
coquilles j dont les principales nous ont été apportées
d’Amérique , eft compofé de même que celui
des environs ae Paris, que nous connoifions bien
en détail. On a cru être autorifé , par Tétât de
confervation où fe trouvent ces coquillages fofli-
ies , à conclure que ces dépouilles des animaux
marins avoient été dépofées par l'Océan dans les
plaines du fud de T Amérique feptentrionale, à une
époque bien plus récente, que dans notre continent,
comme fi les amas de coquilles que nous
offre la France n’étoient pas dans le même état.
On ajouté même, pour appuyer une affertion aufli
hafardée, que les puits q u i, à une certaine profondeur,
donnent une eau douce & faine, fe
rempli fient d'eau faumâtre fi .on la dépafie, comme
fi on ne trouvoit pas, dans plufieurs parties intérieures
de l’ancien continent, des dépôts étendus
de fel marin, réfidans à une certaine profondeur.
Enfin on c ite , pour nous porter à croire la formation
récente a une.grande partie de l’Amérique,
les bords efcarpés des rivières qui montrent, à une
grande profondeur, des lits alternatifs de fable,
de: feuilles, de troncs d'arbres, qu’on confidère
comme les derniers dépôts; de l’Océan. Outre que
nous pourrions citer de femblables amas en .Franc
e , nous ajouterons qu'il y a grande apparence
que tous, ces lits peuvent être rangés parmi les
dépôts de rivières, qui n’ont rien de commun avec
ceux de l’Océan que les obfervateurs inftruits
peuvent feuis faifir les caractères qui les différencient.
A Rhode-Iftànd la mer elt bordée de fuperbes
rochers dé granit; à New-Yorck, à Helt-Gâte &
dans les environs on a le même fpe&acle.
On a rencontré les - mêmes maflîfs depuis la
pointe de l’Acadie jufqu’au cap Fear.
On retrouve même fouvent le granit au niveau
des fables, & formant la bafe qui les foutiéntfur
le rivage noyé des Caroiines, de la Géorgie & de
la Floride, jufqu’au cap Çarnaveral, & enfin la
côte orientale de L’Amérique du nord n’eft qu’ iine
très-belle bandp de granit, ou T a pour bafe.
En remontant «un peu au defius du niveau de
ces maffes granitiques, dans l’île de New-Yôrck,
dans l ’Etat de New-Jerfey, aux bords du Skuil-
kill, on trouve de grands lits de fchiftes micacés,
qui'carâCLérifent les maflifs de la moyenne terre.
La plupart- des marches inférieures des efcaliers
font faites de ces fchiftes; à. Philadelphie , & ;tous
les pafiages d’ûn.trotoir à l’autre en font pavés. /.
A la chute dé la Delàware, entre Trenton &
Morrifvijle, à trente-deux milles ou environ cinq
myria.mètres au deffus de Philadelphie, on voit à
marée baffe le banc de granit qui barre le fleuve,
& des deux côtés les fchiftes. adofles contre ce
banc.
A quelque diftance, en remontant, on trouve
fur du charbon de terre de grandes mafies,de gjès,
matière dont oxi ne rencontre au bord de la.,mer
que quelques morceaux de, médiocre Volurqe,
qui paroiffenty avoir été tranfportés par les eaux,'
Plus haut font des marbres gris & blancs, veinés,
de médiocre qualité, dont on fait beaucoup
d’ ufage à Philadelphie & à New-Yorck.
Le plat pays eft d’ un fable plus ou moins gras,
q u i, de place en place & dans les enfoncemens
qu’ il a fubis > eft couvert de marais tourbeux, affez
improprement nommés meadows ou prairies.
Ainfi voilà les granits prefqu’au niveau de la
mer, & lui fervant de barrière, furmontés par les
fchiftes qui le font eux-mêmes par les dépôts des
grandes eaux, par des collines, par des terres
évidemment plus modernes, mais toujours l’ouvrage
de la mer.
Il n’y a rien là qui contredife ce que nous voyons
dans plufieurs contrées de l’ancien Monde j car
nous y trouvons les granits au fond de plufieurs
vallées & au bord des baflins de l’Océan, & plufieurs
maffes & blocs de granit fe trouvent recouverts
de bancs de fchiftes, & ceux-ci par
des couches de pierre a chaux. Il n’eft pas étonnant
que la côte de l’Amérique méridiônalé, depuis
YOrenoque jufqu’ à RiogalUgo, dans un efpace
de. foixante degrés de latitude, foit plate & fan-
geufe, lorfqu’on a reconnu les caufes qui ont concouru
à la formation de ces dépôts de nouvelle
date , qui font ceux des fleuves & des rivières
côtières.
Epoques de la confiiciitioti.
Plufieurs écrivains ont cru que le fol de l’Amérique
aveit fubi des inondations plus récentes
que celui de l’Europe & même de l’Afie , & ils
fe fondent fur des confédérations qui m’ont paru
fort vagues : .ils nous difent, par exemple, que
le grand nombre de lacs •& d’ eaux marécageufeS
annoncent ces inondations modernes ; ils ajoutent
à cela le grand nombre de volcans dans les hautes
montagnes du Mexique & du.Pérou, une quantité
infinie de productions marines dans les pays
bas', & c.
D’ abord, je réponds que les lacs & les marécages
fe trouvent également dans l’un & l’autre
continent , ainfi que les volcans. D’ailleurs, fi les
volcans étoient une preuve de la nouveauté du fol
de l’Amérique, il faudroit confidérer de même
l’Italie , la Sicile, Tlflande^ le Kamtzchatka, les
îles de la mer du Sud , comme des pays que la
mer a quittés depuis peu j mais rien de tout cela,
n’eft prouvé. ■
Les productions marines, le§ coquillages, les
madrépores &r autres dépouilles des animaux marins
, en prouvant l’ ancien féjour de la mer fur
les continens, le datent à la même époque pour
l’ancien continent & le nouveau ; car fi Ton trouve
en .Amérique des, .lits d e coquillages à differ.ens,
niveaux & dan$ des rochers fort durs 8$ très-
étendus , nous en trouvons de pareils , & dans le,
même état, en Europe & en Afie : bien p lu sn ou s
àvons
avons découvert en Amérique les mêmes amas de
coquillages par familles, qu'en France & en Europe:
ce font les mêmes efpèces dans l'un & l’autre
continent, qui conftituent les amas des huitres,
des viffes , des bélemnites & cornes d’ammon.
Ainfi, lorfqu’on fuppofe que les différentes parties
de l’Amérique n’ont été abandonnées par la mer
que depuis peu de tems, ils ’enfuivroit que notre
continent n’ a été libre des eaux que dans les
mêmes circonftances; car toutes les obfervations
écabliffent cet accord & cette correfpondance des
mêmes événemens d’un continent à l’autre. Si les
premiers peuples de l’Amérique ont tous habité
les pays eleves de montagnes, ils ont eu cela de
commun avec les peuples des anciens continens.
On voit donc qu’il n’y a nulle raifon folide pour
confidérer l'Amérique comme un continent nouveau
& d’ une découverte poftérieure, par la mer,
à la découverte des anciens continens. Les mêmes
monumenSjdes opérations femblables de la nature,
le trouvent fur l’un & l ’autre} les mêmes dépôts
de la mer fur les parties baffes- & voifines des
côtes, les mêmes dégradations faites par les eaux
courantes, depuis la retraite de la m er} les mêmes
formes de vallées ou quebrades, au pied des grandes
montagnes, Scc. forment un enfemble de preuves
auffi nombreufes, auffi frappantes fur un continent
que fur l’autre, & établirent les mêmes agens &
l.i même durée de leur aêtion, la même organifa-
tion des terrains par couches, les mêmes* maflifs
originaires de granits & de fchiftes.
Je fuis toujours étonné que, dans Texpofition
des phénomènes que préfente la conftitution de la
terre au Pérou, D. UUoa infifte fur la diftinétion
de ces contrées d’avec toutes les autres, foit de
l’ Europe, foit de T Afie : il n’ a pas vu que ces
phénomènes peuvent être plus frappans au Pérou,
tant par les rapprochemens des lieux où fe trouvent
les contraires, que par les circonftances qui font
plus favorables à tel ou tel e f f e t t e l l e s font la :
hauteur des montagnes, leurs longues chaînes, la
légéreté de l’air, l’étendue & la continuité de$
pays froids, la quantité des eaux courantes, dont
T action eft continuellement favori fée-par la rapidité
des pentes, le jeu & l’empire des vents qui
régnent dans ces terrains voifins de la mer, &c.
Qu’on parcoure les pays femblables en Europe,
en Afie, & Ton trouvera à peu près les mêmes
phénomènes, qui font toujours en raifon des circonftances.
Lès larges & profondes vallées qu’on
rencontre fur les flancs des grandes montagnes des
Alpes, nereffemblent-elles pas, quant aux formes
des croupes ou bords qui les renferment, quant à
leur température & à leur culture au pied des
montagnes froides & incultes de la Suifle, des
monts Krapach, aux quebrades du Pérou ? Il eft
vrai que le nombre de ces quebrades, leur diftri-
bution fur une grande étendue de croupes, font
plus étonnans} mais cela dépend de la continuité
Uniforme des montagnes de la Cordillière,
Géographie- Phyjîque. Tome I I »
Le but de !axgéographie-phyfique eft de montrer
les phénomènes femblables, & de les rapprocher
plutôt entr’eux que d’ infifter fur les faits fin-
guliers, comme étant feuis j ifoles , merveilleux}
ce qui ne peut jamais exifter à un certain point
dans la nature, qui n’opère rien que par des lois
générales.
C L I M A T S ET T E M P É R A T U R E .
Rien n’eft plus difficile à foumettre à une def-
cription exacte que le climat de la divifion des
Etats-Unis de l’Amérique, qui occupent le centre
: ce font New-Yorck, New-Jerfey, la Penfil-
vanie, la Delaware & le territoire au nord-oueft
de l’Ohio, la partie qui avoifine la Nouvelle-Angleterre
leur .reflemblant fous ce rapport} mais
en général les autres pays que nous avons indiqués
offrent dans leur température les extrêmes les pli s
éloignés, les changemens les plus multipliés & K s
plus brufqués. Cela me paroît furtout vrai dai s
toute la partie fituée à i’ eft des Alleganys, & les
irrégularités dans la température augmentent à
mefure qu’on fe rapprocha de la mer. On a v u ,
dans ces contrées, le thermomètre de Farenhe t
varier de cinquante degrés dans vingt-fix heures;
des ouragans brifer les vaifleaux, déraciner les
arbres & découvrir les édifices,.& des fécherefles
i de deux mois entiers fuccéder à des pluies qui
fourniffoient fix pouces & demi* d’eau dans Tef-
pace de quatre heures} & ce qu’ il y a de plus remarquable
encore, les trois ou quatre mois de
Tété, qui font éprouver quelquefois des chaleurs
comparables à celles de l’Afrique, s’écoulent rarement
fans que le thermomètre y defeende jufqu’au
degré de la congélation. En Penfilvanie onjie pafie
jamais 4’êté à la campagne fans y voir les traces
de lavgelée dans tous les mois, excepté en j uillet ;
ce qui prouve que l’intervalle entre le printems
ôt l’automne eft fort court.
Dans les mêmes lieux où la température biû-
lante de juillet rappelle le climat d’ Italie, la navT
ga.tion des. plus grandes rivières fe trouve toujours
fufpendue par les glaces de l’hiver.
Les fuites de la variabilité du climat fur la falu-
brité de l’ air font telles qu’on peut le conjeéturer,
c’eft-à-dire, que les maladies qui dépendent du
dérangement de la tranfpiration, y font plus communes
qu’ ailleurs ; mais * foit que l’habitude de
l’enfance affoiblifle l’influence du climat, foit que,
dans les étrangers adultes, ces inconvéniens foient
compenfés par des avantages de falubrité, qui
tiennent à d’ autres caufes naturelles, il eft certain
que la vie moyenne y eft auffi longue que dans les
pays les moins fujets à ces variations.
On a vu le thermomètre de Far^nheit à la baie
d’Hudfon s’élever, le 12 juillet, à 8y degrés, &
defeendre, au mois de janvier, à 45 degrés au
deffous de zéro. On a également obfervé que, le
6 juillet 1775, le vif-argent s’éleva iufqu’ à 5)?- de