
vï D I S C O U R S
- » Quoi, monfieur , dit le pédant Lyfidas, la protafe, l’épitafe & la péripétie.........
- D o r a . n t e .
” Ah .monfieur Lyfidas , vous nous aflbmmés avec vos grands mots ! Ne paroiffbz
» pomt li Javant, de grâce; humanifez votre difcours, & parlez pour être entendu.
I « nie z- vous qu un nom grec donne plus de poids à vos raifons ? & ne trouyeriez-
1 v °us pas quil fut aulîi. beau de dire l’expofition du fujet, que la protafe; le noeud
» que 1 epitafe, & le dénouement, que la péripétie ?
L y s i d a s .
33 font ternies de 1 art dont il eft permis de fe fervirw.
Lyfidas fe trompe ; cela n’eft permis que quand cela eft commandé ; mais auffi dans
ce cas , ce lermt un autre genre de pédanterie que d’éviter avec affeâation le mot
technique autorife par 1 ufage ; quand la convention eft faite , quand la règle eft établie .
il faut s y foumettre.
Ï 1 en eft de même des termes du Blafon & de fa fyntaxe particulière. La convention
elt laite , il faut la fuivre. Apres tout , les fciences font bien auffi fouvent le réfultat des
conventions arbitraires des hommes que de leurs connoiffances réelles.
Un peut alléguer encore en faveur de la nomenclature-héraldique , qu'elle abrège .
& que (ouvent elle exprime en un feul mot, ce qui ne pourroit être rendu en termes
communs que par des périphrafes , raifon qui a fuffi pour charger de mots techni-
ques toutes les fciences & tous les arts.
Mais c eft fur tout par l’allégorie, c’eft par toutes ces chimères myftiques de lafcience
hiéroglyphique & fymbolique , que les héraldiftes ont défiguré & déshonoré le Blafon ;
ils 1ont traite comme les pédant traitent Homère & Mathanafius fa chanfon de pont-
neut, ils ont entendu fineffe atout, ils trouvent une lignification emblématique dans
les métaux, dans les couleurs, dans les fourures, dans les animaux, dans les plantes,
dans tous es meubles dont fe compofent les armoiries : l’un cite le Timée de Platon en
faveur de la couleur de gueules ; un héraldifte moderne s’écrie, avec le zèle & le ton
d un millionnaire : K» Impies, qui dans le coeur voudriez qu’il n’y eût point de Dieu
» pont vos remords , qui ne vous quittent point , vous font lentir l’exiftence, ap-
” P , ,®2 \ ° “ vrez les y eux>‘ que la cigogne vous faffie admirer par fa piété, celui dont
» elle eft ainfî que vous 1 ouvrage, & que fa reconnoiffimce vous infpire une fainte
” orreur de votre ingratitude ! ----Quoi ! vous régimbez contre l’Être fuprême qui
« vouSja tire des horreurs du néant, & vous voyez tous les jours la docilité du cheval
qui n a point d entendement ! »
1 Quand les allégoriftes trouvent un- lion , ou un aigle dans des armes , ils ont beau
je u , c elt la valeur , c eft 1 élévation du héros qui eft répréfentée ; mais quand ils y
trouvent la tete dun ane, le groin d’un porc, la gueule d’un loup ; alors ce n’eft plus
le héros , ceft un ennemi vaincu qu’on repréfente , & cet ennemi étoit un lâche ou
pn méchant ; mais cette explication a au moins deux inconvéniens, l’un que'rien n’in-
. dique quand 1 allégorie regarde le vainqueur ou le vaincu , l’autre qu’en aviliffimt le
vaincu on affoibht le mente de ta viftoire; en un mot, rien de plus ridicule que ces
explications, rien de plus arbitraire quç ces rapports ; n'ajoutons pas de nouvelles chi-
meres a un art quon accufe déjà d’être effentiellement chimérique ; mais auffi n’imputons
point a l art héraldique les folies des héraldiftes. ”
De quoi s agit-il dans les armoiries ? De fe diftinguer par un ligne quelconque • la
multitude & la variété infime de ces lignes prouvent que s’ils ont pu avoir dans forigine
quelque allégorie, ils 1 ont perdue par fucceffion de temps & qu’ils font devenus très-indfffé-
rens; y chercher aujourdhui lerafinement d’un , fens allégorique , c’eft imiter les fots nui
mettent de 1 efpnt partout, & qui n’ont jamais conçu la fimplicité. Les armoiries n’en
feront pas moms utiles pour netre qu'une diftimftion & non pas un emblème. Les diftinc-
tions fonL neceffaires dans un état, o u , par la conftitution, tous les hommes ne font
pas repûtes égaux , on ne peut s’en palfer par-tout où il y a de la nobleffe.
P R É L I M I N A I R E . vij
De quelque ceil enfin qu’une philofophie févère envifage la fcience du Blafon , les
nobles ne peuvent être indifférent; à ce; égard , & il ne feroit pas à délirer qu’ils le fulTent.
Quant à ceux qui ne jouiffent pas des avantages de la nobleffe, outre, qu’ils peuvent
les acquérir un jour, comihent auraient - ils le droit de négliger ou de méprifer ce qui
concerne un ordre qui , dans les monarchies, tient fi effentiellement à la conftitution
de l’état, & dont l’hiftoire eft la plus belle partie de celle de la nation?
Mais les diftinétions du Blafon font arbitraires- & frivoles ! Frivoles , fi l’on veut : il
faut pourtaat les connoître, & , fuivant l’expreffion d’un ancien, une curiofité honnête
ne les dédaigne point. Frivola hoec foriajjis. . . . videbwUur , fed tarnen honefla curioficas
e'a non rejpuit. Vopifc. in Aurelian.
Nous joignons ici le Blafon avec l’hiftoire, à caufe des rapports néceffaires que ces
deux fciences ont entre elles , & nous faifons cependant du Blafon un diétionnaire particulier,
parce que c’eft: une fcience à part & complette.
Noüs joignons au Blafon ce qui concerne les ordres de chevalerie hofpitaliers, militaires
& autres, tant à caufe des rapports généraux de la chevalerie avec la nobleffe ,
que parce que les ordres de chevalerie & les armoiries pourraient bien, avoir une origine
commuïte, les croifades. . . . . : ■
Quant i l’exécution , les articles de l’Encyclopédie & ceux du fupplément, forment
le fond de cet ouvrage , & cependant c’eft un ouvrage prefque entièrement nouveau ,
foit parafa multitude des articles ajoutés, foit par les retranchemens & les changemens
faits à la plupart de ceux qui font reliés ; lorfqu’on a confervé en entier quelques articles
importans, on en avertit, ou en le déclarant exprelfément, ou en laiffant fubfifter au
bas de ces articles la marque qui défîgne leurs auteurs.
Dans l’Encyclopédie, la liaifon fi néceffaire du difcours avec les planches avoit été
entièrement négligée , ou plutôt le difcours & les planches avoient été faits féparément,
& on avoit ajouté après coup, pour les planches , une explication entièrement étrangère
au difcours ; nous, employons les mêmes planches ; elles nous ont paru fuffire ;
nous n’y avons fait que quelques légers, changemens que le temps rendoit néceffaires
, & dont les raifons feront ou évidentes par elles-mêmes, ou expliquées; à
chaque article , nous prenons ordinairement pour exemples ceux que préfentent les
planches, & cependant nous laifîbhs quelquefois fubfifter une partie de ceux qui étoient
déjà cités & qui ne fe trouvent point dans les planches, mais qui s’expliquent aifémen*
par leur reffèmblance avec ceux des planches , & qui en augmentant le nombre .des
exemples, enfeignent de plus en plus à blafonner, qui d’ailleurs dévoient fouvent être
confervés par des confidérations particulières; :
On ne fera pas furpris de voir revenir, plufieurs fois ün même exemple dans differens
articles'&:pour. des mots différens ; comme le mot de l’article eft toujours fous-Iigné,
l ’attention dujleâeur eft particulièrement fixée fur le mot pour lequel l’exemple eft
c ité , ;& ce.mot,;dans un-même exemple, eft tantôt l’ùn, tantôt l’autre,
■ A la faite des planches: de l’Encyclopédie , nous plaçons celles du fupplément ; ces
dernières ne font qu’au nombre de fîx, 8t ne feront qu’un avec celles de l’Encyclopédie.
No,us avons , fait difparoître entièrement, pour les raifons expofées plus haut, ces
allégories arbitraires & forcées , dont prefque tous les livres héraldiques font remplis.
Des:traits d’hiftoire choifis & bien placés font l’ornement naturel d’un ouvrage , tel
que celui-ci ; il faut, alors qu’ils fe rapportent uniquement aux armoiries, qu’ils en montrent
l’onigine ou les changemens., qu’ils^.rendent raifon de ce quelles peuvent avoir
d’honorable ou de rèmarquable ;; non feulement nous avons confervé ces fortes de traits",
quand nous en avons trouvé, mais nous en avons ajouté plufieurs. Nous en avons auffi
retranché beaucoup par une raifon contraire. C ’eft afliirément prodiguer l’hiftoire, &
dénaturer les genres, que de raüonter dans un diélionnaire de Blafon l’hiftoire perfon-
nelle d’un miniftre, d’un général ,, fans aucun rapport héraldique , & uniquement parce
qu’il étoit d’une famille dont on cite les armoiries pour exemple de quelque pièce ou