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On donna,encore le même nom aux fanatiques,
q ui, au commencement de ce Tiède, fe révoltèrent
& commirent beaucoup de dèfordres dans les
Cevennes. Ils furent enfin réduits & diffipéspar
la bravoure .& la prudence du maréchal fie Vil-
ïars. ( G ) . .
C AM M A , ( Hïfl. anc. ) lujet d’une tragédie fie
Thomas Corneille, fujet peut-être fabuleux. La
fcène eft en Galatie, le temps n’eft pas connu.
Sinorix, amoureux de Gamma., tue Sinatus, mari
de Gamma, & propofe. à celle-ci de l’époufer, elle
accepte la propofitLon, ils vont au temple , elle
bort la première, félon la coutume, dans la coupe
îacrée, & la préfente à Sinorix, qui boit après
elle fans tarder; elle s’écrie alors : Sinatuseftvengé.
Je meurs contente. i a coupe étoit empoilonnée ;
tous deux expirèrent en peu temps.
CAMOENS , (L ou is de ) auteur de la Lufiade.
C ’eft à M. de la Harpe qui nous a donné en 1776
-une bonne traduéfion de ce poète,à nous fournir
cet article. Voici ce qu’il dit du Camoëns à la tête
.de fa traduéfion :
j) Les biographes ne s’accordent pas fur le lieu
37 de fa naifiance. Ce n’eft pas qu’il fût, comme
•jj Homère, d’une-famille obfcure & pauvre. Il
■ » étoit d’une ancienne nobleffe ; fa maifon, origi-
» naire de Galice., ^s’étoit attachée au:1ervice d’un
« roi de Portugal en 1370.; mais l’ayant quitté
.j> pour celui du roi de Caftille, qui fut battu à la
vjj journée (TAlbujarrotecette maifon perdit la
.» plus grande.partie de fes biens. La branche ca-
v> dette., fur-tout, fut la plus maltraitée., .& c’eft
-.jj d’elle que defcenfioit Camoëns.
« Il naquit l’an 13 17, félon les uns., à Coim-
o» bre; félon d’autres , -à Santarein. Nous fuivrons
>57 l’opinion du licencié Manuel Correa, l’un des
- jj hiftoriens de fa vie , & de fes plus intimes amis,
qui le fait naître à Lisbonne de Simon-Vas de
-37 Camoèns., & d’Anne .de Macédo. Sa mère étoit
-» aufli de famille noble.
33 II y a des hommes dont la malheureüfe def-
■ n tinée s’annonce dès les premiers momens de
•3» leur vie. Tel fut Camoèns. L’époque de fanaif-
,37 fance fut marquée par une dilgrace qui prépara
3> toutes les autres. Son père, capitaine de vaifteau,
37 fit naufrage auprès de Goa, & périt avec tout
t> ce qu’il poflefioit. Ainfi Camoëns naquit fans
» fortune ; malheur r é e l, que le talent ne peut
77 pas toujours réparer.
* Il étudia dans l’univerfité de Coimbre, c’eft-
V à-dire, qu’il apprit la mauvaife philofophie de
C AM
"Ces temps-là, capable de corrompre les meil-
v leurs efprits, & qui ne gâta pas le fièn. Le goût
» des belles-lettres lui fervit de préfervatif contre
» la fcholaftique. Son talent poétique, qui fe ma-
» nifefta de bonne heure, les agrémens de fa
» phyfionomie .& de fa converfation le firent re-
» eevoir (<z) à la cour. L ’amour lui infpira fes
» premiers vers , & caufa fes premières infortunes.
» Ses galanteries, qui offenfoient des hommes
* puiffans, le- firent exiler. On fait combien l’amour
» coûta cher au Tafîe. On croit qu’il caufa en
» partie les malheurs d’Ovide. Cette fatale pafîion ,
» .qui a .-fait tant de viéfimes illuftres , eft infépa-
v rable d’un imagination ardente qu’un grand ta-
» lent fuppofe toujours.
?7 La guerre entre les Portugais & les Maures
77 fit naître dans l’efprit de Camoëns le defir de pal-
» fer en Afrique, pour y combattre les ennemis
77 ■ d e . fa patrie. Il s’y diftingua par fa bravoure ,
77 & on le compte parmi ceux qui ont joint les
77 qualités guerrières aux talens de l’efprit. Mais
77 fon malheur le fuivoit par-tout, & il falloitque
37 lia gloire.qu’il acquit fut expiée. Il perdit l’oeil
77 droit dans.un combat naval. Ses fervices lui ob-
37 tinrent la permiflion de retourner à la cour;
37 mais .de nouveaux chagrins l’en éloignèrent.
33 .Duperron de Caftera remarque eue la perte de
n fon oeil droit ne Vempêchoit pas de faire des ja-
33 loux. Ce qui eft certain, c’eft qu’il fortit de
37 Lisbonne dans le deflein de n’y jamais revenir.’
» On dit qu’en s’embarquant pour les Indes,"
37 il prononça les paroles que le grand Scipion fit
mettre fur fon tombeau : Ingrate patrie, tu n*auras
37 pas meme ma cendre. ( b )
» 11 fit la guerre dans les Indes, & y fignala
» le même courage qu’il avoit montré en Afrique.
77 II fut employé dans une expédition au golfe de
» la Mecque, dont il parle dans une de fes pièces.’
37 II revint à Goa., où 11 vécut quelque temps
37 paifible. Mais cette inquiétude d’un efprit aigri,
» que de longues traverfes portoient à la vengeance,
37 ne lui permit pas de dimmuler quelques injures
13 qu’il reçut de perfonnes aftez confidérables pour
37 efpérer l’impunité. I l les livra au ridicule dans
» des chanfons fatyriques. Le vice-roi de Goa
37 l’envoya en exil à Macao, où les Portugais
37 avoient un .comptoir. Il ne laifla pas . d’y trou-
37 ver de la proteéfion, puifqu’il fut revêtu de la
33 charge de commiffaire-major. Il y amaftamême
73 quelque bien. C ’eft là qu’il acheva fa Lufiade ,,
37 commencéeen Portugal quelques années aupa-.
(a) Duperron de Caftera , qui nous adonné ia feule traduéfion connue de la Lufiade , a tracé le portrait de .Camoërvs
t<dans le goût de nos anciens romanciers , & précisément comme s’il l’avoit vu. » Ses yeux , die—il » étoient grands, vifs
,t> & d’un regard qui ne refpiroît qu’amour & volupté ; il avoit les cheveux blonds , le front noble , le nez aquilin , la
n bouche bien meublée, les lèvres .plus rouges que du corail, le vifage plein , le teint blanc & relevé d’un vermillon
qui répandoit fur fa phyfionomie une fleur de fan té charmante ; la taille moyenne, mais prife avec juftefle , autant
.f» d’embonpoint qu’il en falloir pour n’être pas maigre ; la démarche aifée , l’abord riant & gracieux : tout cela faifoit
•*> un homme qui pouvoir fe prélènter fans autres lettres de recommandation que celles de fa hsnné mine «,
(b ) Jngrata patria , ne ojfa quidam haies.
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3» ravant. Le vice-roi qui l’a voit exilé venoit d’être
si remplacé. Camoëns fe flattant d’être favorable-
3> ment reçu du nouveau gouverneur, Conftantin
37 de Bragance, & voulant jouir du fruit de fon
3> travail dans la capitale des établiffemens portti-
3> gais , monta fur un vaifteau qui retournoit à
3> Goa. Une tempête l’afTaillit à la hauteur des côtes
37 de Cambaye. Il fembloit que la deftinée qui 3» avoit fait périr fon père dans ces climats, y
>» attendît fon fils pour confommer fes difgraces.
» Le vaifteau fut fubmergé. Camoëns perdit tout,
37 excepté fon poème. Il fe fauva le tenant à la
.37 main, comme on dit que Céfar tenoit fesmé-
37 moires. On a prétendu, avec raifon, qu’il étoit
37 difficile de tenir des papiers en nageant dans la
»7 mer. Quoi qu’il en foit, il coriferva fa Lufiade ;
37 & puifqu’il étoit poète , il avoit dérobé au nau-
«7 frage ce qu’il avoit de plus précieux. Il fait
v mention de cette aventure d’une manière très-
v intéreflante dans fon dixième chant. Il fut aftez
»7 bien traité par Conftantin de Bragance ; mais
»3 le fuccefleur de ce vice-roi prêta l’oreille aux
» calomnies des ennemis de Camoëns, qui l’accu-
33 foient de malverfation dans fon emploi de com-
37 miflaire. Il fut mis en prifon. Il fe difculpa ce- •7 pendant ; mais lorfque fon innocence reconnue
33 alloit lui rendre fa liberté , ..il fut retenu pour 17 dettes
37 Sorti de prifon, il rencontra un de ces grands
» qui font perfuadés qu’un homme de talent eft
33 trop heureux de les amufer, & bien payé quand
33 îl a pu leur plaire. Cet homme, qui fe nom-
» moit Barreto, & qui étoit gouverneur de la
3> forterefle de Sofala, engagea l’auteur de la Lu-
37 fiade à le fuivre. Mais quand il l’eut mené en
37 Afrique, il ne lui tint aucune des promefles qu’il
33 lui avoit faites.. Camoëns rebuté de fes mauvais
37 traitemens, alloit reprendre la route du Portu-
37 gai avec plufieurs jeunes feigneurs qui l’avoient
33 prefle d’être le compagnon de leur voyage. >7 Barreto prétendit le retenir, & exigea de lui
3> deux cens écus que Camoëns lui devoit, difoit-il,
37 pour fatraverfée. Il menaçoit même de le mettre
» en prifon. Il y a peu d’exemplçs d’une pareille
37 bafièfle. Ceux qui vouloient emmener Camoënsy
*7 furent obligés de payer pour lui»
37 De retour à Lisbonne , il trouva fur le trône
37 le jeune dom Sébaftien , qui fenfible aux talens,
s? comme tous les princes nés pour la gloire, l’ac-
37 cueillit avec les plus grandes marques d’hon-
» neur, & lui donna une penfion de quatre mille
33 féales, à condition qu’il ne quitteroit plus la
>7 Cour. C ’étoit mettre bien de la grâce dans un
*> bienfait, & c’eft ainfi qu’il eft fi facile aux prin-
37 ces d’ajouter un prix ineftimable à tous les dons
*7 qu’ils accordent,
37 Mais la fortune ne pouvoit pas être fidelle
I» à Camoèns. Dom Sébaftien périt dans fa funefte
37 expédition d’Afrique. Le trouble & la défolation
»» du Portugal, après fa mort, pe permirent pas
tlifoire, foin, I, Deuxième Partt
C A M 745?
» que l ’on s’occupât de l’auteur de la Lufiade. Sa
33 penfion cefta d’être payée. Il falloir qu’une vieil-
» lefte indigente & une mort déplorable termi-
» naflent une vie orageufe & perfécutée. Il mou-
37 rut dans un hôpital, en reprochant à fes con-
73 citoyens leur ingratitude. Il étoit âgé de 62, ans.
77 II fut enterré à la porte de l’églife de fainte
7> Anne. On mit fur fon tombeau cette inferip-
>> tion : Ci gît Louis Camoëns, prince des poètes
37 de fon temps ; il vécut pauvre & malheureux, 6 *
37 mourut de même. Cette épitaphe, d’un homme
37 appellé le prince des poètes, montre quel fort
37 doiyent attendre ceux qui facrifient tout à la
>7 gloire des talens. Mais tel eft le prix de cette
>7 gloire aux yeux de ceux qui peuvent la fentir
>7 & la mériter , qu’il n’y en a pas un , peut-être ,
J7 qui ne voulût, aux mêmes conditions que C<z-
» moèns, avoir le même titre fur fon tombeau.
)> On dit qu’il étoit d’une fociété douce & ai-
77 mable, que fon courage d’efprit égaloit celui qu’il
73 fit voir dans les combats, & qu’il fupportoit
7) les malheurs comme il avoit bravé les dangers,
37 II étoit, comme on l’a v u , enclin au plaifir
y & à l’amour ; plus libéral qu’il ne convient de
77 de l’être , lorfqu’on n’a qu’une fortune précaire ;
37 porté à la raillerie & à la fatyre, qu’on ne
»7 pardonne jamais moins qu’à ceux qui ont une
37 fupériorité réelle».
M. de la Harpe examine enfuite ce qui concerne
la Lufiade ; ceci regarde l’Epopée, & n’eft plus de
notre fujet.
CAM O U X ? (A nnibal) {Hiß. de Fr.) né à
Nice le 19 mai 1638, mort à Marfeillele 18 août
1759 , ayant renfermé dans fa vie toute la longue
vie de Fontenelle qu’il avoit précédé & auquel il
a furvécu. Des cheveux blancs , des rides, un peu
de furdité, étoient à plus de cent ans, fes feuls
fignes de vi.eillçfle; il marchoit fort droit & bê*
choit la terre. Il buvoit beaucoup de v in , fe nour*
riflbit d’alimens folides & groffiers ; il mâchoit
continuellement de la racine d’angélique, & attri*
buôit fa longue vie à cet ufage qu’un vieil hermite
lui avoit confeillé. Il avoit pané cent vingt - un
ans & trois mois fans connoître les maladies. Il fut
malade dix jours avant de s’éteindre entièrement.
On a écrit fa vie j quoiqu’elle n’ait eu de remar*
quable que fa durée.
CAMPANELLA , (T homas) auteur de VA?
theifmus triumphatus qui devroit,dit-on être intitulé,
Atheifmus triupiphans, à caufe de la foiblefle des
raifons employées par l’auteur. Il y a encore de
lui divers autres ouvrages phyfiques, mathématiques
, poétiques. On lui a même attribué le fameux
livre : de tribus impoßor\bus, il fut une des viéfimes
de la haine théologique. Un vieux dominicain, fon
confrère, qu’il avoit embarraffé par fes argumens,
le dénonça comme hérétique & comme traître
envers la patrie ; fur cette accufqtion il pafla vingt-
fept ans en prifon, & fut mis jufqu’à fept fois à U
! queftjoji pendant yingt-quatre heures (quelques^
m h k