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règne fut brillante, & tous fes combats furent fui- j
vis de la vi&oire. Ses flottes, qui couvrôierit les
mers , lui affervirent l’Egypte oc Sidon, dont il fit
paffer les richeffes & le commerce dans fes états.
Les conquêtes, qui fouvent épuifent les peuples
conquérans, ouvrirent dans l’Egypte les fources
de l’abondance. Apriès ne fe livra à fes inclinations
belliqueufes que pour rendre fon pays plus florif-
fant. Les Juifs, fatigués du joug tyrannique de Na-
buchodonofor, cherchèrent un afyle dans l’Egypte,
où leur induftrie commerçante accumula l’or des
-nations. L’ivreffe de fes fuccès le rendit impie , & -
fe croyant plus qu’un homme, il ofa défier les
dieux & braver leur puiffance. Son audace facri-
lège fut punie par la révolte des Egyptiens1, qui
jamais ne biffèrent impunies, les oftènfes faites au
culte public. Ce monarque, vainqueur des nations,
fe vit abhorré de fes lujets. Il paffa de l’infolence
de la viâoire à l’abattement d’un efclave qui
attend en tremblant fon arrêt de la bouche d’un
maître irrité. Ses fujets lui paroiffoient d’autant
plus redoutables , qu’il les avoit inftruits lui - même
dans l’art de combattre & de vaincre. Il eut dans
cette extrémité recours à la négociation, & choi-
fit pour médiateur Amafis, qui avoit * par fes ta-
lens & fa probité, mérité la confiance de fon
maître & Taffeérion des peuples. Cet agent également
propre à la guerre & à la négociation, avoit
montré jufqu’alors une ame infenfible aux pro-
meffes de l’ambition. A peine eut-il expofé aux
rebelles le fujet de fa miffion, qu’un de leurs chefs
lui mit un cafque fur la tête & le proclama roi.
Apriès ne regarda ce feu dévorant que comme une
étincelle prompte à s’éteindre. Il avoit dans fa cour
un de ces hommes privilégiés qui, fatisfaits de faire
leur devoir, n’attendent leur récompenfe que du
témoignage intérieure de leur confcience. C’étoit
Paterbemis, que fon intégrité & fon défintéreffe-
ment àvoient rendu l’idole de la nation. Ce fage,
dont la fidélité étoit incorruptible,- fut chargé d’amener
Amafis vivant, & de le livrer aux vengeances
d’un maître offenfé. Sa négociation eut
un mauvais fuccès ; il n’effuya que les railleries de
ceux qu’il crut devoir étonner par fes menaces.
Aprièsmécontent, le foupçonna d’être le complice
de l’ufurpateur de fon pouvoir, & pour l’en punir-,
il lui fit trancher la tête. La nation, indignée d’avoir
vu tomber un citoyen fi refp.eâable fous la hache
du bourreau , fe fouleva pour venger fa mémoire.
Tous j les yeux- fe fixèrent fur Amafis, qui dès ce
moment fut regardé comme le vengeur de la nation.
Apriès abandonné de fes favoris , fe jetta dans
les bras de l’étranger. Trente mille Cariens &
Ioniens mercenaires trafiquèrent de leur fang avec
lui. Ôn en vint aux mains dans les plaines de
Memphis. Les .étrangers combattirent avec un courage
qui tenoit du défefpoir ; mais enfin, accables
par la fupériorité du nombre , & fatigués de donner.
la mort, ils furent dans Timpuiffance de défendre
lçur vie j tous expirèrent en combattant.
A Q U
Apriès fait prifonnier, ne leur fiirvécut que pour
être traîné au fupplice par fes propres fujets,
t APULÉE, (L u c iu s -) ( Hifl.anc.) auteur de
Varie d’or, ouvrage célèbre & traduit dans la plupart
des langues modernes. Il y a encore d’autres
Ouvrages déAp'ulée, dont la plupart traitent de la
philofophie platonicienne. On a fait du tout une
édition ad ufum Delphini, ce qui femble mettre
Apulée au nombre des auteurs claffiques. On l’a
accufé de magie, on l’a loué de beaucoup de miracles
, qu’on a même ofé comparer à ceux de
Jéfus-Chrift, comme ceux d’Apollonius de Tyanes.
Sa riiagie & fes miracles furent d’avoir plu à une
riche veuve qui fit fa fortune, •& d’avoir gagné
fon procès contre les parens de cette femme , qui
l’accufoient de l’avoir enforcelée, & ce qui étoit
un peu plus grave, d’avoir fait mourir le fils que
cette femme avoit eu d’un premier mariage. Nous
avons l’apologie d'Apulée faite par lui-même devant
le proconful d’Afrique. Apulée étoit né à Madaure
en Afrique ; fa femme fe nommoit Pudentilla , 8c
le fils de cette femme Pontianus. Apulée vivoit au
deuxième .fiècle, fous Antonin & fous Marc-
Aurèle.
A Q U A -V IV A , (Hiß. mod. ) Il y au moins
trois hommes célèbres de ce nom & de cette mai-
fon. i °,J André - Matthieu , duc d’Atri eftimé
comme guerrier, plus connu comme favant , auteur
d’une encyclopédie, très-imparfaite fans doute,
mais enfin d’une encyclopédie auteur aufli de
commentaires fur Plutarque;. Mort en 152.8 à 72
ans,
2°. Le cardinal Oétavio, mort en 16 12 , dans
fa cinquante-deuxième année, ami des fciences 8c
des favans.
30.. Claude, général des jéfuites, qui, par fa
fameufe ordonnance , connue fous le nom de ratio
fludiorum, eût arrêté les progrès des fciences, fi on
l’eût laiffé faire ; mais fon plan d’études, quoique
fi favorable à l’ignorance, fut rejetté par rinqui-
fition, & d’un autre côté les jéfuites ne voulurent
pas être ainfi gênés dans leurs opinions. .Eh ! qui
fommes-nous pour défendre à l’efprit humain de
faire de nouvelles découvertes ou d’abjurer d’anciennes
erreurs ? pour dire à nos femblables : Vous
penfereç & vous parlereç ainfi fur ce qu’un Dieu n’a
pas révélé? Souvenons-nous de l’arrêt de 1624qui
défendoit, fous peine de mort, d’enfeigner aucune
maxime contraire aux anciens philofophes, nommément
à Ariftote, & profitons , fi nous le pouvons
, de l’arrêt burlefque de Boileau,
A Q U IL A , (Hiß. facrée,) furnommé le Pondr
que, parce qu’il étoit originaire du Pont, contrée
d’Afie , fut converti par faint Paul avec fa femme
Prifcille. Il en eft parlé dans Vépitre aux romains.
A q u il a , (Sébastien d’ ) (Hifl: mod,) médecin
italien, zélé dèfénfeur de la do&rine de Ga*
[ lien , auteur d’un traité de morbo gallico , & d’un
i autre de febre fanguined. mort ’eq 1543
T p AQUINO;
A Q U
AQUINO, ( Hiß. mod. ) nom d’une ville du
* oyamne de Naples ; & d’une ancienne & illuftre
maifon de ce royaume, à qui cette ville a donné
fon nom, & qui a produit plufieurs perfonnages
célèbres, entre autres faint Thomas d’Aquin, Tuile
des lumières de Téglife au treizième fiècle, mort
en 1274, dit le doEleur Angélique, Vange de l’école,
l’aigle des théologiens.
La même ville déAquino ou Aquin a donné le
nom à un profeffeur d’hébreu » né à Carpentras,
mais qui fut baptifé à A qui no fous le nom de Philippe
, & qui étant venu enfeigner à Paris , fut un
des correcteurs de la polyglotte de le Jay ; il mourut
à Paris en 16.50.
Antoine dé Aquin, premier médecin de Louis XIV,
& mort en 1696, étoit fon petit-fils.
AQUITAINE, (Hifl. mod. f c’étoit une des
divifions de la Gaule fous les empereurs romains.
Dagobert I en céda une partie avec le titre de
royaume, à fon frère Aribert, ou. Charibert, pour
lui tenir lieu des partages qui avoient eu lieu jufqu’alors
; les defeendans d’Aribert poffédèrent à-
peu-près le même état, mais à titre de duché feulement
, & il fut confifqué fur eux par Pepin-le-
Bref. Charlemagne donna le titre de roi d’aquitaine
au prince Louis, fon troifième fils, qui fut
dans la fuite Louis-le-Débonnaire. Ses fucceffeurs
qui fe difputèrent tout & qui déchirèrent tous fes
états., fe difputèrent & déchirèrent aufli VAquitaine
, qui réunie à la couronne, en 877, par l’avènement
de Louis-le-Bègue au trône,fut confiée à
dès ducs ou gouverneurs lefquels s’en rendirent maîtres
, comme firent prefque tous les gouverneurs
de provinces fur la jfin de la fécondé race. VAquitaine
eut alors fes ducs particuliers, dont l’héritière
fut cette fameufe Eléonore d’Aquitaine, objet
principal de eet article.
Le duc d’Aquitaine Guillaume IX , fon père |
avoit été long-temps le fléau de fes peuples & de
fes voifins ; il lui prit envie de faire pénitence ,
envie qui prend quelquefois aux mauvais princes,
quand ils font vieux. Dans fa jeuneffe même, il
avoit voulu vendre fes états au roi d’Angleterre
Guillaume le Roux, pour aller dans la Terre-
Sainte ; cette fois il entreprit le pèlerinage de faint
Jacques en Galice, dans l’intention de ne'pas revenir;
on croit qu’il y mourut le 9 avril 1137.
Il laiffoit pour héritière Eléonore d’Aquitaine,
fa fille ; en partant il la remit ail roi de France ,
Louis-le-Gros, avec fes états, en le chargeant de
la marier à Louis-le-Jeüne, fon fils , ce que Louis-
le-Gros s’empreffa de faire. Quelle alliance plus
avantageufe eût-il pu défirer ? Mais fon fils détrui-
fit bientôt fon ouvrage , il alla d’abord fignaler
dans la Syrie un courage inutile & funefte, &
manquer à toutes les loix de la politique en Afie
airtfi qu’en Europe. Raimond de Poitiers, prince
d’Antioche , oncle d’Eléonore dé Aquitaine, pria
Louis-le-Jeune, fon neveu par fa femme, de l’aider
à étendre les limites de fa principauté ; Louis
Hifioire. Tome I.
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étoit venu dans l’intention de nuire aux infidèles,
il pouvoir dpnc agrandir à leurs dépens les états
de Raimond ; mais jugeant que l’intérêt de la chrétienté
demandoit de lui d’autres entreprifes, il re-
fufa Raimond, qui voulut s’en venger. Louis
avoit mené avec lui en Syrie la reine fa femme :
il efl difficile de dire s’il avoit bien ou mal fait ;
la préfence de cette femme étoit pour le moins
inutile en Syrie : elle eut peut-être été funefte en
France. Le prince d’Antioche, qui avoit conçu peu
d’eftime pour Louis-le-Jcune, & peut - être trop
d’amitié pour Eléonore, voyant cette princeffe à-
peu-près dans les mêmes difpofitions que lui à
l’égard de fon mari, envenima ces principes de
difeorde , & engagea Eléonore à demander la nullité
de fon mariage ; Eléonore n’entroit que trop
dans fes vues , & le roi ne s’y oppofoit pas aflez.
Soupçonneux, comme tous les efprits foibles , il
avoit fur la conduite de la reine les inquiétudes
d'un mari vulgaire ; il s’allarmoit du v if intérêt
qu’il voyoit le prince d’Antioche prendre à fa*
nièce ; il accufoit aufli Eléonore d’un commerce un
peu libre avec un jeune turc, nommé Saladin:
Mais de ces chofes-là, dit naïvement Mézerai, on
en dit fouvent plus qu’il n’y en a , & quelquefois
aufli il y en a plus qu’on n’en fait. Ce qui eft certain
, c’eft que le mépris d’Eléonore pour fon mari
augmentoit tous les jours, qu’elle ne reconnoiffoit
en lui d’autre mérite qu’une dévotion dont elle
faifoit peu de cas ; qu’elle avoit le caraéière libre
8c lame haute; qu’elle étoit en tout l’oppofé de
fon mari, qui, de fon côté, avoit pour elle toute
l’averfion que peut donner une telle oppofition de
cara&ères. Eléonore difoit qu’elle avoit cru épou-
fer un roi, & qu’elle n’avoit époufé qu’un moine.
Pierre Lombard , le maître des fentencés , le père
de la fcolaftique , regardé pai> beaucoup cPhifto-
riens comme le vrai fondateur de l’univerfité de
Paris, fi confidéré d’ailleurs , que Philippe, frère
de Louis-le-Jeune, étant élu évêque de Paris, lui
céda cette place par refpeéf pour fa doârine,
Pierre Lombard avoit engagé Louis-le-Jeune à fe
faire couper les cheveux par une dévotion du
temps ; ces cheveux courts & plats parurent ridicules
à Eléonore ; Louis l’avertit dévotement qu’il
ne falloir pas plaifanter fur de pareilles matières ;
Eléonore plaifanta fur cette réponfe. Enfin l’aver-
fion réciproque perfuada au roi que fon honneur
& fa confcience exigeoient la féparation demandée-
d’abord par la reine ; bientôt elle fut pourfuivie
avec plus d’ardeur par le roi lui-même. L’abbé
Suger, avant de mourir, lui rendit encore l’important
fervîce de fufpcndre au moins une fi funefte ré-
folution ; mais dès que ce fage miniftre eut Tes yeux
fermés, Louis ne garda plus de mefures ; les prélats
afîemblés par fon ordre à Beaugency, prononcèrent
là nullité de ce trifte mariage, qui eût
dû être heureux, fi les convenances morales fe ré-
gloient toujours fur les arrangemens politiques.
Ainfi, l’ouvrage de la fageffe de Louis-le-Gros fut
Bbb