
plus variable qiVe celui de plufieurs autres contrées
voifines; variation que plufieurs phyficiens attribuent
à l'oppofition continuelle des vapeurs de
l’OCéan atlantique avec les vents fecs du continent
oriental.
Les côtes occidentales en particulier font fujetés
à des pluies fréquentes * pendant que la partie
orientale de l’Ecoffe jouit d'une température plus
fereine & plus fèche que celle de Y Angleterre. A
la v érité, l'humidité du climat revêt les vallées &
les prairies d'une riche verdure qu'on ne trouve pas
partout ailleurs*mais elle nuit à la lancé., caufe des
rhumes qui deviennent les principes des plus graves
maladies| & particuliérement de la confomp-
tion, qui, chez les jeunes gens, a Un grand nombre
de victimes. Cette atmofphère hurnide & chargée
de nuages contribue, avec un ufage excèflif de
greffe viande, à produire cette mélancolie que les
étrangers regardent comme un trait du carrière
national. Comme les arbres attirent & fixent les
vapeurs dont l'air eft chargé, quelques phyficiens
foupçonnent que leur multiplication en Angleterre
contribue à l'infalubrité de l'air, pendant que d'autres
ont publié l'opinion contraire, &c ont en con-
féquence confeillé d'entourer les habitations d'arbres
nombreux.
A la fuite de l'inconftance du climat, les faifons
ont elles-mêmes un cours très-incertain. Plufieurs
observateurs philofophes, & doués d'un jugement
fain & impartial, ont annoncé que, depuis 1775 3
la température de l’Angleterre & de l’Irlande avoir
confidérablément changé, & qu’èn général les hivers
^voient été plus humides*& plus doux, &
les étés plus humides & plus froids qu’ils ne l'a-
voient été antérieurement. La divifion théorique
des latitudes convient peu à ce pays, q u i, à proprement
parler, a huit mois d’hiver & quatre
d'été. La lève y pouffe en avril, mois à la vérité
ordinairement doux; mais affez Souvent les vents
d’eft viennent en mai pour interrompre la chaleur
renaiffante, & détruire une partie des efpérances
de l’année. Les mois de juin, de juillet, d’août &
de feptembre font ordinairement fort chauds > cependant
le givre vient quelquefois fe montrer au
milieu des dernières nuits du mois d'août, & il
n’ eft pas rare d'y reffentir le froid des vents d ’eft
piquant pendant deux ou trois jours entiers. Dans
tous ces accidens il eft aifé de voir pourquoi il n’y
a pas de vignobles en Angleterre. Nous trouverons
encore par la fuite de femblables accidens ,
qui doivent être confidérés comme des obftacles
à la culture de la vigne.
Dans les dernières années on a eu des étés inondés
de pluies prefque continuelles , 6c par un contraire
encore plus remarquable , l’été de 1800 fe
déclara par une fécherene & une grande chaleur.
A peine y tomba-t-il de l'eau depuis le 6 juin jufi
qu’au 20 août, jour où furvint un orage mêlé de
tonnerre.
La maladie que l’on appelle rouille en terme
d'agriculture, lemble plus commune en Angleterre
que dans les autres pays j & quelle qu’en loit
la caufe, elle y eft fouvent très-funefte, 6c produit
beaucoup de ravages dans les plantations de
houblon 6c dans les arbres fruitiers.
On peut dire que les hivers commencent avec
le mois d'o&obre, tems où l’on éprouve le befoin
du feu ; cependant il eft rare qu'il y ait de fortes
gelées avant Noël. D’ailleurs, janvier eft le mois
de l’année le plus rigoureux ; mais comme, en ce
pays, le plus bel été fe trouve fouvent attrifté par
quelques inftans d’hiver, de même les mois d'hiver
les plus triftes y font de tems à autre égayés
par des rayons d'un lble.il paffager, dont la chaleur
n'égaie jamais cependant ce qu'en France on
regarde comme l'été de la Saint-Martin. Le mois
de mars tft généralement le plus variable de l’année;
il offre une fuccefiion bizarre de gelées , de
pluies froides, de vents impétueux 6c d'ouragans,
qui verlcnt tantôt la grêle, la neige 6c la pluie ora-
geulé.
Après la première connoiffance géographique
que l’on a pu prendre d un pays, on s'attache à
découvrir les differens traits de les divers afpcîts >
c'eft ce qu’on peut appeler la pkyfionomie d’un pays
qui varie finguliérement d'une contrée à une autre
, & fnrtout, comme nous l’avons dit ailleurs,
iuivant les differens maflîfs. Jufqu'à préfent il me
paroït qu’on a beaucoup négligé d'obferver , de
décrire, 6c même de faire figurer cette partie. Les
grands traits de tout pays font fes montagnes, fes
vallées & fes rivières. Pour un Etat maritime, particuliérement
pour une Île, ce font fes côtes qui
doivent le plus attirer l’attention des géographes.
Nous allons donc fuivre d’abord les côtes, en commençant
par le détroit de Douvres 6c de Calais.
II. Cotes et Angleterre.
La corrêfpondance des couches dans une partie
des jivages oppofés de l’Angleterre & de laFrance
ne laiffe aucun doute fur l ’ancienne union de cette
iü au continent. Les collines de craie de Blanc-
Neff, entre Calais & Boulogne, & celles qui font
à l'occident de Douvres jufqu'aux dunes, font
visiblement les parties d’un ancien tout. Entre
Boulogne & Follftone eft un autre monument de
l'ancienne jonètion des deux côtes; c’eft une étroite
colline foufmarine, appelée le Ripe-Raps, d un
mille environ de largeur 3 & de dix milles de longueur,
s’étendant à l’eft vers les bancs de Good-
win. Cette colline eft compofée de cailloux roulé
s , qui font diftribués par couches avec plufieurs
autres matières. La profondeur de l’eau fur cette
colline n'eft que de quatorze pieds dans les plus
baffes marées.
Ce détroit fameux n’a que fept lieues de largeur
dans fa partie la plus refferrée. Du môle de Douvres
à celui de Calais , on compte vingt-quatre
milles. Au milieu du canal, dans les plus hautes
marées, la profondeur de la mer eft d’environ
vingt-cinq braffes : le fond eft un fable groflier,
ou offre des quartiers de rochers.
Ainfi que je l’ai démontré dans une carte de la
Manche, qui accompagne ma Dijfertation fur l ’ancienne
jonction de l'Angleterre d la France , laquelle
a remporté le prix de l’Académie d’Amiens, en
partant du détroit à l'eft & à l’oueft, la profondeur
de la Manche d'ûn côté , & de la mer d’Allemagne
de l’autre, augmente par degrés jufqu’ à
cent braffes , après quoi la fonde devient inutile.
On pourra voir tous ces détails intéreffans à l ’article
C a l a i s & à celui de la M a n ch e .
Les grandes marées dans le détroit s’élèvent à
vingt-quatre pieds de haute ur, & le baffes à qùinze.
Le flot vient de la mer d’Allemagne, paffe le détroit,
au-delà duquel il rencontre 6c combat violemment
le courant de la Manche entreFair-Lcigh 3
aujourd’hui en France. Le roi TModehert périt
en chafiant un bifon , l’an 548 , & il eft probable
que I’ efpècé a fubfifté encore dans ce vafte royaume
près de Hallings, & Boulogne ; ce qui prouve que,
ii l'ouverture du détroit 6c l’ enlèvement de l’ifth-
me fe font opérés par la mer, il doit avoir été
plus fortement miné par la maffe prépondérante
de la mer du nord.
Ce qui vient à la fuite de çés préfomptions pour
établir l'ancienne jonction, c’eft la population de
la Grande-Bretagne, foit d’hommes , foit d’ ani-; '
maux, par les migrations de la Gaule. Ce qui l’at-
tefte par rapport à l’efpèce humaine, ce font les
coutumes femblables qui fe font maintenues dans
tous les tems connus > mais ces événemens font
bien antérieurs aux époques conftatées par l’Hif-
toire. Les quadrupèdes ont été introduits de même
par l’ifthme dans l ’Angleterre, 6c font tous fortis
de la France ; car il n’y a pas un quadrupède dans
la Grande-Bretagne, .& même en Ecoffe, qui ne
fe trouve également en France. Parmi les animaux
que l’Angleterre a perdus, on peut compter le
bifon ou boeuf fauvage, le loup, l’ours, le fan-
glier 6c le caftor, qui étoient autrefois communs
aux deux royaumes. Le bifon a continué d’être en
Angleterre dans l’état fauvage , au moins jufqu’en
1466y qu’ils furent employés à une fête : il y en
a encore qui font renfermés dans des loges de certains
parcs. On a vu des ours en Ecoffe jufqu’ en
io$7, & ils ont fubfifté dans le pays de Galles jufqu'à
la même époque. Les loups n'ont été entièrement
extirpés qu'en 1680. Les fangliers étoient
communs autrefois dans les environs de Londres ,
fous le règne de Henri I I , 6c ils font reliés jufqu’en
1577 dans l’état fauvage : alors on ne Les
trouvoit plus que dans les bois du lord Latimer^
De même les chevreuils exiftoient à peu près à la
même époque dans la principauté de Galles 6c
parmi les collines de Ckeviot ; aujourd’hui ils font
confinés dans les hautes terres de l’Ecoffe. Enfin ,
les caftors n'ont difparu qu'après 1188. Tous ces
animaux, l’ours & le bifon exceptés, fe trouvent
Ion g-tems après cet événement.
L’élan, le genêt, le lynx, le loir gras, le loir
de jardin & les chauve-fouris, ou n'ont jamais
atteint la Grande-Bretagne, ou s’ils y ont pénétré
, ils y ont péri fort vîte. Le bouc fauvage &
le chamois, habitans des feules Alpes de la Suiffe,
n’ont pas vécu dans la Gaule, 6c. par conféq lient
n’ont pu pénétrer en Angleterre. D ’après un dépouillement
facile à faire, on trouve que la France
poffède quarante-neuf efpèces de quadrupèdes,
& que l’Angleterre n’en a reçu d'elle que trente-
; neuf.
Les oifeaux, qui ont reçu de la nature le pouvoir
6c les moyens de fe tranfporter fi facilement
d’un lieu dans un autre, & même de traverfer les
mers, ont cependant des limites, tant pour leurs
habitations que pour leurs féjours. Le climat ref-
ferre les uns dans des bornes certaines : outre cela,
des nourritures particulières engagent les autres
à fe fixer dans des pays peu éloignés. C'eft ainfi
que les oifeaux fuivent les progrès de la culture,
& fe naturalifent dans de nouvelles régions. Le
bec-croifé a fuivi la culture des pommes en Angleterre.
On ne connoiffoit pas, dans les hautes
terres de l’Ecoffe, la perdrix, qui y -a fuivi la culture
du b lé , comme le moineau n'a paru en Sibérie
que depuis que certaines contrées de ce vafte
pays ont été cultivées par les Ruffes. On fait que
les alouettes de r iz , natives de Cuba, quittent annuellement
leur île par milliers pour aller dans U
Caroline , où l’ on introduit la culture du riz.
La France, q u i, dans fon étendue, comprend
plus de differens climats que l’Angleterre, eft aufli
plus riche qu'elle en efpèces d oifeaux. On ne
compte guère que cent trente- une efpèces d’oi-
feaux de terre, & cent vingt-une d'oifeaux d’eau,
& la France en poffède cent cinquante-fix de la
première divifion, & cent treize de la fécondé.
Les provinces du nord de la France ont leurs e fpèces
communes avec l’Angleterre, 6c l’on fait
que les provinces méridionales font vifitées par
les diverfes efpèces du nord de l’Afrique. Nous
donnerons par la fuite de nouveaux détails fur les
animaux propres à l’Angleterre.
Pour faire connoître plus particuliérement les-
différens maffifs qui continuent le fol de l'Angleterre
, nous croyons devoir donner d’abord la défi
cription fuccinte, mais détaillée, des côtes de la
Grande-Bretagne.
De longues fuites de falaifes efearpées & de
montagnes crayeufes bordent la côte depuis Douvres
vers l’eft : c’eft leur couleur blanche qui a
valu à cette île le nom d'Albion. Il y avoir au pied
de ces falaifes , une baie où il paroït que Céfar,
cinquante-cinq ans avant l ’ère chrétienne , entra
& mit à l’ancre : cette baie eft aujourd’ hui occupée
par des prairies. Plus loin, l'île de Tfiaaet ne
F f f f i