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c ’eft-à-dire , fur celui d’admettre l’hiftoire dans l’Encyclopédie, nous marchons environnés
d’écueils , & nous fommes obligés de faire attention à tout. Une fuite d’articles
choifis d’hommes illuftres dans les divers genres ne fuffiroit pas pour un diaionnaire
hi(longue; ce titre fuppofe plus d’étendue, une forte d’intégrité, en un mot, un ou-
vrao-e à-peu-près complet ; d’ailleurs, la partie qui concerne les chofes étant affez entière
, fi la biographie étoit fi prodigieufement incomplette , il y aurait une difparate
trop marquée entre ces deux parties, l’ouvrage manqueroit de proportion & d enfemble.
D ’un autre cô té , mettre toute l’hiftoire, même en abrégé, dans l’Encyclopédie,
c ’eft une chofe impoffible ; il y faut du choix, il en faut beaucoup : il en faut entre
le vrai & le faux, entre le certain & le douteux, entre l’important & le frivole , entre
l’utile & l’inutile , entre les perfonnages illuftres & les perfonnages obfcurs. La foui*
des rois, des miniftres , des généraux, des écrivains qui n’ont rien fait de mémorable,
& qui ne fervent qu’à marquer la chronologie , doit faire place ici a ceux qui ont occùpé
d’eux l’univers, même lorfqu’ils n’étoient plus. f f l H M . , „
Ce n’eft pas tout , il faut encore du choix dans les details de chaque article. 1 out
n’eft pas mémorable dans les perfonnages les plus dignes de mémoire ; il ne faut dire
aux hommes que ce qu’ils ont intérêt de favoir, que ce qu’il leur ferait ou honteux,
ou préjudiciable d’ignorer. En conféquence , il faut que les articles foient courts pour
laiffer de la place à tous ceux qui doivent être admis, & fubftantiels pour contenir tout
ce qui méfîte d’être fu. Voilà ce qu’ils doivent être en général ; en particulier, leten-
due de chaque article doit être mefurée fur fon importance; mais il y a encore ici du
choix & la règle la plus raifonnable en apparence doit fouvent céder a de certaines
eonfidérations. Plus un fait eft important, plus ordinairement il eft connu; on ne doit
quelquefois alors que l’indiquer & le juger: ce feroit etre mauvais économe de le l-
pace qu’il eft permis de donnes à l’hiftoire dans TEncyclopedie , que de s arrêter a raconter
avec détail des faits que perfonne n’ignoreroit. Les faits qui demanderaient un récit
détaillé font ceux qui ne feroient pas connus en proportion de leur importance, & la
mal-adrëfle des hiftoriens en a laiffé fubfifter quelques-Uns de ce genre. En un mot,
de l’inftruétion pour les ignorans, des fouvenirs pour les favans ; voila ce que chaque
article doit fournir :
InioSi difcant ? 6- amcnt méminijfe periû.
Ce vers doit être la devife de tout abrégé ; mais cette devife contient une règle alTei
difficile à fuivre. HraS „ r . _. c . ,
Quant aux faits incertains, il y a une diftindion ncceflaire a faire. Si ces faits n ont
point partagé les favans , s’ils n’ont point fait naître des opinions diverfes, ils ne font
bons qu’à omettre , comme n’étant ni affez importans, ni atTez avérés.
S’ils ont donné lieu à des opinions & à des lyftêmes connus, alors ces opinions, ces
fyftêmes deviennent la matière propre de l’hiftoire, qui eft autant le tableau des opinions
que des faits réels. gI . , . ,
Nous avons refait entièrement, ou fi confiderablement remanie, réduit & change le
plus grand nombre des articles d’hiftoire inférés dans le fupplément de l’Encyclopédie,
que nous pouvons les regarder comme étant à nous ; nous en faifons ici aux auteurs
de ces articles toutes les excufes convenables , & nous les prions de croire qu aucun
motif défobliaeant pour eux ne nous a déterminés à ce parti. Mais chacun a ia maniera
de voir & de faire, & nous avons voulu éviter, autant que les circonftances ont pu
le permettre , la bigarurre qui réfulteroit de ces différentes manières. D ailleurs , 1 étendue
qu’on a donnée à de certains articles dans le fupplément, ne nous a point paru
compatible avec notre plan. Ceux de ces articles qui ont pu s accorder avec ce plan ,
& que par cette raifon nous avons confervés en entier, ou avec de tres-legers chaa*
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gemens de ftyle, continueront de porter le nom de leurs auteurs, ou la marque qui
les défignoit, foit dans l’Encyclopédie, foit dans le fupplément, ou enfin une indication
quelconque , qui affine à chacun ce qui lui appartient. Au défaut de nom , les
lettres A . R. lignifieront article refié. Mais le-nombre de ces articles confervés en entier
ne fera pas auffi grand qu’on l’aurait déliré, du moins dans la biographie. Les articles
tirés de l’hiftoire fainte nous ont paru le plus dans le cas d’être confervés.
On nommera ou on indiquera de même les auteurs qui auront fourni des articles
nouveaux : il n’y aura enfin que les articles appartenans en propre à l’auteur de ce
diétionnaire, qui n’auront, comme dans le diétionnaire du blafon, d’autre indication
que de n’en point avoir.
Quand on ajoutera quelque chofe aux articles même confervés, foit pour les contredire
, foit pour les modifier, on mettra ces additions entre deux parenthèfes.
Nous ne prenons de l’hiftoire ancienne, dont l’hiftoire fainte forme une partie fi
importante, que la biographie, que l’hiftoire perfonnelle & individuelle; le refte appartient
ou à l’auteur chargé des antiquités, médailles, monumens , &c., ou à l’auteur
du diétionnaire théologique & de l’hiftoire eccléfiaftique, ou à l’auteur de l’hiftoire de
la philofophie ancienne & moderne, ou aux auteurs du diétionnaite de l’art militaire,
ou aux auteurs du diétionnaire de géographie, qui font en poffeffion de joindre à la
géographie proprement dite des détails hiftoriques & politiques, &c. Quant à l’hiftoire
moderne, nous embraffons, comme nous l’avons dit plus haut, & les chofes & les
perfonnes, mais toujours en abandonnant aux auteurs que nous venons d’indiquer, &
a d’autres encore, tout ce qui peut appartenir à leurs genres. En général , nous nous
laifferons circonfcrire & ferrer de fort près par nos voifins ; ne cherchant qu’à reftreindre
notre genre , que nous avouons être trop étendu, tout facrifice fera pour nous une
acquifition.
Voici donc les différences principales qui diftingueront ce nouveau diétionnaire historique
, de prefque tous les autres. Il fera d’abord effentiellement diftingué des grands
diétionnaires hiftoriques de Moréry , de Bavle , de Profper Marchand, de Chauffepié,
& c . , en ce qu’il fera un abrégé, aftreint par conféquent à toutes les loix des ouvrages
de ce genre, comme de rejetter tous les articles peu importans , peu utiles, de choifir
même entre les autres, & fur-tout de les refferrer pour la plupart dans un efpace allez court,
de rejetter encore les longues differtations, les difcuffions favantes, & de ne préfenter
que des précis & des réfultats. Telle fera du moins la règle générale, mais elle recevra
des exceptions, qui feront déterminées par les circonftances.
Ilfera diftingué enfuite & de ces mêmes grands diétionnaires , & des abrégés, par l’avantage
qu’il aura d’être mixte, c’eft-à-dire, d’être à la fois une diétionnaire & des chofes &
des perfonnes.
Il fera encore diftingué & des uns & des autres, en Ce que ceux-ci tendent toujours
à multiplier les articles, & qu’il tendra toujours à les choifir.
Pour rendre les articles plus fubftantiels, on aura foin d’y inférer, fans les charger
ni les allonger , autant qu’il fera poffible, les difcours mémorables, les traits qui peignent,
ces mots qui quelquefois montrent encore mieux que les aétions le fond de lame, enfin
tout ce qui fait lire l’hiftoire ; car puifqu’il n’y à d’utile que ce qu’on lit , il faut tâcher
de faire lire jufqu’aux diétionnaires , ce fera peut-être encore une diftinétion.
Mais il en eft une plus importante que nous ambitionnons fur-tout de procurer à cet
ouvrage , autant qu’il peut en être fufceptible , c’eft de faire fervir le paffé à l’inftruélion
du préfent & de l’avenir, de donner à l ’hiftoire toute fon utilité, en la rendant la leçon
des rois & des peuples, de la purger de ces faux jugemens, de ces réflexions ma-
chiavelliftes qui infeétent nos hiftoires , même les plus eftimées , de cet éloge perpétuel
des guerres, des conquêtes, des viétoires & du faite ruineux des rois ; de cette admi