
coupent les cheveux au deffus du front j les hommes
les portent ffottans par-derrière j les femmes
les lient-en touffe fur le fommet de la tête. Lès
premiers portent de longs & amples fracs de
peaux d'oifeaux j & les dernières, des peaux de
veaux marins. Sur ce vêtement les hommes en paf-
fent un autre fait des inteftins des animaux céta-
cées, féches, & paflés à l’huile pour que l'eau gliffe
deflus j & pour défendre leur vifage contre les
intempéries de l'air , ils portent une pièce de bois
mince , qui fait l'effet du devant du chapeau de
nos femmes européennes. Les femmes fe tatouent
légèrement la face, & portent un rang de grains
pendans à leur .nez : outre cela les deux fexes fe
percent la lèvre inférieure ; mais il eft fort rare
d'en voir qui y attachent un bout d'os en guife
d'ornement : cela n'arrive qu'aux femmes. Les or-
nemens du nez s'étendent fort loin dans l'intérieur
du continent j car les Américains, qui font en relation
de commerce avec la compagnie de la baie
d'Hudfon, en font ufage. Mais d'après les figures
publiées par de Brie, il ne paroît pas que cet ufage
fe foit répandu parmi les habitans de la Virginie
& de la Floride.
Ils logent dans des jourts ou habitations fous
terre , & plufieurs familles^ font raflemblées dans
une feule, où ils vivent pêle-mêle dans une horrible
faleté : ils n'en font pas moins d'une civilité
très-remarquable dans leur conduite. Ils enterrent
leurs morts fur les fommets des collines, & élèvent
deflus leur fépulture des barrowfon, tertres
de pierres dans la formé & fuivant la coutume
ufitées dans tout le nord de l’Europe, depuis les
rems les plus reculés.
B a i e de B r i s t o l .
Au nord du promontoire â.'Alafckka l'eau décroît
confidérablement en profondeur, & les montagnes
fe reculent vers le fond bien avant dans les
terres, laiflant devant elles & la mer une large
étendue de terres baffes,ou elle forme une grande
Baie appelée Brifiol, avec une vafte rivière au bout,
dont l'embouchure eft d’un mille de large, & qui
eft flruée à la latitude-de j8 degrés 27 minutes. Le
cap Newenham, latitude 58 .degrés 42 minutes,
promontoire de roc, fait la pointe feptentrionale
de la baie; à vingt-huit lieues du cap Oonemak,
qui eft la pointe méridionale. La première pointe
n'offre qu'une aridité univerfelle & dans aucune
végétation dans fon voiflnage. Les valrufes com
mençoient, au 1 y juillet, à s'y montrer en troupes
nombreufes, preuve que la glace n!eft pas effen-
tiellement néceffaire à leur exiftence.
Les habitans de cette côte étoient beaucoup
plus mal vêtus que ceux qu’on a vus jufqu'ici j
mais ils avoient de-commun avec les autres, la
double coutume de fe défigurer le nez & les lèvres. ■
Us rafoient leur tête-& coupoient leurs cheveux
de très-près; ne laiflant que quelques touffes, ou
derrière, ou d'un feul c ô té , à la manière des
Chinois.
Du cap Ntwenkamîe continent s’avance droit
au nord, & à l'oueft eft l’île de Gore, remarquable
par un vafte rocher à la latitude 60 degrés 17
minutes, & longitude 187 degrés 30 minutes, appelé
la Pointe droite, & tout près eft un îlot très-
haut & fort rocailleux, nommé les Pinnacles ou les
Créneaux. Des légions de la tribu des Pingouins
hantoient ces précipices. Cette île paroît être la
limite feptentrionale de la retraite des loutres de
mer.
De Shoal-Nejf, latitude 60 degrés, & longitude
196 degrés, il y a une lacune dans la géographie
d'Amérique, jufqu’à la pointe Skallow - IVater
(baffe terre) , latitude 62 degrés 50 minutes j &
non loin de là on trouvoit les lignes de la décharge
de quelque grande rivière venant du côté où l’ on
n’a pas encore fait de recherches. Au-delà de la
pointe Skallow-Water eft le cap Stephens & , devant
lu i, à une petite diftance, i’île de Stuart. Us
forment les pointes méridionales du détroit de
Norton, formé par un vafte enfoncement de la terre
vers l’eft. Près de la mer, la terre eft partout baffe
& ftérile, & bornée par des montagnes qui fe
montrent dans l’intérieur. Les arbres, qui étoient
le bouleau, l’aulne, le faule, le fpruce, annon-
çoient une toible végétation : aucun de la dernière
efpèce ne pafloit fix à huit pouces de diamètre }
mais le bois flotté, qui étoit diftribué en grande
quantité le long du rivage , avoit de plus grandes
üimenlïons : il avoit été apporté, par les rivières
de l’intérieur du pays, de contrées plus favorables
à fon accroiffement.
Vers le fond du détroit, le ctyDenbigh s’ étend
confidérablement à l'oueft au milieu des. eaux , &
forme une prefqu'ile. Ce fut autrefois une île 5
car l’ifthme prouve évidemment que la mer en
occupoit autrefois la place.
Le détroit, depuis le cap Denbigh, fe refferre
beaucoup & s'alonge en une crique fort 'profonde,
qu'offre l’embouchure d’une' grande rivière. Le
continent,-dans c&ite partie, préfente de vaftes
plaines divifées par des collines d’une hauteur
.médiocre, & arrofées par plufieurs rivières qui y
circulent. La végétation s'anime à mefure qu'on
s’éloigne de la mer, &-les arbres augmentent en
groffeur. Un promontoire appelé Tête-Chauve
borde l’entre-côte nord de cette crique, & plus
loin à l’oueft lè cap Darby, latitude 64 degrés 21
minutes, forme la pointe feptentrionale de ce grand
détroit.
Cette côte eft bien peuplée : les hommes ont
environ cinq pieds deux pouces, B^reffembloienr,
par leur forme & par leurs traits, à tous les naturels
vus par les navigateurs qui ont fuivi la côte
nord-oueft depuis Nootka : ils avoient pratiqué deux
fentes à leur lèvre inférieure. La couleur de leur
peau étoit celle du cuivre j leurs cheveux étoient
noirs & courts. La barbe des hommes, étoit petite,
& , comme nous l’avons déjà dit, leur langue etoîtk
un dialeâe de celle des Efquimaux. Leur habillement
confiffoit principalement en peaux de daim ,
avec de larges capotes qui ne delcendoient guère
plus bas que la moitié des çuifiès, ou elles étoient
jointes par une grande botte très-large par la partie
fupérieure. Les Efquimaux, dans 1 occafion, attachent
leurs enfans dans le haut de cette botte j
les femmes de cette contrée les'placent plus commodément
dans la partie fupérieure de leur jac-
quette ïk fur une épaule. . ,
On remarqua une grande conformité dans leur
'langage. Us avoient, comme les Efquimaux, le
bateau de femme & le kaiack : ils employoient le
premier à fe protéger contre le mauvais tejns, en
le renverfant & fe mettant à l’abri deffous. Mais
l.eurs huttes étoient les plus mal conftruites qu on
eut encore vues : ce n'étoit uniquement qu un
toit en glacis, fans aucun mur de côté j d étoit
compofé de tronçons de bois avec un plancher de
même fabrique : l’entrée étoit à une extrémité ,
ainfi qu’une ouverture pour donner paflàge a la
fumée. „ .
Du cap Darby la terre fe dirige à 1 oueit, & fe
termine à la Pointe Rodney : là elle eft baffe, & a
une grande diftance au-delà elle s élève confidérablement,
en prenant la direction nord du continent.
Devant la Pointe Rodr.ey, latitude 64 de grès
.30 minutes, on trouve l'ïle du Traîneau , à caufe
d’un traîneau qu’on y trouva, reffemblant a ceux
dont fe feivent les Ruffes dans le Kamtchatka
pour voiturer leurs denrées fur la neige. L île étoit
déferte, & l’on n’y trouva que quelques débris
de jourts. _ 1 • j
' A la latitude 64 degrés 55 minutes, longitude
192 degrés, eft l'ile de King, nommée ainfi par
honneur pour l’habile & digne continuateur du
voyage. Le continent à'Toppofite de l'ïle fe prolonge
vers l’eft, & forme une baie dont 1 eau eft
peu profonde > enfuite il s’avance brufquement
dans fa mer, & y forme l ’extrémité la plus avancée
vers l’oueft. Ce cap forme un des côtés du détroit
de Bering y & fe trouve ©ppofé au Cap Efi , fur le
rivage aliatique, à la petite diftance de trente-
neuf milles : il eft fitué fous la latitude 65 degrés
46; minutes , & fe nomme le Cap du Prince de
Galles. C ’eft une terre baffe, & un peu au-delà
paroiffent des hauteurs, parmi lefquelles eft une
montagne à fommet pointu.
C'eft ici que commence la mer Glaciale > c'eft
à la laritude de 70 degrés 41 minutes que le
capitaine Cook s’eft trouvé barré par une glace
impénétrable, qui arrêta fa marche & le força de
renoncer à toute poflibilité d’un paffage par le
nord-eft. A
Après cette defeription de la cote nord-oueft
de l’Amérique, il ne me reftera plus, pour donner
une idée générale & complète de l’Amérique feptentrionale
, qu’à indiquer plufieurs articles de^ ce
Di&ionnàire , où je me propofe de faire connoître
les autres contrées qui en font partie. C eft dant
ces vues que je renvoie aux articles Baffin ( baie
4e ) , Davis ( détroit de ) , Glaciale ( mef) ,
Groenland ( ancien & nouveau) , Hudson {baie
d ') j Labrador (terre de), T erre-Neuve.
P r e m i è r e a d d i t i o n a la defeription des côtes
nord-ouefi de VAmérique feptentrionale , d'après
le troifième V^oyage de COOK en 1776, 1777 j
1778 û1 1779.
T c h i n k i t a n É , b a ie a : , f y d e g r é s d e l a t i t u d e
n o ' d , l a q u e l l e a é t é v i f i t é e & d é c r i t e p a r l e c a p i ta
i n e Marchand.
Lorfqu'on en approchoit on voyoit devant foi
des montagnes élevées, & fur la neige qui les cou-
v ro it, les arbres verts dont elles étoient plantées
jufqu'à leurs fommets, & qui fe deflinoient d’une
manière remarquable. La bafe qui portoit ces mon-
! tagnes, les petites collines qui de diftance à
autre la dominoient, étoit revê.ue d’une verdure
uniforme} & lorfque les navigateurs eurent atteint
la cô te , ils trouvèrent que les établiffeoeens des
habitans voifins de la côte ne pouvoient être occupés
que dans le tems où cette peuplade faifoit
commerce de. pelleteries.
Quoique les peuplades difleminées fur la côte
nord-oueft de l1 Amérique fe préfentent avec des
apparences qui annoncent une grande affinité en-
tr'elles} quoique nous aiyons déjà reçu du capitaine
Cook des notions affez étendnes fur une
race d’hommes jufqu’alors inconnue à l’Europe,
je crois qu'il convient d’ajouter i c i , d’après Dixoït
& le capitaine Marchand, des détails fur une
cafte particulière, qui ont pu échapper à un premier
examen, & qui offrent, dans le moral comme
dans le phyfique, des nuances remarquables &
des paffages intéreffans d’une variété à l’autre de
l’efpèce humaine.
De hautes montagnes ferment de toutes parts,
comme nous l’avons déjà dit, la baie de T chin-
kitané, & il eft vraifemblable que la neige qui
en couvroicles fommets eft une neige perpétuelle
} car à l’époque où le capitaine Marchand y relâcha,
les feux de la canicule & une pluie abondante
, qui ne ceffa de tomber pendaat le féjour
qu’il y f it , n’a voient pu la faire totalement difpa-
roître } il en reftoit encore beaucoup fur les montagnes
les plus élevées, qui cependant offroient
des forêts d'arbres jufqu'à leur cime. Une neige
qui réfifte à l’ardeur du foleil d'été & à la chute
des pluies} une forêt dont l'oeil ne peut atteindre
la limite, & qui fe prolonge dans la profondeur
des terres } des fommets enveloppés de nuages
1 dont ils fufpendent la marche , tous ces phénomènes
annoncent que, dans ces climats, le règne
de l’hiver eft long & rigoureux} mais l’homme,
le fêul être dans la nature qui réfifte également
aux feux de l’équateur comme aux glaces du pôle ,
brave ici les frimats & la neige comme les animaux