
retrouveroîent dans les maffes momueufesde l'A-
fie , fi lJon jetoit lès yeux fur la belle carte de
Ruffie , qui accompagné les Voyages de Pallas.
Cette carte fait voir de plus que, dans les hautes
latitudes voifines du cercle polaire, les grandes
chaînes redevenoient, pour la plupart, parallèles
au méridien. L'on fait d'ailleurs que la chaîne des
Cordiliières, la feule des chaînes équatoriales qui
foit bien connue, eft auffi parallèle au méridien.
Si des obfervations nombfeules yenoient à l’appui
de celles-ci, on pourfbit, ce lèmble, en conclure
une organifation généralejk primitive de la
terre, faite de manière que les maffes élevées fe-
roient reliées perpendiculaires au mouvement de
rotation, tant dans les régions voifines de l'équateur
, que dans, celles qui régnent aux environs
des'pôles.'
Mais dans les latitudes moyennes il paroît que
les chaînes auront pris une direction oblique du
nord-eft au fud-ouell. Air refte, il ne parcît pas
qu’on connoiffe encore affez bien la conftitution
intérieure de chacune de ces maffes montueufes
pour les rapporter à une époque confiante & déterminée
j 1 car il en faudroit- une pour chaque-
. maffe de telle ou telle nature de matériaux & de
telle ou te l e organifation , intérieure, & il s'en
faut beaucoup que les obfervations à ce lu jet aient
été auffi précifês que générales. Cependant, fans
un plan exaêl d’obfervations, on ne peut en tirer
que des conjectures, & la geographk-phyfique les
proferit très-fâgemenr.
J’ai déjà dit que les chaînes de montagnes quf
courent parallèlement aux côtes de l'Océan atlantique
V dans un efpace de neuf cents milles, divi-
foient les eaux des Etats-Unis en rivières orientales
& occidentales. C'eft une obfervation générale,
que le terrain s’élève dans une progreflîon
plus ou moins régulière, à mefure qu’on s éloigne
de la mer. Cette obfervation eft furtout très-fen-
fible dans le continent de l’Amérique feptentrionale.
Mais je dois ajouter que cette progreflîon
dans l’élévation du terrain eft fuivie d’un revers
qui a la même marche en fens contraire, fuivant
que les autres parties de l'Océan fe trouvent plus
ou moins éloignées du point de partage des eaux.
Il eft aifé de voir, par tous les détails que l’on
peut lire dans les articles des Etats-Unis, oue les
fommets qui confervent la neige jufqu'au mois de
mai & de juin, n'ont pas plus de quatre à cinq
cents pieds de hauteur au delfus du niveau de la
mer. .
Si nous reprenons la fuite des montagnes dont
nous avons fait mention féparément, nous verrons
que des montagnes élevées féparentle diftriél
de Main du Canada, & les montagnes vertes s’étendent
entre l'Etat de Vermont 8c le lac Cham-
plain. C ’eft au nord de l'Etat de New-Yorck que
commence ta grande chaîne des Alleganÿs ou Apa-
laches, qui fe prolonge jufque dans la Géorgie, du
nord-eft au fud-oueft.'Cette chaîne, qui a depuis
foixante jufqu’à deux cents milles de largeur, fe'
compofe de plulieurs lignes redoublées & ïènlible-
ment parallèles entr’elles. La première ligne qu’on
rencontre en s'éloignant de la mer, dans une partie
de la Penfilvanie & de la Vi.ginie, à une diltance
de cent trente à deux cents milles de l’Océan, fe
nomme montagnes bleues. Au-delà s'étend une large
valléë que bornç la ligne des montagnes du norda
après laquelle on trouve diverfes lignes moins
confidérables, puis la grande ligne des Alleganÿs
proprement dits, 8c enfin celle des montagnes du
Laurier. Dans les Carolines les diverfes montagnes
rapprochées forment une chaîne plus étroite en
confervànt la même direction.De toutes les lignes
de montagnes que je viens d'indiquer, celle des
Alleganÿs eft la feule que les rivières ne coupent
point; c'eft proprement l'arête du continent, le
vrai point de partage des eaux courantes.
A leur diftance de la mer, à la grandeur & au
grand nombre des rivières qui en découlent, on
doit juger que leur hauteur eft confidérable, 8c
cependant elle ne* paroît pas auffi confidérable à
l’obfervateur qui eft placé au pied de ces montagnes}
car les mefures les plus exactes ne portent
qu'à quatre mille pieds au delfus de leur bafe
la hauteur des fommets les plus élevés. Mais l’étonnement
ceffe lorfqu’on réfléchit que le terrain
s'élève graduellement depuis la mer, 8c que le
fol des vallées comprife^ entre les lignes des montagnes
que nous avons diftinguées, eft déjà à un
degré de hauteur affez confidérable pour en fairé
varier très-fenfiblement les climats fous les mêmes
latitudes.
La partie des Etats du fud, comprife entre les
montagnes bleues 8e la mer, eft en général un pays
de plaines unies , donc l’inclinaifon vers l’Océan
eft à peine fenfiblç à l’oe il, & dont le fo l, rempli
de rocs faillans dans le voifînage des montagnes
, devient plus chargé de fubftances terreufeS
à mefure qu'on s'approche de l’Océan atlantique,
jufqu'à n'être plus qu'une maffe de terre grade
ou légère, & fans mélange d’aucune pierre quel-’
conque.
Il paroît que le printems eft l’époque générale
où les rivières de l’Amérique feptentrionale parviennent
à la plus grande hauteur dans leurs crues.
Il en eft de même en Europe pour toutes celles
qui ne prennent pas leur fource dans des montagnes
affez élevées pour offrir des neiges ou des
glaces permanentes } car ces derniers fleuves, tels
que le Rhin ou le Rhône, ont au contraire leurs
baffes eaux au commencement du printems, s’ac-
cfoiffent à mefure que la chaleur de la faifon augmente
; jufqu’au mois d’août, où ces rivières
atteignent ordinairement leur maximum. La rivière
de ConneÜicut, comme je l’ ai indiqué à cet article,
éprouve fes crues au mois de mai, quoique
fes, eaux defeendent du plateau lé. plus élevé des
Etats-Unis ;’ ce qui concourt à prouver que ces
montagnes font beaucoup moins hautes que les
grandes chaînes d’Europe, puifque fous un climat
plus froid, à mêmè latitude“, elles ne gardent pas
des neiges permanentes. Le Mont-Wafington, que
l'ai cité ci-devant comme une des montagnes les
plus élevées de l’Amérique;feptentrionale, fe voit
à la diftance de vingt-cinq lieues j mais le Mont-
Blanc ,/dans les Alpes, fe découvre des enviions
de Dijon, à la diftance de cinquante lieues au
moins, ce qui réduiroit à environ fix cents toifes
la hauteur d’un des pics les plus élevés des Etats-
Unis. Mais ce ne font là que des approximations
qui feront fans doute rectifiées par des obfervations
exactes lorfque les phyficiens inftruits du
Nouveau-Monde porteront le baromètre fur tous
ces divers fommets les plus éminens.
Rien n'eft plus pr.ècieux(pour lès. naturaliftes qui
ont étudié l ’hiftoire de h terre, que de rencontrer
des faits analogues dans des lieux très-éloi-
gnés j mais il eft bien important d'en ^approcher
févérement les circonftances correfpondantes, &
d’ailleurs .d’avoir apprécié avec fagacité les phé^-
nomènes’qui fe préfentent de part & d’autre. --
Quelques géologues ont cru que la defeription
de Jefferfon, fur le rpeélacleque pxéfente la réunion
des eaux de la Patowmack & de la Shenandoah,
pouvoit être comparée avantageufement avec ce,
que le profeffeur Sauffure a imaginé au fujet du
fcaffin dont le lac- de'Genève occupe actuellement
le fond ."Il paroît, dit-il, que notre lac a été anciennement
plus élevé qu’ il ne l’efl aujourd’hui. |
Diverfes confédérations, & furtout celle de 1-’iffue
par laquelle le Rhône fort du baffm de nos mon- !
tàgnes, concourent à ptoüver cette vérité.
■ Cette iffue-eft une échancrure étroite & profonde,
creufée par la nature entre la montagne de
Vouache & l’extrémité dù Jura : ce pafïage fé
nomme YEclufe, dénomination qui annonce fort
bien une iffue ouverte aux eaux entre de hautes
montagnes. Cette iffue eft la feule par laquelle
le Rhône puiffe for tir du fein de nos montagnes ;
fi elle étoit ferméè, nos plus hautes collines fe-
roient fubme,rgées, 8c toute notre val!éé ne fôr-
msroit qu’un imméiïfe refervoir. Il paroît probable
que ce paffage étoit Originairement fermé. La
montagne du Voudche paroît être la continuation
de la première ligne du Jura. La pofition de leurs
couchcs eft fi préciféhient correfpondante, qu’elle
prouVë leur ancienne union & continuité.
; Mais tout éobfifte à décider l’époque à laquelle
cette réparation & ’ cette ouverture fe font opérées;
car alors les c.onféquences qu'ont voulu en
tirer les géologues pourroient être détr'uitesyainfi
que la fuppofilion des révolutions qu’ils ont prétendu
nous engager à adopter.
Au rèfte, lorfque nous connpîtrons bien notre
continent Sc les différens ordres dé phénomènes
qu’il nbus préfente, nous poutrobs retrouver'avec
piàifir lès faits analogues que lès confiées dit continent
de l’Amérique feptebtrlonale, fous les mêmes
parallèles, pourroient nous offrir, 8c pour
lors tous tes faits- fourniroient des réfultats d’un
grand intérêt, & précieux pour l’hiftoire de la
terre.
Co N s i d £ ra T i o u s , 1°. fur la conflitution phy-
m ue de l'Amérique fptentrionalep l° -.fu r les
époques auxquelles,.on doit la rapporter j $°. fur
fes climats & leur température y af .fu r le? chutes
6* rapides dey.principales rivières.
C O N S T I T U T I O N P H Y S I Q U E .
J’ai toujours regretté que les naturaliftes qui
ont parcouru l’Amérique, n’àiènt pas plus'feigne
les defcriptions'qu’ ils auroient dû nous donner de
la conflit ut ion phyfiquedes différentes parties qu'ils
ont décrites. Ûn^uroit pu, fur ces détails, établir
une comparaifon entre l'Amérique & l’Europe;
mais il aüroit été néceffaire que les mêmes obfer-
vateurs enflent travaillé fur le même plan. Nous
voyons, par exemple, en Amérique, que h plus
haute des montagnes connues eft un pain de fucre
granitique; d ’un autre*côté; nous favons que les
Alpes, qui forment une des chaînes'ks plus élevées
de l’Europe, offrent auffi, dans une grands
partie de leurs fommets, des efpècës dé. noyaux
de granit. Dans l ’Amérique méridionale, les Cordiliières
préCntentlU même ftruélure & la .même
nature de pierre. Mais il y a plus , les chaînes centrales
des Aipes ont toujours pour avant-corps des
fchifles, puis des roches feuilletées ou t.ilcites,
compofees de quartz &r de mica, & dans le précis
de ce que l’on nbus a dit;du Mont-Wafington ,
nous avons- v a , I !’article du Ntu^Hampshire,
que des pierres de même nature envirobnoient ce
pic élevé. Ainfi la diiiribütïon de ces1 fubftances
autour des noyaux granitiques n’eft pas un phénomène
particulier à ’ilos Alpes : outre due je le
ferai reparoître dans 'plufieurs contrées de l ’Europe
& de l’Afie',* je'finis par l’indiquer avec les
mêmes ‘caradïère^ tiaiis l’autre hén^ifphèrè. Après
cela » qu’ où nous dife que l’Amérique feptentrio-
n a lé y e n fe rencôn:rent ces objets de campa fai-
fon,. même à gianJe échelle, eft un continent
d’une époque inférieure à celle qui a prëfidé aux
opérations de la nature, dont nous obfervobs partout
les réfultats.
On trouve dans les- plaines du fud des preuves
incrinteftables d e i’anci'èn féjour de là iiaér, comme
danY.l-ancien continent ; & ce qui Confirme que
ce .féjour a été afiujetti aux mêmes cil Confiances,
c’eft qu’on y trouve , à une profondeur uniforme
& régulière, des couches de coquillages marins
; bien confervésc J’ajoute même que ces dépouilles
d ’animaux marins fè trouvent, comme dans l’ancien
continent y diftribuées par familles, par amas;
ce qui prouve que ces tèflacées ont vécutranquik
lement dans la mer, dans le baffm qui a formé
l ’Amérique, comme dans celui qui a produit l’ Eu-
i io h e , 8c la Fj-ancè en particulier. Cet amas dé