
des lacs, & en raffemblent plufieurs fans ordre
dans leur cours, qui eft fort irrégulier & plus ou
moins aiongé.
J’ai remarqué depuis long-tems que cette grande
contrée de l’ Amérique feptentrionale, voifine du
pôle nord, étoit femée de lacs & de rivières d’un
cours affez irrégulier, &. que ces phénomènes
étoient affez fèmblàbles à ceux que nous offre la
pointefeptentrionale de l’Europe, comprife entre
le 50e. & le 70e. degré de latitude nord.
11 fufEt de jeter les yeux fur ces deux contrées,
pour être frappé de leur reffemblance : on y trouve
également des eaux ffagnantes & courantes,dont
la marchj incertaine ne paroit affujettie à auchne
pente fui vie : out e cela, des cataraûes & des
chutes fréquentes annoncent, dans l’un & l’autre
pays, des inégalités multipliées, en forte qu’on ne
rencontre aucun pays auffi étendu, qui offre des
lacs groupés & enfilés de la même manière. Au
refte, je renvoie ici à l ’article La c , ou je traiterai
en détail de tous les points qui peuvent rçndre
cette comparaifon intéreffànte.
V égétaux. Ce pays eft entièrement aride au
nord de la baie d’Hudfon : on nJy voit même plus
de pins ni d’autres arbres verts, & la terre ne
produit guère que de miférables arbriffeaux tout
rabougris. Toute efpèce de femence d’Europe,
jetée dans ce dur climat, y a péri.
A nimaux. On trouve, dans ces contrées, des
ce r fs , des buffles, des loups, des renards, des
caftors , des loutres, des linx, des martres, des
écureuils, des hermines, des chats fauvages &
des lièvres. Parmi les oifeaux on y compte les
o ie s , les outardes , les canards de différentes ef-
èces , des perdrix, &c. Les poiflons font des
aleines, des vaches marines, de« veaux marins,
des morues,& un poiffon blanc, préférable au hareng.
Dans les fbuves & les lacs fe pêchent en
abondance des brochets, des perches, des carpes
& des truites.
Tous les animaux ont une fourrure ferrée ,
douce & chaude. Dans l’été on remarque, comme
dans les contrées du nord, un changement dans
la couleur de leurs peaux > mais quand cette faifon,
qui ne dure guère que trois mois, eft paffée, ils prennent
tous la livrée de l’hiver, & les quadrupèdes,
ainfî que les oifeaux, prennent la couleur blanche.
Un phénomène auffi remarquable, c’eft que les
chiens & les chats qui ont été tranfportés de
l’Europe fur les côtes de la baie d’Hudfon, ont,
à l’approche de l’hiver, changé d’habit, & fe
couvrent d’un poil plus long & plus épais que
celui qu’ ils avoient apporté d’Angleterre.
C an ad a. Cet Etat eft borné au nord & à I’eft
par la Nouvelle-Bretagne & la baie d’Hudfon j au
fud , par la Nouvelle Ecoffe, la Nouvelle-Angleterre
& la Nouvelle-Yorck, & à l’oueft par des
terres inconnues.
Le climat de cette province n’eft pas fprtkdiffe-
rent de celui des colonies dont nous ferons mention}
mais comme elle eft plus éloignée de la mer
& plus au nord qu’aucune de ces colonies, el)e
éprouve un hiver plus rigoureux : les étés y font
fort chauds, comme dans tous les pays de l’Amérique,
qui ne font pas ficués trop au nord.
Quoique le climat foit froid & l’hiver fort long,
le fol, qui en général eft bon, produit plufieurs
fortes de grains : le tabac même y croît bien & y
eft avantageufement cultivé. L’île d’Orléans, près
de Quebec, ainfi que les bords du fleuve Saint-
Laurent & des autres rivières, eft remarquable
par fa fertilité.
Les pays incultes de l’Amérique feptent ionale
renferment les plus grandes forêts du Monde j
elles ne forment qu’un bois continu : rien n’eft:
plus majeftueux que ces amas d’arbres dont les
fommets fe perdent dans les nues, & où les ef-
pèces font li variées, que les botaniftes qui fe
font donné le plus de peine pour en faire le dénombrement,
n’ont pu en connoître la moitié.
Nous renvoyons à l'article Forets tous les détails
qu’on a pu recueillir à ce fujet fur les forêts
du.Canada. Nous partons de là aux fleuves & aux
riyieres, pour continuer Y hydrographie de ces provinces
de l’Amérique feptentrionale.
Les rivières qui arrofent ce pays font très-nom-
breufes, & plufieurs dentr’elles ont un lit auffi
large que profond : les principales font la rivière
des Outawas, qui fépare le Canada fupérieur de
l’inférieur} la Chambley ou Sorelle, qui reçoit les
eaux du lac Champlain} Lofwegatckée , Seguiney 3
les trois Rivières , Montmorency & la Chaudière.
Les deux dernières forment chacune une cataracte
très-confidérable : celle de la rivière Montmorency
tombe d’ une hauteur perpendiculaire
de deux cent quarante pieds, fans rencontrer aucun
obftacle dans fa chute : la largeur de la rivière,
au fommet de la cataraCte n’eft que de cinquante
pieds. Les eaux produites par cette chute
font retenues dans un baffin creufé au milieu d’un
rocher d’une feule pièce, d’où elles s’échappent
continuellement & coulent dans le fleuve Saint-
Laurent , qui n’en eft éloigné que de trois cents
pas au deffous de Quebec.
La hauteur de la cataraCte qu’on voit dans le
cours de la rivière de la Chaudière, n’eft pas de
moitié auffi grande que celle de Montmorency}
mais fa largeur a plus de cent cinquante pieds :
d’ailleurs, les environs en font infiniment plus
agréables.
Le fleuve Saint-Laurent peut être confidéré
comme prenant fa fource dans le lac Ontario , & ,
fe dirigeant enfuite au fud-eft, il pâlie à Montréal
, où il forme l’île de ce nom, après avoir
reçu la rivière des Outawas, dix lieues au deffous
de Montréal. En continuant le même cours il rencontre
le flot du montant à plus de cent cinquante-
trois lieues de la mer, où il eft navigable pour de
grands vaiffeaux. Au deffous de Quebec , à cent
fept lieues de la mer, il devient fi large & fi profond,
que, dans la guerre du Canada, des vaiflèaux
de ligne contribuèrent à la prife de cette capitale.
Après avoir reçu dans fon cours une multitude
de ruiffeaux & de rivières ,c e grand fleuve tombe
dans l’Océan au cap des Roziers, où il a trente
lieues de large, & où la mer eft fort agitée. Dans
fon cours il forme une grande variété de baies,
de ports & d’ îles, dont plufieurs font très-fertiles
& d’ un afpeét agréable.
Le fleuve Saint-Laurent eft le fleuve fur lequel
il y ait des établiffemens de quelque importance.
Mais en jetant un coup d’oeil dans l’avenir, on
voit qu’il n’eft pàs irnpoflîble que le Canada & ces
régions de l’oueft foient un jour en état d’ établir
Un commerce confiderable fur les grands lacs d’éau
douce; & comme ce fleuve eft l’iffue naturelle de
ces lacs, nous devons croire qu’il fera toujours
le centre & le débouché de toutes les opérations
commerciales de ce pays, parce que c’eft le canal
qui conduira toutes les denrées fuperfluesà l’Océan
atlantique.
Nouvelle-Ecosse. Cette province eft bornée
au nord par le fleuve Saint-Laurent, à I’eft, par le
golfe‘que forment l’ embouchure de ce fleuve &
la Mer atlantique} au fud, par la même mer & la
Nouvelle-Angleterre, & à l’oueft par le Canada
& la Nouvelle-Angleterre.
Toute cette contrée eft arrofée par un grand
nombre de rivières dont le cours eft femé de lacs,
comme celles du Canada, dont nous avons parlé
à l'article de cette province. J’y vois d’abord
Penobfcot, la rivière de Sainte - Croix & celle de
Saint-Jean , qui s’étendent jufqu’aüx limites méridionales
de la province de Quebec, & fe jettent
dans la baie de Fundi : elle eft bornée au nord par
ces mêmes limites, jufqu’à l'extrémité de la baie
de Chaleur. Les rivières Rifligouche , Miguaqua &
Nipifignit tombent dans le golfe Saint-Laurent.
Les mers qui baignent ces côtes font, comme
on vo it, l’Océan atlantique, la baie de Fundi &
le golfe Saint - Laurent : les petites baies fon t,
Gafpé, la baie de Chaleur, Miramichi, la baie Verte,
la baie de Chedibouâou , celle de Sainte-Marie &
Ja baie des lies. Je pourrois encore multiplier ce s
indications, y ajouter les ports nombreux qui s’y
trouvent, pour faire connoître les diverfes dentelures
que cette côte a éprouvées par l’ aélion de
l’Océan,qui en a détaché plufieurs îles, &: fur tout
les îles Saint-Jean & Royale, & , pour achever de
faire connoître tout ce que la terre a fouffert de
l’Océan, faire l’énumération des caps les plus remarquables
, qui font au nombre de plus de quinze,
à feize.' Je finirai par indiquer, dans l’intérieur,
environ une vingtaine de petits lacs qui tiennent
aux rivières, & qui annoncent la même inégalité
de terrain & la même diftribution des eaux que
nous avons décrite dans le Canada. Ainiî la Nouvelle
Ecoffe doit être comprife dans la contrée
voifine du pôle que nous offre l’Amérique feptentrionale
, que nous avons comparée à celle de la
pointe nord de l’ Europe, & que nous ferons repa-
roître à l’article La c .
Animaux. Les quadrupèdes font la partie 1*
pluscurieufe & jufqu’ ici la plus intéreffantedel’hif-
toire naturelle du Canada: c’eft à leurs dépouilles
que l’Angleterre eft redevable des matières premières
de fes manufactures & de fon commerce
avec les pays que nous venons de décrire. Le«
animaux qui habitent les immenfes forêts du Canada,
& qui parcourent les contrées incultes de
ce vafte continent, font des cerfs , des daims ,
des ours, des renards, des martres , des chats
fauvages, des furets, des belètes, des écureuils
gris bc de grande taille, des lièvres & des lapins-
Les parties méridionales renferment un grand nombre
de boeufs fauvages, de daims de la petite race,
diverfes efpèces de chevreuils, de chèvres, de
loups, &c. Les marais, les lacs & les étangs,qui
font fort nombreux dans ce pays, abondent en
loutres &: en caftors, dont les blancs, qui font
fort rares, font très-eftimés, ainfi que ceux d’un
beau noir. Le càftor de 1 Amérique, quoique ref-
fembiant a 1 animal connu en Europe fous ce no en.,
a plufieurs qualités qui le rendent le quadrupède
le plus curieux que nous connoiffions} il a près
de quatre pieds ae longueur, & pele foixante à
foixante-üix livres : lès femelles ont ordinairement
quatre petits par an , par quatre portées
fucceftives. Cet animal amphibie né refte pas long-
tems dans l ’eau; mais il ne peut vivre (ans s’y
baigner fouvent. Il y a des caftors de différentes
couleurs , noirs, bruns, blancs, jaunes ; mais on
remarque xjüe moins ils ont de poils & plus la
couleur dé leur peau eft légère, moins le climat
qu’ils habitent eft rigoureux. Outre la fourrure '
ce précieux animal produit l e .cafioream contenu
dans des facs intérieurs au bas-ventre : on con-
noît la valeur de cette drogue.
Le rat mvdqué eft le diminutif du caftor auquel
il reffemble, excepté par la queue : il pèfe environ
cinq à fix livres, & fournit du mufe très-
fort.
L ’élan eft de la grandeur du cheval ou du mulet
: fa couleur eft un mélange de gris léger & de
rouge foncé. Il recherche les pays froids; & quand
l ’hiver ne l u i fournît pas d’herbe , il ronge l’écorce
des arbres.
Le buffle, efpèce de taureau fauvage, reffemble
allez à ceux d’Europe} il a le corps couvert d’ une
efpèce de laine noire fort éftîmée. Les cuirs du
buffle font auffi doux & auffi maniables que ceux
du chamois ; mais fi forts,que- les boucliers qui
en font formés dont lès Indiens font ufage,
rëfiftent en quelque forte à une balle de fufil.
Le chevreuil du Canada ne diffère en aucun®
l chofe de celui d'Europe. Les loups font rares au