
mination vient de Vandalitia, que les Vandales,
qui fâvoient bien choifir les lieux de leurs conquêtes
& de leurs établiffemens , lui ont donné. Sous
les Sarrafîns, cette belle 8c grande province fuffi-
foit à former trois royaumes. Son commerce eft
confidérable. Elle a cent lieues de longueur fur
foixante de largeur. Plus anciennement, elle fe
nommoit B étique 3 du fleuve Boetis, aujourd'hui
Guadalquivir, qui l'arrofe. Il ne me relie plus qu'à
donner ici une defcription raifonnée du baffin de
ce fleuve.
La Sierra-Morena ou MontagneANoire appartient
à la chaîne qui , depuis le feizième degre de
longitude en revenant vers le douzième * fépare
les baflins de la Guadiana 8c du Guadalquivir. Le
noyau de ce maflif eft compofé de granit , de
quartz , & d'autres principes du granit en différentes
proportions. La portion de cette chaîne ,
qui porte le nom de Sierra - Morena , s’étend
fur douze lieues environ de longueur de l’ eft à
l'oueft.
C'eft à quatre lieues de la Caroline, joli bourg
de nouvelle formation, que l'on trouve le paffage
de la Sierra-Morena 3 connu fous le nom de Puerte-
del-Rey.
Pour parcourir 3 avec un certain ordre, le badin
du Guadalquivir3 il me paroît qu'il convient de
commencer l'examen du fol vers la fource de- ce
fleuve. C ’eft là que l'on trouve d’abord Alcarar,
proche fa fource , endroit remarquable par une
mine de calamine. La terre qui la renferme eft
fort dure, & d'un jaune d’ocre foncé. A quelque
diftance à l'oueft, à Santa-Cru^-de-Mudela, & toujours
au pied de la Sierra-Morena, il y a une mine
d'antimoine, dont le filon fe montre à la furface
de la terre.
En s’approchant de Linare\ , on trouve une
plaine très-vafte & fort élevé e, puifquè du centre
de cette plaine on découvre plufieurs villes qui en
font affez éloignées : telles font Andugar, capitale 5
Bae^a , XJbeda & Bàgnos.
Cette plaine eft terminée à l’oueft & au nord
par deux vallons très-profonds : ce font deux tor-
tens qui les ont approfondis à la fuite de plufieurs
ravins creufés & élargis par le laps du tems. Les
collines oppofées à la plaine font toutes criblées
par les puits des mines que les Maures y ont exploitées.
11 paroît que les rois.de Jaën cherchoient
dans les entrailles de la terre des richeffes qui puf-
fent les dédommager de celles que leur rerufoient
ces collines par leur ftérilité. Suivant toute apparence
, ils fourniffoiënt les pays circdnvoifîns de
plomb,- de cuivre & dfargent, car prefque toutes
ces collines renferment quelques-uns de ces métaux
en abondance, & même plufieurs les renferment
tous. En .parcourant les deux vallons cdpnt nous
avons parlé , on voit pendant plus d'unë' lieue le
haut des collines efcârpëes fur leufs bords', couvert
de puits pratiqués de quatre pas èri quatre pas,
& diftribués en ligne droite : do préfùme qu'il peut
y en avoir au moins cinq mille. Il eft fort vraifem-'
niable que l'on doit la découverte de ces filons
aux eaux qui les firent paroître en formant des ra.
vins, car on ne voit pas le moindre indice des filons
à la cime des collines ; au lieu que les voyant
à découvert fur les croupes des ravins, les Maures
dirigèrent leurs travaux d’après les premières con-
noiffances des quatre filons qui s'y montrèrent. On
ne trouve, dans toute l’étendue que nous venons
d’ indiquer, aucune mine dans les traélus de pierres
calcaires 3 mais dès qu'un granit gris, brun, &c.
s'apperçoit, on y voit des filons de mine de plomb,
qui ont quelquefois foixante pieds de large, lef-
quels fe réduifent aufli à un pied 3 ils varient d'ailleurs
dans toutes les proportions imaginables entre
ces deux extrêmes. Il arrivefouvent qu'ils font
à découvert dans les maffes graniteufes, & qu’ils
affeélent de s'y plonger comme dans un fol quî
leur fert de bafe. C ’eft une véritable galène dont
les grains font affez gros , & ,donnent ordinairement
foixante à quatre-vingts livres de plomb par
quintal. D ’ailleurs, chaque quintal de cette même
galène ne contient que trois quarts d’once d'argent
par quintal. On met beaucoup d’importance à l'ex-*
ploitation de cette mine, dont le'plomb s’emploie
à différens ufages de la fociété.
i ° . On en fait du petit plomb pour la chaffe,
que l’on vend dans toute l'Efpagne au compte du
roi.2
e*. Une partie fe vend aux potiers de terre pour
verniffer leurs ouvragés.
Le furpius paffe en France, & fe vend à la foire
de Beaucairë : ce font ordinairement des potiers
de terre qui l’y achètent.
En partant de Radajos pour aller à Séville, on
traverfe une plaine déferte, non calcaire, jufqu'à
Sainte-Marthe, où l’ on rencontre quelques collines
d’ardoifes fort dures, & dés rochers de grès
fin , lefquels s'étendent jufqu'à Zafra. Ici lé'pays
change d’afpeâ:, car on commence à y voir des
couches & des terres calcaires : dés pierres à chaux
y recouvrent leurs formes , car elles ne font plus
fendues comme auparavant, mais elles, fe préfen-
tent par couches horizontales 5 elles offrent une
pierre grife & bleuâtre, mêlée de veines fpathi-
ques, & il réfulte de ce mélange des marbres de
différentes couleurs. De Zafra on fe rend ï Sainte-
Marthe, où les collines précédentes baiflent peu
à peu , & finiffent par former une plaine de cinq
lieues, jufqu’àZar^a-del- Angel.En paffant par Mo~
nafterio , on arrive a Fuerite de Cantos, où les
pierres 8c les terres calcaires finiffent font remplacées
par des quartz & des roches graniteufes.
La Sierra-Morena commence à ce village ; elle eft
formée de collines rondes, de pierres de fable.
Emavançant un peu dans les montagnes, on arrivé
à Olalla 3 qui eft le premier village du royaume
ancien de Séville : Pôn fol eft compofé de collines
8t de plainésj, où l ’on rencontre des pierres 8t
des âtnas confus de roches & de fragmens de grahic
arrondis 3 on entre enfuite dans les montagnes
de la Sierra Morena, puis on ne voit plus que
des maffes de granit, de l'ardoife fort dure , de
la pierre de fable, des cailloux graniteux, &c.
tous matériaux qui conftituent la maffe de la Sierra-?
Morena 3 à quoi on peut ajouter un terrain rempli
de S a fait es ou de laves compactes qu’on trouve
parmi des granits & des porphyres : on n’y découvre
ni pierres à chaux, ni rochers difpofés par
couches , ni plâtres , &c. Après avoir traverfé la
Sierra-Morena, on defeend dans la grande plaine
de Séville 3 qui offre fur fes limites des cailloux roulé
s , débris de granit & de grès.
En allant vers Andujar on trouve que les environs
en font très-fertiles en grains, en vins &
en huiles : c'eft de là auffi qu'on tire abondamment
de cette argile blanche, dont on fait les petites
cruchesqui fervent dans une grande partie del’Ef-
pagne pour conferver l'eau fraîche en été. Dans
d'autres parties de V Andaloujie, on trouve également
de cette argile qui eft rouge : on en fabrique
des vafes que l ’on appelle bucaros , dont on fait
iégalement ufage pour rafraîchir l’eau. Les cruches .
blanches, ainfi que les bucaros couleur de fang de ;
boeu f, font minces, poreufts, liffes & à demi
■ cuites : en y métrant de l'eau , ces'vafes répandent
une odeur femblable à celle de la terre feche
lorfqu’ il pleut en é té , & l’eau filtre à travers leurs
corps & les conferve toujours humides. Les bucaros
qu’on tire des Indes font compotes d’une ;
•terre plus fine & ont une odeur plus fuave. Plu-
'fieurs voyageurs nous ont parlé long - tems des
vafes. évaporatoires de l’Afrique, de l’Egypte ,
de la Syrie & de l’Inde avant que quelques per-
fonnes inftruites nons aient fait connoître les bu-
'earosdz les cruches d’Efpagne, qui font de la même
mature que ceux-là, & qui fervent depuis un tems
immémorial à rafraîchir l’eau. Ceci nous a valu
l ’introdu&ion des procédés de fabrication de ces
'Vafes en France j auffi j ’ai cru devoir faire part
de ces diverfes particularités dans deux articles de
ce Diétionnaice. ( Voye^ Al c a r a z a s . )
De Linarès à Grenade on ne fait que monter.
Les montagnes font compofées de fubftances d’ une
nature différente de celles qu'on rencontre dans
celles de Jaën. Celles des environs de Mongibar
font ën couches calcaires, couvertes de terres à
blé : l1 on y cultive auffi beaucoup d'oliviers. En j
fe portant en avant on reconnoît que les pierres
arrondies qu'on trouve dans le lit de la rivière, font
conglutinées enfemble, pendant qu’elles forment
des roches fuivies au haut des collines : on voit
aufli que les coteaux des environs du village font
en bonne culture, & n’offrent aucune pierre dans
leur intérieur. Depuis Torre-Campo on ne ceffe de
'monter jufqu'à ce que l'on ait atteint les dernières
cimes, qui font couvertes de neiges: au-delà de
ce village on rencontre Alcandete, gros bourg bâti
en marbre noir, dont la couleur n'eft pas l’effet
d’un mélange de bitume. En fortanç de ce bourg
on traverfe une montagne couverte de terres calcaires
cultivées, &produifant beaucoup d’oliviers.
Quoiqu’il y ait dans cetre contrée un grand nombre
de collines terreufes, ce font les plus baffes :
il y en a d'autres plus élevées en roches calcaires,
lefquels n'ont pas également éprouvé la décompo-
fition. Alcala-la-Réal eft à cinq lieues d’Alcandete ,
dans une fituation fi élevée, qu'il y a partage des
eaux, d'un côté vers l’Océan, 8c de l'autre vers
la Méditerranée , par le Xenil 8c par le Guadalquivir.
Sur une des-pi us hautes montagnes du pays
on trouve du gypfe blanc & veiné , & dans l’intérieur
d’un grand nombre de collines des pierres
conglutinées, qui forment des roches fuivies : il y
a de ces mêmes pierres dans le X en il, mais il ne
les charie pas loin , car , tout rapide qu’il eft en
été , lors de la fonte des neiges, on ne voit plus
une feule de ces pierres près de boxa.
La très-belle fituation d e la ville de Grenade eft
au pied de la montagne d’Efpagne, la plus élevée
& la plus étendue} elle eft toujours couverte de
neiges j aufli l ’a p p e l le - t - o n par cette raifon, Sierra-
Nevada. Les collines du fécond ordre varient entre
elles. Les unes font compofées de roches pelées,
d’autres le font de roches fehifteufes, à fentes perpendiculaires
& obliques 3 d’autres enfin font couvertes
de terres rouffâtrès, couvertes d’arbres, d’ar-
buftes & déplantés. Un de ces coteaux, forteievé,
eft compofé d’ un marbre v einé, depuis le fom-
met jufqu a la bafe.: il y en a beaucoup d’autres
de différentes formes & de différentes matières.
C e qui mérite le plus d’attention, c’eft que la
plus grande partie de ces coteaux renferme des
mines d argent 8c de cuivre : on en voit qui
ont été exploitées par les Maures, & les autres,
moins apparentes, font reliées fans aucun travail. *
Le fommet de là Sierra-Nevada3 jufqu'à Grenade,
eft compofé d'un bloc énorme de roche couleur
de fouris, fans aucune fente j -c'eft de ce fommet
qu'il fort un grand nombre de fource s alimentées
par les neiges fondues : elles donnent naiffànce
au Xenil y qui traverfe Grenade. Quoique cette
montagne foit une maffe énorme de rochers dans
plufieurs endroits , les granits font décompofés 8c
couverts d'une terre qui eft affez fertile.
t<A deux lieues de Grenade on trouve une carrière
de ferpentine, dont on peut tirer de très»
belles colonnes. Elle eft au bord 8c-au niveau du
Xenil. Cette ferpentine v erte, &- pleine de bleu
eft fufceptible d’un très-beau poli. Plufieurs pe*-
fonnes mftruites -penfent que cettè Serpentine mérite
d'être préférée au fameux vert anrique donc
on faifoit tant de cas à Rome. Indépendamment
de cette carrière, il y a encore d’autres maffes
de ferpentine dans cette partie , auxouelles on
n’a pas encore tou ch é, quoiqu'elles fôient très-
apparentes.
Grenade eft renommée d’ailleurs par fe^ albâtres
& fes marbres. Quelques-uns de ces albâtres font
tres-bUncs , auffi brilians 8c auffi■ franlpâTens que