mention maintenant que dé la rivière de
Saint-Jean, qui, après avoir parcouru la pénin-
fule , fe jette dans la baie du Saint-Efprit, & de
la rivière d3 Alatamaha ou de King- George, qui ,
par quatre embouchures , fe jette dans la mer
Atlantique.
Pour donner une idée du travail de l’eau fur la
côte méridionale de la Floride, 8c même fur celles
de la péninfule, j’indiquerai les baies principales
& les caps que j’ y trouve dans la carte de Dan-
ville. On y v o it , i°. comment les eaux courantes
de l’intérieur ont détruit les terres aux environs