
lieu , 8c qui fe continue par les eaux coûtantes,
nous pouvons croire qu'elles ont fuivi les differentes
pentes-que la fécondé opération avoit ébauchées,
& le frayé pour ainfï a re qu’elle leur avoir
très-anciennement tracé, qu’t lies nom fait qu’augmenter,
élargir & approfondir : d’où il eft réfulté
toutes les grandes vallées de nos fleuves, qui ont
réuni à un tronc principal les rivières latérales,
lefquelles ont démoli les bancs fuperficiels, & en
ont porté les débris qu’elles ont arrachés des lieux
élevé s , dans les plaines fluviales inférieures.
Pour en convaincre les perfonnes qui voudront
bien y donner quelqu’attention, je réunirai fous
le même point de vue les différens fommets du
monde qui ont donné la diredion aux grands fleuves.
En examinant leur difpofition générale fans
craindre les répétitions, on a dit que les fleuves
ne couloient d’occident en orient que parce que
les parties les plus élevées des contrées qu’ils tra-
verfoiènt , fe trouvoient à l’occident de leur
cours, & qu’ ainfi ces fommets dévoient avoir
leur diredion du nord au midi, comme plufieurs
contrées nous les ont offerts ; mais cette confédération
ne donne que des vues rétrécies particulières
, qui ne peuvent conduire à des principes
généraux, fï eflentiels pour éclaircir cette partie.
J-'ai cru devoir la généralifer en traçant fur le
globe les foriimets de tous les continens connus ,
& en fuivant de là les pentes qui peuvent conduire
aux mers, lefquelles offrent l’extrémité des filions
dont les continens font couverts. On verra ainfï,
fur les différentes parties de nos continens, lès
principales chaînes de montagnes formant les font- j
mets de ces mêmes filions. ( Voye^ notre Atlas, !
dont la mappemonde renferme deux hémifphères,
où ces fommets font figurés très-exadement. )
L’Afrique, dans ce qui nous en eft connu, n’o ffre
pas un fpedacle moins confiant 8c moins régulier.
La chaîne du mont Atlas envoie dans les mers
voifines des Canaries , des torrens & des fleuves
moins longs que ceux qu’elle envoie dans 1 intérieur
du continent, & qui vont fe perdre au loin
dans des lacs & dans de grands marais.
Les plus hautes montagnes qui fe préfentent
aux navigateurs qui. font le tour de cette partie
du monde, font à l’occident, vers le Cap Vert &
dans toute la,Guinée. Cette chaîne, après avoir
tourné autour du C on go, va gagner les montagnes
de la Lune , appelées Y Epine du Monde, 8c
elle s’alonge jufqu’au Cap de Bonne-Efpérance ,
& fe perd fous les eaux du midi. Quoiqu’elle occupe
affez régulièrement le milieu de la grande
pointe d’Afrique , on reconnoîtra néanmoins, en
ronfidérant les mers orientales & occidentales,
que cette chaîne n’eft pas au milieu des filions >
outre cela , la mer occidentale eft une mer profonde
& fans îles. L’orientale, au contraire, a
un aifez grand nombre d’ îles & de bas-fonds ; en
forte que d’endroit le plus profond de la mer occidentale
eft bien plus près de cette chaîne, que
le plus profond des mers orientales 8c des Indes.
Je termine ce détail en renvoyant à ce que j’ai
dit ailleurs de l’Amérique feptentrionale & méridionale.
A n e c d o t e s dépendantes du climat des mers de la
moyenne terre, & du climat des mers de la nouvelle.
La multitude infinie de coquillages répandus
dans les parties de nos continens qui appartiennent
à la moyenne & à la nouvellè terré , nous a
offert les monumens les plus naturels & les plus
communs du fijour de nos continens fous tes eaux
de l ’Océan. Nous en avons trouvé enfuite quelques
vertiges en approfondi ffant les différens fyf-
tèmes des anciens philofophes} mais ces opinions
ayant été toutes plutôt le fruit d’ une folle imagination
des hommes que du, fou venir du paffé ,
n’ ont point mérité d’être mifes en parallèle avec
les monumens refpeétables de la nature. Nous allons
donc revenir encore à ces monumens autheh-
; tiques qui font reftés de l ’ancien état de la terre ,
! non pour fuivre préfentement l ’examen des differentes
produirions marines, pour en reconnoît; e
les caractères, les formes, les efpèces 8c les familles,
mais pour élever nos regards fur les tradus
de la moyenne 8c de la ^nouvelle terre , & obfèrver
en grand s’ il n’e-ft pas refté fur nos continens, dans
I’errtemble de nos montagnes & dans la difpofition
générale de nos collines, des empreintes 8c des
traces du féjour des mers dans les baffins qu’ elles
ont enfuite abandonnés.
Les continens que nous habitons depuis les
foixante-quatre fiècles environ que nous connoif-
fons, ne font donc conftruits que de matériaux
provenus de la démolition d’autres plus anciens,
& d’une multitude innombrable de corps marins,
dont les parties ’es plus folides fe font accumulées
pendant la durée de Y ancienne terre. Le tetris, ce
deftrudeur impitoyable des ouvrages des hommes,,
n’a pas fur ceux de la nature un égal pouvoir.
Les monumens des plus anciennes moinarchies ont
été détruits ; mais parmi les monumens de l’ancien
empire de là mer, il nous eft refté une prodi-
gieufe quantité de frêles coquillages, qui, malgré
lès fiècles, ont confervé jufqu’à nos jours leurs
formes , & fouvent toute leur beauté. Bien plus,
; nous distinguons encore, en beaucoup d’endroits,
les efpèces qui çompofoient leurs différentes familles
: Uur pofïtion bancs par bancs, couches par
couches, n’ a point généralement changé non plus,
& l’odeur que ces dépôts ont contractée, ne s’ eft
pas même tout-à-fait diffipée.*
Nous ajouterons auffi q u e , dans ces mêmes
bancs & couches, on trouve les dépouilles de
plufieurs animaux 8c végétaux terreftres totale-
! ment étrangers à nos climats, comme les coquilles
! 8c les autres corps marins organites.
I Comme, dans ces tems reculés, les lits des
mers,
mers, où tous ces matériaux 8c ces débris fe conf-
truifoient & s’amaflbient, occupoient des climats
différens : de là fans doute font provenues ces
grandes variations qu’on remarque dans la nature
8c la compofition du fol intérieur de nos diverfes
contrées. Dans certains lieux ce ne font que des
lits de pierres blanches ; ailleurs elles font rouges j
dans d’autres elles font noires. Dans une province
elles font finguliérement tendres, 8c dans d’autres
plus duces. Ici on ne voit que des marbres > l à ,
des criftaux 8c des fels y ailleurs , ce ne font que
des lits profonds de marné\ de terre glaifeou de
craie.
Je pourrois offrir en détail toutes les variétés
de matériaux qui fe font amaiTés dans le baffin de
la mer, &r qu’elle a mis à découvert en différens
tems, comme ils ont été conftruics'en différens
tems. Parmi ces variétés je pourrois auffi comprendre,
non-feulement les differentes familles de
nos amas de coquilles, mais encore les pierres de
différens grains , lefquelles doivent ces grains à ces
coquilles.
Ce feroit un travail fort utile 8c fort intéref-
fant, qu’une géographie fouterraine qui pourroit
nous amener à la connoiffance de ces anciens climats,
de la mer, d’où il eft réfulté la diftribution
de ces produits tirés de fon baffin., & vi fi blés à la
furface'de la. terre. Ce projet ne me paroît devoir
ê_ere conçu & exécuté que par ceux qui fendront
le befoin de dillinguer les époques des retraites de
la mer, relatives à la moyenne terre d’un coté, &. à
la nouvelle terre de l’autre.
La diftindion de ces deux terres, qu’il eft fi
facile de faifir, nous donnera la foliation d’ un
problème qui jufqu’ à préfent a fort embarrafïé
les natnraliftes qui ont cherché à déterminer les
différentes natures de foin les qui fe font trouvés
réfidçr dans le baffin de la mer, & qui pour cela
ont voulu changer l’axe de la terra 8c l’aîpeét du
fpleil , fans penfer que tout dépend de la. diftinc-
tion des époques de l’apparition de certaines parties
de nos continens > car, dans tout ce travail,
il eft nëceffaire de distinguer l’ouvrage des mers.
O r , comme nous ne connoiftons pas les caufes de
ces apparitions , nous faurons encore moins la
caufe de ces différentes natures de foffiles, foit
végétaux , foit animaux.
Ainfï la mer, qui a formé la moyenne terre, offre
partout des pierres de, fable , des pierres calcaires
prefque toutes en couches inclinées, 8c d’un grain
fort fin. Quelques-uns cependant de ces matériaux
fubfiftent encore en bancs peu éloignés du plan
de l’horizon ; mais quelques-uns ayant perdu une
partie de leur à-plomb, cheminent vers certains
points, & femblent portés à s'écarter de-leur ancienne
affiette. C ’eft là que l’on a trouvé des empreintes
de plantes d’Amérique, 8c des dépouilles
d’animaux appartenais à ces mêmes contrées lointaines
; c’eft là que fe font opérés des affaiffemens
confidérables ; c e.ft là que coulent des riv ères qui
Gêographie-Phyjique. Tome II.
J fe perdent, des rivières à catarades, des dégorgeoirs
plus ou moins abondans ; c ’eft là que le niveau
des fources occupe une hauteur intermédiaire
entre.les cimes de Y ancienne terre 8c les fommets
des collines de la nouvelle: Je pourrois citer
à cette occafion les deux Jura, celui de Franche-
Comté 8c celui du Dauphiné, les environs de Grenoble,
d’Annecy, de Chambéry, de Nîmes, d’A vignon
, 8cc. où tous ces phénomènes s’obier vent
& fe montrent d’une manière très remarquable.
Tous les dépôts adoftes à ces maffifs, 8c qui
font très-iéguliérement diftt ibués par lits horizon?
taux, ceux dont les pierres offrent un grain fort
gros , où les amas de coquilles font ordinairement
composés de coquilles, dont 1 organisation eft affez
bien confervée, même dans leurs débris, tous ces
phénomènes appartiennent à la nouvelle terre. Ce
qui peut en convaincre , c ’eft que ces fyftèmes de
dépôts font conftamment établis fur ceux de la
moyenne terre, ou même immédiatement fur les
maffifs de Y ancienne, 8c à un niveau toujours inférieur
j car l’une & l’autre difpofition relative des
deux terres a lieu 8c s’obferye en plufieurs contrées
& dans de grandes vallées de la France, que
j’ai décrites fous la dénomination de vatléesg
p p .. , .
Au refte , les pierres formées de débris de coquilles
, dont les élémens de décompofition font
fort gros, peuvent appartenir à la moyenne terre.
On en trouve de fembjables amas en Angoumois
8c en Sain congé, qui font difperfés au milieu de
là nouvelle terre. Ce qu’il y a de fîngulier, c ’eft que
cette moyenne terre te trouve & s’ obferve en plufieurs
contrées de la France & des pays étrangers,
que j’ai vues & revues avec foin , Ce décrites
fous la dénomination de vallées golfes, C ’eft une
confidéracion qui donne des rapprocheinens très-
inftrudifs, relativement aux dépôts de la mer, lesquels
ont des catadères particuliers ; caradères
dépendans toujours de trois ordres de chofes , du
grain des pierres, de leurs difpofitior.s primitives
& relatives, enfin des dérangemens que le laps des
tems y a vifiblemenc apportés. Je mettrai fous les
yeux de mes ledeurs tous ces fyftèmes de faits ,
qui ne font pas connus. Quoi qu’il en fo it, nous
partons à la diftindion du climat des mers de la
moyenne 8c de la nouvelle terre.
Cette diftindion m’a paru donner la folution
primitive de la réfidence des foffiles., foit coquillages,
foit végétaux, foit enfin dépouilles d’animaux
, dans certaines parties de nos continens ,
lefquels corps organifés appartiennent à différens
climats.
C ’eft la diftindion des deux terres ou maffifs qui
m’a fourni cette première vue. Je trouve les monumens
de cette diftindion dans les baffins des
deux mers, au fond defquelles il eft aifé de.prouver
que ces terres ont été formées. A in fi, l ’on
voit ici que cette diftindion de la moyenne terre 8s..
de la nouvelle , que j’ai déduite depuis long-temj