Sç>d BEN
Madame la ducheffe de Longueville, fa foeur,
.étoit pour Uranie , & fe déchaînoit contre Job,
furquoi on fit ces v e rs , qui valoient bien les
deux fonnets :
Le deftin de Job eft étrange
D'être toujours perfécuté ,
Tantôt par un démon & tantôt par un ange;
La vérité eft que perfonne ne fait un vers du
fonnet d''Uranie 3 qui eft fec ,. iftfipide & maniéré ,
& que tout le monde fait le dernier tercet du
fonnet de Job.
S’il fojùffrit des maux incroyables ,
11 s'en plaignit, il en parla ,
J'en connois de plus miférables.
Cela fera toujours joli , parce- que cela eft
fimple , fin & galant.
M. de Sallo, en parlant , dans le Journal des
favans du lundi 26 janvier 1665 , des deux Je-
c ondes & des gageures auxquelles ils donnèrent
lieu , s’exprime ainfi : » Il eft à craindre qu’il n’ar-
r> rivé à ces deux pièces la même chofe qui eft
arrivée.à ces deux fonnets qui divifèrent le par-
a> naffe eh deux factions fi célébrés fous les noms
3> de Jobelins & if Uraninscar étant examinés de
j» plus près , ils perdirent beaucoup de leur pris &
« de leur eftime*«.
Le Joconde de la Fontaine n’a rien perdu de
fon prix; quant à celui de Bouillon, on en ignorerait
jufqu’à l’exiftence fans la lettre de Boileau
fur ce fujet. Mais il y a dans la comparàifon des
deux querelles une exactitude à laquelle M. de
Sallo ne penfoit point ; c’eft que des objets de la
première , il n’en eft refté qu’un , le fonnet de Job ,
& que des objets de la fécondé, il n’en eft pareillement
refté qu’un, le Joconde de la Fontaine.
On voit par une lettre de Coftar à madame la
marquife de Lavardin , qii’on avoir voulu envoyer
Benferade en ambaffade auprès de la reine Chrif-
tiné , comme François I avoit envoyé Budée
auprès de Léon X. ,Le projet n’eut point d’exécution,
& Scarron date une épître à la comteffe de
Fiefque :
L’an que le fleur.de Benferade 1
N’alla point à fon ambafTade. - .
On fait que. Benferade mit les Métamorphofes en
rondeaux, & que pour les tailles-douces de ce
mauvais ouvrage, dont l’idée même étoit fi mau-
vaife , Louis XIV lui donna mille louis, profufion
d’un proteâeur faftueux envers un poète courtifan. i
Le rondeau fameux qu’on fit à ce fujet, vaut mieux
que tous ceux de Benferade;
A la fontaine oîi s’enyvre Boileau ,
Le grand Corneille , & le facré troupeau.
B E N
De ces auteurs que l'on ne trouve guère ,
Un bon rimeur doit boire à pleine aiguière
S’il veut donner un bon tour au rondeau.
.Quoique j’en boive aufli peu qu’un moineau £
Cher Benferade , il faut te farisfaire ,
T’en écrire un... . eh ! c’eft porter de l’eau
A la Fontaine/
De ces refrains un livre tout.nouveau
À bien des gens n’a pas eu l’heur de plaire ÿ
Mais quant à moi, j’en trouve tour fort beau
Papier , dorure , images, caractère , •
Hormis les vers qu’il falloit laifier faire
A la Fontaine.
Seneçai juge affez favorablement Benferade , lorf-
qu’il dit de lui :
Il fut vieux & galant, fans être ridicule >
Et s’enrichit à cômpofer des vers. ,
Furetière le maltraite fort dans fes faélums ; mais
qui n’y maltraite-t-il pas ?\
Boileau apporté deux jugemens divers fur Benferade.
Il le loue dans le meilleur de fes ouvrages ;
il le critique dans le plus mauvais. Il dit dans l’art
poétique :
Que de fon nom , chanté par la bouche des belles,;.
Benferade en tous lieux amufe les ruelles.
Il dit dans la fatyre de l’équivoque :
- Je ferois mieux , j’entends , d’imiter Benferade.'
C’eft par lui qu’autrefois mife én fon plus beau jour
Tu fus , trompant les yeux du peuple & de la cour , •
Leur faire , à la faveur de tés Muettes folles , ? : .
, Goûter comme bons mots tes-quolibets frivoles :
Mais ce n’eft plus le temps. Le public détrompé
D’un pareil enjouement ne fe fent plus frappé.
Tes bons mots , autrefois délices des ruelles ,
Approuvés chez les grands , applaudis chez les belles »
Hors de mode aujourd’hui chez nos plus froids badins
Sont des collets montés & des vertugadins.
Il eft beaucoup queftion dans les écrits du temps1
du càrrofle de Benferade & des belles dames auxquelles
il le prêtoit ; c’eft qu’un càrrofle , devenu
aujourd’hui de néceflïté première, & \qui ne fup-
pofe pas même de fortune , étoit alors une grande
affaire. Un homme de lettres fur-tout "ayant un
càrrofle à lui, étoit une efpèce de phénomène.
Benferade, laïc & galant, étoit riche fur-tout
de penfions fur les bénéfices, ce qui fournit sj.
Bayle cette application de Virgile :
Non hos queefitum munus in ufus.
Il ayoit fait quelques pièces de théâtre; mais s’il
B E N
aimoit la comédie, il aimoit encore plus les comédiennes
, dit l’abbé Tallemant; il étoit l’amant de la
Bétie-Rofe.
Il fut reçu à l’académie françoife en 1674. Il
mourut en 1691 âgé de quatre-vingt ans.
BENTIVOGLIO, grande maifon d’Italie , longtemps
fouveraine de Bologne , a donné aux lettres
un poète & un hiftorien diftingués. ■
Le poète, nommé Hercule, né en 15 10, neveu,
par fa mère, d’Alphonfe l , duc de Ferrare, eft
un des poètes italiens les plu£ célèbres du feizième
fiècle. Il mourut en 1573. Ses poéfies, contenant
des fatyres , des fonnets, des comédies, ont été
recueillies à Paris en 1719. Il fut employé avec
fuccès dans des négociations importantes, & il a
laiffé d’ailleurs la réputation d’un homme brillant
& aimable.
L’hiftorien , plus illuftre encore, eft le cardinal
Bentivoglio ( Gui. ) On a de lui l'Hifto ire des guerres
civiles de Flandre-, en italien; des Mémoires aufli en
italien, qui ont été traduits en françois par l’abbé
de Vayrac, & des lettres qui paffent pour un livre
claflique en italien , & qui ont été traduites en
françois. On l’accufe de montrer dans fon hiftoire
une prédilection trop marquée pour les Efpagnols,
& trop d’attachement aux préjugés ultramontains.
Une femme de cette maifon (Françoife Bentivoglio
) femme de Galéote Manfredi, prince
de Forli, fe vengea d’une infidélité de fon mari,
en le poignardant.
. B ENTLEY, (R ich ard ) connu par plufieurs
bonnes & favantes éditions d’auteurs grecs & -latins
, avec des notes utiles, & par une réfutation
du difeours dè Collins fur la liberté de penfer.
Cette réfutation parut fous le nom fuppofé de
Phileleuth'ere de Lêipjîck. Le fameux Boyle avoit
légué 50 livres fterfing à un prédicateur qui
ferait choifi chaque année pour défendre, dans
huit fermons contre les incrédules, la religion tant
naturelle que révélée. Bentley fut le premier nommé
par les. exécuteurs teftamentaires. Il fut le fiiccef-
feur de M. Juftel dans la charge de bibliothécaire
du roi d’Angleterre ; il eut enfuite la direction du
collège de la Trinité à Cambridge. Né en 1662,,
mort en 1742,.
. BENZELIUS ; ( Eric ) ( Hifl. litt. mod. ). archevêque
d’Upfal, auteur d’une Traduction fuédoife
de- la. bible. Mort en 1709 à 67 ans.
• BERCHOÏRE ou BERCHEUR , (P ierre)
BERCHORIUS ou BERTHORIUS, {Hifl. litt.
mod.) auteur de la traduction frahçoife de Tite-
Live faite par ordre du roi Jean, & dont il y a
un manuferit curieux en forbonne. Mort en 1362.
B E R E N G E R . C ’eft le nom d’un héréfiar-
que célèbre du onzième fiècle , dont l’article
n’appartient qu’à l’hiftoire eccléfiaftique., &
d’un difciple d’Abailard, nommé Pierre, qui publia
pour fon maître une apologie contre faint
Bernard, Elle fe trouve parmi les oeuvres d’Abai-
l.ard.
B e r jggji
BÉRÉNICE, {Hifl. inc, ) Nom de plufieurs
femmes connues dans l’hiftoire de Syrie , dans
l’hiftoire d’E gypte, dans l’hiftoire des Juirs , & c. i°. Bérénice, fille de Ptolomée. Philadelphe
roi d’Egypte , époufa Antiochus, dit le Dieu , roi
de Syrie, qui avoit une autre femme nommée
Laodice. Celle-ci fe vengea de l’infidélité d’Antio-
chus en l’empoifonnant, & en poignardant Bérénice
avec un fils qu’elle avoit eu d’Antiochus.
Laodice fut tuée elle-même dans une guerre que
Ptolomée Evergetes entreprit contre elle pour venger
Bérénice , fa feeur. Toiite cette tragédie arriva
environ deux fiècles & demi avant J. C. 20. Bérénice de Chio, l’une des femmes du
fameux Mithridate, qui la fit étrangler ou qui
l’étrangla de fes mains, de peur qu’elle ne tombât
en \a. puiffance de Lucullus, qui venoit de remporter
fur lui une viCloire. Ce trait barbare de la
jaloufie afiatique eft de l’an 71 avant J. C. Peut-
être cependant étoit-ce un trait de fierté plus que
de jaloufie ;*peut-étre le roi de Pont vouloit-il feulement
einfacher qu’une femme de Mithridate ne
fût traînée en triomphe au Capitole.
30.. Bérénice, fille de Ptolomée Aulètes, roi
d’E gypte, fit étrangler fon mari Seleucus , pour
époufer fon amant Archelaüs, & fon père la fit
mourir, environ un demi fiècle avant J. C.
4°. Bérénice , fille de Salomé , foeur d’Hérode
le Grand, époufa fon coufin-germain Ariftobule,
fils d’Hérode, que fon père fit mourir. Bérénice
ne contribua pas peu, par fes intrigues, à la mort
de fon mari. Elle époufa enfuite un autre fils d’Hérode
, nommé Theudion.
5°. La plus célèbre de toutes les Bérénices eft
celle qui fut aimée de Titus. Elle étoit fille d’A -
grippa l’ancien, & foeur d’Agrippa le jeune, roi
des Juifs ; elle époufa Hérode, fon oncle, puis
Polémon , roi de Cilicie , qui fe laifla engager par,
elle à fe faire circoncire ; elle fut accufée d’un
commerce inceftueux avec fon frère. Dans la fa-
metife guerre qui entraîna la ruine des Juifs, elle
leur donna un confeil qu’ils auroient dû fuivre,
celui de fe foumettre aux Romains. N’ayant pu
rien obtenir de ces furieux, elle prit contre eux &
parti de Titus qu’elle aima, & dont elle fut aimée. 1 i
voulut l’époufer ;, mais refpeâant l’averfion des
Romains pour les rois & les reines, & préférant
la patrie a une femme, il fe crut obligé de renvoyer
celle-ci malgré lui & malgré _^lle. Titus ,
dit Suétone , Reginam Berenicen , cui etiam nuptias
pollicitus ferebatur , fatim ab urbe dimift, invitus
invitam. Louis XIV ayant fait dans la fuite un pareil
facrificé à fa grandeur , Madame (Henriette
d’Angleterre ) eut l’idée de faire céléorer cette
féparation de Louis XIV & de mademoifelle
de Mancini , fous les noms de Titus & de Bérénice.;
de là la Bérénice barbare du grand Corneille & la
Bérénice touchante de Racine.
BERG1E R , (N icolas) ( Hifl. litt. mod. ) connu
par fon Hifloire des grands chemins de Tempire ro