
logne, fils de Jagellon, fuccéda en 1444 à Ton
frere Ladiflas V . Il étoit à peine fur le trône qu’il
eut les armes à la main. Alexandre, vaivode de
Moldavie, chaffé de fes états par Bogdan, crut que
Cajîmir prendroit en main la défenfe de fou vaffal.
Il ne fe trompa point : Bogdan fut chaffé, reparut
à la tète d’une troupe de brigands, difparut une
fécondé fois, fut atteint dans fa fuite, figna un traité
qu’il viola le jour même, attaqua l’arinée Polo-
noife, fut vaincu, revint encore, & fut affaffmé.
Cependant la Prufle accablée fous le joug de l’ordre
Teutonique, appelloit Cajîmir, L’offre d’une
couronne, la gloire de délivrer des peuples opprimés
, le plaifir d’abattre un ordre orgueilleux, fi
long-temps fatal à la Pologne; tant de motifs réunis
conduifirent Cajîmir en rruffe, vers l’an 1457.
La fortune des armes fe déclara d’abord en faveur
des chevaliers ; mais la prife de Mariembourg, la
conquête de Choinicz, la défaite de plufieurs de
leurs détachemens , ébranlèrent par dégrés ce
coloffe qui menaçoit tout le Nord. L’ordre demanda
la paix, Cajîmir la lui accorda aux conditions les plus
dures. Culm, Miclou, & le duché de Poméranie,
retombèrent fous la domination Polonoife. L ’ordre
céda encore à Cajîmir, Mariembourg, Schut, Chrift-
bourg, Elbing 8c Tolkmith. Ce prince honora le
grand-maître & fes fuccefleurs du titre de confoil-
ler né du fénat de Pologne ; mais il leur vendit
cher cette faveur, dont ils étoient peu jaloux. Il
étoit réglé que le grand-maître, fix mois après fon
éle&ion, viendroit rendre hommage au roi pour
la Pruffe, & lui prêter ferment de fidélité , au nom
des chevaliers & de leurs vaffaux.
Cajîmir à fon retour eut la gloire de voir en 1471,
Ladiflas fon fils appellé au trône de Bohême, &
Ion fécond fils Cajîmir, couronné roi de Hongrie.
Il mourut peu de temps après. Ce fut un homme
célèbre 8c non pas un grand homme. Il termina,
il eft vrai, par l’abaiffement de l’ordre Teutonique ,
une guerre qui, deppis deux fiècles, avoit fait, des
frontières de Pologne & de Pruffe , un théâtre
de carnage ; mais fes fujets gémirent fous le fardeau
des fubfides ; & s’il les rendit redoutables,
il ne les rendit pas heureux. ( M. D e Sa c y . )
Casimir V . {H1 fi- de Pologne J) roi de Pologne.
Ce prince fut un exemple fingulier des bizarreries de
la fortune & de celles de l’efprit humain. Uladiflas,
roi de Pologne, fon frère, l’envoya en Efpagne l’an
1638. Cette puiflânee étoit alors en guerre avec
la France. Cajîmir, à la fois négociateur & général,
devoit conclure un traité d’alliance entre Uladiflas
& Philippe I I I , & prendre le commandement
de la flotte qui devoit détruire le commerce des
François fur la Méditerranée. Forcé par les vents
à relâcher fur les côtes de Provence, il promena
dans Marfeille & dans Toulon des regards curieux
qui devinrent bientôt fufpe&s. Il n’avoit point de
paffeport; on faifit ce prétexte pour s’aflurer de
la perfonne. Il demeura deux ans en prifon. La
cour de Pologne ne ceffa point de négocier pour
fa délivrance qu’elle obtinten 1640. Celle de France
craignoit que malgré fes formens, il n’allât fe joindre
aux Efpagnols pour fe venger; celle de Var-
fovie s’attendoit à le voir revenir prendre poffef-
fion des états qu’on lui donnoit en apanage. Toutes
deux fe trompèrent. A peine échapé de prifon,
Cajîmir fe jetta dans un cloître, & fe fit jéfuite à
Rome. Si cette révolution fut le fruit des réflexions
qu’il avoit faites fur le néant des grandeurs pendant
(a captivité , fa philofophie s’évanouit bientôt, &
l’ambition fe réveilla dans fon coeur. Ne pouvant
plus briguer une couronne, il brigua un chapeau
de cardinal 8c l’obtint. A peine ctoit-il reçu dans le
facré collège, qu’Uladiflas mourut. Le jéfuite conçut
alors de nouveaux projets de grandeur, brigua les
fuffrages de la diette 8c fut élu. Le pape le releva
de fes voeux : il laiffa fon chapeau à Rome, 8c alla
prendre la couronne à Cracovie, l’an 1648. Les
Cofaques s’étoient foulevés 8c avoient porté le ravages
fur les frontières ; les injuftices que leur chef avoit
effuyées, avoient allumé les premières étincelles de
la guerre. La nobleffe excita Cajîmir à venger la Polo-
» gne. « Vous n’auriez pas de crimes à punir, répon-
» dit le ro i, fi vous n’en aviez vous-même donné
» l’exemple aux Cofaques. On perd le droit de châ-
» tier les coupables, quand on le devient foi-même».
Cette réponfe étoit belle, mais le mal étoit pref-
fant & il falloit plutôt fonger à défendre les Polonois
qu’à les haranguer ; déjà les Cofaques avoient gagné
une bataille; Bogdan Kmielnieski s’avancoit à la tête
d’une armée triomphante. Cajîmir, qui n’avoit point
encore raffemblé les forces de la république, lui
propofa une trêve, le reconnut général des Cofaques,
& parut moins donner la paix aux rebelles,
que l’accepter lui-mème.
Les Cofaques n’attendirent pas qîour rompre la
trêve, qu’elle fut expirée. Ils entrèrent en Pologne,
caufèrent de grands ravages, gagnèrent de»
batailles, prirent & brûlèrent des villes, & vinrent
les armes à la main demander une amnifiie &
la confirmation de leurs privilèges que Cajîmir n’ofa
leur refufer. La guerre ne tarda pas à fe rallumer.
Les Polonois avoient appris dans leurs défaites la
maniéré de combatre des Cofaques ; ils triomphèrent
enfin de ce peuple indocile, l’an 1651. Jean
Cajîmir combattoit au premier rang dans la bataille
qu’il gagna contre eux. Mais bientôt la nation
fecouelejoug, eft châtiée de nouveau, fe révolte
encore, le ligue avec les Ruffes, fait avec fes alliés
une irruption combinée en Pologne. Elle eft fécondée
par les Suédois; Jean Cajîmir fait des voeux,
met fes états fous la proteélion de la Vierge , tandis
que fes ennemis les ravagent; il fit alliance
avec l’éleâeur de Brandebourg qui, en devenant
fon ami, ceffa d’être fon vaffal, acheta à vil prix
l’indépendance à laquelle il afpiroit, & vendit fort
cher à la Pologne le foible appui qu’il lui promet-
toit. Ce traité n’empêcha pas les Ruffes, les Cofaques,
les Tartares & les Suédois de continuer
leurs ravages. Tandis qu’ils pénétroient dans la
Pologne, Cajîmir, au lieu de repouffer les ennemis
de l’état, ne s’occupoit qu’à détruire les hérétiques,
affoibliffoit l’armée de la république, en ne recevant
que des foldats catholiques fous fes drapeaux.
Il chaffa les Sociniens, & oublia que parmi eux
il y avoit des artifans, des laboureurs oc des fol-
tlats; mais ce qui déplut fur-tout à la nation, c’eft
que cédant aux inftances de la reine fon èpoufe,
il voulut défigner pour fon fucceffeur Henri de
Bourbon, duc d’Enghien , fils du grand Condé.
»» On ne vous permettroit pas pour votre fils, lui
dit un gentilhomme, » ce que vous voulez faire en
»»faveur d’un étranger»». C ’étoit Lubormiski qui
avoit ofé faire au roi cette réponfe digne d’un
républicain : il avoit des ennemis;on lui chercha
des crimes , il fut proferit; Breflaw fut fon afyle:
il n’en fortit qu’à la tête d’une armée, battit les
royaliftes, rendit la liberté aux prifoniers, retourna
à Breflaw 8c mourut couvert de gloire. Sobieski,
vaincu par lui , apprit de fon vainqueur l’art
de la guerre, & remporta fur les Cofaques des fuc-
cès qui l’occupèrent plufieurs années ; dès que ce
grand homme paroîtliir la fcène, Cafimir ne paroit
plus qu’à l’écart dans le fond du tableau. Ennuyé
de ce rôle obfcur, il voulut devenir plus obfcur
encore & defeendre du trône. La république s’op-
pofa en vain, à ce deffein bizarre; il abdiqua l’an 1668,
vint en France, obtint l’abbaye de S. Germain des
Prés, celle de S. Martin de Nevers , 8c mourut
dans un doux loifir l’an 1672. C’étoit un des hommes
les plus vertueux & un des rois les plus foï-
bles dont Phiftoire ait parlé. Il ne fit dans fa vie
qu’un feuî choix conforme à fon caraéfère 8c à fes
talens, ce fut lorfqu’il fe fit religieux à Rome. ( M.
d e S a c y . )
àCASSAGNES. (Jacques ) {Hifi. litt, mod.) Il
n’eft connu aujourd’hui que parce qu’il eft décrié
dans un vers de Boileau, devenu proverbe en naifi
fànt. Il étoit garde de la bibliothèque du roi ; il
fut un des quatre membres de l’académie françoife
qui composèrent d’abord la petite académie, depuis
l’académie des inferiptions 8c belles-lettres. Il
avoit été reçu à l’académie françoife en 1662, U
mourut le 19 mai 1679, à S. Lazare où on avoit
été obligé de l’enfermer, fa tête s’étant dérangée
par l’excès du travail 8c peut-être par le chagrin
que lui caufa le vers de Boileau. Les auteurs faty-
riques ne favent pas tout le mal qu’ils peuvent faire
quand ils réufliffent. L’abbé Cajfignes n’avoit que
quarante-fix ans quand il mourut.
CASSANDRE, CASSANDER, (Hifi. de Macédoine)
fils d’Antipater; il ufurpa la Macédoine
après la mort d’Alexandre-le-Grand dont il perfé-
cuta la famille ; il- avoit époufé line foeur de ce
conquérant; il fit la guerre à Olimpias fa mère,
elle tomba entre fes mains 8c il la fit mourir, par
repréfailles de quelques cruautés qu’elle avoit
exercées fur des gens du parti de Cajfandre. Alexandre
le Grand avoit laiflè deRoxaneunfils, nommé
Alexandre comme lui ; Cajfandre redoutant fes
droits le fit périr ainfi que fa mère. Cet ufurpa-
teur mourut dans fon lit vers l’an 304 avant J. C*
il fut difciple de Théophrafte. Cassandre (François) (Hifi. litt. mod.)
c’e ft, dit-on, le Damon de la première farire de
Boileau. On ne peut pas dire qu’il y foit abfo-
lument maltraité; mais il étoit fi aifé de rendre
fa pauvreté intéreffante 8c refpeâable ! Boileau l’a
rendue ridicule par la defeription qu’il en a faite#
Cette première fatire de Boileau eft imitée de la
troifième de Juvénal ; Boileau met la critique de
Paris dans la bouche de Damon ou de Cajfandre,
comme Juvénal met la critique de Rome dans la
bouche d’Umbritius, que la pauvreté chaffe comme
Cajfandre du féjour de la capitale. Mais combien
le début de Juvénal eft noble 8c décent.
Quamvis digrejfu veteris confufus ami c i ,
Laudo tafnen vacuis qubd fedem figere Cumig
D e j l in e t , atque umun civem donarc Sibyllec.
C ’eft un ancien ami que fa mauvaifo fortune
oblige à quitter Rome; Juvénal le plaint, 8c fe
plaint lui-même de cette féparation ; il ne fe con-
fole qu’en fongeant aux agrémens du féjour que
fon ami a choifi pour afile, il fe confole par l’ef-
pérance que fon ami fora heureux ; voilà l’ami 8c
le poète d’abord ennoblis. Pour Boileau, on ne
fait s’il veut exciter la pitié pour Cajfandre ou in-
fulter à fa misère. Son ton demi-plaifant eft tout
à-fait équivoque..
Damon r ce grand auteur , dont la mufe fertile
Amufa- fi long-temps & la cour & la ville :
Maie qui n’étant vêtu que de fimpie bureau
Pafie l’été fans linge , & l'hiver fans manteau :
Et de qui le corps fec & la mine affamée ,
N’en font pas mieux refaits pour tant de renommée >
Las de perdre en rimant & fa peine & fon bien ,
D’emprunter en tous lieux , & de ne gagner rien ,
Sans habits , fans argent, ne fachant plus que faire ,
Vient de s’enfuir chargé die fa feulé misère :
•Et bien loin des fergens ,-des clercs , & du. palais ,
Va chercher un repos qu’il ne trouva jamais :
Sans attendre qu’ici la juftïce ennemie
L’enferme en un cachot le refte de fa vie 'r
Ou que d’un bonnet verd le falutaire affront
Flétriffe les lauriers qui lui couvrent le front,-
Mais le jour qu’il partit, plus défait & plus blême
Que n’eft un pénitent fur la fin du carême ,
La colère dans l’ame , & le feu dans lés yeux,-
11 diftilla fa rage en ces triftes adieux.
Si on a voulu rire, qu’y a-t-il de plaifant dans
une pareille fituation, for-tout quand il s’agir d’un
homme à qui les lauriers couvrent le front; fi on
parie ferieufemen£, pour uoi toutes ces expref-
fions de comédie l Cajfandre étoit dit - on r d ur.e