
à3a A G Ü
vençaûx, lui Oppofa fa faélion. Celle de la coin-'
te fie alloit fuccomber lorfqu’elle appella ufi protecteur
puiffant. C’étoit le duc de Savoie. Il falloit
réunir tous les fuffrages, pour introduire dans la
Provence un allié plus dangereux qu’un ennemi
même. Les agens de ce prince , lui cherchoient
des créatures , flattoient les mécontens , prodi-
guoient les promeffes, l’un d’eux voulut féduire le
brave & vieux Saint - Marc. « Penfes-tu, dit le
guerrier en montrant fes cheveux blancs, » qu’a-
n près avoir blanchi au fervice du roi de France,
» je veuille donner à un autre ce fouffle de vie ,
» qui me relie ». La comteffe appuie de Ion autorité
ces négociations , elle cabale en faveur du duc
de Savoie, le comte de Carces cabale contre elle,
le parlement d’Aix balance entre les deux partis ;
■ tandis qu’il délibère , la comteffe paroît à la tête
d’une troupe de féditieux, l’affemblée fe diffipe,
le palais eft livré au pillage. La comteffe députe
•vers le duc de Savoie, pour le prier de venir fe-
eourir à main armée la foi catholique contre les
proteftans. Ce prince fit de grands préparatifs,
temporifa, pour donner à la révolution le temps
de s’affermir, obferva de loin le péril, partit enfin,
marcha lentement, & fe montra lorfqu’il crut ne
plus trouver de réfi fiance. Il entend par-tout retentir
fur fon paffage les cris de vive fon altejje, '
rive ta mejje, oc y répond en verfant l’or à pleines ,
mains. Pendant ces délais, Cafiellar, créature de
la comteffe, ignorant magiffrat, citoyen turbulent
, brave foldat, à la tête de quelques fanatiques,
'avoit conquis Barjols & plufieurs autres places.
Le duc affiége Salon, un pan de muraille s’écroule,
les prêtres catholiques comparent le duc à Jofué,
la ville à Jéricho , le canon avoit fait le miracle.
Cependant les finances du duc étoient épuifées.
Il alla chercher des fecours en Efpagne. Jeannin
l’accompagnoit, Jeannin, magiftrat intègre, négociateur
profond , ligueur fans fanatifme, qui fut
l'ennemi de Henri I V , mérita fon efiime & devint
i on ami. Philippe II donna au duc cinquante mille
«eus, mille foldats, quinze galères, & lui fit pour
l’avertir les plus belles promeffes. Le duc entra
en triomphe dans le port de Marfeille, mais en
mettant „pied à terre, il apprend que fes troupes
Ont été battues par le célèbre JLefdiguieres. Impatient
de venger fa gloire , il court à Berre_, &
s’empare de cette place après un fiege opiniâtre.
I l âvoit promis le gouvernement de cette conquête
j f la comteffe de Sault pour un de fes favoris. C’étoit
Louis-Honoré de Caftellane, fieur de Befau-
thin., brave officier , efprit orné par les lettres,
qui. 4a voit nouer des intrigues , faire des chantons
, & gagner des batailles. Le duc manqua à
fii parole ; la comteffe dévora fon reffentiment ,
éc attendit l’inftant de la vengeance ; dès - lors
elle apprit avec une joie fecrette tous les malheurs
du duc de Savoie, lui fufcita des. envieux
parmi les grands , des ennemis parmi le peuple,
'&iis.jfprtgça pluS-fivA le chaffer de la Prpven-
A G U
ce. Le duc étoit trop clairvoyant poiïf lie pas
foupçoriner' ces menées. Il chercha à gagner
l’eftime des Provençaux par des traits d équité
frappans. Pierre Biord, lieutenant dans Arles ,
homme fans talens , fans courage, fans vertus,
qui croyoit fa vie menacée par tout ce qui l’en-
vironnoit, barbare par foibleffe , odieux au peuple,
à fes créatures, à lui - même , iriimoloit fans
pitié tous les. objets de fes pufillanimes foupçons.
Lefdiguieres s’avançoit pour venger les habitans,
le duc l’apprend, il veut le prévenir. La comteffe
, qui voit que le prince , par une jufie
févêrité , va fe concilier l’affeélion du peuple , fait
jouer mille refforts pour fufpendre fa marche,
& pouf le rappeller. Mais déjà le duc eft dans
Arles, & Biord eft dans les fers. Le prince ne
diffimule plus alors l'indignation que lui cau-
fent les procédés de la comteffe de Sault. Il tonne ,
il menace, il croit n’avoir en tête qu’une femme
vulgaire, qu’on peut féduire par la politique, ou
intimider par les armes. Il court à A ix , entend
crier de tous les côtés fouero Savoyard, voit la
colère peinte à fon afpecl dans tous les y eu x ,
& reconnoît l’effet des intrigues de la comteffe J
fes jiartifans courent à fhôtel de fon ennemie, enfoncent
les portes,pénètrent jufquès dans fon appartement
pour fe faifir, difbient-ils , des féditieux
dont il étoit l’afyle. La comteffe fe préfente l’air
calme , avec une indignation tranquille, u Voilà
» donc,dit-elle,le prix des fervices que j’ai rendusau
» duc de Savoie , qu’il tremble, qu’il tremble ! l’in-
» gratitude ne demeure jamais impunie : les mains
» viles & mercenaires qu’il arme aujourd’hui contré
» moi, s’armeront un jour contre lui. » Elle entend
un des conjurés qui murmuroit ces mots*
qii attendons-nous ? Que nexécutons-nous notre ordre ?
)7 Frappez, leur dit la comteffe, je n’ai point
» le coeur affez bas pour demander la vie. Tous
» les coeurs ne font pas glacés pour moi : ma
» mort trouvera des vengeurs. Et vous, dit-elle,
en s’adreffant à quelques magiftrats qui étoient
entrés , » vous pères de la patrie , vous dépofi-
» fitaires de l’autorité fuprême, vous fouffrez
» qu’un audacieux étranger s’élève un trône aut
» milieu de la Provence ! » Ce difcours étonne ,
fubjugue les efprits. Les affaffins trefnblent, reculent
& difparoiffent. Revenus de cette première
furprife, ils rentrent chez la comteflè , & la chargent
de fers. Elle joue la malade, une femme de
fa fuite,pouffée par un zèle héroïque, trompe les
furveillans, fe met dans le lit de la comteffe ,
& détourne par des accens plaintifs l’attention
des gardes, tandis que Chrétienne d’Aguerre, vêtue
en Savoyard ,T e menton couvert d’une barbe
longue & touffue , s’évade avec fon fils déguiféen
payfan. Les Marfeillois ouvrent les bras à ces illuf-
très fugitifs , & prennent les armes contre une
troupe de commiffaires & d’huiffiers, que, le duc
I avoit envoyée pour le faifir de la. comteffe. JDepuis cet inftant le duc perdit par dégrés fon
À G Ü
crédit & fes conquêtes. 41 voulut faite un dernier
effort pour ramener la fortune. Il prefenta la
bataille à la Vallette, chef du parti François. Les
deux partis formoient à-peu-près huit mille hommes;
on vit ces deux corps s’avancer avec autant
de gravité que les plus grandes armées , divijes
de même, obferver le même ordre, executer les
mêmes manoeuvres. La vi&oire balança long-temps,
enfin le duc fut entraîné dans la déroute de fes
foldats. La Vallette furvécut peu à fa v i fe r e . Il
périt quelques jours après à l’attaque du village de
Roque-Brune. Cétoit un vertueux gentilhomme
qui, dans le choix des partis qui divifoient la
France , avoit plus confulté fon coeur que fes
intérêts. La ligue lui offrit le gouvernement de la
Provence , s’il vouloit la féconder dans fes projets
ambitieux. Il rejetta cette propofition avec beaucoup
de nobleffe, mais fans fafte comme Tans de-
tours. ‘ 1 Après fa mort, la comteffe de Sault s empara
des affaires & des efprits , elle fe prefenta
dans les principales villes , perfuada au .peuple
qu’elle avoit été féduite , qu’elle lui avoit
donné un tyran croyant lui donner un protecteur.
Elle éteignit peu-à-peu les troubles qu’elle avoit
fait naître, ferma pour jamais au duc l’entrée de
la Provence, & paffa le refie de fa v ie , adoree
dans fa faction, refpeétée dans l’autre, & redoutée
d’un prince qui, dans fes plus hauts ^ projets,
n’avoit paru être que le miniftre de 1 ambition
d’une femme. ( M. de Sa c y , )
( Toute cette hiftoire, qui eft abfolument fans
dates, a pour époques générales & principales,
comme on le v o it , les’ règnes de Henri IV. en .
France, & du duc Charles-Emmanuel en Savoie. )
A G U I , l’an neuf, ( Hiß. anc. ) cri ou refrain
des anciens Druides , lorfqn’ayant cueilli le gui de
de chêne, le premier jour de l’an, ils alloient le
porter en pompe, foit dans les villes , foit dans les
campagnes voinnes de leurs forêts.On cueilloit ce gui
avec beaucoup de cérémonies dansle mois de Décembre
; au premier jour de Fan, on l’envoyoit aux
grands , & on le diftribuoit pour étrennes au peuple,
qui le regardoit comme.un remède à tous maux , &
le portoit pendu au cou, à la guerre , &c. On
en trouvoit dans toutes les maifons & dans les
temples, ( G )
A g u i , Fan neuf, ( Hiß. mod. ) quête que 1 on
faifoit en quelques diocèfes le premier jour de ;
l ’an , pour les cierges de l’églife. Il paroît que
cette cérémonie, inftituée d’abord pour une bonne
fin, dégénéra enfuite en abus. Cette quête fe faifoit
par de jeimes gens de l’un & de l’autre fexe,
ils choififfoient un chef qu’ils appelaient leur follet,
fous la conduite duquel ils cominettoient, même
dans les églifes, des extravagances qui approchoient
fort de la fête des foux. • - v |
Cette coutume fut abolie dans le diocefe d Angers
en 1595 par une ordonnance fynodale : mais
pn la pratiqua encore hors des églifes; ce qui
Hißoire, Tom, I.
a G ü 23 3:
obligea un autre fÿnode en 1668 , de défendre
cette quête , qui fe faifoit dans les maifons avec
beaucoup de licence & de fcandale, les garçons & les
filles v danfant,& chantant des chanfons dillolues.ün
V donnoit auffile nom de Bachelettes à cette folle re-
fouiflance , peut-être à caufe des filles qui s y aflem-
bloient, & qu’en langage du vieux temps on appel-
loit bachelettes. Thiers , Traite des jeux i A . R .)
AGUIRRE ( Joseph Saenz d ) (. Hijt.mod. )
né à Logrogno en Efpagne en .l63 0 \ à ^ ? rd
bénédiSin , Infmte cardinal en 1686 , eft célébré
par fa collecbon des conciles d’Efpagne, publiée en
ifiot & 1694, en 4 vol. in-folio. On en a donne
une nouvelle édition à Rome en 1753, en 6 vol.
in-folio. La première édition eft encore la meilleure*
Mort à Rome en 1699. Il eft auteur de quelques
; autres ouvrages moins connus & à-peu-près du
même genre. „ . . . A „
AHÏAS ou ACHIAS , (Hifl. famte.) prophète,
natif de Silo, qui prédit à Jéroboam fon élévation ,
la mort de fon fils A bia, & la defolation de fa
: maifon. • , . , ^ r*
A IL L Y , ( P ie r r e d’ ) (Hift- mod. ) ne a Coffl-
piégne en 1350, d’une famille pauvre, reçu doc*
teur de Sorbonne en 1380. chancelier de lum-
verfité de Paris, confeffeur & aumônier du roi
Charles V I , évêque du P u y , & enfuite deCam-
b ray , enfin cardinal, eft fur-tout célébré par le
zèle qu’il témoigna & les foins qu’il fe donna pour
l’extindion du grand fchifme d’Occident, qui etoit
de fon temps dans toute fa force. Ce fut un de
fes fermons, prêché en 1405 , devant 1 anti-pape
Benoît XIII, ( Pierre de Lune. ) qui fit inftituer
la fête de la Trinité, laquelle n’exiftoit pas encore ,
il fe diftinguaaux conciles dePife & de Confiance.
Les éloges qu’on lui donnoit dans 1 univerfite, n annoncent
qu’un fcholaftique célèbre ; c etoit 1 Aigle
des doSleurs de la France , c’étoit le marteau des
hérétiques. Sa réputation eft encore refpeâée ; mais
elle ne va pas jufqu’à faire lire fes ouvrages, qui
ont prefque tous été imprimés à Strasbourg en
1490, in-folio , & dont quelques-unsl’avoient déjà
été féparément à Paris. Ils font tous en manuferit
dans la bibliothèque du collège de Navarre, où
ils avoit été bourfier , & qui le reconnoît pour fon
fécond fondateur. Le plus connu de fes ouvrages
& qui ne l’eft guères que par le titre , eft fon
traité de la réforme de Téglife ; cet ouvrage Fa toujours
fait citer, parmi les prélats bien intentionnés ,
qui fentoient la néceffité de réformer l’églife,
mais fans rien innover dans la foi. Au refte , il
ne Eut pas sélever au-defius des erreurs de Ton fiè-
c le , il croyoit à l’aftrologie judiciaire , & le pape,
félon lui , pouvoit difpofer des couronnés. Il
mourut, félon les uns, le 8 Août 1419 ; félon les
autres , le 9 Oftobre 1425 ou 1426.
AIMOIN , moine de l’abbaye de Fleury ou S,
Benoît-fur-Loire, eft auteur d’une hiftoire de
France, qui fe trouve dans le recueil de Duchêne
& dans celui des bénédiftins, & qui eft d’ail-,
Gg