peut plus être diftinguée de la terre ferme ; elle
était cependant, du tems des Romains, féparée
par un canal profond, large depuis un mille 8c
demi jufqu'à quatre.
Après qu'on a pàffé le haut promontoire de craie
du North-Foreland, on voit s'ouvrir l'embouchure
de iaTamife, enfermée dans fon lit par des terres
très-bafles, & dont l ’entrée eït partagée par de
.nombreux bancs de fable.
Sur les côtes deSuffoik 8c de Norfolk s'élèvent,
par intervalles , des éminences compofées de différentes
fubftances pierreufes ; les collines paroiffent
autour de Leoftoife, Dunvich, 8rc. Les crag-pits,
vers .Woodbridge, font de prodigieux puits.de
coquillages de mer, dont plufieurs font entiers &
tout-à-fait folides, mais malgré cela fe décom-
pofent facilement j ce qui fait un fonds inépuifable
d'engrais pour les terres labourables des environs.
Vers Yarmouth, & depuis ce lieu jufqu'à Vinter-
Tonè ff, la côte eft baffe, plate, 8c compofée de
tuiles foutenues par le fable.
De Hapsburgn à Cromer eft une fuite de fa lai-
fes argilèufes, qui s'élèvent depuis cinquante jufqu'à
cent pieds de hauteur perpendiculaire , que
l'Océan fappe continuellement, 8c détruit de manière
à produire fur cette côte les plus grands
changemens. Vers Sherringham & Cley, la côte
eft formée de petites collines qui s'abaident doucement
jufqu’au rivage,, ferne de rochers bas &
de pierres ifolées. A Holkham-Vells & Warehaen,
les rivages fablonëux fe terminent en monticules
de fable, qui font fixés par le jonc marin : cette
plante arrête les inondations des fables, qui, fans
ce préfervatif, détruiroient de vaftes étendues dé
terre, & combleroient furtout les marais falans
qu’ ils protègent. Au milieu de ces amas de fable
s’élève le mont Hur.Jîanton : fon fommet eft couvert
de terre végétale ordinaire à un pied de pro-
fondeur. Sous cette terre eft une couche de deux
pieds de craie délitée, 8c réduite en morceaux
fort menus ; elle recouvre un maflif de la même
fubftance, qui a trente pieds d'épaiffeur ; il repofe
fur un banc de pierre rouge 8c dure, de quatre
pieds de profondeur. Succèdent enfiiite fept pieds
d’une pierre d'un jaune-fale 8c friable, placée fur
une bafe de poudingues ferrugineux qui s’étendent
jufque dans la mer, avec de gros fragmetis
épars fur le rjvage. Cette montagne a environ quatre
vingts pieds de hauteur, & elle eft placée à
Tentrée des marais. Depuis cet endroit toute la
c ô te , près Snettisham jufqu'à Lynn, eft baffe,
plate, & d’ un fchifte ardoifé.
Depuis Hoîm, qui peut être confidéré comme
le promontoire feptentrional de Norfolk, la mer ;
s’avance profondément à Toueft , 8c. forme la
grande baie nommée les marais 3 remplie de vafles
bancs de fable , dont la furface eft à fec dans la
marée baffe; mais les paffes intermédiaires fervent ’
aux batimens nombreux qui vont à Lynn. Cette \
ville eft fituée fur l’Onze, dont le canal fe prolonge
jufqu’au centre de l'île , 8cqui reçoit dans
fon cours un grand nombre de rivières fecon-
daires.! . ■ , - : ;
Le rivage oppofé eft celui du comté de Lincoln.
«Les grandes marées s'élèvent- de quatorze pie^ls
au quai de Boftoh, fitué fur la Wetham , à quelques
milles de la tête de la-baie. Les grandes marées/
y voiturent .des vaiffeaux de plus de cent
tonneaux ; ceux qui font au deffus relient au Scap,
qui eit l’ouverture du bras de mer. Ici les rivières
plates & peu rapides n'ont pas affez de force pour
creufer leur lit à une certaine profondeur. Le Lin-
colnshire & partie des fix autres comtés font les
pays bus de la Grande-Bretagne. Le premier eft
•borné à l'occident par un cordon de terre élevée,
qui, dans ce^pays plat, domine-d'une maniéré
très-marquée : cet éfpace, prolongé depuis Scap
jufqu’au promontoire nord oppofé à H ull, pie-
fente à la mer un front en arc régulier 8c fuivi,
; fans aucune brèche, 8c il eft fi bas,- qu'on ne 1 ap-
: perçoit de la mer qu'à une petite diltance. Toute
la côte a pour front des marais falans ou des collines
de fable, 8c de plus elle eft garantie par des
digues artificielles contre la fureur de la mer. Le
refte de la côte fe comble par les fables. -
Enfiiite vient un grand plateau, qui comprend la
divifîon de ce comté, nommé Holland, avec partie
de ceux deNorthampton, Norfo k , ( ambridge
8c Huntingdon, 8c qui peut avoir foixante milles
de longueur fur quarante de largeur : c'étoit, originairement
un pays couvert de bois, ©n y a trouve,
en creufant, des forêts entières de chênes , bien
au deffous du fol marécageux, 8c fur un fond io-
i-ide. Les chênes avoient quinze pieds de circonférence,
8c quarante-huit de longueur : la .plupart
étoient brûlés vers la racine , ancienne méthode
de les abattre. Un grand nombre d’autres étoient
couchés avec leurs racines , ayant été déracines
par la force de la mer, entrant avec violence.&
fubmergéant tout ce pays, qu'elle a couvert en-
fuite de limon dépofé à chaque fois qu'elle 1 inon-
doit. Sous Conington-Down, dans le Huntingr
donshire, on a trouvé un fquelette de baleine-
d'environ vingt pieds de longueur , qui fans doute
étoit vénue s'échouer dans l'ancienne baie.^
* Par la fuite des tems cette terre baffe a fubi une
autre révolution : le dépôt limoneux s’accrut tellement,
qu'il forma des efpaces defféchés confi-
dérables, & ne laiffa fur d’autres qu'une légère fu-
perficie d'eau 5 ce qui encouragea les Romains a
reconquérir entièrement fur la mer ces nouvelles
terres. Ce peuple infatigable ^conftruifit le premier
des digues de fable le long de la mer, &
écarta l'Océan de. ces terres précieufes que les
Anglais continuent de cultiver avec-avantage. 11
eft vrai cependant qu’après la retraite. des Romains,
comme on négligea d’entretenir leurs travaux,
& que les digues furent abandonnées .&
détruites en certains endroits,. tout devint un
marécage qui ne put fervir d’afyle qu'aux oifeaux
d’e a u , ou fervir de retraite aux aventuriers.
Ely 8c plufieurs* terrains- qui avoient l'avantage
d'être élevés au deffus des eaux , étoient pour
lors de véritables îles, & fervirent de-retraites
aux religieux. E ly , Tborney, Spiney 8c autres
lieux fe changèrent en abbayes fainetifes, 8c ce ne
fut qu'à cette époque que l'induftrie des habitans
commença la réparation des ouvrages des Romains.
De confiâmes vifites confervèrent ce pays, repris
fur les eaux, pendant quelque teins | mais par la
fuite le pays ayant été réduit de nouveau en un
marais inculte, il ne fut mis définitivement en valeur
que par les comtes de Bedford, qui prefer-
vèrent entièrement des inondations plus de trois
cent mille acres. ; •
Les vaftes marécages de ces comtés étoient
comme nous l'avons obfervé dans les premiers
tems, la terrai te des oifeaux d’eau ; mais par i'heureux
changement dont nous venons de parler, on
afubftitué à leur place des troupeaux nombreux,
parce qu'à de triftes rofeaüx ont hiccédé de belles
8c. riches moiffons, 8c des pâturages abondant.
La grue, qui jaciis venoit par troupes , a déferté
l’île entière. Le canard fauvage commun fait encore
fes pontes par milliers dans les parties qui
font reftées fous les eaux. La grande oie fauvage
y -fait suffi fa ponte, 8c y demeure toute l ’année.
Les combattans, les vanneaux, les barges rouffes,
les corlieux , les bëcafléaux aux jambes rouges, y
paffent l'été j mais en automne ils partent avec
leurs petits, 8c fe difperfent dans.l'île. Le hibou
à courtes oreilles Fait‘ici fes mi grations avec la be-
caffe, 8c c'eft un hôte bien accueilli par les ferr
miers, dont il purge les champs de fouris. Les
canuts fourmillent-fur les côtes en hiver, tems ou
l'on peut les prendre dans des filets, mais en été
on n'en voit plus.
Le Nord, plus reculé, eft fans doute l'afyle d’un
grand nombre d'oifeaux' d'eau qui viennent garnir
nGS rivages lorfqu'ils font chaffés par le froid
vers un climat plus tempéré; la plupart vifitent les
marais ou les côtes de la Grande-Bretagne régulièrement
tous les ans. D'autres, à «qui la nature a
donné la forcé de braver lés hivers ordinaires de
la zone glaciale, ne viennent vifitér cés contrées
que dans k-s années où le froid devient trop rigoureux
dans ces contrées.
Du Nés de Cled\z terre s’enfonce-à l’oûeft, & ,
avec le rivage oppofé du comté d’Y o rck , borne-
la grande baie ou bras de mer du Humber, qui,
s’introduifant par des fïnuofités très - marquées’
dans l’intérieur des terres, reçoit la Trent & tou-‘
tes les rivières confidérables de cette grande province
: quelques-unes prennent leur fource dans
les parties les plus.éloignées. Il paroît que toutes
les côtes du comté de Lincoln font plates, & ont
été conquifes fur la mer. Barton & Barrow n'ont
plus aujourd'hui la moindre apparence de ports ;
cependant Holinshead les qualifioit de bons.ports..
De. femblables acçidens font arrivés à la partie fupérîeure
du bas pays de Holderneff, qui eft en
face de ces rivages. Hedon, à quelques milles au
deffous de Hull3 étoit, il y a plufieurs fièélès,’ua
port très-commerçant, maintenant éloigné de là
mer d’un mille & demi ; mais, en revanche, la
mer s'eft bien vengée fur les parties voifines du
continent. La fituation, & jufqu'aux noms de plu-
fiéurs places, autrefois des villes de marque fur
l'Humber, n'ont plus la moindre exiftence. A leur
place on voit des bancs de fable fort étendus, qué
la mer découvre en baffe marée. Refte l'île Sunk3
q u i, vers l’an 1666 3 paroiffoit au deffus de ces
fables comme un écueil dominant : on la reprit à
cette époque fur la mer, en faifant des levées de
terre.
Le promontoire de Spurn termine ce côté de
l'Humber, & préfente aujourd'hui la forme d'une
faucille. L'endroit où font'élevés des fanaux eft
une berge d'environ deux milles de longueur, fur
quelques parties de laquelle fe trouvent des montagnes
de fables-que les vents de nier y ont accumulés
depuis foixante-dix ans. En partant de cet
endroit, la c ô te , pendant quelques milles , eft:
compofée de très-hautes falaifes' d’argile brune 3
que la violence continuelle des flots de la met
d’Allemagne ronge de manière à détruire des acres
de terre entiers, & jette fur le rivage des quantités
d’ambre confidérables. Dé beau froment croît
fur cette malle d'argile, jufque fur les bords des
fahifes. Un pays de la même,fécondité s'étend depuis
Kilnfey jufqu'au village de Sprotfly, fur une
fuperficie ondoyante de plufieurs lieues d'étend ue.
Du voifinage de Kilnféy la térre rentre, par une
douce courbure, dans l’intérieur de l’île , jufqu'au
grand promontoire de F'iamborough, n’elt encore
qu'une continuation d^ûne haute falaife d’argile,
jufqu’aux environs du village d'Hornfey. Près
de ce lieu eft une mare, fameufe par les anguilles
& les brochets qu'on y pêche, & qui maintenant
eft féparée de la mer par un fi petit éfpace, qu'il
eft probable que ce village fera bientôt détruit :
il y a déjà long-tems qu'une rue en a été engloutie
, & il ne refte qu’ un trifte fouvenir de Hide ,
qui étoit une ville voifine.
Le pays s'abaiffe confidérablemént, & près de
la bafe du promontoire il rentre fi profondément,
qu'il ferme la baie de Bridlington. Le banc de fable
de Smithié,, le feu 1 qui fe trouvé entre Flambo-
rough &'Spurn-Head, s’étend à tràvëfs: 'l’entrée
dé la baie de Bridlington , & dans les vents vio-'
léns du nord 8c du nord-eft il augmente encore'la
fureté de cet afyle’ pour les navires qui longent la
côte.
Le promontoire eft formé de pierre à chaux,
d’une blancheur éclatante comme celle dé la neige.
Près du fommet elle eft douce au toucher, tendre,
8c s'exfolie quand elle èft expo fée à la gelée au
i pied du promontoire elle eft'dure, folide 8c liffe.'
Des bateaux font employés tous les étés à en
• voiturer des quantités confidérables à Sunderland,1