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humeur dure & chagrine qui nuifit beaucoup à fa '
fortune ; c’étoir une raifon de le blâmer ou de le
plaindre , mais non pas de le rendre" ridicule.
La traduction que Cafiandre a faite de la ! hé torique
d’Ariflote, eft fort effimée. Il a aufli traduit
les derniers volumes de l’hiffoire de M. Th on ,
que du Ryer n’avoit pas traduits. Quant aux vers-,
pour lefquels on dit qu’il avoit du talent, il ne
relie rien de cette mufe fertile qui amufa f i longtemps
6» la cour 6* la ville.'
Boilçau dans une lettre à M. de Maucroix parle
de la mort de Cajfandre, & la compare à- celle
de la Fontaine arrivée vers le même temps en
1605. La Fontaine étoit mort pénitent 8c dévot;
« la grâce, dit Boileau, ne paroît pas s’êt.e ré-
» pandue de la même forte fur le pauvre M. Caf-
» fa n d r e^ qui eft mort tel qu’il a vécu ; c’eft à fa voir
» très-mifanthrope, & non-feulement haïfiant les
» hommes, mais ayant même affez de peine à fe
» réconcilier avec D ieu, à qui, difoit-il, fi le rap-
» port qu’ofl m’a fait eft véritable , il n’avoit nulle
obligation.
On dit en effet que mourant de misère fur un
méchant grabat, & fon confeffeur l’excitant à l’amour
divin par la confidération de la bonté de
Dieu, des bienfaits que nous en recevons tous -&
qu’il en avoit reçus comme les autres , Cajfandre
s’écria : ah 1 vraiment oui, parleçrmoi de fes bienfaits !
ne lui ai-je pas de grandes obligations ? vous fa,ve%
comment il ni a fait vivre ; vous voye^ comment il me
fait mourir ! ■
Caffandre-Fidtle, favante Vénitienne, eftimée,
honorée des favans 8c des grands fouverains de
fon temps, tels que- Jules I I , Leon X , François I ,
l’empereur Ferdinand : on a d’elle des lettres &
des difcours. Elle mourut âgée de 102 ans en
156 7, ayant vu quinze papes, .
CASSARD (Jacqu e s ) ( f fijl* de F r i) , marin qui
auroit autant de réputation que les duGué-Trouin
& les Jean Bart, fi fon humeur dure & fauvage
n’avoit terni fes bonnes qualités & nui à fa gloire
& à fa fortune ; il s’étoit diftingué en 1697, à l’expédition
de Cartbagène fous M. de Pôîntis; il fut
dans la guerre de 17Q1 la terreur des Anglois 8c
des HolTândois fur les mers & dans leurs colonies.
An Si indocile que brave, ïl fe refufoit à toute fu-
bordination & à toute difcipline. Employé feul, il
eût été très-ùtile. Ayant joint par les ordres de
la Cour , fon efcaçke à celle d’un officier d’un grade
fupérieur, il l’en détacha de fon autorité privée
pour fondre fur une flotte; angloife qu’il rencontra
& que le commandant vouloit éviter ; fa défobéif-
fance fut fieureufe, il enleva deux vaiffeaux de la
flotte angloife. Cependant fur Jes plaintes du commandant
François , la cour témoigna du mécontentement
à Cafard; celui-ci va trouver le commandant
: vous fave^ écrire , . lui dit-il, voyons fi
_ vous fave^ vous, battre. On lui fit comprendre que
tomme la folie du duel fouffre pourtant quelques
pglkiftipns raifonn^bles ? il étoit reçu qu’on ne fe.
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battoit point pour les conteftations qui concernent
le fervice , parce que la fubordinatipn eftnéceffaire,
8c on l’obligea de faire fa paix particulière avec
fon fupérieur. La paix générale ayant rendu fes
fervices inutiles, les fit oublier au point, qu’ayant
fatigué le minifière de follicitations un peu ardentes
au fujet d’un armement qu’il prétendoit avoir fait •
pour la ville de Marfei lie , 8c que .cette ville refufoit
de lui payer , il fut enfermé au château de
Ham, où il mourut en 1740;. il étoit fils d’un
armateur de Nantes & étoit né dans cette ville en
1672.
CASSIM-GHEURI, ( Hiß. mod.) c’eft le nom
que, lès Turcs & les Grecs levantins donnent à la
fêté de faint Démétrins, Ce jour efi: fort redouté par
les matelots & gens de mer, ils n’ofent jamais Te
hafarder à tenir la mer ce jour-là, & font toujours
en forte d’être dans le. port dix jours avant que
cette fête arrive. ( A. R. )
CASSINI (Jean-Dominique& Jacques) {Hiß.
litt, mod.) le premier efi allez connu par le bel
éloge qu’en a fait M. de Fontenelle, à- l’académie
des fciences, dont M. Cafiini fut un des plus illufi
très membres ; par la méridienne de S. Pétrone ;
par celle de l’obfervatoire de Paris , qu’avoit
commencée M, Picard , 8c. que M* Caffini continua
du côté du lud, comme M. de la Hire du
çôté du nord ; par la découverte des fatellit-es
de Jupiter , événement qui a paru aflez important
dans l’hiftoire de Louis XIV , pour qu’une médaille
en confaçrât la mémoire ; par fon traité de la comète
; par tous les progrès que lui doit l’aflrono-
mie.
Né à Périnaldo dans le comté de Nice le 8 juin
1626, attaché à la ville de Bologne par une place
honorable, 8c par les fervices mêmes qu’il avoit
rendus à cette v ille ,il arriva à Paris au commencement
de 1669. » appellé, dit M. de Fontenelle,
» d’Italie par le roi, comme Sofigène, autre aftro-
» nome fameux, etoit venu d’Egypte à Rome,
v appellé par Jules-Céfar. Le roi le reçut, 8c
» comme un homme rare, 8c comme un étranger
» qui quittoit fa patrie pour lui «.
Il mourut le 14 feptemdre 17 12 , âgé de quatre-^
vingt-fept ans 8c demi, » fans maladie, fans dou-i
n leur, dit M, de fontenelle, par la feule nécefi
» fité d,e mourir n. Il avoit perçîu la vue dans les
dernières années de fa v ie , malheur qui lui a été
commun avec Galilée. » Les cieux, dit encore M.
de Fontenelle, » les deux qui racontent la gloire
» de leur créateur, n’en avoient jamais plus parlé
*> à perfonne qu’à lui, 8c n’avoient jamais mieux
» perfuadé «.
Jacques Casçini, fon fils , foutint la gloire de
fon nom. On a de lui des élémens d’aftronomie ;
un traité de la grandeur 8c de la figure de la terre.
Il étoit aufli de l’académie des fciences, 8c il y a
plufieurs bons mémoires de lui dans lé recueil de
cette académie ; il fit en 1733 8c 1734 des travaux
importpRT relatifs à |a méridienne. Il mounq ën
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ï 7 56 à quatre-vingt-quatre ans dans fa terre de I
. Thury, près de Clermont en Beauvoifis, 8c il ;
mourut d’accident à cet âge ; il verfa dans un mauvais
pas, 8c mourut des fuites de cette chûte.
Le nom de Cafiini fubfifte encore aujourd’hui
avec gloire dans l’académie des fciences.. .
CASSIODORE, ( Hijl. du Bas-Empire ou des
I Goths. ) Le nom de Cajfiodore a été ennobli par plufieurs
grands hommes qui l’ont porté ; il femble que
le mérite fût héréditaire dans cette famille,originaire
de la Calabre, qui fournit des fénateurs éclairés 8c
.vertueux à Rome 8c à Conftantinople. Le premier
qui figure dans l’hiftoire fe diftingua par fes talens
militaires, 8c fur-tout parle carnage des Vandales
qui avoient fait une irruption dans l’Abruzze 8c la
Sicile. Ses victoires Pappelloient aux premiers emplois
; mais fa modération l’élevant au-defliis des
promeffes de la fortune, il aima mieux paroître
digne des honneurs que d’en être revêtu. Son fils,
digne héritier de fes vertus , fut également propre
à la guerre' 8c aux affaires. Valentinien III lui
.confia une portion de l’adminiftration publique,
8c il eut lieu de fe féliciter de fon choix. Le farouche
Attila, arbitre du deftin de lltalie , mena-
çoit d’envahir les plus riches provinces de l’empire.
Valentinien, trop foible pour l’arrêter dans le cours
de fes conquêtes, fe fervit de la dextérité de Caf-
fiodore dans les négociations pour détourner ce
fléau des nations. Il le choifit pour fon ambaffadeur
.auprès de ce roi barbare, accoutumé à parler aux
rois comme à des efclaves.. Cajfiodore eut à efluyer
fes hauteurs infultantes ; mais il oppofa une indifférence
dédaigneufe à ce coloffe d’orguèil, 8c fes
réponfes fières fans être outrageantes, donnèrent
au barbare une haute idée des. forces de Valentinien.
Attila, dépouillé de fa férocité, adopta un
fyftême pacifique , 8c conçut tant d’eftime pour
l’ambaffadeur, qu’il lui demanda fon amitié.'' L’empire
recueillit avec reconnoiffance le fruit de cette,
négociation ; l’empereur voulut reconnoître fes fervices
par des terres 8c des dignités qu’il eut la gé-
nérofité de refufer ; 8c content de la fortune, il fe
crut aflez récompensé par la gloire d’avoir défendu
l ’état. Il fe retira dâns une contrée délicieufe de
l’Abruzze, pour y jouir de lui-même ; il mourut
dans le château où il étoit né.
Le petit-fils 8c le fils de ces deux illuffres citoyens,
fut Magnus-Aurélius Cajfiodore qui gouverna
l’empire des Goths ,, fous Théodoric, 8c qui
marcha encore avec plus de gloire dans le fentier
tjVyr, lui avoient tracé fes pères, Il fortoit à peine
rie l’âge de puberté , lorfque le roi Odoacre le
nomma combe des facrées largefles. Cet emploi,
qui répond à celui de contrôleur-général des finances
, lui fournit des oççaftons de faire éclater fon
défintéreffement ; il n’ouvrit les tréfors de l’état
qiie pour faire germer l’abondance. Après la mort
d’Odoacre , afîafliné par l’ordre de Théodoric,
Cajfiodore dçyjnt le favori du nouveau roi ; 8c il
mérfia çette confiance, en retenant dans la fou-
fflflaire, Tom, /, Deuxieme Part^
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million les- Siciliens, follicités..à la révolte par
l’empereur Anaftafe. Il fut récompenfé de ce fer-
vice pair le gouvernement de la Lucanie, qu’il
contint dans l’obéiffance. Un fecrétaire d’état ayant
abjuré la foi catholique j pour embraffer l’Ària-
nifme que profeffoit fon maître, paya cher fon
infidélité ; Théodoric, au lieu de lui favoir gré
de cette complaifance , lui fit trancher la tête, en
lui difant : Si tu n’as pas été fidèle à ton Dieu ,
comment feras-tu fidèle à ton roi, qui n'eft qu’un
homme ? Cajfiodore fut appellé à la cour pour occuper
fa place, où il réunit par fon affabilité , tous
les fuffrages. Son efprit cultivé le rendit cher à
Théodoric qui, quoique nourri dans la pouflière
du camp, en fecoua toute la rudeffe, 8c prit beaucoup
de plaifir à l’entendre difeourir fur toutes les
matières philofophiques, 8c particulièrement fur
i’afironomie. Cajfiodore n’ufa de fon crédit que pour
appeller les favans auprès du trône ; Boëce &
Symmaque furent revêtus d’emplois de confiance.
Quoiqu’il ne follicitât rien pour lui, il fut nommé
quefteur du facré palais „à l’âge de 27 à 28 ans.
Théodoric, en lui conférant cet emploi, dit : Je
vous donne une place, dont la naiffance ne peut
rendre digne ; c’en la fcience 8c la probité qui ont
diâé mon choix. En conférant les autres dignités ,
je fais un préfent ; mais en donnant celle de quefteur,
je ne confulte que mes intérêts 8c ceux de
mon peuple. Cette faveur fut fuivie d’une autre
l’année fuivante. Cajfiodore fut nommé maître des
offices du facré palais,.c’eft-à-dire, de la maifon du
prince 8c de la milice. Cette dignité le mettoit à la
tête de tous les citoyens, qui alors étoient tous militaires
; de-là il pafla à la charge de préfet du prétoire
d’Italie , qui lui donnoit le droit de commander
les gardes prétoriennes , dont il étoit le
juge fans appel; les prérogatives en étoient lés
mêmes que celles de l’emperëur, dont il étoit le
repréfentant ; 8c quoique déchus de leur ancienne
puiffance, les préfets fe montroient en public
traînés fur un char, ils avoient leurs officiers, &
leur jurifdi&ion fur les citoyens leur donnoit une
autorité plus réelle que celle qu’ils exerçoient autrefois
dans les armées. Ils nommpient aux charges
de tribuns 8c de fecrétaires, ils difpofoient du tréfor
de l’état 8c des fucceflions abandonnées : c’étoient
eux qui, dans les temps de famine, étoient chargés
d’approvifionner les provinces. Théodoric, content
de fes fervices, lui conféra le titre de patrice :
ce prince, en accumulant toutes les dignités fur fà
têtç, fe ménageoit des reffources dans fon miniflre.
Cajfiodore avoit hérité de riçheffes immenfes , qui
par la générolité de fon maître, le rendirent le
plus riche particulier de l’empire. Il n’ufa de fa fortune
que pour les befoins de l’état ; il fournit des
armés aux foldats; 8c fes haras nombreux furent
deftinés Ê remonter la cavalerie. La perfécution qui
s’éleva contre les orthodoxes ne lui permit pas de
foufçrire à des ordres qui bleffoient la religion ; U
s’éloigna de Ja copr, QU il fut rappellé par Théo