
d'un mélange d'Yakouts, de Tongouths, de Bou-
ratis „ de Mantchoux & de Chinois, lequel aura
fans doute une langue particulière. Ces vaftes
contrées, où la terre eft inculte & déferte, invitent
les Tartares émigrés à. s'y établir, & font
très-propres à leur fournir les moyens de vivre
dans l'abondance ; elles peuvent même, fi Ton y
cultive du blé, être d’un grand fecours pour la
Chine. Il faut cependant obferver que la partie
de ce pays , qui eft la plus baffe, fe trouve fujète
aux inondations & à de fréquens tremblemens de
terre.
Le fleuve Amour n'a d'autres rivières affluentes
.confidérables, venant de l'eft, que les deux dont
j ’ai fait mention ci-devant. La Nonni-Oula, très-
,grande rivière qui prend fa fource par le 50e. degré
de latitude, fait un vafte circuit avant que de
fe joindre à l‘Amour dans l'endroit où ce fleuve fe
trouve le plus rapproché des contrées méridionales.
Une autre grande rivière., YOnfouri, fe jette
aufli dans l'Amour un peu au deffus de fon embouchure.
. L'Amour traverfe le lac Hinka, 8c n'eft alors
éloigné de la mer du Japon que d'une journée de
marche. Coulant enfuite vers le nord, il va fe
jeter dans la mer d'Okhotsk, vis-à-vis de l'île
de Saghaalien,
Ce fleuve eft très-poiflonneux : fes bords font,
comme nous l'avons déjà dit, couverts de forêts
de chênes, de châtaigniers, de bouleaux & de
pins de différentes efpèces. Là le fol eft très-fécond,
& le climat doux & fain. L e s habitans de
cette côte de la Corée & des îles voifïnes ne
font pas très-nombreux, mais ils fe diftinguent
par leur hofpitalité 8c par la bonté de leur naturel.
Ils font le commerce avec ceux de l'intérieur,
pour des chofes de pure néceflité. Ce fleuve donne
ion nom à la mer, à l'île & au détroit voiflns de
fon embouchure. Nous rappellerons, par la fuite,
ces détails intéreflfans dans d'autres articles.
AMPÉLITE. Ampelites, terre noire & bitumi-
neufe. Pline l'a défignée comme telle en difant
qu'elle eft très-reffémblante au bitume, & qu’elle
fe liquéfie dans l'huile. Diofcoride allure que l’on
trouve la terre ampélite aux environs de la ville
de Seleuche en Sourie j il la donne comme une terre
d'un beau noir, qui fe divife affez facilement,qui
eft également luifante dans toutes fes parties, &
qui fe dilfout promptement dans l'huile après avoir
été broyée. Matthiole conclut de toutes ces observations
, que Y ampélite n'eft pas fort différente
du jais ou du charbon de terre j ce que je ne puis
croire, d'après les détails que j'expoferai par la
fuite. Le nom d’ampélite vient d’une propriété qu'a
cette terre, qui eft de faire mourir les vers qui fe
trouvent dans les vignes j c’eft pourquoi on la
nomme terre de vigne. On s'en eft feivi pour teindre
en noir les cheveux & les fourcils : on en a
fait des dépilatoires. Quoi qu'il en foit de toutes
ces propriétés, qui meparoiffent affez aventurées,
je vais donner ici la defcription de la carrière de
l'ampélite, dont le principal ufage eft de fervir
aux charpentiers pour tracer les lignes de toutes
les mefures qu’exigent leurs conftruétions.
Il me paroit important furtout, avant de parler
de cette carrière qui fe trouve à Ferrière-Bechet}
village voifîn de Sée% en Normandie, de fairé con-
noître la conflitution du fol des environs.
L'ancienne terre graniteufe paroït d'abord au
Pleffis j enfuite le trajet de Séez à la Ferrière-Be-
chet offre des couchesde pierres calcaires, qui fem-
blent adoffées à ce maffif primitif. Cependant dans
certaines parties on remarque des fchiftes, pierres
à lames ou fauffe ardoife, qui forment une lifière
entre l'ancienne terre 8c la nouvelle : celle-ci fe
montre à Beauvais : c'eft là que de nombreux amas
de peignes 8c d'huitres font enveloppés de marnes
grifes , comme au Mellerant. Ceci fe prolonge
jufqu'à la Ferrière-Bechet, où l’on retrouve d'abord
du grès d’Alençon, puis la pierre noire ou
ampélite dont font ufage nos charpentiers. La carrière
de cette pierre fe voit au milieu du fchifte :
fon allure eft de l'eft à l’oueft, en plongeant à
l’oueftj fa grande inclinaifon eft du fud au nord.
Cette matière eft diftribuée par couches lamel-
leufes , au milieu defquelles on apperçoit des
fentes de defliccation, qui interrompent la fuite
des couches.'C'eft dans ces fentes qù'on découvre
des criftaux de vitriol fort blancs. Dans certaines
parties de la carrière les couches difparoiffent, 8c
la maffe de Y ampélite prend la forme de rognons
avec des plis allez multipliés, qui font la fuite du
déplacement 8c de l'inclinaifon delà maffe.
Lorfqu'on revient de la Ferrière-Bechet à Séez
par Saint-Hilaire, on retrouve la nouvelle terre,
où l'on peut fuivre de grandes & longues couches
calcaires , horizontales, deffous lefquelles
font des prifmes de grès à découvert dans certaines
parties où les couches fe trouvent détruites.
( Voye^ Argent o n. )
On trouve dans les monts Krapack une efpèce
de bitume connu fous la dénomination d‘erdpeck.,
qui, tant qu’il rcfide dans le fein de la terre, eft
mou , fou pie comme une cire jaune ; mais lorsqu'il
a été expofé à l’air, il prend une certaine dureté
8c tombe en écailles, comme la lacque. Qeterd-
pech eft très-différent de celui qu’on trouve près
de Zurich, d'Aleriçon 8c dans le Dauphiné : il
paroït affez femblable à celui que Wolfterdorf a
décrit, 8c que Wallerius nomme terra bituminofa,
& approche cependant beaucoup du lapis ampe-
lites.
On n'a pas jufqu'ici trouvé une grande utilité
Ù fe fervir, comme cotnbuftible, de cette matière
qu'on tire des monts Krapack. Il eft vrai
qu’on peut, au moment où on la tire du fein
de la terre, en faire des chandelles qui ne donnent
aucune fumée, quoiqu’elles procurent une
grande clarté. Aurefte, j'ajoute ceci aux détails
pîrécédens comme une variété de Y ampélite. Lés
minéralogiftes en ont diftingué un fi grand nombre
d'efpèces, qu'on peut bien rapprocher celle-
ci de celle d’Alençon, dont nous avons indiqué
le gîte ainfi que les principaux caractères.
AMPHISCIENS. Comme cet article eft le premier
où il fera queftion des ombres, j'ai cru devoir
expofer ici le fyftème général de leur distribution
fur le globe de la terre, dépendante de
la marche annuelle du foleil. C'eft fur ce plan
qu'on divife les habitans de la terre, à raifon des
ombres, en trois claffes. Les uns font appelés Amphifciens
, d’autres Hétérofciens8c enfin les troi-
fièmes Périfciens, Nous allons expliquer très-fuc-
cip.élément cette divifion, nous propofant d en
déduire d'autres vues relatives à la géographie-
phyfique.
Les ombres tirent leurs dénominations des points
vers lefquels elles fe projettent : telles font les'
ombres orientales ou occidentales , fuivant que le
foleil eft à l'oueft ou à l’eft. Mais nous devons
confidérer principalement ici celles qui partent
des corps droits, quand le foleil eft dans le méridien.
Or, il eft vifibie pour lors que ces ombres font
feptentriohales ou méridionales.
Les Hétérofciens font les peuples qui habitent
les contrées de la terre où les corps droits projettent
leur ombre, tantôt au nord fcc tantôt au
fud, certains jours de l'année. Us Périfciens font
ceux, dont les ombres tournent tout autour de
l'horizon : ces derniers peuples habitent les zones
- glaciales-. Les Amphifciens font ceux dont les ombres
font tournées vers le nord pendant quelques
jours, 8c d’autres jours vers le fud. Mais pour ne
pas oublier les lieux litués fous les tropiques, nous
ajouterons les Afciens , qui, dans un certain jour
de l'année , n'ont point d'ombre du tout à midi ,
8c ceux-ci font divifés, 1®. en Amphifciens-Afciens,
qui n'ont point d’ombre à midi dans deux jours de
l'année, & dont l’ombre les autres jours eft tournée
tantôt au nord, tantôt au fudj 2°. en Hétéro
fciens-Afciens, qui n’ont point d’ornbre à midi
un certain jour de l'année, 8c dont l'ombre, le
refte du te ms, eft toujours tournée au nord ou au
fud. Tous ces différens phénomènes dépendent
des jours où le foleil fe trouve au zénith de ces
lieux- > ; •.
Les.peuples qui habitent fous les tropiques du
cancer ou du capricorne font Afciens-tiétérofciensy
car, quand le foleil eft au tropique du cancer ou
du capricorne, les corps droits n’ont pas d’ombre.
Mais à mefure que le foleil approche de l'équateur
dans les deux parties de la zone torride
que. l'équateur fépare , l’ombre eft projetée au
nord ou au fud.
Les peuples qui habitent fous la zone torride
font Afciens-Amphifciens y car fi l’on y prend un
point quelconque fur le globe de la terre, il eft
évident que le foleil fe trouvera deux fois par
an à fon zénith : ainfi les corps droits n y donneront
pas d’ombre alors j mais les autres jours
l’ombre tombera au nord lorfque le foleil occupe
-la partie du fud, & au fud lorfque le foleil fe
trouve au nord. •
Les peuples qui font fitués dans les zones tempérées
font Hétérofciens y car le foleil fe trouve
pendant toute l’année plus au fud de ceux qui
font fous la zone tempérée du nord, & plus au
nord de ceux qui font fous la zone tempérée du
fud. Ainfi l’ombre doit toujours être projetée au
nord pour l’une, 8c au fud pour 1 autre.
Les peuples qui vivent fous les zones glaciales
font Périfciens y car le foleil ne fe couchant pas
pour eux pendant certains jours, 8c tournant autour
de l'horizon, l'ombre projetée doit tourner
aüfl! avec lui.
, Après avoir expofé ce que différens Traités
élémentaires de géographie ont publié fur les om-
brest je crois devoir y joindre.de nouvelles vues
pour fubftituer aux ombres la confidération de la
lumière 8c de la chaleur, effets infiniment plus
iniéreffans que les ombres. 11 eft ailé de voir que,
dans beaucoup de circonftances dont nous avons
parlé, les nuances de températures fui vent les projetions
des rayons du foleil, 8c que même il y a
des cas où la ceffation des ombres annonce la
plus forté chaleur, produite néceffairement par les
: rayons dont laélion eft perpendiculaire à la furface
de la terre.
Ainfi la plupart des diffinélions des peuples, relativement
aux ombres, détermineront des modi-
i ficationsde la chaleur, dépendantes de leur marche
: telles font celles des Amphifciens, qui era-
braffent ce qu’on peut remarquer lur les effets dé
la chaleur dans toute ,1’étendûe de la zone torride,
comme dans celle des deux zones tempérées.-On
peut réunir auffi à ces. confidérations ce qui fe
paffe dans les zones glaciales, où la lumière du
foleil & les ombres qui en font la fuite produifent
des effets fi remarquables, qu'ils ont étonné, non-
feulement les voyageurs, mais encore les cultivateurs
de ces contrées. La réfidencedu foleil fur
l'horizon, fa marche continuelle tout autour de
ce cercle , laquelle promène l’aélion de fes rayons
fans interruption, & une chaleur qui a des progrès
tiès-marqués pendant fon afcenfion , & fe foutient
encore affez vivement pendant fa defcente , tous
ces phénomènes nous engagent à nous occuper s
dans l’examen des z.ônes affectées aux Périfciens,
plutôt de la lumière 8c de la chaleur du foleil,
que des ombres. Aurefte, nous reviendrons par la
fuite à ces confidérations importantes , dans les
articles H e t e r o s c i e n s & P f.r i s c i e n s , en développant
toutes ces vues nouvelles plus en détail
en les ramenant toujours au but phyfi-
que, qui fait notre principal objet. ( Voye\ auffi
I Z o n e s .)- , • - ■