ces vallons font-ils couverts de terre, malgré
la rapidité de leurs pentes. Il y a fur ces croupes
des bouquets de bois de pins, des cultures & des
prairies dans les fonds de cuve.
On doit juger par-là combien font abondantes
les eaux qui circulent dans tous ces vallons, d iftr i-
bués, comme nous l’avons d it, depuis le fol élevé
de Saint-Bonnet jufqu’à la rivière de Cance , à
laquelle cette vallée verfe ces eaux. J’ai d’ailleurs
été à portée de voir que la fonte des neiges avoit
beaucoup contribué a l’ organifation de tout ce
fyftème de vallons, que nous avons eflayé de faire
connoître.
Je reviens maintenant au plateau d’Annonay,
où j’ ai eu lieu d’examiner de nouveau plufieurs
mafies graniteufes. J'ai reconnu que leurs faces
verticales étoient très-unies, très-nettes, & fans
aucune interpofition de matière hétérogène. Les
granits à gros criftaux ont des faces fort larges j
ceux à petits criftaux, au contraire, n’offrent que de
très-petites faces & des fentes très-multipliees.
IDy a des granits à bandes ondées parrrj les
granits à grains uniformes, comme des granits à
grain fin parmi des granits à gros grain. J'ai vu
de même que les cailloux roulés des rivières qui
ont leurs cours dans les granits,. avoient pour
noyaux des pierres dures qui ont pu réfifter aux
chocs réitérés des eaux courantes. Il eft aifé de
reconnoître que les pierres tendres avoient dif-
paru, ayant été réduites en fable & en-autres
elémens des granits.
En quittant le plateau graniteux d'Annonay &
en jetant les yeux fur les montagnes du Dauphiné,
On eft étonné que ce plateau fe trouve à un niveau
plus bas que les couches horizontales, & les demi-
Combles inclinés à l’horizon, qui couronnent ces
montagnes ; qu’en un mot, ce plateau, dans la
partie qu’il offre entre Annonay & Andance, n’ ait
pas reçu la fuperfétation de ces couches. Si l'on
réfléchit en même tems que la furface. de ce plateau
auroit pu éprouver un grand abaifiementpar
les mêmes caiifes qui ont attaqué les groupes de
montagnes qui font à fön extrémité, & dont nous
avons parlé en détail, on trouvera une forte de
Solution à la difficulté que nous venons de pré-
fenter.
•Les couches horizontales de la dernière époque
fe prëféntent, à ceux qui favent obferver & qui
defcehdent à Andance, dans la plaine du Rhône. !
pn ;y voit ces dépôts appartenans à la Vallée-Go fè
du Rhône , qui font adoîfés contre les parties intérieures
'des croupes de granit ., depuis Andance
jüfqu’à Châteaubourg, & même au-delà. Ils prou- :
Vént que la mer n’a pu les faire que depuis l’ap- 1
profondiffeanënt de la belle vallée du Rhône.
- ( F - ^ T x l l é e - G o x ï e , G r a n i t & V a l l é e . )
ANSE tju ANCE. Sinus maris. 'C’eft une partie
de côte, dans laquelle la mer ou la terre éprouve
un enfdncernent à peu près fémi-circulaire : c’eft là ’
que la mer le plus fouvent a pénétré, en formant
une petite rade peu profonde. L’in d i f f è r e d'une
petite baie3 en ce que fon entrée ou embouchure a
plus de largeur à proportion que celle de la baie }
mais en général Yanfe eft plus-petite que la baie.
On appelle anfe de fable celle qui préfente fur
fon contour une plage de fable ou une greve. ( Voye£
ces mots.) Les anfe s de cette forte font communément
bornées par deux pointes de rochers, entre
lefquels la plage fe développe en s’enfonçant un
peu dans les terres.
Une cale y que les Anglais défignent par les dénominations
de cove ou right, qu’ ils emploient
également pour indiquer une anfe 3 eft un petit
abri fur une côte, un enfoncement fort étroit,où
de petits bâtimens peuvent fe couler, fe réfugier
& fe mettre en fureté dans le mauvais tems.
On emploie dans nos colonies une qualification
peu convenable} c’eft celle de trou pour défigner
une petite anfe où les bâtimens peuvent ancrer.
Ainfi, nous avons à Saint-Domingue le petit trou,
le fuie trou3 <&c. & à l ’Ile-de-France le trou fanfaron
: c ’eft dans cette dernière anfe que les vaif-
feaux hivernent. Il feroit convenable de fubftmicr
la qualification d‘anfe à celle de trou.
J’ai cru devoir indiquer, dans la defeription des
côtes du Canada, plufieurs anfes qui fe trouvent
mêlées avec les baies 3 dont j’ai fait l’énumération
à l’article de la N o u v e l l e -E c o s s e : ce font
Yanfe de Sainte-Catherine y Yanfe aux Lamproies,
Yanfe Noire , Yanfe du Diamant, les anfes de Çhi-
bouciou y de Sainte-Marguerite, de la Heve, du Mouton
y de L'Ours, &c. Nous reprendrons ces détails
fur les anfes & les baies 3 avec l’expofition des
circonftances qui s’ y trouvent réunies , à l'article
de la N o u v e l l e - E c o s s e . ( Voyei cet article. )
Après ces idées préliminaires fur les anfes (/mus
maris"), je crois qu’il conviendra d’ en rapprocher
ce qui concerne les baies , les golfes, \ts~mers &
les bajjinsy afin de les préfenter fous le même point
de vue, & d'y ajouter les embouchures des fleuves
& tous les bras de mer, qui font des efpèces
de euis-de-facs fort étroits. Ain fi, tout ce qui fert
à modifier à un certain point les formes littorales
de nos continens, y figurera dans un périple inf-
truélif, qu’on ne fauroit fuivre & étudier avec
trop de foin.
Ainfi les anfes 3 les baies3 les golfes , font les enfonce
mens où l ’Océan a pu s’introduire dans les
terres fans en détacher des parties, & a pu fef-
tonner les bords de nos continens.
En général, 1 e. golfe eft plus large à fon entrée,
qu’il ne l’ éft fur fa longueur ; la baie3 au contraire,
eft plus large dans fon milieu, qu’elle ne l’eft à fon
entrée. D’ailleurs,ces enfoncemensplus ou moins
îange-s, plus ou moins profonds, conviennent aux
définitions précédentes, & peuvent être défignés
fans inconvénient, tantôt par les mots de baies,
tantôt par ceux de golfes, & il paroî-t que ., fort
1 fouvent, on a cru pouvoir affigner fans choix Tune
ou l’autre dénomination aux diverfesfinuofîtésdes
bords de nos continens. Cependant ne convien-
droit il pas de fe diriger fur ces principes, qu'un
golfe eft une grande baie, & qu’ une baie eft un :
petit golfe ? Mais j’ajoute ici qu’un golfe, quelque j
grand qu’ il fo it , ne peut être qualifié de mer, 8c
encçre moins d'océan, parce qu’ une mer, renfer- ;
m é e dans un baffin intérieur quelconque, ne peut ■
être p ri fa pour un golfe.
On diftingue deux fortes de baies : les unes ou-
vertes , qui ne font proprement que de petits
golfes, telles que les baies de Campêcke, de Honduras
y que leur configuration a fait qualifier de
golfes y ainfi que le golfe de Darien, de Guaya-
quil, de Panama.
Les baies fermées font de petites mers intérieures,
telles que les baies de Cadix, de Bofton , &
Franfaife. On appelle auffi baies de véritables j
mers intérieures, telles que les baies de Baffin &
d’Hudfon.
Au refte, nous ne pouvons omettre dans l’étude
du littoral de nos continens, les petits accidens'
qui l’interrompent à un certain point, tels que les \
ports y les havres, les criques , les embouchures des
grands fleuves ou ces petits bras de mer que les
navigateurs défignent quelquefois par le nom 8Yentrées
: il en eft de même des culs-de-facs. Je le répète
: toutes ces modifications des bords de l’O céan
doivent.nous intéreficr d’ autant plus,qu’elles-
peuvent nous donner les premières idées des diffé-
rens progrès de l’agrandiffement des formes plus
confidérables, & en même tems du développement
des différentes caufes qui y ont contribué.
Il me paroît que jufqu’à préfent aucune de ces
configurations des bords réciproques de nos continens
&r des mers n’a été décrite avec toutes les
circonftances qui pouvoient nous conduire à la
connoiffance de ces caufes. -Plufieurs écrivains
n’ont admis d’autres agens que l’aétion de l’Océan
contre les terres, pendant qu’ il eft très-probable
que les eaux courantes de l’ intérieur des terres y .
ont eu comme elles , & y ont encore la principale
influence. Au refte, quelles que foiencla difpofi-
tion Sr 1§ direction des agens qui ont opéré ces
dentelures, il eft de la plus grande importance de
décrire avec foin toutes les circonftances qui en
ont déterminé les effets, fuivant les principes de
la géographie-phyfique, qui peut préfider à la
difeuffion des différentes caufes, fuivant les formes
que nous préfenteront les anfes, les baies &
les golfes. C ’eft pour fuivre, dans ces vues, un
objet auffi important, que je vais tracer un périple
, des côtes de nos deux continens, où les formes
littorales & principales feront notées très-fuccinc-
tement, tant relativement àTa&ion de l’Océan,
que fous le rapport de celle des eaux courantes de
l’intérieur des terres, me réfervant de traiter par
la fuite des baies & des golfes les plus célèbres &
les plus étendus, foit dans des articles particuliers,
foit dans un article général.
Je ferai furtout remarquer que les formes des
anfes , des baies & des golfes different furtout fuivant
que les caufes de l'intérieur ou du dehors y
ont influé plus ou moins. Les formes qui nous i-n-
térefferont le plus, font celles des golfes étroit?
& profonds, & dont les côtes, baignées par l’O céan
, reçoivent en même tems les eaux des grands
fleuves : auffi j’ai eu le plus grand foin d’ en défigner
les embouchures le plus exa&ement qu’ il
m’a été poffible, comme une des circonftances
que nous devions rappeler, parce qu’elles^ ont
été négligées jufqu’ à préfênt. D’un autre coté ,
plus les côtes de l ’Océan font détaillées & Coignées
y particuliérement fur la bordure orientale,
où le travail de l’eau en grande malle eft plus marqué,
plus le dénombrement de ces formes doit
être exadf. Je l’ai trouvé furtout d'un beau détail
dans la belle carte générale qui accompagne le
Voyage autour du Monde d’Etienne Marchand, par
M. de Fleurieu, particuliérement le long des côtes
de l’Océan oriental, & il feroit à defirer que
ces détails fufifent tranfportés dans nos mappemondes
ufuelles, qui font fi peu exactes.
Je reviendrai au refte, je le repère, fur les v éritables
caufes qui ont concouru à denteler les
côtes de nos continens , & j’ infifterai particuliérement
fur les effets des eaux intérieurés, parce que
fouvent les géographes & les naturaliftes ont négligé
de les comprendre dans les agens que la nature
à mis en oeuvre depuis long-tems, & de
comparer ces effets avec ceux des flots de la mer.
J’ajouterai d ’ailleurs définitivement à toute cette
difeuffion, la néceffité de connoître la nature des
bords de l’Océan & leur conftitution phyfique ,
qui doit être telle qu’elle ait pu fe prêter plus ou
moins à leur deftruêtion, & à l’approfondiffement
d’une côte contre laquelle les flots font des efforts
continuels, étant favorites par la tendance de toute
la maffe des.eaux de l’eft à l’oueft.
Périple des deux continens.
Parcourons le littoral des deux continens, pour
attacher à chaque portion des côtes de la mer la
qualification qui paroît convenir le mieux à leur
configuration particulière, & pour y joindre d’ailleurs
le nom que leur fituation pourra nous indiquer.
En entrant dans l’Océan atlantique parle nord,
nous trouverons d’abord,du côté de l'Amérique,
la baie de Baffin & la baie d'Hudfon , dont les deux
baffins fe réunifient par des détroits qui forment
une mer intérieure d’ une grande étendue, laquelle
communique avec Y Océan atlantique. Nous reviendrons
par la fuite à cette Méditerranée , en efiàyant
d’en faire connoître tous les détails relatifs à fa
formation primitive.
Le fleuve Saint-Laurent, par le prolongement
de fa large embouchure, forme enfuite un golfe ,
borné au nord par les côtes méridionales du Labrador,
à i’ eft par file de Teïrè-Neuve, & au