BEDA , (N oël) Dans le temps où Ieîutlïêra-
nifme commençoit à s’introduire en France , la
Sorbonne avoit pour fyndic Noël B edier, qui trou-
voit plus beau de s’appeller Beda, peut-être eu
mémoire du vénérable Bèdë. Théodore de Bèze
appelle tout finalement Beda , 8c un autre docteur
, nommé Duchefrie > deux großes .bêtes. Beda
étoit un de ces difputeûrs faits pour excitèr 8c pour
effuÿer des tempêtes ;=l'ëtrouble étoit fon élément,
fion pédantifme perfeçiitënr agitoit 8c foulevoit
fans cefle fön école tr i luifàlloit toujours quelque
ennemi a combattre , quelque viélime à égorger ;
îl veilloit tour-à-tour aux portes de l’erreur 8c de
la vérité, prêta dévorer indifféremment l’une &
l’autre proie; ce fut une bonne fortune pour lui
que la naiflanee des héréfiës de ce fiècle ; il cher-
choit des hérétiques, il en créoit avant qu’il y en
eut ; il ne ceffa de dénoncer, ni la Sorbonne de
cenfurer j elle eut à lui reproçhèr beaucoup de
décifions qu’elle n’eût jamais faites fans lui & qui
pourvoient la compromettre ; il vouloir qu’on brûlât
le doéleur Merlin, pour avoir effayé de juftifier
Origène , & Jacques le Fêvre d’Ètaples, peur avoir
cru voir trois Madeleines au lieu d’une dans l’évangile
; il fit condamner Erafme , il fit brûler Ber-
quin, ami d’Erafme , 8c ennemi des fcolaftiques ;
il vouloir faire ehaffer de la Sorbonne l’évêque de
Senlis , Guillaume Petit , parce qu’il étoit tolérant
& ami des lettres. 11 vouloit plus, il vouloit-faire.
flétrir, dans, les écoles un livre de piété de la
reine de Navarre , foeur de François L Ildéteftoit
cette princeffe, parce qu’elle étoit la perfonne lapins,
aimable, la plus indulgente, la plus bienfaifante de
fon fiêcle, parce qu’elle déroboit toujours quelque.
viélime aux fureurs de la perfécution , 8c. qu’elle-
difpofoit le. ro i, fon frère , à là tolérance. Les Pé-
dans la jouèrent dans leurs collèges Tans l’avoir jamais
vue ; ils la repréfentèrént conîme une furie ,
elle qui n’étoit que grâce 8c que douceur. François I
voulut venger fa foeur, qui ne vouloit point du
tout être vengée -y & qui obtint du moins.de ne l’être,
que foiblement. Beda fut envoyé pour quelque
temps en exil avec fes plus, zélés partifans. A fon
retour, il prêcha publiquement contre le roi,, qui
brûloit cependant les hérétiques, mais qui, félon
Beda y les ménàgeoit encore trop.. Cette infolence
fut punie du bannïffement ; il fut encore rappellé
& prêcha encore contre le roi ; il fut enfin condamné
à faire amende honorable dans ce même
parvis de Notre-Dame , où il avoit fait brûler plus
d’un livre hérétique. ..enfuite on l’enferma au Mont-
Saint-Michel, où il mourut le 8 janvier 1.537. On
remarqua que depuis fa prifon, & fur-tout depuis
fa mort, les cenfures de Sorbonne furent moins
fréquentes..
On peut penfer qu’un pareil- ennemi des lettrés
& de la raifon s’oppofà de- tout fon pouvoir au
renouvellement des lettres & à l’établiflèment du
collège roy al, qu’on appelloit alors le collège des
iXQis langues ; il foule.va TUniyerfité,. qui cita les
profefleurs royaux au parlement, 8c Beda fe chargea
d’y plaider lui-même là caufe de l’uni verfité».
« La religion , félon lui, étoit perdue, fi l’on en-
” fëignoit le grec & l’hébreu; l’autorité delà vul-
' ” gâte alloit être détruite : déjà l’on entendoit de
» toutes parts ces paroles fi fufpeâes : Ain f i forte
» le texte hébreux c'efi ainfi quon lit dans le grec
: » dès feptante. Mais ces gens étoïent-ils théologiens
» pour ©fier expliquer la "bible ? D’ailleurs les bibles
5» (dont ils fe fer voient, étoïent, pour la plupart,
» imprimées en Allemagne, pays d’hé'réfie, du-
» bien elles nous venoient des juifs «. Le parlement
ne prononça rien ; le collège royal fubfifta*
& s’aggrandit,
Marot, perfécuté aufli par la Sorbonne 8c par
Beda y faifit cette occafion clé faire caufe commune
avec les profefleurs royaux; il dit dans une épître
au roi, qu’il n’a (lui Marot) pour ennemis que
les pédans & les fanatiques ; puis il ajoute :
A u ta n t comme eux , fans caufe quî foit bonne
Me v eu lt de mal l’ignorante Sorbonne ;
Bien ignorante e lle eft d’être ennemie- .
D e la Trilingue & noble académie
Q u ’ as-érigée. I l e ft tout manifefte
Q u e là dedans , contre ton vueil' célefte-
E ft défendu qu’on ne voife alfégant
Hébrièü , ni grec , n i latin é lég ant :
Difant- que c’èft lang a ge d’ hérétiques.
O pauvres gens de favoir tout éthiques ï "
Bien faites v ra y ce proverbe courant.-:
Science nha.hayneux que l'ignorant.
BEDE, (dit le VÉNÉRABLE..) ( Hifi. d’Anglèt.
prêtre anglois, favant dans un fiècle d’ignorance ,,
oc qui doit fa réputation à ,cette circonftance, eft
principalement connu par fon Hïfioire ecclèfiaflique
d’Angleterre ; fés oeuvres ont été recueillies en 8:
volumes in-folio, qu’on relie ordinairement en 4 ;.
né en 673 ,. mort en 73 5-,
BEDEAU , f. m. ( ;Hifi. mod,-.) bas officier, fer-
gent, qui fomme les perfônnes de paroître ou dé
' répondre. Bedeau , fe dit. encore d’un officier fubalterne-
dans lés Univeffités, dont la fonction eft de marcher
devant le re&eur 8t les autres princip'aux Officiers,.
avec une niafle,dans toutes les cérémonies publiques.
Les- uns difènt que bédelli vient par corruption
de pedelli, parce que les bedeaux fervent 8c courent
à pié ; les autres font dériver cè. nom de:
pedo feu baculo , parce qu’ils portent Une baguette ;
ils for mentpedellus dé pedum , efpète dé baguette,
qui eft leur fymbole; 8c de pedellus, ils font le
nom bedellus. Il en eft qui s’imaginent en avoir
trouvé l’étymologie dans l’hébreuxée^/, ordonner
ranger, di/pofer. Spelman, Voflïus 8c Somner , dérivent
bedeau du Saxon bidel crieur püblic ; c’eft
dans le même feus que certains anciens manuferità
Saxons, nomment les évêques bedeaux de Dieu]
Del bedalli.
Le traduéleur du nouveau teftament faxon rend
■ exa&or, par bydele ; 8c ce mot eft employé dans
les lois d’Écoffe, [.our fignifier la même chofe.
Dans les églifes 8c paroifles on nomme bedeaux
de bas officiers laïcs, vêtus de longues, robes de
drap rouge ou bleu, portant fut la manche gauche
une plaque d’argent, ou un chiffre en broderie
, qui repréfente l’image ou le nom du patron
dejeette églile ; ils ont à la main droite une verge
ou baleine, garnie de viroles 8c de plaques d’argent
, précédent le clergé dans les ceremonies ,
& fervent à maintenir le bon ordre pendant l’office
, èn chaffant les mendians , les chiens,
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BEDFORD ou BETFORT -, ( Jean duc de )
( Hifi. d?Anglet.') frère du roi Henri V , fut chargé,
«près la mort de ce conquérant, arrivée le 31 août
j'4 2 2 , de la régence de la France, pendant la minorité
de Henri V I , proclamé à neuf mois roi de
France 8c d’Angleterre ; affemblage monftrueux de
deux feeptres ennemis dans la main d’un enfant. Le
duc de Bedford, que Henri V , fon frère, chargeoit
en mourant, de tyrannifer la France , -s’acquitta
très-bien de ce funefte emploi; la France ne pouvoit
guères avoir d’ennemi plus redoutable,8c fous fa régence,
les Anglois n’éprouvèrent aucun des hiconvé-
miens d’une minorité. Il attacha de plus en plus le duc
de Bourgogne au parti anglois ;■ il acquit, par des
moyens adroits, un autre allié confidérable,le duc de
Bretagne; il gagna, en 1423, la bataille de Crevant ;
en 1424, la bataille de Verneuil; il combla les
malheurs de Charles VII. Enfin la Pucelle d’O rléans
arrêta fes progrès ; le duc de Bourgogne fit
La paix avec la France, à Arras, le 22 feptembre
1435. Le 14 décembre fuivant,'arriva la mort du
duc de Bedford, Ligne 8c principe de décadence
pour les Anglois,' qui perdoient en lui un des plus
grands princes dont leur nation ptiiffe s’honorer.
L’Angleterre n’avoit point encore eu de général
plus favant dans fes opérations, ni de miniftre plus
conciliant dans les affaires. Il exécutoit avec la même
rapidité que Henri V , ce qu’il avoit conçu avec
plus de fageffe; il traçoit des plans, il les fuivoit,
fes fuccès étoient le fruit de fes combinaifons ; il
faifoit marcher enfemble la politique 8c la guerre,
les négociations 8c les hoftilités. Plufieurs de fes
expéditions furent à la fois des exploits brillans
& de grands coups d’état. Prudent, patient, fage,
modéré, jufte même, quoique défendant Une caufe
injufte, m favoit diriger , perfuader, calmer , ramener
, diffimuler. ; il avoit fallu toute fa dextérité
pour retenir fi long temps le duc de Bourgogne
dans le parti des Anglois, dont il brûloit de
fe détacher. Il eft trifte que tant de talens , 8c
même de vertus , n’aient été employés qu’à faire
le malheur des hommes. M. Hume dit que la mémoire
du duc de Bedford eft fans tache -, fi l’on ex-
&epte l’exécution barbare de la Pucelle d’Orléans ;
ttïalheureufement cette tache eft ineffaçable, 8c il
n’y a point de gloire qui n’en fût ternie. ( Voye^
A rç , Jeanne d’ ) Apprenons à redouter les haines
nationales & les préjugés qu’elles font naître, en
voyant dans quelles fureurs elles ont pû entraîner
un prince vertueux, 8c même éclairé ; gémiffons
fur un tel bourreau d’une telle héroïne ; veillons
fur nous-mêmes -, 8c défions-nous des pafîïons.
Le duc de Bedford fut enterré dans la cathédrale
de Rouen ; on lui érigea un tombeau. Rapin-Thoiras
raconte que Louis XI étant à Rouen à confidérer
ce monument, un courtifan françois propofa de
le détruire, parce qu’il rappelloit la honte de la
nation. « Refpeftons, dit le monarque, la cendre
» d’un ennemi, q u i, s’il étoit en v ie , fefoit trem-
» hier le plus hardi d’entre nous. Je vpudrois que
» ce monument fût plus digne encore du héros
» auquel il a été confacré. »
BEDMAR ( Alphonse de la Cueva , Marquis
de) ( Hifi. mod. ) étoit ambaffadeur à Ve-
nife en 16 18, dans le temps de la fameüfe conjuration
,. dont l’abbé de Saint-Réal a écrit l’hif-
toire, 8c fu t, dit-on, Tarne de cette conjuration
avec le duc d’O ffone, gouverneur de Naples. La
conjuration ayant été découverte, il fut obligé de
prendre la fuite. M. Grofley, avocat à Troyes.,
affocié libre régnicole de l’académie des inferip-
tions 8c belles-lettreS,~ a prétendu que cette conjuration
n’eft qu’une fable, 8c l’hiftoire de l’abbè
de Saint-Réal qu’un roman. Quoi qu’il en foit ,
le pape Grégoire XV créa le marquis de Bedmar
cardinal en 1622. Il fut gouverneur des Pays-Bas ;
puis étant tombé dans la difgrace du roi d’Efpa-
gne, il fe retira à Rome, 8c obtint l’évêché de
Paleftrine. Il mourut le 10 Août 1665 à quatre-
vingt-trois ans. Les Vénitiens haïffent fa mémoire ,
tant par le fouvenir de la conjuration de Venife,
qu’à caufe du livre où on attaque la liberté originaire
de cette république , 8c qui eft attribué au
marquis de Bedmar ; il a pour titre : Squittinio délia
' liberta Veneta. Amelot de la Houflaye Ta traduit
en françois dans fon traité du gouvernement de
Venife.
BEGLERBEG, f. m. {Hifi. mod.) 110m qu’on
donne en Turquie au gouverneur - général d’une
gr.ande étendiîe de pays. Ce mot fe trouve écrit
diverfement- dans les auteurs : begleberg, beylery,
8c beghelerbeghi ; il fignifie feigneurdes Jeigneurs.
Les beglerbegs font autant de vicerois qui commandent
à tout un royaume ; leur autorité s’étend égale- ■
m ent fur la guerre , fur la juftice, 8c fur la police : ils
ont au-deffous d’eux d’autres gouverneurs particuliers,
foit d’une province,foit d’une grofle ville,qu’on
nomme fanjucs ou fanjiacs. Après le grand-vifir,
les beglerbegs feuls ont le pouvoir de publier dans
leurs départemens les ordonnances impériales , 8c
d’y tenir la main. Par tout l’empire , hors de
l’enceinte de Conftantinople, ils peuvent faire décapiter
, ou punir de tel autre genre de mort ou
châtiment que bon leur femble , les coupables
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