
grande quantité des morceaux de marbre qui fe
rencontrent au pied de la colline de fable , & qui
fondes reftes de l'exploitation de la carrière : tout
porte à croire que les fculpteurs romains tiroient
la matière de leurs ouvrages de cette île.
Le marbre ftatuaire dArbe contient des ortho-
cératites & des nummales de la grande efpèce. On
les découvre plus facilement dans les morceaux
qui ont été expofés à l'air.
Ce marbre offre, dans fes caflures , les mêmes
élémens de criltallifation qu'on trouve dans les
marbres falins.
Il eft inutile de dire qu'autour de cette île la
mer eft fouvent lumineufe , parce qu’elle l'eft à
peu près partout, mais dans des circonftances
qu'on verra développées à l'article M e r l u m i n
e u s e ,
ARBRES f o s s i l e s . Dans plufieurs contrées de
la terre éloignées les unes des autres, on rencontre
des amas d3arbres couchés à des profondeurs qui
s'étendent depuis vingt jufqu'à foixante pieds. Ces
arbres ont été abattus & encafles par une fuite des
changemens arrivés à la furface de la terre depuis
la retraite de la mer. Les obfervations qui ont été
faites dans les tourbières de la Hollande & dans
les marais de la Frife prouvent que la direction
de ces arbres e ft, pour le tronc, au nord-eft, &
pour la tê te , vers le point oppofé de l’horizon.
C 'e ft , félon plufieurs érudits, à l'inondation de
la Cherfonèfe cimbrique, arrivée l'an 340 avant
notre ère vulgaire, ainfi que l’a déterminé Picard,
que cette inondation à laquelle on doit ces dépôts,
a , félon eux, enfeveli les forêts de la F rife,
& formé tous le^s marais qu'on trouve depuis Schel-
ling jufqu'à Bentheim.
D'un autre c ô té , d'autres favans anglais prétendent
que les arbres fojjiles qu'on tire de la terre
dans la province de Lancaftre, font les reftes des
forêts abattues par les fauvages bretons, pour fe
mettre à couvert des invafions des Romains fous
la conduite de Jules-Céfar- Je ne fuis pas éloigné
d%dopter l'explication qu'on donne d'un phénomène
mal obfervé jufqu'à préfent. Effectivement,
il eft pofïîbl.e que des amas d'arbres foient dus à
la caufe qu'on affigne à ceux de la province de
Lancaftre. Cependant je defirerois fort qu'avant
de rifquer cette décifion, on eut fait un examen
férieux de la pofition de ces arbres, des matériaux
étrangers à ces arbres, qui les enveloppent & qui
les recouvrent. Sans ces détails bien circonftan-
c ié s , on ne peut rien conclure de quelques faits
■ ifolés & incomplets.
Quant aux amas d'arbres qu'on trouve dans les
tourbières de Hollande, il eft vifible que ce ne
font pas les reftes de forêts abattues par l'inondation
de la Cherfonèfe cimbrique , car tous ces
arbres ont été- enfevelis par les mêmes eaufes,
dont le concours a formé la plus grande partie du
foi.fa&ice de la. Hollande & de la Frife. Qr,. il eft
évident qu'il eft le produit des fleuves qui fe déchargent
dans ces provinces. 11 n'y a pas de doute
que les arbres dont il eft ici queftion,- n'aient été
voiturés & dépofés par l'eau des fleuves, qui ont
entraîné d’ailleurs tant d’autres matériaux en Hollande
j en forte que fi l'on ajoute à ces arbres, ainfi
qu’aux vafes & aux débris des couches de pierres
dépofés par ces fleuves, les productions naturelles
des rofeaux qui ont végété dans les lieux
inondés, enfin les fables refoulés par les vagues
de la mer & par les vents, on aura l’affemblage de
tous les matériaux qui ont contribué à la formation
du fol aétuel de la Hollande.
Il faut donc fuppofer d’abord que lès fleuves
qui ont leurs embouchures en Hollande, ont détruit,
dans leurs premiers accès torrentiels, l’ancien
fol au milieu des parties où les eaux courantes
ont pu exercer leurs démolitions, & furtout au
milieu des couches horizontales qui le formoienr.
On ne peut fe diflimuler que, par la fuite des tems
& par le changement des circonftances, ces mêmes
fleuves dont le cours s'eft trouvé ralenti, n'aient
dépofé dans le vide occafionné par ces deftruc-
tions, tous les matériaux qu'ils avaient détachés
des différentes parties des bords de leurs canaux ,
& que, par le progrès de tous ces dépôts, le fol
fa&ice de la Hollande, de la Frife, de Gronin-
gue, &c. n'ait été formé, & nullement par l'inondation
fortuite de la m er, dont on ne peut affigner
ni la caufe ni des effets femblables qui foient bien
connus.
Je crois qu'il convient , avant de décider ainfi
fur la caufe de ces dépôts & fur celle de ces phénomènes
, de faire l'examen des circonftances de
la difpofition des arbres foffiles 3 & de fe bien convaincre
, par une difeuflion fuivie, à quel ordre
de chofes on doit rapporter ces événemens. Si ces
arbres, par exemple, font diftribués par couches
mêlées avec des bancs de pierres calcaires ou de
pierres de fables , alors on voit qu’ils ont été entraînés
dans la mer par les fleuves, & que c'eft
dans fon baflin que les matériaux qui les cou-
vroient, auroient été ainfi mêlés & arrangés.
Mais fi les matériaux qui les enveloppent i ne
compofént que des amas fans fuite & fans ordre ,
& fans aucune difpofition horizontale ; qu'occupant
d'ailleurs les environs de .l'embouchure de
plufieurs fleuves, ils ne font que le véfultat des
tranfports fucceffifs occafionnés par les déborde-
mens de ces fleuves, qui dans leur accès détrui-
fent & entraînent , & qui finiffent par dépofer
dans les parties dé leurs canaux où l'eau dilatée
eft ralentie, tant par la largeur de l'embouchure,,
que par le refoulement des eaux de la mer.
Nous fommes en quelque forte témoins d’une
pareille révolution qui s’opère encore vers l'embouchure
du fleuve des Amazones, On y trouve
des amas immenfes d’arbres qui ont été entraînés;
par le fleuve „ & entaffés par les courans, rapides-
qu’il éprouve dans • les accès de débordement
D’ailleurs, ces mêmes arbres fe dépofent encore ]
chaque jour, & font recouverts par les terres qui
font les produits des fédimens journaliers que les
eaux de l'Amazone, difperfées dans les différens,
canaux de fon embouchure, y Forment, étant ralenties
par le reflux qui remonte jufqu'aux limites
d’un terrain bas & uni, qu'on doit confidérer
comme l’ouvrage du fleuve & de l'Océan.
On peut voir par ces détails, quelle eft la fuite
des opérations de la nature , à laquelle un natu- !
rulifte doit s'attacher lorfqu'il examine ce qui ;
s'opère quelque part dans l'ordre des anciens phé- !
nomènes. On fent aifément que, fans cette attention,
il ne peut remonter du préfent au paffé., de
manière à en tirer la plus grande inftru&ion, &
c ’eft en comparant l’un & l ’autre état qu’il en recueille
des principes aufli folides que lumineux.
'Je conclus de toute cette difeuflion, i° . qu'il ■
faut bien obferver les circonftances dans lefquelîes :
fe préfentent les amas d arbres /effiles avant que j
d'aflîgner la caufe & l’époque de leur entaffement !
dans une contrée quelconque, & avant que d’en
tirer aucune conféquence relative aux révolutions :
qu’elle peut avoir efluyées ; 2 0 . que les arbres i
foffilesj accumulés & enfevelis dans les terres vers I
l’embouchure des grands fleuves, font les produits
de leurs tranfports, & nullement celui de
l’inondation de la mer, dont les effets font aufli
inconnus que. la caufe en eft incertaine 5 30. que
les circonftances locales donnent prefque toujours,
par leur réunion, le déneûment des phénomènes
ae cette efpèce, & de prefque tous ceux qui
appartiennent à l’hiftoire phyfique du globe. Ainfi
l’on voit qu’en vain abandonneroit-on à la conjecture
des éclairciflèmens que l’obfervation feule
peut nous procurer. 40. Que les amas d arbres
foffiles 3 enveloppés ou ft ratifiés au milieu des couches
horizontales ou inclinées, doivent être rap
portés aux mêmes époques que ces couches, &
aux mêmes eaufes. y°. Que ces mêmes amas, enveloppés
dans des vafes fans fuite & fans ordre,
doivent appartenir aux dépôts des fleuves, qui
font poftérieurs à la retraite de la mer & au quatrième
ordre des opérations de la nature, dépendantes
des eaux courantes torrentielles & fluviales.
Je ne puis m'empêcher de faire remarquer, en
terminant cette difeuflion , que des vues trop générales
, bien loin dé fervir à l’éclairciffement de
plufieurs points relatifs à la théorie de la Terre ,
ne peuvent qu'égarer ceux qui s’y livrent, au lieu
de recourir à la feule voie d’ inftru&ion ouverte
a ceux qui peuvent en tirer quelqu'avantage ; je
veux dire l’obfervation raifonnée & fuivie. Ob-
fervez un fa it , difcutez-le , comparez-le avec
d’autres analogues, & décidez enfuite fi vous avez
recueilli de quoi afleoir un jugement, finon attendez
la lumière de l'analogie, qui ne manquera
pas de vous éclairer dès que vous pourrez comparer
un ou deux faits du même ordre. Sans ces
reflources, il eft raifonnable de douter jufqu'à ce
que de nouvelles recherches vous inftruifent fuffi-
famment. ( Voyc^ T ourbes & T ourbières ,
Kà n c a r d in e , & c.)
Arbres fojjiles trouvés en Dauphiné3 département de
■ l ’I f ère.
On a découvert plufieurs arbres fojjiles fur une
des plus hautes montagnes des Alpes en Dauphiné,
& près d'un glacier, à plus de fept cent foixante
mètres de hauteur verticale au diffus des forêts
les plus voifines qui exiftent actuellement. Ce font
des troncs de mélèfe, de bouleau, d'aune &c de
tremble parfaitement confervés, avec leurs racines.
Il y a grande apparence que ces efpèces d'arbres
ont végété fur les lieux mêmes où ils font
enfevelis , & que la température y eft devenue
a fiez froide pour que ces mêmes arbres ne puffenc
exifter par la fuite qu'à un niveau inférieu'r.
On a cherché la caufe de ces changemens de
température dans la dégradation des fommets de
ces montagnes, dans i’aminciflement de leurs fommets
par les eaux pluviales, & dans la deftrtiCtion
imprudente des bois qui les couvroient, par la
main des habitans, & il faut avouer que toutes
ces eaufes, maintenant en activité fous nos yeu x,
font des moyens plus fîmples & plus efficaces que
tous les agens que nous voyons figurer dans les
hypothèfes les plus brillantes & les plus compliquées.
C'eft au Montdelens, canton d'Oifans, département
de l'Ifère, & une des plus hautes montagnes
des Alpes de ce département , que cette découverte
s’eft faite, & qu’on a reconnu ces circonftances..
Cette montagne fe trouve fituée à environ
fix rhyriamètres de Grenoble : c ’eft une malfe
fehifteufe & granitique , couverte d'un glacier uni
comme une table 5 il a deux myriamètres de. longueur,
fur deux kilomètres de largeur. L'épaiffeur
confidérable des glaces fait que les bords s’en prolongent
à un niveau plus bas que la ligne des neiges'
perpétuelles. C'eft autour de ce dépôt immenfe
de glaces que fe trouvent des prairies, des endroits
coupés par les torrens, des rochers crevaf-
fés au point que les gorgés ou vallées étroites de
la Grave & de Saint-Chriftophe qui l’entourent,
font à,deux mille deux cents mètres de profondeur
au deflous du glacier.
Le village ou hameau de Montdelens, placé au
bas & fur une des croupes en pente de cette montagne
, eft élevé de mille trois cents mètres au de£*
fus du niveau de la mer.
Le glacier du Montdelens} fîtué à une élévation
de trois mille neuf cents mètres, s'étend à plus de
trois lieues du nord au-fud jufqu'au Lautaret, à la
! Berarde & à Valouife, confins du Briançonnois,
département des Hautes-Alpes. C'eft au bas de ce
; glacier, parmi des peloufes, que fe trouvent quel-
; cjues marais dans des enfoncemens afiez confidé