
laquelle il s’enflamma, & pour laquelle il fit des
imprudences & des folies peu féantes à un fi grand
général ; il fe déroboit fouvent de fon armée, pour
aller la voir à travers mille périls ; il l’obtint enfin
du marquis de Bade fon père ; alors fa joie
éclata par des fêtes militaires, qui infpirèrent autant
d’effroi au pays que fes noftilités les plus
violentes ; le bruit de deux cens coups de canon
qui fe fit entendre jufqu’à Caffel, fit croire qu’on
étoit aux mains, & le peuple fe mit en prière
■ dans toutes les églifes. Banier ne vécut que peu
de mois après fon mariage. Cet engagement, dit
un auteur moderne, étoit trop v i f pour fon métier
& pour fon âge. Pour fon métier, foit; mais pour
fon âge! Banier avoit à peine quarante ans, & il
e ft à remarquer qu’aucun de ■ ces grands capitaines
des armées fuédoifes , qui ébranlèrent l’empire
d’Allemagne & la puiffance autrichienne dans cette
guerre de trente ans , ne paffa quarante ans ;
Guftave-Adolphe fut tué le a 6 novembre 163 2, à
trente-huit ans ; le duc de Saxe-Veimar mourut le
18 juillet 1639, à trente-fix ans; le général Banier
le 10 mai 1641, à quarante ans; ajoutons que dans
ce fiècle, Charles X I I , roi de Suède, après tant
de conquêtes, de revers & de projets, fut tué devant
Frédérickshall , le 11 décembre 1 7 18 , à
trente-fix ans & demi. On a remarqué que le général
Banier avoit beaucoup de reffemblance avec
le roi Guftave-Adolphe dans les traits, dans la
taille & dans les manières. Banier, (Antoine) {Hifl. Hit. mod.) M. de
Boze rapporte une particularité remarquable de
l’éducation du jeune Banier chez les jéfuites de
Clermont en Auvergne. Il avoit une grande facilité
dont il abufoit, & qui lui laifibit un temps
qu’il eût pu employer à. des étüdes ultérieures,
mais qu’il aimoit mieux donner au jeu & aux plai-
firs de fon âge. Ses régens, pour l’en punir, avoient
imaginé, lorfqu ils donnoient les places, de déclarer
: « qu’il avoit mérité la première , qu’il
a n’auroit que la fécondé ou la troifième, & quel-
j> quefois la dernière, pour les raifons que per-
j> fon ne n’ignorait. Il eft vrai qu’alors il prenoit
cette dernière place avec une fierté qui faifoit
3> baifler les yeux au.nouveau chélateur, & qui
» fouvent embarraffoit le régent même. »
C’eft que le régent s’y prenroit fort mal, c’eft
qu’il alloit dire élément contre fon but, c’eft que
fa déclaration étoit un hommage pour le jeune
Banier & une humiliation pour l’autre, c’eft que
cet autre aurait dû refufer une place qu’il n’avoit
pas méritée, parce qu’il ne s’agit pas d’occuper
1111e place, mais de s’en être rendu digne; c’eft
que malgré l’arrêt du régent, Banier étoit toujours
le vrai chélateur.
J’ai v u , s’il eft permis d’infifter fur ces détails
de collège, que la philofophie ne jugera peut-
être pas fi dépourvus d’importance, j’ai vu un régent
s’y prendre d’une autre manière pour entretenir
l’émulation entre fes deux meilleurs écoliers ;
maïs dont l’un étoit très-fupérieur à l’autre. Üfl
les appelloit Céfar & Pompée, parce que le fécond
étoit toujours vaincu par le premier, non-
feulement dans la compofition pour les places,
mais encore dans ces combats, fource de tant d’émulation
, où l’écolier, mécontent de la place qui
lui eft échue par le fort de la compofition, peut
conquérir une place plus honorable, en démontant
celui qui l’occupe, c’eft-à-dire, en remportant fur
lui trois avantages, & où d’un côté cette ardeur
de conquérir , cfe l’autre le défir de conferver, pro-
duifent tant d’efforts heureux. Le régent craignoit
que l’inégalité des deux concurrens ne fît deux
mauvais effets, celui de décourager l’un & d’inf-
pirer à F autre cette négligence, compagne de la
lecurité; il ne vouloit pas être tout-à-fait injufte,
il fe permettoit feulement d’être partial, il fe per-
mettoit de fournir fecrettement des fecours au
vaincu, & de lui rendre l’efpérance, en le mettant
èn état de renouveller & de foutenir le combat,
non pour enlever au vainqueur la vicloire
qu’il méritoit,, mais pour la lui faire acheter. Il
a depuis révélé ce ftratagême à fon difciple chéri,
qui s’en étoit douté dans le temps, .& qui ne le
lui pardonnoit pas alors ; mais qui dans la fuite,
en ayant connu le .motif & reffenti l’effet, en a
voué une reconnoiffance éternelle à fon maître.
Revenons à M. l’abbé Banier. Chargé après fes
études de l’inftitution des fils de M. le préfidenf
du Metz, l’étude approfondie qu’il fit avec eux
des anciens Auteurs, fur-tout des poètes, décida
dans la fuite de fes plus grands travaux ; de-là fon
explication hiftorique des fables, où l’on découvre
leur origine & leur conformité avec l’hiftoire ancienne;
de là fa traduélion & fes explications des
Métamorphofes d’Ovide; de-là fon corps général
de Mythologie. Ce genre d’érudition paroît avoir
été fon objet favori & le travail principal de toute
fa vie ; mais il s’eft permis des excurfions.
Paul Lucas, pour rendre utiles les notes imparfaites
& les matériaux informes qu’il avoit rapportés
de fes voyages, avoit le bon efprit de les
faire rédiger par des favans de profeflion, auxquels
il ne manquoit que d’avoir vu ce que Paul Lucas
avoit vu pour eux : ce s favans comparaient les
découvertes de Paul Lucas avec celles d’Hérodote-,
de Strabon, de Paufanias, de Pline; ils donnoient
ainfi à fes voyages le mérite de l’érudition &, de
la critique : c’eft ainfi que fon premier voyage
fut publié par M. Baudelot, le fécond par M.
Fourmont l’aîné , le troifième par M, l’abbé
j Banier.
C ’eft encore ce dernier qui a donné la quatrième
! édition des Mélanges d'Hifloire & de Littérature de
dom Bonaventure d'Argonne, plus connu fous le
nom de Vigneul Marville. Le dernier volume eft
entièrement de M. l’abbé Banier. ( Voyez A r-
G O N N E .)
M. l’abbé Banier étoit né à Dales en Auvergne.,
le 2 novembre 1673. H avoit été reçu à l’gcadé**
mie des belles-lettres,en 1713. Il mourur le 19
novembre 1741.
BANNÈS, (D ominique.) ( Hiß. d’F fp .) dominicain
, grand théologien efpagnol, auteur de
commentaires en f 2. vol. in-fol. fur la fomme de
Saint Thomas, 8l èonnu fur-tout comme confef-
feur de Sainte Thérèfe. Il mourut en 1604 à Mé-
dina-del-Campo, âgé de 77 ans.
BANNIMUS, ( Hiß. mod. ) mot de la baffe latinité
, qui exprime dans l’univerfité d’Oxford l’ex-
pulfion d’un membre qui a mérité cette peine.
On aflichok dans un carrefour ou autre endroit
public, la. fentence d’expulfion, à ce que nul n’en
prétendît caùfe d’ignorance. ( G )
BAR , ( Hiß.- mod. ) le duché de Bar ou le Bar-
rois , a eu premièrement des ducs, qui ont fini
en 1032 dans la perfonne de Frédéric I I , enfuite
des comtes jufqu’en 1354 , que le comté de Bar
fut érigé en duché. Le fameux roi de Naples &
de Sicile , René d’Anjou , qui ne fut jamais roi
de Naples ni de Sicile, mais qui fut duc de Lorraine
du chef de fe femme, & Louis, cardinal de
Bar , fon oncle , lui céda fon duché de Bar en
1419. De-là la réunion de la Lorraine & du Bar-
rois ; mais c’étoit dans la maifon d’Anjou que fe
faifoit cette réunion ; ou plutôt il n’y eut point
de réunion réelle.. Le roi René pofféda le duché
de Bar', mais la Lorraine refta en. litige entre la.
maifon d’Anjoulaquelle y avoit droit du chef
d’Ifabelie de Lorraine, fille de Charles I I , duc
de Lorraine, femme du roi René, & là branche
de Lorraine-Vaudemont, qui prétendait que la
Lorraine étoit un fief mafeulin,.. & qu’elle mivoit
' la loi falique. Pour terminer ce grand procès, qui
coûta du fang- aux deux partis , il fallut que.
la Lorraine, portée dans la maifon d’Anjou par
Ifabelle dé Lorraine , fût reportée dans la maifon-
de Lorraine par Iolande d’Anjou, petite-fille de,
René , qui époufa Ferri I I , de la branche de
Vaudemont., La réunion dé eés deux états a été
feite depuis à la couronne de .France d’après les »
convenances générales dé l’europe par lés traités
& conventions des 3 ©élobre 1.73 5, 11 avril &■
18 août 1736 j.& 18 novembre 1738 , par lefquels;
la maifon dé Lorraine a cédé à .la-France, les du-,
chés de Lorraine & de Bar, en échange de la:
fiicceffion du grand duché de Tofeane.
BARABALLI, ( Hiß. litt. mod. ) bel homme ,
& mauvais poète italien, à qui le pape Léon X.
trouva plaifarit de conférer par jeu les honneurs du’
triomphe poétique, que le Taffe ne put recevoir:
dans la fuite. On monta ce beau vieillard-fur un
éléphant, & on le conduifit en pompe au Capitole.
L’éléphant jetta le poète par terre , le cortège fe
diflïpa., &. le triomphe tourna en rifée de la part
des fpeélateurs, &.en confufion de la part du triôm- '
phateur. Au fond, cette plaifanterie pontificale , !
qui, pouvoir aboutir à tuer ou à bleffér un malheureux,
n’étoit pas de bon goût» Ce qui peut
cous confoler c’eft. qu’elle n’eft. peut-être pas
vraie, c’eft Varillas qui la raconte. Anecdotes de
Florence.
BARADAS.- Voyez Barradas. BARABBAS , (Hifl.facrée. ) féditieux & meurtrier
que Pilate, à. la prière des Juifs,-délivra préférablement
à J. C. Non hune ,fed Barabbam.
B A R A CAQ U E , f. m. ( Hifl. mod. ) nom de
feéle & de religieux Japonois , dont la prière & la
méditation eft l’occupation continuelle. (A . R.')
B A R A C , ( Hifl. des Juifs..) fils d’Abinoëm, fut
le quatrième jugedes Hébreux,.qu’il gouverna pendant
quarante ans : ce fur lui qui les délivra de
la fervitude de Jabin, roi des Chananéens. Excité
par la prophéteffe Debora y il leva une armée de
dix mille nommes, attaqua Jabin dont il mit en
pièces1 les troupes, commandées parSifara. {A.R.\
BARACHIAS, ( Hifl. facrée. ) père du prophète
Zacharie ; ce nom d’ailleurs eft celui de plufieurs
autres Juifs, dont il eft parlé dans divers livres-
de l’écriture.
B ARANOWSKI, ( Boguslas ) {Hifl. de Pal.)
gentilhomme polonois , né avec une ambition dé-
mefurée & des talens fupérieurs ; du fein de l’indigence
, il voulut s’élever au trône. Jean Sobieski III
étoit mort en 1696. La diète s’affembloit pour
l’éleélion ; le partage des opinions allumoit déjà
des querelles très-vives. Les fuffrages tour-à-tour
achetés , vendus , refufés, prodigués r réclamés,
différaient la décifion. Pendant ces troubles, les
Tartares voyant la Pologne fans chef, fe jettèrent
fur la Podolie. L’armée de la couronne étoit fur
la frontière ; elle attendoit fa folde : déjà le murmure,
avant-coureur de la révolte, fe faifoit entendre
dans le camp. Bogujlas faifit cette circonf-
tance : « mes amis , dit-il, en s’adreffant aux fol-
dats., » la république ne daigne plus fe fouvenir
» de fes défenfeurs. Les feigneurs ne font occu-
î> pés qu’à s’ouvrir un- chemin au trône ; & nul-
» d’eux ne fonge que les défenfeurs de ce trône ,
prêts à mourir de faim, font abandonnés à la.-
» merci des Tarrares. Croyez-moi, pénétrons dans
s» la Tartarie ; allons chercher chez nos ennemis-
» la réçompenfe que la patrie nous refufe ; & re-
” venons chargés - de leurs dépouilles Ge discours
fi conforme à l’efprit d’indépendance r qui:
règnoit alors dans l’armée, fut. répété dans tous -
les rangs ; 8c.Bogujlas, d’une voix unanime, fut pro--
clamé général',: il conduifit. les rebelles dans la>
Tartarie,.livra au pillage les.^villes & les campagnes,
revint en Pologne; & envoya des députés-
à la diète pour demander d%n ton ferme & menaçant,
la paie de dix ans que; la négligence des-
miniftres avoit laiffé s’accumuler: La diète occupée-
d’ôbjets plus importans, fit peu d’attention à cette:
demande. Cependant l’année dirigea (a marche vers-
la- Ruftie, où, pendant un an,.elle caufa un dégât'
affreux ,, tandis que les Tartares imitoient en Pologne
la fureur ds ces, rebelles qui s’honoraient do.'
nom de. confédérés. Cependànt;la diète- les déciaroict
ennemis de. la patrie,-Boguflas ^xdoXioit des manifefir