
ou bien des pâlies qu’on élève ou qu’on abaiffe
plus ou moins, à proportion de la quantité d’eau
qu’on fouhaite.
On conftruit aufli des éclufes à demeure & à
trous. Ces dernières font les plus (impies : une
ou deux groffes planches ou plateaux de deux
pouces d’épaiffeur , pofées l’une fur l’autre,
fufKfent. On les perce de plufieurs trous ronds
ou carrés, qu’on ferme avec des tampons lorf-
qu’ il le faut. La planche inférieure eft enfoncée
en terre j & toutes font exactement jointes.
-Enfin, on a befoin de planches mobiles qu’ on
affure grofliérement au travers des maître fies
rigoles , pour jeter & détourner les eaux fur les
endroits où elles conviennent le mieux.
Voici maintenant les règles qu’il faut fuivre
dans les arrofemens : i®. une prairie élevée &
découverte demande plus d’eau qu’une prairie
baffe & ombragée. 2°. Pour les arrofemens ordinaires
& réguliers , les eaux doivent être répandues
avec plus d’abondance fur une prairie en
pence, ou dont la terre eft légère, &c. ;° . Les
prés dont l’afpe$ eft au midi, font les plus altérés
, mais aufïi donnent des récoltes plus abondantes.
Les prés dont l’expofition eft à l’orient
ou à l'occident, tiennent le milieu pour les be-
foins & les produits. 4°.On court moins de rifques
à trop arrofer avec de bonnes eaux naturelles,
qu’avec des eaux de médiocre qualité. 50. On
fent qu’ il faut moins arrofer dans les années plu-
vieufes, que dans les années fèches. 6°. L’abondance
des eaux de médiocre qualité nuit plus
aux terres fortes qui les retiennent avec une certaine
opiniâtreté, qu’aux terres légères, qui s’en
défaififlent affez promptement. 7®. Tous les terrains
qui ont des pentes en divers fens & des
contre-pentes, font fujets à devenir fangeux , fur-
tout dans les fonds, en les arrofant fans ménagement
& fans précaution ; ainfi on ne peut trop y
faire attention. 8Q. Quelques perfonnes penfent
u’un terrain qui eft arrofé pour la première fois,
oit être abreuvé à fatiété; a’autres foutiennent,
au contraire, qu’ il faut l’ accoutumer peu à peu à
l ’effet des irrigations. Il paroît que ceux qui ont
confulté l’expérience, fe font convaincus qu’ on
peut inonder avec fuccès les terres légères , dont
les pentes font régulières & uniformes; mais qu’il
en eft tout autrement des terres fortes ou mi-
fortes , ou de celles qui ont des pentes en divers
fens. 90. Il paroît que l’arrofement doit être bien
fuLvi & bien abondant au printems, être fufpendu
à un certain point en é té , reprendre en automne,
& s’exécuter en hiver avec toute la prudence &
l’intelligence que cette faifon doit naturellement
exiger.
Les régies fur le tems de l’arrofement font
les fuivantes : i° . dès que le dernier foin eft re-
cueilli, i1 faut abreuver très - abondamment les
prés > alors toutes les eaux 4 même les médiocres,
peuvent fervir. C ’eft donc une mauvaife économie
que d’y faire pâturer le bétail dans cette faifon, &
furtout d’arrofer les prés la nuit, pendant que les
beftiaux y pâturent le jour. 20. On doit bannir des
prés l'introduCtion des eaux médiocres dès que la
gelée furvient, & n’y laiffcr entrer que celles qui
ne gèlent pas ou qui gèlent peu. 30. Il ne faut point
changer les eaux pendant la gelée, mais attendre,
pour les conduire ailleurs, que le dégel foit venu.
4°. Les meilleures eaux font dangereufes fur les
prés lorfque , l’herbe commençant à pouffer, l’on
craint les gelées blanches. On doit donc être
attentif aux premiers avis de froid dans le printems.
50. Les arrofemens du printems demandent
plus de foin & d'attention que ceux d'automne,
pour changer l’eau & foigner fa diftributiôn &
I fa circulation régul ère & uniforme. 6®. Lorfque
l’eau & la terre font échauffées par les rayons
du foleil, les arrofemens font nuifibles aufli les
arrête-t-on ; mais on attend, pour changer les
eaux, que la chaleur du jour foit baiffée. j ° . Les
neiges' ou les glaces fondues font pernîcieufes
aux prairies , furtout dans l’état où elles coulent
des montagnes. 8°. On interrompt l’arrofement
dès que les plantes des prairies commencent à
entrer en fleur, afin de laiffer prendre une certaine
confiftance à ces plantes. 90. Pendant les
pluies froides, on arrofe avec de bonnes eaux la
plus grande étendue de prairie qu’il eft poflible.
io°. Si l’année eft pluviéüfe , on ne doit arrofer
qu’avec de bonnes eaux. u ° . On n’ arrofe point
pendant qu’il fouffle de vents froids. 12®. Il ne
faut changer l’eau des prés qu’après que la rofée
eft évaporée, lorfqu’elle eft abondante : les eaux ,
conduites fur une herbe couverte de rofée> font
nuifibles : On ne les change pas non plus pendant
la grande chaleur du jour; on les change
donc le foir avant la roféè , & le matin après
qu’elle eft diflipée, comme nous l’avons dit.
L’expérience a fait établir plufieurs règles fur
la maniéré de pratiquer les canaux deftinés à porter
les eaux fur le terrain, & à les répandre »
& fur l’emploi de ces canaux. i° . Toutes les
parties doivent profiter de l’ irrigation , & elle ne
doit nuire à aucune ; 20. chacune/doit être plus
ou moins arrofée, fuivant fa nature ; 30. le nombre
des canaux de dérivation doit être proportionné
à l’étendue -de la prairie, foit en largeur,
foit en longueur, & de même le nombre des canaux
de defféchement doit être en raifon des endroits
inondés, & c . 40. la diftance des canaux d’arrofe-
ment, qu’ on appelle rigoles, doit auffi varier, fuivant
la nature du terrain ; ainfi cette diftance fera
moindre fur les terres légères & fur celles qui ont
moins de pente ; mais plus grandes fur les terres
fortes & fur celles qui ont plus de pente, & depuis
trente jufqu’ à cinquante pieds d’inclinaifon ;
y°. les rigoles ne doivent pas être trop longues,
car l’eau pour-lors n’atteindroit pas à leur extrémité,
ou bien y parviendroit trop froide s’il
fait froid, ou trop chaude s’ il f ût chaud : pour
diminuer cette longueur, on fera un canal de
détente ; de plus, on pavera la rigole jufqu’à une
certaine diftance , ou on lui donnera plus de
pente; 6°. les rigoles, comme nous l’avons d it ,
doivent être plus larges a leur entree , & diminuer
infeofiblement jufqu a leur iffue : ceci eft
fonda fur la diftributiôn régulière de l’eau ;
70. c ’eft pour cette raifon que l’ on doit veiller
fur les canaux , pour qu’ ils' ne s’obftruent dans
aucune partie de leur cours ; 8°. car les eaux ne
doivent ni être arrêtées , ni croupir dans aucun
endroit, mais circuler toujours librement, pour
entretenir une humidité uniforme partout ; 9?. le
canal de conduite ne doit jamais ^déborder, pour
que fes bords ne foient pas détruits ; io ° . au
canal d'introduCtion qui fait la fonction de rigole,
l’on doit faire , d’intervalle à autre, de
petites ouvertures dans la direction de la pente
du terrain ; 1 1°. ces ouvertures doivent être en
biais pour s’adapter à la pente; 12®. en automne
on ne change point le cours de l’eau que le fol
ne foit entièrement humeCté ; il faut ménager
l ’eau fur la fin de l’hiver , & même plus encore
für la fin de l’été & au fort de la chaleur du
jour, comme nous l’avons déjà dit ; 13°. l’eau
doit être diftribuée de manière quelle coule à la
fuperficie du gazon ;elle ne peut, au refte, produire
du bien qu'autant qu’elle pénètre doucement
le fo l , fans trop inonder les racines des
plantes
Les eaux graffes & accidentelles, celles qui
lavent les grands chemins & même les rues des
villes & des villages , doivent être employées
fuivant certaines règles que nous allons expofer
le plus fuccinétement qu’il eft poflible.
i®. On voiture les eaux d’égoûts depuis l’automne
jufqu’au printems, fur les prés qui ne peuvent
pas en profiter autrement. Dans les autres
faifons, il faut conferver ces eaux ou les rejeter
fur les fumiers ; 2°. fi ces eaux peuvent couler
d'elles-mêmes fur les prairies, il faut paver les
conduites ; î°- on creufera enfuite dans l’endroit
le plus commode du pré un petit étang
bien étanché & pavé, comme nous l’avons dit
& expliqué ci-deffüs , pour y raffembler les eaux
graffl s , & l ’on répandra enfuite le limon qui s’y
dépofera fur les endroits du pré qui ont le plus
befoin de cet engrais ; 40. il faut fouvent changer
la direction de ces eaux , & les faire couler
le plus loin qu’ il eft poflible ; y°. on les détourne
dès que l'herbe eft parvenue à la hauteur
d’environ fix pouces ; 6°. quelques fermiers
rte tranfportent ces eaux d’égoûts fur leurs :
prés, qu’après qu’elles ont féjourné quelque tems
dans les étangs.
Pour ce qui concerne le$ eaux à tems , nous
rappellerons quelques pratiques qu’on ne fauroit
fuivre avec trop de foin. i ° . Il faut paver le
canal d’introdu&ion , & même celui de dériva- i
tion, jufqu’à une certaine diftance de leur ouverture
; 2P. comme i’eau fe prend ordinairement
le fo ir , & qu’on la garde jufqu’au lendemain
à la même heure , il convient de recevoir
dans un étang l’eau qui couleroic pendant la
chaleur du jour ; elle ferviroit à arrofër la nuit
fuivante ; 30. les canaux pavés doivent être tenus
bien nets & en bon é ta t , afin que toutes ces
opérations de l’arrofement fe faffent bien régulièrement,
comme nous l’avons prefcrit.
Pour l’irrigation d’un pré de terre forte, dont
la pente eft médiocre, les canaux d’arrofement
ou les rigoles doivent avoir moins de profondeur
quelles n’en ont dans les terres légères : il faut
aufli les changer toutes les automnes, en coupant
le terrain entre deux canaux anciens.
• On ne doit pas prodiguer l'eau aux terres fortes
qui n’ont que peu de pentes, furtout fi elles font
expo fées au nord, & que le s x aux foient médiocres.
Les fumiers font furtout très-profitables fur
ces fortes de terrains. On fe fert particuliérement
des boues des rues^, & en .général des fumiers bien
confommés , & qu’on a foin de répandre en automne,
dans le tems où la végétation eft moins
aCtive. Au printems, on ramafle les parties de
fumier qui n’ont pas été fondues par les gelées &c
les eaux des pluies.
S'il y a de la moufle fur les prés, il faut l’arracher
avec un ratèau de fer / avant que de jeter
ie fumier, ou même, ce qui renouvelle plus avan-
tageufement une prairie, on y fème du blé, &
puis du trefle alternativement.
Quelquefois on diffout le fumier dans un étang,
d’autres fois on le répand fur la place qu’on fe prc -
pofe d’améliorer; ailleurs, on le diftribue le long
du canal de détente : ce qu'il importe le plus,
c’eft de s'affujettir aux différentes circonftances.
Quant à ce qui concerne les marais , il faut
commencer par donner l’ écoulement aux eaux
ui y croupiflent. On élevera des bernes du côté
'où viennent les eaux , afin de les écarter des
bas-fonds ; on creufera des tranchées dans ces
endroits inondés^, &: on procurera par ces moyens
l’écoulement des eaux furabondantes ; car les
terres ne produiroient prefque plus fi on les pri-
voit d’eau tout-à-fait. On y fupplée même par
des verfemens artificiels, ménagés avec prudence :
pour cela on laiffe des ouvertures aux bernes , &
on y établit des éclufes, qu’on ouvre ou qu’on
ferme fuivant le tems ou les faifons.
On pourroit encore employer des tuyaux percés,
qui, couchés dans le maflîf des digues, boi-
roient dans les rivières, & feroient l’office de
fontaines pour les prairies, fuivant le befoin.
On arrofe les chenevières , foit par immerfion
comme les marais , x foit par irrigation comme
les prés.
Enfin les jardins s'abreuvent aufli par irrigation
comme les prés , ce qui avance beaucoup la production
des légumes. Cette opération fe trouve