
velle terre, dont les limites côtoient, du côté de
T e ll, une certaine bordure affez remarquable de
l’ancienne terre du Limofin & du Bas-Poitou.
L’on trouve prefque partout des tufs ou les dé-
comportions des couches immédiatement infér
rieures à la terre végétale, des bancs de moëlons
& d’autres bancs d’un grain plus folidé. Ainfi, des
coteaux entiers préféntent aux obfervateurs, par ;
leursefcarpemens le long des vallons, des maifes
immenfes de pierres de taille propres à toutes fortes
de conftru&ions.
Cette compofition fouterraine n’ eft pas cependant
confervée au même état primitif dans tous
les cantons. On remarque des déplace mens fingur
liers & fort étendus dans celui de la Rochefoucauld,
& dans les environs de Ruffec & de Ver-
teiyl : l’on v voit des rochers & des moëlons calcaires
qui font inclinés en tous fens dans les coteaux
Se dans les plaines. Les.vides ou cavités fou-
terraines qui les féparent, engloutiffent les eaux
pluviales à une fi grande profondeur, qu’on ne
peut en faire ufage pour former des fontaines ou
des puits. Par un contrafte remarquable , le fol
devient froid & humide à mefure qu’ on approche
de l’ancienne terre du Limofin, car il n’eft plus
calcaire > la nature des terres change comme les
productions} c’ eft un autre monde qui ne participe
p ointé e l’Angoumois.
Terres végétales.
Quoique nous ayions déjà traité des terres végétales
relativement à leur Origine, je crois devoir
y revenir i c i , ,en les confidérant par rapport
à la culture. Les différentes natures de terres végétales
qui s’offrent à la furfacé des cultures de
l ‘Angoumois, font la g'oie vive, les varennes , les
terres fortes , les fables brûlans & non brûlans , &Ç les
chaumes. On appelle groie vive une couche de terre
fuperficieile, mêlée de petites pierres de différentes
figures & groffeurs : ii y a toujours fous cette
couche, ou des bancs de tufs pierreux, ou des moëlons.
Il elt évident que les pierres qui font dans
les groies proviennent du fond, dont elles font
continuellement détachées & comminuées par la
culture. On conçoit auffi qu’ un pareil fof doit offrir
des variétés infinies par la nature des pierraille
s , par les tufs calcaires, par les terres argileufes
qui lecompofent, & par les proportions de leur
mélange. La couche végétale pierreufe qui carac-
térife la groie v iv e , eft plus ou moins épaiffe $ la
fécondé couche, fur laquelle_cette terre repofe,
eft ordinairement formée par un tuf ou par des
bancs de moëlons plus ou moins ferrés , ou enfin
par un rocher plus ou moins vif. $i ce rocher offre
un corps continu & fans aucune fente, alors cette
groie, aflïfe fur un fond impénétrable aux racines
des plantes , eft de la plus mattyaife qualité , à
moins que la couche de terre végétale ne foit
d’ une telle épaiffeur, qu’elle puiffe fe fufEre à
elle-même. Si au contraire le rocher eft entrecoupé
de fentes ou de veines de terre affez multipliées
& affez ouvertes pour recevoir les racines de la
vigne ou des autres .végétaux qui pénètrent à une
grande profondeur, alors la groie ;eft confidérée
comme étant de benne nature.
On appelle varennes les terres qui font formées
par des dépôts confidérables s elles ont beaucoup
de profondeur, & tapilTent ordinairement le fond
des vallons, où les eaux courantes ont fait des dépôts.
Ainfi, la qualité des dépôts détermine celle
des varennes.
Les terres fortes font les argiles ou marnes pures ,
& mêlées de toutes fortes de principes terreux.
Les fables brûlans font les. terres dans lefquelies
le fable fin ou les graviers font trop abondans pour
la végétation. Les fables.non brûlans font ceux où
ce mélange fe trouve naturellement bien fait, ou
dont la baie eft fuffifamtpent humeCtée.
La dénomination de terres franches eft appliquée
à toutes celles qui ont été améliorées par les engrais
ou, par la culture, fans qu’ on ait égard à leur
état primitif & naturel * elles varient entr elles
félon J a conftitution de leurs premiers élémens, &
félon la dépenfe qu’elles exigent pour k s entretenir
dans l’état que la culture leur a fait acquérir.
Les chaumes font les rochers, moëlons, groies
ou tufs^recouverts d’une couche de terre fi mince -,
qu’elle eft abfolument infufKfante pour une- culture
quelconque. Les terres incultes, auxquélles
il y auroit très-peu de chofe à faire pour les faire
for tir de leur état de pure nature & les affranchir,
ne font plus confidérées comme des chaumes, mais
feulement comme des terres neuves , dont il eft
poffible de tirer des produits plus ou moins confidérables
par la culture. Ces terres neuves exigent
plus ou moins de dépenfe pour leur faire acquérir
les qualités de terres franches.
Les groies, les varennes , les terres fortes & les
fables non brûlans forment les meilleurs fonds de
Y Angoumois : il y en a qui font couverts de vignes
plantées depuis plus de cent ans, & qui font encore
en bon rapport, quoique, de mémoire d'homme,
elles n’aient pas reçu le moindre engrais î elles font
un peu dégarnies de ceps, il eft vrai $ mais aufïi l’on
n’ a jamais cherché à les renouveler & à les repeupler
par des provins, par des chevelus, par des
marcotes ou par une plantation quelconque. Il y
a peu de provinces où le même cep puiffe durer
auffi long-tems , fans être foigné à un certain
point.
De même il y a des terres labourables defquek-
les on retire de bonnes moiffons pendant dix à
douze ans confécutifs, fans qu’ il foit nécefiaire
d’y.apporter, aucune efpèce d’engrais 5 quelques-
unes même font fi bien conftituées, qu’on ne fe
fouvient pas de les avoir vues repofer. Parmi les
terres de la meilleure qualité,, une bonne groie
vive eft encore préférable à toutes les autres ie lte
eft d’une culture plus facile;& plus propre à nourrir
toutes fo.rtes de plantes.. Ses, productions font
non-ftulement meilleures, mais .encore elles jréfif-
tent mieux aux accidens des faifons y telles que les
gelées & les pluies, qui pourriffent les végétaux
dans les; terres fo r re s ,.& détruiLent quelquefois
les récoltes entières dans 1 varennes. D’ailleurs ,
les engrais difpofent mieux les plantes à la végétation
dans les groies que dans tout autre.fol : les
plantes s’y foutiennent mieux, & y durent plus
long-tems. Une bonne groie vive.,,,-jeJe répète,
eft une bonne terre affranchie , jmêlée.-en bonne
proportion de petites pierres, & qui auroit une
épaiffeur de dix à douze pouces fur un tuf pier-i
reux qui fe décompofe aifément, ou fpr des couches
de moëlons d'un grain fort lâche. Il y a aufïi
des fables non brûlans, où le mélange eft naturellement
fait en fi bonne proportion, qu’ ils équivalent
aux meilleures groies vives, & furtout ii leur
bafe eft un peu humide. , .
VAngoumois feroit très-riche en productions
de culture fi les bonnes qualités de terres,dont
je viens 4®' parler, y étoient .les plus abondantes j
mais malheureufement Jeur quantité eft fi petite
en comparaifon des fommets & des; plaines arides,
des collines, des groies trop vives ou des mauvais
tufs, des chaumes ou des rochers nus, que ce département
ne doit pas être compté parmi les plus
productifs de l ’Empire,français. . ^ .:l\
L’induftrie a cherché à tirer parti.de ces fom-
mets arides en y. plantant la vigne, qui s’accommode
des coteaux & des terrains fecs. iLes pre-?
miers fuccès de ces plantations,ont.engagé les cultivateurs
à les multiplier & à les étendre : de là
il eft ré fui té que Y Angoumois a été couvert de vignes
, & que le vigneron s’eft.emparé a une grande
quantité de terres à froment. Les gra:âs valaient
peu ; la vigne produifoit beaucoup. Maih$ur<èufç-
ment pour lu i, la chance,a t,ourné : de dépit il les
a arrachées pendant quelque tems, jufqu’à.cè que
l’équilibre fut. établi. Enfin, les payfans angou-
moifins fe font adqnnés à tous les genres . de
culture.
Les vignes difparoiffent peu à peu en allant de
ŸAngoumois en Limofin, parce que le vin dégé-
nère.en même raifon que,les fols. La vigne, placée
dans un fol froid & humide, donne un vin foible,
qui fe confômme par les petits propriétaires. La
culture principale du canton confiite en feigle,
froment, maïs, avoines, blé noir, raves & châtaignes.
Les limites de Y Angoumois, reffembloient
beaucoup au Limofin : la terre aigileufe y do:
mine. Les pierres font des efpèces de filex qui occupent
un certain efpace déterminé, après lequel
on ne rencontre plus que le granit eh maffe ou en
train de décompofition, lequel forme, par fon mélange
avec les.argiles, la terne végétale de l’ancienne
terre du Limofin. C ’eft.le^ pays vignoble
& calcaire par fa nature , qui caraCtérife Y Angoumois
proprement dit. Le commerce établi entre
ces,deux pays confifte principalement en bétail,
; grains & vins.
i If me femble que ,1e projet de répandre la, culture
du maïs -dans nos provinces feptençrionales,
même dans les provinces voifines de Paris, n’a pu
.être conçu que par un homme qui n’ a pas vu
combien fa maturité étoit tardive , ainfi que fa
J récolte, dans nos provinces méridionales. On ne
! le recueille fort fouvent qu’en octobre, &prefqne
j toujours après les gelées ; auffi doit-on être étonné
I que ce grain , .étant peu mur, donne une pâte fi
| mollaffe.
I Çetjie plante a -befoin $ef pluies abondantes pour
j éprouver-un certain çiéyelpppeqient fjans lequel le
I grain ne parvient pas à fa maturité., & fort fou-
j vent les pluies qui opèrent ce développement
font trop tardives, &: malgré une chaleur favorable
qui fuccède à ces pluies, ce grain n’ atteint pas pour
lors une maturité convenable avant lesgelées.
En général, on trouve dans ces provinces, que
ce grain fournit une nourriture lourde, indigefte:
le feül avantage qu’on'eï; rerire'eft pour la volaille.
La culture a e ‘ce‘ grain demande beaucoup
de bras pour être faite en grand : elle peut détourner
, dans nos provinces, de travaux plus
effentiels & plus profitables.- Les< provinces où je
l’ai vu cultivé plus généralement, offrent un fol'
léger, aifé à ameublir. Dans les terres fôrttes &
argileùfes il rie profite pas autant, 8c ne développe
pas une u abondante végétation y fôit^ en
feuilles-, foit en grain. Il eft vrai que cê fôb tient
mieux; Beau , & ne laiffe-pas-àut'ant fotfffrir- la
plante^des féchertffes, mais il ne prend pas auffrtôt
la chaleur après les pluies. C ’eft par cette raifon
que prefque -toutes les cultures de maïs ne donnent
pas, dans toute leur-étendue, une végétation
uniformerll y ar beaucoup de vides, ou lesplafrtes
manquent totalement, ou- bien fOTtrclairfêihéë&,
ou enfin ont toutes fortes de grandeurs , parce
que toutes ces plantes n’ont pas été nourries également,
& qu’il Leur faut une abondante nourriture.
Que de pertes toutes ces circonftances n’oc-
cafionnent- elles pas 1
Plus ce grain produit, plus il exige du fol &
du climat, & pour peu que l’eau lui manque il
dépérir, parce qu’ il n’a pas le développement
neceffaire.
tj Ç ’eft , aufli à ces «caufes qu’on doit attriblier
(’ inégale maturité des pieds de maïs. J’en ai vlt
fëcHer & annoncer la maturité parfaite y pendant
qu’un grand nombre d’autres étoient encore fort
verts, tant dans leurs tiges que dans, leurs feuilles,
quoique développés affez bien & d’ une aufli grande
taille que les autres, à plus forte raifon!les tiges
foibles & rabougries, qui étoient encore plus
vertes. C ’eft en cet état que j’ai vu les cultures
du maïs furprifes de la gelée au mois d’o&obre
de 1786. O r , que penfer de ces récoltes d’ un grain
qui ne fe trouve naturellement que dans les pays
où il ne gèle pas l