
t î c l e M o r v a n c i - a p r è s la d é te rm in a tio n d e s l i m
i te s d e Y a n c ien n e & d e la n o u v e lle terre pa r des
o b fe r v a t io n s fu iv ie s , d o n t les r é fu lta ts fo n t figu r
é s dans un e c a r te p a r t ic u liè r e q u i fa i t p a r tie d e
n o t r e A t l a s . )
Avant de quitter Y a n c ien n e terre que j’ai taché
de faire connoîtrefil ne me refte plus qu’ à indiquer
deux grands phénomènes très-remarquables , qui
la diftinguent finguliérement de la m oy enn e & de
la n o u v e l le . Le premier a pour objet l’imbibition,
la circulation intérieure & l’épanchement au dehors
de l’eau pluviale. Toute cette marche de
l ’eau particulière à Ya n c ien n e terre fera développ
é e , dans le plus grand détail, à l ’article Circulation
de l’ eau des pluies. Le fécond phénomène
concerne la diftribution des eaux dans les
vallons latéraux attachés aux rivières principales ,
& dont nous avons déjà parlé ci-devant en traitant
des a ffluences dans Ya n c ie n n e te rr e . On trouvera
de même cette dernière diftribution des eaux
courantes, figurée & décrite dans notre Atlas aux
articles Affluences & C onfluences 5 ce qui
complétera nos nouvelles vues fur l'origine des
Sources, & Amplifiera un problème que les phy-
liciens du lïècle dernier ont chargé de confidéra-
tions vagues & inutiles.
ANCIENNES PEUPLADES. Dans le tems que
la mer occupoit les parties des continens qu’elle a
formés, les hommes des premiers âges n’ont pu
avoir d’afyle que fur les hauteurs & les plateaux
élevés du globe, d’où leurs defcendans fe feront
fucceifivement difpèrfés vers les différens points
des continens abandonnés enfuite par la mer. C ’eft
ainfi que Ton a découvert, au pied des anciennes
montagnes & fur leurs fommets, les premières
peuplades, comme les Péruviens au pied des Cor-
dillières, à la côte occidentale les Bréfiliens, dans
la partie oppofée des Monts Apalaches tous ceux
qui , par la fuite des tems , fe font établis dans la
Virginie, la Floride , les Antilles & les Lucayes :
de même les habitans de la Guiane font defcendus
du Parimé j &c. _
Il faut cependant confidérer que les grandes
maffes montueufes qui font maintenant divifées
en fommets fort petits, arides & efcarpés de tous
côtés, offroient, dans les premiers tems, de grandes
furfaces convexes, q u i, par leur fituation
comme par leur étendue, pou voient, comme nous
l’avons a i t , fervir de retraite aux hommes au milieu
des inondations anciennes de l’Océan. On
doit penfer effe&ivement que c’ eft précifément à
l’époque des premières peuplades, que les chaînes
de montagnes n’avoient pas encore été féparées
par des vallons qui ont été approfondis depuis,
& qu’ elles offroient des convexités très-étendues,
capables de nourrir les premiers hommes. Ainfi il
ne faut pas en juger d’après l’état a&uel, qui eft
un état de deftru&ion. Au refte, avant de fixer
J’étendue des parties du globe qui n’ont pas été
couvertes par la mer, & où les hommes ont pu fe
réfugier, il faut avoir recueilli plus d’obfervations
qu’on n’ en a ralfemblé jufqu’ à préfent, les avoir
rangées par ordre, & avoir déterminé les limites
des t ra ttu s de l’ancienne terre, qui ne portent pas,
comme nous l’avons d it, les traces du féjour de
l'Océan & de fes dépôts.
D’ailleurs, lorfqu’on envifage avec attention
les différens ordres d’événemens qui font pofté-
rieurs à la retraite de la mer, le long intervalle
de tems qui a dû exifter depuis que les couches
horizontales ont été formées & mifes à découvert
, il n’eft pas probable que les plus anciens
habitans aient pu conferver la mémoire, ou être
témoins de la révolution qui a mis à fec les parties
de nos continens, lefquelles ont fait partie du baffm
de la mer. On ne voit pas que les* fauvages établis
le long de la chaîne des Apalaches & des montagnes
Bleues aient confervé la mémoire de cet
événement.
Comment fixer l’époque du féjour de la mer fur
nos continens & de fa retraite ? Il eft fi facile de
confondre avec ces révolutions des évenemer.s/
poflérieurs, lefquels pourroient appartenir à l’époque
torrentielle, & qui font de nature à laiffer
de fortes impreflîons dans la mémoire des hommes.
Le féjour de la mer ni fa retraite ne font pas
de cet ordre d’événemens brufqués qui étonnent
par la rapidité avec laquelle ils parcourent certaines
contrées du globe : ces derniers accidens ne
font dus qu’ à des accès fubits qui marquent leur
marche de manière à effrayer ceux qui en apper-
çoivent, ou les effets, ou 1 :s traces. C ’eft peut-être
à ces mêmes événemens qu’ on doit rapporter ces
fquelettes énormes enfevelis dans des terres nouvelles
, qu'on a découverts dans la T erre des Brûlés
ainfi qu’au Mexique, à Tefçuco, dans les îles de
Sainte-Hélène & de Puna. Il paroît que partout,
comme en Sibérie, ce font des fquelettes de grands
quadrupèdes. Quelles autres caufes pourroit-on
affigner à la deftru&ion de ces animaux? A me-
fure qu’on aura mieux obfervé la difpofition de
ces animaux dont Jes dépouilles foffiles fe présentent
dans le nord de l’Afie comme dans celui de
l’Amérique, qu’on aura reconnu les efpèces auxquelles
ces dépouilles ont appartenu, on fera plus
en état de décider un des points les plus impor-
tans de la phyfique du globe & de l’hittoire des
êtres, & l’on fera plus en état de rapporter ces
événemens à des accidens dont les caufes peuvent
être indiquées parmi celles que nous con-
noiffons. Mais fi l'on préfente ceci comme l ’effet
d’une cataftrophe dont on n’ indique aucune caufe
naturelle, on a bien l’ air d’introduire des moyens
i extraordinaires, que le befoin d’ expliquer fans le
fecours de l’obfervation fait imaginer. A mefure
que l’obfervation, fuivie & raifonnée, éclairera
toutes les circonftances de ces faits étonnans, l’on
verra les événemens bien analyfés.& bien connus
appeler les caufes. Dans cet article je commence
par les peuplades des hommes & des animaux qui *
fe retiroient fur les hauteurs; & je finis par indiquer
les amas de leurs cadavres vifiblement produits
par la marche, de la nature dans fes def-
truélions.
ANCIENS- ( Auteurs). Je crois devoir m’pccu-
per ici des confiéquences qui réfultent de l’ étude
de l’hiftoire naturelle de la terre, pour.écarter les.
di verses affertions des Anciens, relatives aux états
fuç.effifs de certaines parties du globe,
Jufqu’à préfent plufieurs naturaliftes ont été
fort embarralïés pour .réduire à leur jufte valeur
les opinions des. Anciens fur les différens états des
contrées de nos continens, & particuliérement
fur les effets des eaux courantes dans l’ intérieur
des terres & le long des rivages de l’Océan. Je
les vois fort attentifs, lorfqu’ iis ont' effayé de
fixer»nos idées fur des points importans, à recueillir
les faits que les Anciens leur fourniffent,
. dans l’ intention fans doute de nous, faire adopter
ce qu’ils conffdèrent comme le réfultat du rapprochement
de leurs paffages. Je vois d’ailleurs
que les le&eurs femblent auflî les regarder comme
des autorités précieufes, auxquelles les naturaliftes
de nos. jours doivent fe-foumettre fans difcuflîon
comme fans examen.
Cependant il eft évident que l’ obfervation, guidée
par les principes de la géographie-phyfique,
.doit nous déterminer inconteftablement à n’avoir
.aucun égard aux afl'ertions des Anciens, foit qu’elles
aient pour objet les tems héroïques , foit
qu’ elles concernent l’hiftoire & les monumens de
leur tems, car plufieurs de ces affertions font
contredites par l ’obfervation de la nature, qui
nous a offert fouvent, d’une première vue , des
preuves frappantes de l’ ignorance des Anciens,
& furtout de leur amour pour le merveilleux ;
car à mefure qu’on a fuivi avec plus d’attention
„les réfultats des opérations de la nature , on s’eft
convaincu que. les anciens écrivains étoient bien
éloignés de nous donner des explications de certains
faits, puifque leurs hiftoriens comme leurs
poètes les avoient défigurés par la teinte favorite
.du merveilleux.
Effectivement, l’hiftoire naturelle des Anciens
_étoit un tiffu de faits la plupart extraordinaires,
par les acceffoires que la fable avoir ajoutés aux
détails de leurs explications. J’en puis citer ici
pour preuves le chapitre CIII de Pline, intitulé
Miracula àquarum ,fontium, & c. où il y a tant d’erreurs.
Ils étoient donc bien éloignés de fe borner
aux agens que la nature leur offroit, & par confé-.
quent d’aller recueillir fur les lieux les .circonftances
qui pouvoient les éclairer, & ceci doit
nous paroître d’autant moins étonnant, que la
.même illufion s’eft continuée jufque dans le moyen-
âge , & même u» peu de notre tems. Quoique
l’obfervation fe foit perfectionnée à un certain
point 3 le merveilleux a toujours féduit les efprits
Géographie-Phyfique. Tome IL '
faux. On voit par-là combien i l eft’ rare de réduire
les faits à la fimplicité de la nature, aux circonftances
vraiment inflruétives, & qui peuvent fervir
à analyfer tout ce qui s’eft opéré & s’opère de
nos jours.
C ’ eft-dans ces vues que j’ ai effayé de faire connoître
les différens ordres de faits que les Anciens
nous ont tranfmis,, dans l’intention pour lors de
montrer, en difcutant chacun de ces faits , les
différens principes de leurs erreurs , & de les
ramener à ce que les obfervations ont pu nous
apprendre.
Je place à la tête de ces faits ce que les Anciens
ont dit fur l'ouverture des détroits, & parmi ces
détroits ce qu’ils ont hafardé fur ceux de Gibraltar,
des Dardanelles 3 de Confiantinople, & c . ; enfin fur
les golfes, les meis intérieures, dont ils ont attribué
la formation à l’Océan. A ce fujet je puis
renvoyer d’abord à ce que j’ai dit fur le Bufphore
deThrace dans la notice deTournefort, & à l’article
B o s p h o r e de ce Dictionnaire.
Je fuppofe maintenant que l’on fe propofe de
difcuter ce que les Anciens ont écrit fur les déluges
en général &c fur les inondations particur-
lières, il fau t, après avoir reconnu l’état aChiel
des pays qu’ils ont fait les théâtres de ces événemens
extraordinaires, examiner furtout fi rien
n’annonce, dans la forme extérieure du fol de ces
contrées famé u fes , les veftiges de ces révolutions;
fi toutes lés formes du terrain reffernbleiit
à celles que préfentent les autres contrées voifî-
; nés ; enfin, fi l ’on y trouve partout en activité les
| agens ordinaires.
Dans tout ce qu’ ils ont dit du déluge de Deu-
calion en Theffalie, j’ y vois une infinité de cirr
confiances fauffes & hypothétiques, mal obfer-
vées par les premiers écrivains, & mal racontées
par les féconds. On a d it, par exemple, qiie le
beau vallon de Tempe avoit été ouvert par les
eaux du Pénée , qui avoient féparé le mont Pélion
du mont Offa, Sc que les eaux de ce fleuve^ avant
cette ouverture, avoient. rompu la digue qui les
retenoit & en formoit un lac.
Il eft évident que fi le vallon de Tempe a été
ouvert par les eaux du Pénée, ce n’ eft pas dans le
tems que le maflif de Tempé formoit une digue qui
retenoit les eaux du lac ; car fi ces eaux du Pénée
ont été raffembîées dans un balfin , elles n’ont pu
détruire leur digue, & encore moins fe faire jour
en creufant la vallée de Tempe; car il a été nécefi
faire que les eaux du Pénée aient charié , dans le
baffin du la c , des vafes affez abondantes pour que
ce baffin fût comblé de manière que le fond du
nouveau lit du Pénée, formé par ce rempliffage,
fût au niveau de la digue par-deffus laquelle fe
verfo.it,le trop plein du lac ; alors l'eau du fleuve
auroit repris fon activité , & la digue fe féroit
creufée par cette maffe d’eau devenue courante :
; fans cette circonftance, je, ne puis concevoir que
1 l’eau du lac ait rompu fa digue , & c. Tct