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Vers l ’an 73 de l'ère chrétienne , ils formèrent
tine alliance avec le roi d’Hircanie, qui leur facilita
le paffage du détroit de Derbent pour exercer
leurs brigandages dans la Médie. Le/roi des Par-
thes ne fe crut pas affez fort pour oppofer une
digue à ce torrent qui fe répandoit dans les plus
belles provinces de l'Afie. Quarante ans après
cette expédition ils en tentèrent une nouvelle fous
Adrien 5 mais ils en furent chafles par Arrwn.
Après avoir effuyé ce revers ils tournèrent leurs
armes contre l'Occident.'-Gordien, alarmé de cette
irruption, marcha contr’eux avec ur.e armée qui
fut taillée en pièces par ces barbares dans les campagnes
de Philippes en Macédoine. Après cette
victoire ils s'établirent fur la rive gauche du
Danube.
A la fuite de la défaite de Gordien , les Alains
devinrent fi redoutableSj que des bords du Danube
ils ébranlèrent les provinces de l'Empire les plus
éloignées. Alors la domination des Plains s'étendit
depuis les plaines de la Sarmatie & les Palus Méo»
tides, jufqu'aux montagnes de Vlnde & des fources
du Gange 3 & tous les peuples compris dans cette
vafte étendue furent connus fous le nom d'Alains.
C'étoit peut-être moins parce qu'ils obéiffoient
au même maître 3 que par la conformité de leurs
moeurs & de leurs ufages 3 qu'ils portèrent le
même nom. •
Les Alains nomades, comme les autres Scythes
&.Tartares, n'avoient d'autres maifons que leurs
tentes & leurs chariots, qu'ils tranfportoient avec
leurs troupeaux dans les contrées les plus abondantes
en pâturages. Leur bétail étoit leur unique
richeffe 5 ils en mangeoient la chair & eabuvoient
le lait. Tandis que les femmes , les enfans, les
vieillards , étoient fédentaires fous des tentes, la
jeuneffe, qui n'avoit d'autre occupation que la
guerre, portcit les ravages chez fes voifins,et re-
venoit chargée de leurs dépouilles. Ammien Marcellin
prétend que, de tous les Scythes, les Alains
furent les plus humains & les plus ciyilifés : ils
refpe&oient le droit des nations & la foi des traités.
Conquérans fans être deftru&eurs, ils cher-*
choient à fertilifer les pays dont ils fe rendoient
maîtres. Leur taille étoit haute & régulière : cela
paroît d'autant plus conforme à la vérité, que les
Cîrcafîiensqui en defcendent,font encore aujourd’hui
célèbres par la. régularité de leurs traits, &
que c’eft parmi leurs femmes que les monarques
asiatiques cherchent les objets de leur amour.
Quoiqu’on confonde ordinairement les Huns
*vec les Alains, parce qu’ils habitoientà peu près
les mêmes contrées , il paroît qu’ ils formèrent
deux peuples diftinéts. L'hiftoire rapporte que les
Huns Bafckires firent une irruption dans la Sarmatie
afiatique, où ils trouvèrent les Alains, établis.
Ces barbares, jaloux de la profpërité des
anciens polTelTeurs, entreprirent de les dépouiller
de leurs terres, & ils biffèrent partout les veftiges
dê leur valeur brutale. 11$ firent un grand carnage
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des Alains, dont les uns fe réfugièrent dans^ les
montagnes de la Circaffie, où leur poftérité eft
encore établie aujourd'hui ; d'autres fe fixèrent
fur les bords du Danube, o ù , s’étant unis aux
Suèves & aux Vandales, ils ravagèrent conjointement
la Germanie, la Belgique & les Gaules.
Ils auroient pouffé pli s loin leurs brigandages >
mais ils ne purent franchir les monts Pyrénées, &
ils parurent fixés au pied de ces montagnes, d'où
ils portèrent les ravages dans les villes & les provinces
voifines. Un certain nombre de ces guerriers
de la faétion commune s'établirent dans les
Gaules, & furtout dans la Bretagne & la Normandie
, où leurs defcendans ont hérité de leurs
inclinations guerrières.
L’an 409 les troupes chargées de veiller à la
défenfe du paffage des Pyrénées arborèrent l’éten-*
dard de la rébellion. Utace, roi des Alains 3 profita
des circonftances pour entrer en Efpagne avec
les Suèves 8ç les Vandales, qui * partagèrent en-
tf'eux .ce's riches provinces : la Galiçe & la Bétique
échurent aux Suèves & aux Vandales;.la Lufitanie
& la province de Carthagène furent foumifes aux
Alains.
Un fpeélacle bien furprenant eft de voir un
peuple forti de la Sibérie traverfer une vafte étendue
de pays, fe fixer enfuite fur les bords de la
Méditerranée & de l'Océan, c'eft-à-dire , dans
des climats bien différens de ceux qu'il avoit primitivement
habités. Les peuples modernes , aufli
courageux , pourroient - ils réfifter à toutes ces
excurfions & à ces fatigues ?
Utace, maître pajfible de la Lufitanie, pouvoir
jouir- 3 fans, être inquiété, du fruit de fa conquête >
i mais dévoré d’ambition, il fuccomba à la tentation,
d’aflervir ceux qui l’avoient aidé à vaincre..
Les Suèves & les Vandales, attaqués par un allié
perfide, fe fortifièrent de l’alliance d'Honorius,
qui aima mieux les fecourir que de les avoir pour
ennemis. L'ambitieux Utace fut vaincu. Les débris
de fon armée fe réfugièrent dans la Galice ,
où ils. fe fournirent aux lois du vainqueur.. Ceux
des Alains qui n'avoient pas pris les, armes, fe rangèrent
volontairement fous la domination des
Suèves.
Un peuple qui n’avoit d'autre métier que la
guerre, et qui ne formoit plus de corps, de nation
, fut forcé de trafiquer de fon fang avec
l’étranger. Ainfi c'eft en qualité de mercenaires
qu’on les voit combattre dans l’armée de Rada»-
gaife contre Stilicon. C e fut encore fous ce titre
qu’ ils, formèrent le centre de l'armée à la bataille
qui fe livra dans les plaines de Châlons contre
A ttila , qui y^fit la fonefte expérience de leur va--
leur. Ce fut ainfi qu'après avoir été les fléaux
de l’Empire, ils en devinrent les défenfeurs. Ils,
combattirent? avec d’autant plus d’opiniâtreté
contre Attila, qu’ ils confervoient une haine invincible
contre les Huns, qui avoient chafle lent#
ancêtres de leurs pofieffions.. '
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Quand la Terre eut pris une conftitution nouv
elle, & que de nouveaux Empires fe furent formés
de celui des Romains, les Alains prirent les
noms des nations où ils trouvèrent des établifle-
mens. On a fouvent donné leur nom aux Maffa-
getes, aux Huns & aux autres brigands fortis du
Pont-Euxin, quoiqu’ on dût remarquer entre les
plains & ces barbares la même différence qu'on
trouve aujourd’hui entre les Tartares Calmoucks
ceux de la Crimée. Les Alains, dans le tems de
leur fplendeur, avoient donné leur nom à leurs
alliés & à leurs tributaires. Dans leur décadence
ils furent compris fous le nom de ceux qui les
avoient fournis. C ’eft une obfervation qu’on doit
faire en lifant l’hiftoire de toutes les nations nomades.
Tel avoit été autrefois le deftin des M'edes,
qui prirent le nom de Perfes quand ils eurent été
Subjugués par Cyrus,fouverain d’une province de
ce nom. Les Perfes à leur tour furent connus fous
le nom de Parthes, lorfqu’ils paflerent fous la domination
d’Arface, roi de la Parthie, petite province
qui donna fon nom à un des plus vaftes
Empires de l’Orient. ( V N om ad e s . )
ALAISE ville de France, fituée dans le département
du Gard, fur une branche du Garé°n :
elle fe trouve au milieu de plufieurs chaînes de
montagnes, dont les détails m’ont paru mériter
l’attention des naturaliftes. Ainfi pour rendre cet
article intéreflant, j’ai cru devoir rapprocher un
nombre confidérable d’obfervations lithologiques,
qui ont été faites par l’abbé Sauvage dans les
environs de cette v ille , 8c que j’ai vérifiées moi-
même en grande partie. Ces obfervations roulent
principalement fur les coquillages foffiles, fur les
différens fucs pétrifians & grains des pierres, fur
la fuite des divers maffifs , enfin fur les dérange-
mens arrivés dans les dépôts primitifs de la furface
du globe.
Ges fujets , diftingués fenfiblement les uns des
autres, fe trouvent liésâc diftribués par chaînes qui
renferment une continuité de fols de même nature,
& de foffiles de même grain. Cette divifion m’a
paru d’ailleurs fort remarquable 8c très-intéref-
fante pour la géographie-phyfique : on y'voit les
effets des changemens arrivés à la furface du globe,
8c dont nous nous fommes furtout occupés à l'art
ic leAggrégation. Il y a long^tems que l’hiftorien
de l’Académie des. fciences avoit prédit qu’à la
fuite de nos obfervations 8c de nos recherches,
on parviendrait à connoitre l’hiftoire, quoique fi
ancienne, des révolutions du globe, & que les |
naturaliftes en fourniraient lés mémoires & les i
pièces juftificatives* f
Les chaînes dont il eft iei parlé, ont toutes, à j
peu dechafe près, la même direction, qui eft celte j
du nord-eft au fud-oiuft» elles font outra ceki .t
toutes à> côté les unes des autres : aucune n a au
delà d’un quart de lieue de largeur j la plupart-en >
ont moins, & pour leur longueur ou sïtî-a u-mvi |
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qui ont jufqu’à dix lieues. On comprend dans ces
chaînes3~ non-feulement les rochers, mais encore
leurs débris avec la chaîne qui les environne,
parce que la nature de celle-ci eft la même, dans
une chaîne quelconque , que celle des rochers ,
& qu’ ils paroiffent avoir eu pour principe I’un^ 8c
l’autre une maffe commune, dont une partie s'eft
confolidée pendant que l’autre a éprouvé une certaine
comminution : il faut en excepter feulement
les terres qui ont été mêlées avec les débris an*-
nuels des plantes & des animaux.
'Cette efpèce de terreau ne s'étend qu'à quelques
pieds de profondeur dans les endroits qui
n'ont pas éprouvé des accroiffemens ou des enléL
vernens notables : dans les autres, tels que les
environs des ruiffeaux & des rivières, il faut creü^
fer plufieurs toifes, percer différentes alluvionS,
pour pénétrer jufqu’aux terres qu’ on peut appeler
natives, qui apartiennent aux rochers renfermés *
dans les entrailles de la terre.
Première ckaîhe.
Elle eft la plus éloignée d’Alais & à environ
deux lieues de diftance. Le rocher tendre & calcaire
, dans lequel on a creufé de profondes carrières,
eft difpofé par lits fe trouve d'un blanc
éblouiffant. La pierre de taille qu'on en tire, connue
fous le nom de navicelle , fe travaille aifement
au fortir de la carrière, lorfqu’elle eft encpre fraîche
j mais elle acquiert enfuite une grande dureté
lorfque l’humidité qui en écartoit les differentés
parties, s'eft évaporée. C ’eft une propriété commune
à toutes les pierres qu'on a extraites^ de
quelque profondeur, pourvu qu'elles foient pénétrées
de fucs pierreux qui en lient les différens
principes.
On diftingue très-bien Ces fucs pierreux dans
les rochers de navicelle | au moyen de certains
noyaux qui fe trouvent diftribués dans les couches,
& dans lefquels ce fuc fe trouve criftallifé. Cçs
noyaux, qui réfiftent aux marteaux des tailleurs
de pierre, ne font que dels coquillages que la pétrification
a-défigurés. Le tefi^ des coquilles s.eft
changé en une matière fphatique qui en a- pris
la place.
Seconde chaîné.
Cette chaîne , qui vient immédiatement après
la première, & qui fe rapproche d’Alais de même
que les fuivantes, paffe à Ners & à Mons. Les
rochers qui y régnent dans toute la longueur, ont
une codlitution uniforme 8c de même grain, juf-
qffà une fort grande profondeur -, ils donnent lin
mauvais, vnâ. bre blanchâtre, par lits de différente
• él5*ifi*ur - 'qui ne fe féparent les uns des autres
difivvëc p&ine. Ces lits- ne font tiffus que d’un
aùv.is vsrodiq*eux de petits coquillages, parmi lef-
tiu-is'lrs tèViines paroiffent dominer très-fenfible-
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